00:00Bonsoir à mes camarades de la 2ème heure, bonsoir Vincent Roy, bonsoir Pierre, écrivain,
00:09chroniqueur politique, bonsoir Jean-Michel Salvatore, bonsoir Pierre, communiquant et
00:14chroniqueur politique, bonsoir à vous Patrick Stefanini, bonsoir, et merci d'être avec
00:18nous en direct sur Europe 1, ancien secrétaire général du ministère de l'immigration et
00:22de l'identité nationale.
00:23On va revenir dans un instant avec vous, si vous le voulez bien, sur ces déclarations
00:26de Bruno Retailleau qui semblent être des avancées, en tout cas, entre le Maroc et
00:31la France sur les questions des visas consulaires, mais d'abord je voudrais votre opinion, Patrick
00:35Stefanini, à vous aussi sur la présence de Yacine Bellatar dans la délégation française
00:40au Maroc.
00:41Écoutez, moi je suis un spécialiste des questions migratoires, donc je ne me prononce
00:49pas sur ce sujet.
00:50Est-ce que vous dites comme Marine Le Pen que c'est une façon de dégrader l'image
00:54de la France ?
00:55Écoutez, c'est une visite d'État, elle est organisée par le Président de la République
01:01avec l'ensemble du gouvernement, elle participe d'un objectif qui est stratégique pour
01:05notre pays, qui est de renouer des relations normales avec un très grand pays qui est
01:11le Maroc.
01:12La communauté marocaine en France est la deuxième communauté étrangère sur notre
01:17pays et je ne verserai pas d'huile sur le feu au moment où on essaye de rétablir
01:24avec ce pays des relations de coopération qui sont indispensables aux deux parties.
01:29Écoutez, c'est une forme de réponse et si vous ne versez pas de l'huile sur le
01:33feu, ça veut dire qu'il y a déjà un feu.
01:34Vous dites qu'on va vers une normalité, en tout cas plus de normalité, vers les relations
01:42entre la France et le Maroc.
01:43Ça veut dire que jusqu'à présent, sur certains sujets, elles sont anormales ces
01:46relations ?
01:47Comme vous le savez, les relations diplomatiques avec le Maroc étaient compliquées depuis
01:53plusieurs années pour toute une série de raisons.
01:57Elles se sont débloquées cet été avec un changement de position de la France sur
02:03la question du Sahara occidental.
02:07Il faut s'en réjouir.
02:11Il faut espérer que ça ne se traduira pas en parallèle par une dégradation trop forte
02:17de nos relations avec l'Algérie, mais pour l'instant, concentrons-nous sur le sujet
02:21du Maroc.
02:22Je vous ai dit que la communauté marocaine en France était la deuxième communauté étrangère
02:26dans notre pays.
02:27Par ailleurs, le Maroc constitue le premier pays d'immigration en France aujourd'hui
02:33en termes de nombre de titres de séjour délivrés chaque année.
02:36C'est bien que Bruno Retailleau, à l'occasion de cette visite d'État, puisse, et apparemment
02:42c'est le cas si j'en crois les déclarations qu'il a faites ce soir, amorcer un processus
02:47de coopération régulière avec son homologue marocain.
02:51Raccourcir les délais d'examens, augmenter le nombre de laissés-passés consulaires délivrés
02:55par rabats pour les expulsions avec des points d'étape réguliers, voilà ce que dit le
02:59ministre de l'Intérieur.
03:00Oui, il a raison, sur les huit premiers mois de l'année, la France a obtenu environ 350
03:11laissés-passés consulaires, là où elle en avait demandé un peu plus de douze cents.
03:16Donc ça fait un taux de délivrance des laissés-passés consulaires dans ce que les
03:21techniciens appellent les délais utiles qui est un peu supérieur à 25%.
03:25Il doit être possible de faire mieux et il doit être possible de faire plus rapidement.
03:32C'était l'objet de la visite de Bruno Retailleau, c'était l'objet des conversations qu'il
03:37a eues avec son homologue marocain.
03:39Nous verrons dans les semaines et les mois qui viennent si les résultats s'améliorent.
03:45Bruno Retailleau a évoqué une coopération quasi quotidienne, ou en tout cas il a indiqué
03:51qu'il suivrait de très près l'évolution de ce dossier.
03:55Encore une fois, je crois que c'est important.
03:57Je n'ai pas besoin de rappeler le drame qui s'est produit il y a une quinzaine de
04:01jours avec cette jeune étudiante de l'Université Paris-Dauphine, assassinée semble-t-il par
04:08un ressortissant marocain sous au QTF et dont le laissé-passé consulaire a été délivré
04:13mais malheureusement, 24 heures après qu'il ait été remis en liberté de son centre
04:17de rétention, tous nos concitoyens ont en tête ce drame abominable.
04:22Donc il faut travailler à améliorer la situation et je crois que c'est ce que fait le gouvernement
04:27de Michel Barnier.
04:28Question pour vous de Jean-Michel Salvatore.
04:31En plus de cette question des laissés-passés consulaires, quels sont les autres sujets
04:36qu'il y a à négocier avec le Maroc ?
04:41En matière d'immigration ?
04:42Oui.
04:43Si vous voulez, l'immigration en provenance du Maroc a évolué depuis plusieurs années.
04:49Elle était fondamentalement une immigration familiale.
04:54Elle est devenue en importance d'abord une immigration étudiantine.
04:59Ce sont les étudiants marocains qui viennent faire leurs études en France qui représentent
05:05aujourd'hui le premier poste d'immigration pour ce pays dans notre pays.
05:09On est suivi ensuite de l'immigration familiale et puis il y a également une part très importante
05:14d'immigration économique, puisque l'immigration économique représente à peu près 10 000
05:21personnes par an, c'est considérable.
05:24Alors ça s'explique par la proximité du Maroc avec la France, ça s'explique aussi
05:30par l'intensité des liens économiques qui existent entre nos deux pays.
05:34Donc il faut veiller à ce que cette immigration légale, qui encore une fois est importante
05:39puisque c'est le Maroc qui vient en tête, suivi de très près par l'Algérie, il faut
05:43veiller à ce que cette immigration légale se déroule bien et à ce que les ressortissants
05:49marocains qui arrivent en France pour s'y établir durablement puissent s'intégrer.
05:54On sait que la question de l'intégration est une question difficile.
05:59On sait qu'au cours des 20 dernières années, des difficultés d'intégration sont apparues
06:04paradoxalement pour ce qu'on appelle la troisième génération.
06:07Donc il faut travailler en parallèle à ce que l'immigration marocaine en France puisse
06:14se traduire par une intégration réussie sur notre sol.
06:18Question pour vous de Vincent Roy.
06:19Oui, M.
06:20Stéphanini, une question un peu technique.
06:22Je me suis laissé dire qu'en réalité, le gouvernement marocain demandait au gouvernement
06:26français, lorsqu'il donnait des laissés-passer consulaires, de grouper.
06:33C'est-à-dire qu'on ne pouvait pas renvoyer, par exemple, un Marocain sous OQTF un par
06:40un, par exemple, ou même deux par deux.
06:41Il fallait attendre qu'il soit dit, ce qui n'était pas sans poser problème puisque
06:44certains sortaient des crâts, d'autres rentraient dans les centres de rétention, d'autres rentraient
06:51et par conséquent, certains échappaient à la vigilance des autorités françaises
06:55quand d'autres venaient de rentrer.
06:56Ce qui fait qu'au final, on avait des laissés-passer consulaires, mais on ne pouvait renvoyer personne.
07:01Patrick Stéphanini.
07:02Oui, alors, ça fait partie en effet des difficultés qui sont à résoudre et il semble qu'un
07:10certain nombre de laissés-passer consulaires délivrés par des autorités marocaines n'aient
07:15pas été retirés par les autorités françaises, sans doute parce que malheureusement les intéressés
07:21avaient été libérés de leur centre de rétention, donc il n'y avait plus de place
07:25d'avion.
07:26Ça fait partie de ces difficultés au quotidien dans la gestion de...
07:31Difficulté est un doux euphémisme, Patrick Stéphanini.
07:33Oui, difficulté est un doux euphémisme, je reconnais que je vous ai dit quel était
07:39le grosso modo le taux de délivrance des laissés-passer consulaires dans des délais
07:42utiles un peu supérieur à 25%, donc ça reste faible et par ailleurs, on sait que
07:51chaque année la France prend à peu près 6500 décisions d'éloignement de ressortissants
07:58marocains et le nombre total de décisions exécutées est un peu supérieur à 750,
08:06donc ça fait un taux d'exécution qui est de l'ordre de 12%, c'est un peu plus faible
08:14que la moyenne pour l'ensemble des nationalités, donc oui, il y a des marges de progrès dans
08:20notre coopération avec le Maroc sur ce sujet qui est un sujet très important, mais je
08:25voudrais insister sur le fait que précédemment, dans le gouvernement précédent, le ministre
08:31de l'Intérieur, Gérald Darmanin, s'était préoccupé de cette question, on s'en souvient,
08:35il s'était rendu au Maroc, il avait discuté avec son homologue, mais ses efforts s'étaient
08:40déployés sans qu'il ait été beaucoup soutenu, notamment par la première ministre
08:47de l'époque, donc aujourd'hui il y a un changement, on a bien compris que Michel Barnier
08:54soutient fortement son ministre de l'Intérieur et le Président de la République a accepté que
09:00dans le cadre de cette visite d'État, les questions d'immigration soient abordées de
09:05manière privilégiée alors que Bruno Retailleau a pris ses fonctions il y a quelques semaines.
09:10Donc on prenait un risque, il faudra juger sur les résultats, évidemment.
09:17Est-ce que la question, Patrick Stéphanie, maintenant que le Maroc fait ce pas en avant,
09:22puisqu'on peut le considérer comme ça, dès lors qu'il y a un accord visiblement
09:26noué avec Bruno Retailleau, le ministre de l'Intérieur français, est-ce que la question
09:30algérienne va rester, j'allais dire figée, ou est-ce qu'il pourrait y avoir des avancées
09:38aussi du côté d'Alger ? Et comme vous disiez, la communauté marocaine est la deuxième en France,
09:46la première communauté étrangère c'est l'Algérie.
09:48Oui, il est clair que la décision qui a été prise par les autorités françaises concernant
09:56le Sahara occidental n'a pas plu à Alger, ça s'est traduit par le rappel de l'ambassadeur
10:02algérien en France, ça s'est traduit par l'annulation du projet de visite du Président
10:07de la République algérienne en France.
10:11C'est le rôle du Président de la République qui avait conçu cette politique ambitieuse
10:17de réconciliation avec l'Algérie, c'est désormais le rôle du Président de la République
10:22de voir si après ce coup d'arrêt, il peut faire redémarrer le processus.
10:27Vous savez, les trois pays du Maghreb, pour des raisons différentes et avec des histoires
10:33différentes, ont quand même tous les trois une relation historique particulière avec
10:38la France.
10:39Et nous ne pouvons pas ne pas en tenir compte, et eux-mêmes ne peuvent pas ne pas en tenir
10:44compte.
10:45Voilà, donc c'est sur ces données qu'il faut travailler, l'immigration...
10:48On ne peut pas en rester là, vous voulez dire ?
10:51Non, on ne peut pas en rester là, l'immigration fait partie des sujets importants qui structurent
10:57notre relation avec chacun de ces pays, ça n'est pas le seul sujet, il y a des sujets
11:02de l'économie, il y a des sujets de coopération, Dieu merci, dans le domaine culturel, dans
11:07le domaine de la francophonie, etc.
11:09Mais, encore une fois, moi qui suis un spécialiste de l'immigration, je me réjouis que pour
11:16la première fois, à l'occasion d'une visite d'Etat, pour la première fois depuis bien
11:20longtemps, la question de l'immigration soit au sommet de la pile.
11:25Les propos d'Emmanuel Macron sur Al-Andalus, vous en pensez quoi ?
11:29Je ne ferai pas de commentaire.
11:32C'est noté, merci beaucoup Patrick Stefanini, 20h25 sur Orp.