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LA BANDE PREND LE POUVOIR - Restos: doit-on interdire les portables?
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il y a 1 an
La bande de “Julie jusqu’à minuit” réagit à l'interdiction des téléphones à table mise en place par une restauratrice du Bas-Rhin pour recréer de la convivialité dans son établissement
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00:00
Il faut-il interdire les téléphones portables dans les restaurants ?
00:04
Ça semble un petit peu radical, mais il y a un restaurant dans le Bar 1 qui s'est lancé.
00:07
On a rencontré la propriétaire de ce restaurant qui nous explique pourquoi elle a pris cette décision.
00:12
On l'écoute.
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Sur toutes les tables, les téléphones sortirent, les gens qui ne parlaient plus entre eux,
00:17
des couples pendant les Saint-Valentin qui passaient leur temps au téléphone.
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Et puis à un moment, on s'est dit stop, non, il faut faire quelque chose.
00:24
Et quand on leur disait « mais attendez, vous pouvez vous parler,
00:27
vous n'êtes pas obligés de vous appeler ou de vous envoyer des SMS, c'est beaucoup plus sympa. »
00:31
Et puis des fois, on nous disait « mais qu'est-ce qu'on va se dire ? »
00:34
Donc je leur dis « on va trouver un sujet de conversation, il n'y a pas de souci. »
00:38
En plus, un retour les pieds ancrés dans la terre avec tout ce qui va avec,
00:43
le fait de rediscuter entre nous, le fait de retrouver des liens sociaux,
00:49
c'est aussi important.
00:52
Quand on arrive au point où on se demande ce qu'on va pouvoir bien dire à l'autre au restaurant,
00:56
c'est un sujet qui, au début des années 2000, était très prégnant.
01:00
C'était la solitude des Français.
01:03
Les Français, pris par leur métier, pris par la vie, n'avaient plus le temps de sociabiliser.
01:08
On voyait que les partis politiques, déjà, commençaient à reculer.
01:12
On n'avait plus cette sociabilité.
01:14
Les syndicats, les gens étaient moins syndiqués.
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Les Français, un très grand peuple sportif,
01:19
allaient moins encore dans les clubs sportifs, soutenaient moins,
01:23
s'éloignaient des centres-villes où il y avait ces centres sociaux qui permettaient d'échanger.
01:30
Miracle, en 2007, arrive l'iPhone et ses concurrents sud-asiatiques,
01:36
qui permet d'avoir les réseaux sociaux sur soi,
01:39
et pas de se transporter son ordinateur du bureau où on faisait ses propres échanges,
01:42
et d'avoir une sociabilité qui devient une sociabilité factice.
01:46
C'est-à-dire qu'on discute avec des gens à l'autre bout du monde, c'est fantastique,
01:49
mais on ne discute plus avec les personnes qui sont à côté.
01:51
Et même, on commence à se méfier de ça,
01:53
parce qu'on dit des choses sur les réseaux sociaux qui ne sont pas toujours la vérité,
01:56
et qu'on n'a pas envie du jugement des autres.
01:58
Après, arrive la pratique, c'est-à-dire que l'objet est devenu le sujet,
02:03
c'est-à-dire que finalement, il n'y a plus que le téléphone portable qui compte,
02:07
et en effet, on ne s'échange plus, et puis en plus, on devient très impoli.
02:12
C'est-à-dire que vous avez des gens dans les restaurants
02:14
qui mettent leur conversation avec tout le monde, avec le haut-parleur,
02:17
qui regardent des vidéos sans mettre le casque, etc.
02:19
C'est devenu quelque chose, c'est devenu le Far West.
02:21
Donc, il faut interdire les téléphones portables dans les restaurants ?
02:23
Je n'ai pas dit qu'il fallait interdire, mais vous savez, c'est toujours pareil.
02:25
Peut-être que les endroits, on va vous demander, comme dans le train maintenant,
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on vous demande d'aller téléphoner sur les plateformes.
02:31
Si vous avez un téléphone urgent, mais que vous sortez du restaurant,
02:34
vous allez sur la plateforme, et que vous allez ailleurs,
02:37
et que vous n'embêtez pas le monde, j'allais dire autre chose,
02:39
mais que vous n'embêtez pas le monde avec votre conversation
02:41
où tout le monde sait votre vie, ce que vous avez dans votre réfrigérateur,
02:44
peut-être qu'on va revenir à un peu plus de sociabilité,
02:47
un peu plus de politesse.
02:49
Et puis, on va redécouvrir, c'est quand même un truc fantastique,
02:53
c'est l'échange, la conversation, la séduction.
02:55
Sauf qu'on ne va pas se mentir, ça nous est tous arrivé,
02:57
je pense, autour de cette table, de passer un coup de fil à table
02:59
ou de répondre à un texto au restaurant, non ?
03:02
D'accord, ben justement, peut-être que si vous avez le choix.
03:05
Et aussi, c'est quand même arrivé quand même de répondre à un texto au cinéma,
03:09
oui, et puis de répondre à un appel, et puis ça s'arrête où en vérité ?
03:12
Non, il y a des endroits quand même, ou à l'église, ou au temple,
03:15
ou n'importe quoi, enfin, ce n'est pas possible.
03:17
Il y a un moment donné, peut-être que la sociabilité impose,
03:20
et c'est le libre choix des gens, dans ce restaurant, il n'y a pas de téléphone.
03:23
Voilà, vous y allez, vous n'y allez pas.
03:25
Si ça ne marche pas, vous verrez que les restaurants abandonnent.
03:27
Non, je pense que ça fonctionnera.
03:29
Il y a beaucoup de bureaux maintenant où on demande de retirer les portables
03:32
avant les réunions, on demande de plus envoyer de texto dans les bureaux
03:35
parce que le langage texto est quelquefois trop violent.
03:38
Et on demande aux gens justement de changer les habitudes.
03:41
C'est une expérience intéressante, c'est une expérience sociale,
03:44
et moi, je trouve que c'est très bien.
03:45
Vous êtes pour, Natacha Polony ?
03:47
Moi, je suis pour tout ce qui permet de déconnecter pour une raison simple,
03:50
c'est que d'abord, le fait de garder son téléphone portable à déjeuner,
03:55
quand on est en famille, quand on est avec d'autres,
03:57
ça veut dire que ce qui peut arriver de l'extérieur est plus important
04:01
que vous qui êtes avec moi, autour de moi.
04:04
C'est ça, en fait, le message qui est envoyé.
04:06
Donc, c'est absolument tragique, et je passe mon temps à voir,
04:10
en particulier des familles avec les enfants qui ont le téléphone portable,
04:14
parce que là aussi, on ne sait plus les tenir,
04:16
on ne sait plus leur apprendre à se tenir au restaurant.
04:19
Donc, soit on a l'option, on les laisse comme ça,
04:21
c'est un cauchemar et les restaurateurs sont effondrés
04:24
et les clients à côté n'en peuvent plus,
04:26
soit on les colle sur une tablette.
04:28
C'est-à-dire qu'on est dans une forme de régression de la sociabilité
04:32
qui pose problème aujourd'hui et qui, surtout,
04:34
n'est pas un cadeau à faire aux générations futures.
04:37
C'est au contraire une entrave.
04:40
Mais apprendre à un enfant à se contrôler, à attendre,
04:44
à être patient, à se tenir bien, à respecter les autres,
04:48
c'est le plus beau cadeau qu'on puisse lui faire.
04:50
Donc, je trouve, en effet, que ce genre de choses...
04:52
J'ajoute un dernier point pour lequel il faut, en effet,
04:55
dans certains restaurants, interdire les téléphones portables,
04:58
c'est que ça a même une influence sur la cuisine qu'on vous sert.
05:01
C'est-à-dire que maintenant, les jeunes chefs font des plats instagrammables.
05:06
Il faut que ce soit joli.
05:07
On vous met des trucs.
05:08
Il y a un vieux restaurateur qui appelle ça les branleurs de ciboulette.
05:11
C'est insupportable, avec trois petites gouttes de ça.
05:14
Les gens voient des trucs.
05:16
Ils voient une photo et ils envoient ça.
05:18
On ne sait pas quel goût ça a.
05:19
D'ailleurs, ça a tout le temps le même goût.
05:20
Ça n'a aucun intérêt.
05:21
On ne sait pas ce qu'on mange.
05:22
Mais ce n'est pas grave, ça fait une belle photo.
05:23
Donc, rien que pour ça, rien que pour sauver la bonne cuisine,
05:27
il faut arrêter avec les téléphones portables.
05:29
Eh bien, ma femme m'envoie un SMS pour me dire qu'elle est d'accord
05:32
avec l'interdiction proposée par Arnaud Stéphan.
05:34
Donc, voilà.
05:35
Merci.
05:36
À cause de toi.
05:37
C'est ce que j'allais dire.
05:38
J'allais quand même dire, vous avez tous les cas votre portable posé.
05:40
Mais là, on travaille.
05:41
On travaille.
05:42
Évidemment, personne n'échange de SMS avec sa femme ou ses copains
05:47
sur ce plateau.
05:48
Le travail ne s'arrête jamais.
05:51
C'est derrière un des sujets.
05:53
C'est-à-dire qu'il y a des injonctions contradictoires.
05:55
Les gens, on attend d'eux des réactions immédiates,
05:58
répondent tout de suite à des mails, répondent tout de suite à des SMS.
06:01
Le point d'interrogation au bout de cinq minutes.
06:04
Bon, voilà.
06:05
Tu m'as mis un lu, tu m'as mis un vu, tu m'as mis un lu.
06:11
Donc, il y a des injonctions tout à fait contradictoires.
06:13
C'est une question anthropologique.
06:15
Je veux dire, on est en train d'apprendre à organiser notre temps.
06:18
Dominer son temps, c'est la plus grande des libertés.
06:21
C'est la plus grande liberté du mouvement ouvrier, déjà.
06:23
La lutte pour l'arrêt du temps du temps de travail,
06:25
avoir ce droit de se poser au pied d'un arbre et de faire rien,
06:28
qui n'est pas la même chose que rien faire.
06:30
Parce que faire du rien, ça requiert de se concentrer
06:32
et de réfléchir à comment je vais faire du rien.
06:35
Et il y a un autre objet anthropologique, c'est le repas.
06:38
A l'Antiquité romaine, il était interdit de manger seul.
06:42
Et il y avait des personnes qui pouvaient vous accompagner,
06:46
des gens dans la rue que vous pouviez inviter chez vous.
06:48
François Hollande.
06:49
Et ça avait un nom, ça s'appelle un parasite.
06:53
C'est de là que vient le mot parasite,
06:55
parce que ce n'était pas concevable que ce moment sacré soit fait seul.
06:59
Et à condition, ou alors la seule exception,
07:01
vraiment il fallait avoir des bonnes raisons,
07:03
et manger debout.
07:04
Si on mangeait seul, il fallait manger debout.
07:06
Et donc ce caractère sacré du repas
07:09
comme un moment de convivialité profondément humaine,
07:12
je pense que c'est ce qui essaie de faire respecter cette restauratrice au fond.
07:16
Elle veut faire respecter son propre travail,
07:18
l'énergie, l'amour qu'elle met dans son repas.
07:20
Bon, et puis peut-être aussi ça serait un sujet commercial,
07:23
c'est-à-dire c'est un produit d'appel.
07:25
C'est comme une retraite,
07:26
plutôt que de faire une retraite dans un monastère,
07:28
on appelle ça aujourd'hui des retraites numériques, ça existe.
07:31
Eh bien au moins on sait que dans ce restaurant-là,
07:34
c'est sûr, on sera obligé,
07:36
peut-être pas de converser,
07:37
parce que j'ai déjà vu des couples se dire rien au restaurant,
07:39
même sans avoir un téléphone.
07:42
Ça ne vient pas d'aujourd'hui.
07:45
Mais du moins qu'il y a cette chose qui nous oppresse tout le temps,
07:48
qui est une sorte d'appendice qui n'est plus là,
07:50
et donc on doit essayer d'exister sans cela,
07:52
c'est positif je pense.
07:53
Ça sera compliqué à imposer comme interdiction,
07:55
parce qu'il y a une loi
07:56
qui préserve l'accès aux moyens de communication.
07:58
C'est ce qui fait que les salles de spectacle
07:59
n'ont pas eu le droit de généraliser les brouilleurs.
08:01
Ça a été considéré comme illégal.
08:02
On n'a pas le droit d'interdire à quelqu'un
08:04
d'avoir accès à des réseaux de communication
08:06
qui sont l'espace public.
08:07
Donc ça ne peut être que volontaire.
08:09
On sait que dans un restaurant, on doit le poser.
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