Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • hier
Un homme, père d'un chef d'entreprise qui a fait fortune dans la cryptomonnaie, a été enlevé ce jeudi avant d'être retrouvé ce samedi soir à Palaiseau avec un doigt sectionné. Pour faire pression sur le fils, les ravisseurs lui ont envoyé une vidéo de son père mutilé. Thierry Sabot, chef de la BRI de la Préfecture de la police de Paris, était l'invité de Première édition. 

Catégorie

📺
TV
Transcription
00:00Il est 8h moins le quart, l'invité de première édition. Bonjour Thierry Sabot.
00:04Bonjour.
00:04Et merci d'être avec nous ce matin. Vous êtes le patron de la BRI, la brigade de recherche et d'intervention de la police judiciaire de la préfecture de police de Paris.
00:11Beaucoup de questions ce matin après cet enlèvement qui aura donc duré 60 heures.
00:14L'enlèvement jeudi matin à Paris du père d'un patron qui a fait fortune dans les crypto-monnaies.
00:19L'homme a été enlevé à Paris en pleine rue dans le 14e arrondissement alors qu'il promenait son chien.
00:24emmené dans une fourgonnette de livraison, séquestré ensuite à Palaiso dans un pavillon loué sur Airbnb.
00:32D'abord, quelle était la rançon réclamée par les ravisseurs et à quel moment avez-vous reçu cette demande de rançon ?
00:39Alors bien entendu, je ne vais pas rentrer dans tous les détails de l'enquête parce que c'est couvert par le secret et les gardes à vue sont encore en cours,
00:46mais plusieurs millions d'euros ont été demandés.
00:48Enquête et dénouement rapide, très rapide.
00:51Oui, c'est-à-dire que tous les moyens ont été mis en oeuvre, tous les moyens de la direction de la police judiciaire, de la préfecture de police ont été mis en place.
00:59Et je tiens à signaler la forte détermination de tous les effectifs de mon côté à la BRI.
01:04J'ai réussi à mobiliser entre 25 et 30 personnes en fonction des moments, des phases d'enquête.
01:10Mais voilà, on est sur un week-end de 1er mai.
01:13Je tiens à saluer mes opérateurs et notamment à remercier leur famille qui tolère ce genre de choses.
01:18Certains d'entre eux étaient en congé et sont revenus quand même.
01:20Très vite, vous avez constitué en fait une task force en réunissant plusieurs groupes d'enquêteurs pour remonter en fait la trace de ces ravisseurs
01:28qui ont tout fait pour ne pas être repérés, mais qui ont commis des erreurs.
01:33Oui, tout à fait.
01:34La police judiciaire, la BRI, c'est une unité de la police judiciaire.
01:38Et quand il se passe un gros événement comme ça, on participe à une énorme task force avec toutes les brigades.
01:43Il y a une brigade qui est nommée coordinatrice, ici c'est la BRB.
01:46Et puis tout le monde participe, la brigade criminelle, la brigade cyber, la police technique et scientifique.
01:52Tout le monde se met en ordre de bataille pour ramasser le maximum d'informations et trouver un fil à tirer.
01:59Est-ce qu'il y a des éléments qui vous ont poussé à intervenir très vite ?
02:02Alors, c'est plus compliqué que ça parce qu'en fait, on part de très loin.
02:07On est dans des nouvelles pratiques avec cette dématérialisation des remises de rançons.
02:12Et donc, on n'a plus ce travail de terrain qui permet d'essayer de se positionner pour progresser.
02:17Donc, on est obligé de travailler avec de la technologie, des recherches de haut niveau
02:22qui nous permettent de percevoir un micro-détail dans tous ces flux de données.
02:27Les ravisseurs envoient une vidéo qui montre l'urgence de la situation.
02:31Oui, tout à fait. Il y a une grosse pression qui est mise par les ravisseurs.
02:35On a nos négociateurs qui sont aux côtés, qui ont une charge mentale énorme
02:40parce qu'ils sont près de la personne qui est chargée de remettre la rançon.
02:44Donc, il y a un contact qui s'établit ?
02:45Oui.
02:46Avec le fils de la victime, on imagine ?
02:48Oui, tout à fait.
02:49On a en face de nous, dans ce genre d'affaires, des gens qui n'hésitent pas à faire de la manipulation mentale,
02:57à essayer de détruire le discernement des individus qu'ils ont en face d'eux
03:01pour les affaiblir et les amener à porter la rançon.
03:05Et c'est pour ça qu'on a, notamment dans notre équipe, médecins, psychologues
03:08qui sont à notre disposition pour nous aider dans cette tâche.
03:11Parce que, forcément, à un moment, la tentation de la famille de la victime,
03:15c'est de donner un peu d'argent ?
03:17Oui, ça peut être ça.
03:18Sauf qu'on est face à des individus qui ne sont pas des individus de confiance.
03:22Si on commet de tels actes, on ne peut certainement pas faire confiance
03:25sur le fait que remettre de l'argent, ça entraînera une libération.
03:28Aucune somme n'a été versée au cours de ces 60 heures ?
03:30Des micro-versements sont effectués, mais essentiellement pour s'assurer
03:34de la traçabilité des flux informatiques.
03:37Est-ce que vous pouvez nous décrire l'opération ?
03:38Est-ce que ce fut une opération difficile ?
03:42Oui, c'est une opération complexe.
03:43Comme je le disais, l'ADN de la BRI, c'est les enlèvements et séquestrations
03:47depuis toujours, depuis le baron Rampin en 1978.
03:49Sauf que vu qu'il n'y a plus cette matérialité de la remise de l'argent,
03:52il faut avoir des nouveaux préceptes.
03:54Et on s'est adapté à ces circonstances-là.
03:56Ça faisait des mois qu'on commençait à travailler sur ces nouveaux modes d'enlèvement.
04:02On a commencé à travailler sur les rançons JCL il y a plusieurs mois
04:05pour comprendre comment on pouvait travailler dans ce type de situation.
04:08Et puis ça nous a amené aux affaires récentes sur les enlèvements
04:12dans le monde de la crypto-monnaie.
04:14Et donc on a étudié tous ces retours d'expérience
04:17pour essayer de voir comment on s'adopterait pour gérer ces situations.
04:22Donc vos hommes analysent des millions de données en quelques heures,
04:25notamment des données de téléphonie,
04:26qui vous conduisent jusqu'à ce pavillon de Palaiso en Essonne.
04:31Oui.
04:32C'est un peu plus compliqué que ça.
04:33Encore une fois, on a toute cette task force.
04:35C'est eux qui brassent la donnée.
04:36C'est eux qui… L'image, c'est celle de…
04:40La BRI, elle est là pour trouver l'aiguille dans la botte de foin.
04:43Mais on a besoin d'une équipe qui nous dise où est cette meule de foin à fouiller.
04:47Qu'est-ce qui se passe lorsque vous vous retrouvez face à eux ?
04:50Est-ce que ce sont des gens qui vous apparaissent chevronnés
04:52ou est-ce que ce sont des amateurs ?
04:55Quand on est face à eux, déjà, une fois qu'on a localisé l'appartement,
04:58il faut à un moment donné choisir de donner l'assaut.
05:00Oui.
05:00C'est ce qu'on a fait.
05:01Vous êtes sûr à ce moment-là que c'est…
05:03Non, on n'est jamais sûr à 100%.
05:04On a des données techniques qui nous ont été rapportées
05:07par notre cellule d'assistance technique.
05:09On a, nous, notre flair policier qui nous fait recentrer
05:12nos investigations sur cette ville-là,
05:15qui a toutes les caractéristiques d'un lieu potentiel
05:19où on pourrait faire ce genre de fait.
05:20un lieu caché, un peu isolé, tranquille,
05:25dans une zone où on ne suspectera rien.
05:29Et puis, il faut, à un moment donné,
05:30faire le choix de donner l'assaut ou de payer la rançon.
05:34On a quand même la vie de l'otage qui est en jeu.
05:36Ça se passe comment, l'assaut ?
05:37Est-ce qu'il résiste ou est-ce qu'il se règle assez vite ?
05:39Oui, immédiatement, dès qu'on rentre dans l'appartement,
05:43nous, on mise sur la fulgurance.
05:45Ce qu'on veut, c'est absolument pas qu'ils prennent l'idée
05:48de transformer l'individu, la personne qui est séquestrée
05:52en un otage sous la contrainte immédiate d'une arme.
05:56Voilà, comme bouclier humain.
05:57Donc, on doit agir rapidement.
05:58Parce qu'en plus, il est déjà mutilé.
05:59On est d'accord, la victime est déjà mutilée.
06:00Oui, on sait déjà qu'ils sont capables de passer à l'acte.
06:02Ils sont capables du pire.
06:03Ils sont capables de faire plus que de lui couper un doigt
06:06comme ça s'est produit.
06:06On l'imagine.
06:08On n'en a pas les certitudes toujours, mais on l'imagine.
06:10Donc, il faut agir très rapidement.
06:12On rentre, on est face à des individus qu'on sait armés.
06:15On a vu sur une vidéo une arme de poing.
06:17Ils ont à proximité d'eux et l'un d'entre eux
06:21tient une arme blanche.
06:23Le deuxième fouille en direction d'outils
06:28pour s'en saisir, pour essayer de réagir.
06:32Et donc, on doit intervenir et on applique...
06:34D'un mot, dans les sept personnes qui sont aujourd'hui
06:36en garde à vue, les gardes à vue peuvent durer 96 heures.
06:39S'agit-il de petites mains ou y a-t-il des commanditaires
06:41de l'enlèvement parmi les sept interpellés ?
06:43Là, on est au cœur de l'enquête.
06:45Donc, l'enquête se poursuit.
06:47La BRB poursuit ses investigations, des auditions.
06:50Il y a un travail monumental qu'il y a à faire derrière.
06:53Après ces trois jours, il y a des mois d'enquête
06:55pour savoir où on en est.
06:56D'un mot, la victime, à ce moment-là,
06:58au moment de l'intervention, elle est dans quel état ?
07:00Alors, on a immédiatement le pompier,
07:02le médecin de notre colonne d'intervention
07:05qui se porte à son secours.
07:06Il est relativement lucide et on le trouve assez fort
07:12par rapport à ce qu'il a subi.
07:16Vraiment, il a été dans une situation très, très difficile
07:19pendant ces trois jours.
07:20On lui porte secours immédiatement.
07:24Et aujourd'hui, il y a un gros chemin à faire pour s'en remettre.
07:29Un gros choc psychologique et physique, évidemment.
07:32Tout à fait.
07:32Merci beaucoup, Thierry Sabaud, d'être venu ce matin
07:34sur le plateau de première édition.

Recommandations