Comment fonctionne notre mémoire et comment la travailler?
Notre mémoire se travaille quotidiennement et les types de mémoire ne sont pas les mêmes. Le court terme, la mémoire du travail ou celle à long terme, celle du langage des gestes etc.
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00:00On parle ce matin d'un outil exceptionnel qui se trouve quelque part là, c'est la mémoire.
00:05Comment ça marche ? Mais d'abord, est-ce qu'on peut dire que c'est un organe la mémoire ?
00:10Alors non, pas vraiment. C'est un système assez complexe, c'est pas un muscle, c'est pas vraiment une zone en particulier.
00:16C'est une fonction qui nous permet d'encoder, de stocker et de restituer pour interagir avec notre environnement.
00:23Et on pense spontanément quand on dit mémoire au souvenir, mais ça contient aussi les savoir-faire et les connaissances.
00:29En fait, on dit souvent mémoire visuelle ou auditive. Je pensais ça naïvement avant de préparer cette chronique.
00:34C'est pas faux, mais c'est plus complexe que ça. On a chacun nos trucs pour stimuler nos systèmes de mémoire,
00:41où on est plus sensible et on doit apprendre chacun notre manière d'apprendre.
00:45Mais la mémoire, c'est, vous le voyez, une mémoire d'abord à court terme, une mémoire de travail,
00:49celle qui me sert à me souvenir du début de ma phrase avant de la finir, celle qui me sert à faire cette chronique également.
00:54Et après de cette information, soit je vais l'oublier, soit je vais la stocker comme un disque dur.
00:59Pour une plus longue chaîne chronique.
01:01Exactement, pourquoi pas. Avec plusieurs systèmes, la mémoire sémantique qui est celle du langage, des connaissances,
01:07celle du sens des mots, etc. La mémoire épisodique avec tous les moments qu'on a personnellement vécu.
01:11En général, ça se crée entre l'âge de 3 et 5 ans. La mémoire procédurale, c'est tous les automatismes
01:16qui nous permettent de conduire, de faire du vélo, de marcher.
01:21La mémoire percative qui va s'appuyer sur nos sens, qui me permet de reconnaître vos visages et de savoir qui vous êtes.
01:27C'est un ensemble de systèmes qui cohabitent et qui sont extrêmement complémentaires.
01:32Est-ce qu'on sait combien de mots, de chiffres chacun d'entre nous peut retenir ?
01:36C'est très variable, mais en moyenne, on dit 7 à la suite dans l'ordre.
01:41Mais la technique, c'est d'aller plus loin en les regroupant.
01:44C'est d'ailleurs ce qu'on fait spontanément pour les numéros de téléphone.
01:48Exactement, de trouver des moyens mémotechniques pour allonger cette liste.
01:527, ce n'est pas beaucoup. Je pensais que tu serais davantage.
01:55Si je vous dis un numéro de sécu, si tu dois le retenir tout de suite...
01:59Si c'est le mien, je vais le retenir.
02:01Mais est-ce que c'est normal, parce que ça fait partie des inquiétudes qu'on peut avoir, d'oublier un nom, un prénom ?
02:07Comment il s'appelle ?
02:09Ou qu'est-ce que j'ai fait hier soir ? C'est dingue, je ne m'en souviens plus.
02:12C'est tout à fait normal. C'est Francis Eustache, un neuropsychologue que j'ai interrogé,
02:16qui est un grand spécialiste de la mémoire, qui me dit qu'on est peut-être trop exigeants parfois avec nous.
02:20Et c'est tout à fait normal de ne pas savoir où on a mis ses clés.
02:23Parce que l'oubli, ça fait partie d'un processus de la mémoire, et c'est même assez sain.
02:28C'est quoi ? C'est du nettoyage ?
02:30Exactement, ça évite de saturer nos circuits neuronaux.
02:33Et quand on n'oublie pas, ce n'est pas possible.
02:35On doit faire le tri entre ce qui doit être mémorisé et ce qui ne l'est pas.
02:38En fait, l'inquiétude, si on se souvient qu'on oublie, ça va encore, c'est ce que j'ai retenu.
02:43En revanche, si dans l'entourage, on se rend compte qu'une personne nous a demandé quatre fois la même question en 30 minutes,
02:48et que c'est quelqu'un d'extérieur, en gros, un vrai amnésique ne sait pas qu'il oublie.
02:52Nous, si on a conscience de nos propres oublis, ça va encore.
02:55Ça se travaille, la mémoire ?
02:56Ça se travaille, mais il faut en prendre soin.
02:59Parce qu'on dit toujours qu'on n'utilise qu'une très très très petite partie de notre cerveau.
03:02Oui, on désestime notre mémoire.
03:04Mais la mémoire, elle a besoin de quiétude et de sérénité.
03:08Et on ne lui offre pas vraiment ça avec notre hyperconnexion, etc.
03:11Et Francis Eustache m'expliquait justement qu'avant tout, la mémoire, pour en prendre soin, c'est l'hygiène de vie, le sommeil.
03:17On sait que la privation de sommeil à long terme, ça entraîne des troubles de l'apprentissage et de la mémoire.
03:23L'alimentation, les activités sociales essentielles, les interactions sociales, tout ça, ça va la stimuler.
03:29Et après aussi, on peut la stimuler en sachant chacun quel est notre meilleur moyen d'apprendre.
03:36C'est pour ça qu'il y a certains enfants, vous leur lisez une fois une poésie, ils sont capables de la dire quasiment et d'autres pas.
03:43Parce qu'eux, ils ont compris la mémorisation sans effort.
03:46Ils ont mis en place, sans qu'on sache pourquoi, la meilleure stratégie d'apprendre pour eux.
03:50Et certains, on doit plus les aider.
03:52Il ne faut pas hésiter à trouver sa propre stratégie.
03:55Pour certains, ça va être de lire à voix haute, de mettre des tons, de chanter.
04:00Mais comment les enfants peuvent découvrir ?
04:02Parce qu'il y a ceux qui, de façon innée, ont su comment retenir une leçon et il y a ceux qui cherchent encore.
04:07C'est à nous de les aider et de voir ce qui marche mieux.
04:09Est-ce que c'est quand on leur lit ? Est-ce que c'est quand on surligne des couleurs ?
04:13Est-ce que c'est quand on leur demande, on leur lit la leçon avec même le corbeau et le renard ?
04:18On va le lire avec plein de tonalités différentes.
04:20Il faut stimuler.
04:22Un truc très intéressant aussi, les étudiants, il ne faut pas, on l'a tous fait, les révisions de dernière minute, c'est contre-productif.
04:29Parce que l'idéal, c'est de laisser huit jours entre le premier apprentissage et la deuxième lecture.
04:34Il faut en général faire une matière pendant une heure et après changer et y revenir.
04:38C'est le faire en plusieurs fois, la répétition qui permet d'ancrer, de laisser une trace dans notre cerveau.
04:43C'est pour partager une expérience personnelle, mais j'étais à la réunion de parent-élève de mon fils qui est en CM1.
04:47La maîtresse expliquait que pour mémoriser, il fallait associer parfois une histoire, un lieu, un chiffre.
04:53Une histoire positive pour parler de l'histoire notamment.
04:56Elle fait une histoire à son bureau, qu'elle associe à un chiffre, qu'elle associe à quelque chose de très positif.
05:01Les enfants retiennent, elle dit en quelques minutes.
05:04Donc il y a des trucs et que ça se cultive la mémoire.
05:06Ça se cultive. Il y a d'ailleurs des championnats de mémoire qui sont organisés depuis 2008 en France.
05:10Une association des sports de mémoire à l'initiative des trois champions de France.
05:13D'ailleurs, c'est ce qui m'a donné l'idée de cette chronique.
05:15C'est ce livre d'un vice-champion de mémoire 2022 avec qui j'ai pu échanger.
05:20Son livre est très complet. Il y a plein d'exercices.
05:22Il explique comment on peut arriver à des records hallucinants.
05:25Devinez le nombre de chiffres qu'un candidat français a pu retenir en cinq minutes, en l'ordre.
05:30En cinq minutes ?
05:32Il a lu une série de chiffres et il les a retenus.
05:34Plusieurs centaines.
05:35468 et record du monde.
05:37Il semble qu'il y ait de la logique entre les différents chiffres.
05:411467 pour le record du monde.
05:43Il y a des épreuves avec des cartes à jouer où on doit retenir plusieurs chiffres.
05:47C'est hallucinant.
05:48Et comment ils s'entraînent ?
05:49En mettant en place des techniques comme celle que tu as dite, Lorraine.
05:52Ou un autre système que j'ai appris qui s'appelle la table de rappel.
05:55En fait, les chiffres et les lettres, c'est abstrait.
05:58On a besoin de concrets pour retenir.
06:00Donc, ils vont remplacer les chiffres par exemple par des images.
06:03Je vous donne un exemple.
06:05Quand on doit retenir 9, 2, 67, 75.
06:08On pense à un œuf parce que ça ressemble phonétiquement.
06:12Le 2, on va penser à un signe.
06:14Le 67 a une casquette parce que ça ressemble phonétiquement.
06:17Et le 75, pourquoi pas Paris a une tour Eiffel.
06:19Et donc, ils vont se faire une phrase.
06:21L'œuf du signe est caché sous la tour Eiffel dans la casquette.
06:25Ça, c'était l'exemple de la maîtresse.
06:27Le 3, une glace au chocolat.
06:29Donc, c'était associé à quelque chose de positif et une image.
06:33Exactement ce que tu disais.
06:34Et ça, ça leur permet la table de rappel pour nous.
06:36C'est quand même très barbare.
06:39Mais pour eux, ça leur permet d'apprendre des centaines et des centaines de données.