Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • il y a 6 mois
Philippe Baptiste, ministre en charge de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, le 12 mars 2025 sur franceinfo.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Les premières semaines de Donald Trump n'ont pas seulement bouleversé la diplomatie mondiale,
00:04elles ont aussi déstabilisé des pans entiers de l'administration américaine.
00:07Le mot d'ordre est simple, faire des économies et mettre fin, je cite, à l'idéologie wokiste.
00:12Résultat, dans le domaine de la recherche scientifique, par exemple, des termes sont devenus interdits,
00:17tels que climat, femmes, égalité ou inclusion.
00:20Du coup, des chercheurs ne peuvent plus du tout travailler,
00:22des scientifiques américains menacés et entravés, auxquels la France a décidé d'ouvrir les bras
00:28en proposant de les accueillir, bonjour Philippe Baptiste.
00:30Bonjour.
00:31Ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, merci d'avoir accepté l'invitation de France Info.
00:36Vous venez d'envoyer un courrier aux organismes de recherche et aux universités françaises
00:42pour qu'elles s'organisent afin d'accueillir des américains.
00:45Mais oui, parce qu'en fait, la communauté scientifique mondiale est inquiète,
00:50elle est sidérée par ce qui est en train de se passer aujourd'hui aux Etats-Unis.
00:53Ce qu'on est en train de voir, c'est la méthode de la tronçonneuse qui est appliquée à la recherche.
00:58Et ça, ça ne fonctionne pas, je veux dire, la construction de la recherche, c'est du temps long.
01:02Et aujourd'hui, on est en train, aux Etats-Unis, de voir des pans entiers de la recherche
01:06qui sont attaqués et qui sont attaqués extrêmement brutalement.
01:10Comment ?
01:11Concrètement, c'est des gens qui sont brutalement, du jour au lendemain, mis à l'écart.
01:15Je pense, hier, on apprenait que la scientifique en chef de la NASA était purement et simplement remerciée.
01:21C'est une célèbre climatologue aussi.
01:23Exactement, qui en plus est accessoirement vice-présidente du GIEC.
01:27Enfin, je veux dire que c'est quelqu'un qui a une très grande renommée internationale.
01:30Mais c'est des milliers de personnes, à droite à gauche, dans des domaines extrêmement variés,
01:34qui vont de l'énergie, au climat, à l'environnement, sciences sociales, NIH, l'Institut de la Santé.
01:40Mais ce que je veux dire, c'est que ça a un impact non seulement aux Etats-Unis, mais ça a un impact mondial.
01:44Pourquoi ?
01:45Parce qu'en fait, les Etats-Unis ont historiquement joué un rôle un peu de plateforme internationale pour la recherche.
01:51Tout le monde travaille avec eux.
01:52Bien sûr, et je prends l'exemple du NIH aujourd'hui, donc l'Institut de la Santé.
01:56Il gère aujourd'hui une base de données qui est considérable pour la santé, qui va de la santé jusqu'à la biologie fondamentale.
02:02Tous les chercheurs dans le monde, et les chercheurs français en particulier, les utilisent ces bases de données.
02:06Et du jour au lendemain, on voit que ces bases de données, elles sont en train soit de disparaître,
02:09soit les accès qui sont modifiés, des mots-clés qui sont interdits.
02:13Mais de quoi parle-t-on ?
02:15De quoi parle-t-on ?
02:16Donc il y a une vraie indignation aujourd'hui.
02:18On assiste à une destruction, je vous écoute, on assiste à une destruction de la recherche scientifique aux Etats-Unis,
02:23qui forcément a un impact sur nous.
02:25Donc ce que vous proposez, effectivement, c'est d'accueillir ces chercheurs américains ?
02:29Oui, alors, effectivement, aujourd'hui...
02:31Comment on les accueille ?
02:32Alors, on a des universités aujourd'hui qui se sont mobilisées.
02:34Ex-Marseille Université, le Président Berton est très en pointe sur le sujet,
02:38mais il y a d'autres universités aujourd'hui qui se mobilisent.
02:40Des centres de recherche, des organismes de recherche qui se mobilisent aujourd'hui
02:43pour éventuellement proposer à des chercheurs de venir en Europe aujourd'hui.
02:47C'est un point important.
02:49À côté de ça, c'est aussi développer notre autonomie en termes de données,
02:52justement, avoir notre autonomie en Europe.
02:54L'autonomie stratégique, elle passe aussi par ça,
02:56ça veut dire être capable d'avoir nos données de recherche en Europe
02:58et pouvoir les exploiter comme on a envie de les exploiter.
03:01Et puis, c'est aussi des programmes de recherche qui s'effondrent et qu'il faut aujourd'hui combler.
03:05Vous parliez il y a un instant de la Station Spatiale Internationale.
03:08Moi, j'ai entendu M. Musk, il y a quelques jours, nous expliquer qu'en 2027,
03:12il fallait arrêter la Station Spatiale Internationale.
03:14Mais de quoi parle-t-on ?
03:16De quoi parle-t-on ? C'est l'objet d'un traité international.
03:19Cette station, elle est censée être là jusqu'en 2030.
03:22Donc, je ne sais pas qui est en train de parler.
03:24Est-ce que c'est M. Musk qui est le patron de SpaceX ?
03:26Est-ce que c'est M. Musk qui est le patron du Dodge dans l'administration américaine ?
03:30Je ne sais pas. Je ne sais pas vous répondre aujourd'hui.
03:32Vous demandez à l'administration Trump d'être clair là-dessus ?
03:34Mais bien sûr, il y a un vrai sujet là-dessus.
03:37Et puis, il faut qu'en Europe, vous l'avez mentionné,
03:39moi, j'étais à Varsovie hier et avec mes collègues ministres
03:42d'enseignement supérieur et de la recherche en Europe,
03:44je crois qu'aujourd'hui, il y a une volonté très forte.
03:46La France pousse très très fort pour que la Commission,
03:49aujourd'hui, se saisisse du sujet et propose des initiatives concrètes,
03:52justement, pour répondre à ces questions autour des données,
03:55autour des programmes et autour de l'accueil des chercheurs.
03:57Parce qu'effectivement, c'est une chose de dire aux chercheurs américains
03:59« Venez chez nous, on va vous accueillir ».
04:01Sauf qu'en fait, il faut des moyens, M. le ministre.
04:03Les Américains, on le sait, la recherche aux Etats-Unis,
04:06en termes de moyens, a été jusqu'ici bien plus supérieure que chez nous.
04:10D'ailleurs, nous-mêmes, on a déjà du mal à garder nos chercheurs en France.
04:14Est-ce qu'on peut les payer autant, ces chercheurs américains
04:17qui peuvent arriver chez nous ?
04:18On a des modèles qui sont radicalement différents.
04:20Moi, je voudrais dire qu'on investit sur la recherche.
04:22Il y a évidemment des tensions. Il faudrait plus, etc.
04:24Je voudrais juste donner un chiffre.
04:26Depuis la loi de programmation recherche qui a été mise en place en 2021,
04:30aujourd'hui, c'est près de 3 milliards d'euros en plus
04:32qui sont arrivés pour la recherche, pour augmenter la rémunération des chercheurs.
04:35Pour faire des infrastructures de recherche, etc.
04:38Je ne dis pas que c'est suffisant et je dis probablement qu'il faut aller plus loin.
04:41Et l'Europe est en retard sur ces sujets-là, donc il faut qu'on se mobilise.
04:44Mais enfin, oui, on est en capacité de le faire.
04:46On est en capacité de faire des propositions.
04:48On ne va pas régler l'ensemble du problème nous-mêmes.
04:50Je pense que la bonne maille, c'est au niveau européen.
04:52Mais en attendant, aujourd'hui, nos universités, nos centres de recherche se mobilisent
04:56et l'État sera là pour les accompagner en mobilisant des ressources.
04:59La recherche, on voit que ça devient un problème
05:01puisque les Américains ont effectivement changé de braquet.
05:03Quand vous dites qu'au niveau européen, on doit organiser un plan
05:08pour chercher des financements, même des financements privés ?
05:11Mais bien sûr, je pense qu'il ne faut pas du tout être timide là-dessus.
05:14Vous savez, l'effort de recherche, il est important qu'il soit à la fois public et privé.
05:19L'Europe et la France, on est un petit peu en retard sur le financement public.
05:23Mais on est surtout très en retard sur le financement privé.
05:26Il faut mobiliser les entreprises et faire qu'on travaille ensemble, conjointement
05:29entre les centres de recherche au CNRS, à l'INSERM, dans les universités,
05:33avec, derrière, les entreprises.
05:35Parce que l'innovation, les ruptures qui font que demain, on va être autonome
05:39et que demain, on va avoir une industrie qui se développe,
05:42ces ruptures, elles se construisent à l'interface entre les laboratoires et l'industrie.
05:47Vous espérez attirer combien de chercheurs américains ?
05:49Ça, je ne peux pas vous répondre.
05:51On est en train de construire un plan.
05:53Parce qu'en fonction, vous allez trouver une enveloppe pour pouvoir les accueillir ?
05:56C'est attirer quelques chercheurs.
05:58Mais c'est aussi des équipements qu'il faut mettre à disposition.
06:00C'est des équipes. Vous savez, vous ne faites pas venir juste un chercheur dans son coin.
06:03C'est tout un ensemble qui doit venir à la fois.
06:06Mais les ordres de grandeur, c'est probablement quelques centaines.
06:09Un exemple particulier, monsieur le ministre,
06:11l'Agence Nationale pour l'Océan et l'Atmosphère des Etats-Unis.
06:13La NOA !
06:14Effectivement, la NOA a l'interdiction, depuis un mois, d'échanger avec l'IFREMER,
06:18notre institut de recherche à nous, en France, pour l'exploitation de la mer.
06:22Les scientifiques du côté américain ne peuvent plus participer
06:24ou organiser des réunions avec leurs homologues étrangers,
06:27sur ordre de l'administration Trump.
06:30En fait, ce sont nos partenariats de recherche qui sont totalement déjà bannis.
06:33Mais bien sûr, ça me donne envie de pleurer quand j'entends ça.
06:36Il faut voir ce qu'est la NOA.
06:39C'est une organisation que je connais très très bien.
06:41Vous-même, vous étiez chercheur, il faut le dire.
06:43Oui, bien sûr, moi j'ai été chercheur.
06:45Et puis je me suis occupé du CNES, qui travaillait avec la NOA très étroitement.
06:49C'est une organisation absolument incroyable,
06:51avec des chercheurs qui sont exceptionnels,
06:53qui s'intéressent à la météo, qui s'intéressent au climat,
06:55qui sont des gens de très très haut niveau.
06:57Le fait qu'aujourd'hui on remette en cause ces partenariats,
07:00effectivement, ça me semble être vraiment dramatique pour la recherche mondiale
07:04et pour ce qu'est la science aujourd'hui,
07:06dans un monde où on a besoin de science,
07:09on a besoin de science pour comprendre le monde,
07:11on a besoin de science pour comprendre le changement climatique
07:14qui a lieu aujourd'hui sur Terre,
07:16pour essayer de l'anticiper, pour essayer de le modéliser.
07:19Et ça, c'est le rôle fondamental de la NOA et de nos agences.
07:22C'est l'IFREMER, c'est le CNES, c'est les universités.
07:24Et donc il faut qu'on y soit et il faut maintenir l'effort sur ces programmes-là.
07:27Et la France et l'Europe seront au rendez-vous.
07:30La France prête à accueillir les scientifiques américains.
07:32Merci Philippe Baptiste d'avoir lancé cet appel sur France Info,
07:35ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Recommandations