• il y a 4 mois
Interroger nos sociétés, ses fractures, ses espoirs... C'est l'objectif des documentaires que propose Public Sénat toutes les semaines. Pour débattre et mettre en perspective l'oeuvre diffusée en première partie de soirée les samedis, Rebecca Fitoussi anime une discussion avec des spécialistes pendant une demi-heure. Avant la diffusion du deuxième documentaire de la soirée. Année de Production : 2023

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00:001924, le Paris des Jeux Olympiques de Marie-Laurence Rincey qui nous offre un trésor d'archives et qui nous permet peut-être d'avoir un éclairage un peu nouveau
00:10sur ces Jeux qui nous attendent à Paris dans plusieurs semaines. Y a-t-il bien autre chose que le sport derrière les JO ?
00:16Cela fait partie des questions qu'on va se poser avec nos invités. Patrick Cannaire, bienvenue à vous.
00:20Sénateur du Nord, président du groupe socialiste, écologiste et républicain, membre de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport.
00:28De 2014 à 2017, vous avez également été ministre de la ville, de la jeunesse et des sports.
00:33Guy Druth, bienvenue à vous également, membre du comité international olympique, champion olympique du 110 mètres haie lors des Jeux Olympiques de Montréal en 1976.
00:41Et puis vous avez été également ministre de la jeunesse et des sports, c'était sous Jacques Chirac entre 1995 et 1997.
00:49Pauline Ecampie, bienvenue à vous également, ancienne joueuse internationale de basket, membre de l'équipe de France pendant plus de 10 ans et même capitaine de cette équipe.
00:57Vous avez déjà été consultante pour les Jeux Olympiques, notamment pour France Télévisions et vous venez de publier Ma promesse en héritage aux éditions Enfora.
01:06Pascal Blanchard, bienvenue, historien, chercheur associé au CRIME, c'est un centre de recherche d'histoire de la mondialisation.
01:12Les éditions de La Martinière viennent de publier un magnifique livre que vous avez co-dirigé, Olympisme, une histoire du monde,
01:19des premiers Jeux Olympiques d'Athènes en 1896, aux Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.
01:26On verra des photos pendant cette émission. Merci à tous les quatre d'être ici.
01:29Parmi les choses marquantes de ce film, il y a cette impression que l'histoire se répète, que les polémiques sont toujours un peu les mêmes.
01:37Prix des billets, délogement, transport, choix des lieux de compétition.
01:41En fait, est-ce que ce n'est pas rassurant ? Est-ce que ce n'est pas un classique des géopatriques canaires, les polémiques ?
01:46Moi, j'ai porté cette candidature, puisque c'est François Hollande qui avait lancé ce défi après le terrible échec pour nous de 2012,
01:54où Londres a gagné face à Paris, l'organisation des JO.
01:58Effectivement, ce formidable documentaire montre que nous retrouvons des problématiques équivalentes.
02:04Peut-être deux aspects qui ne sont pas évoqués et qui sont ceux d'aujourd'hui, c'est le développement durable,
02:08qui n'était pas une préoccupation à l'époque, et les questions de sécurité, qui seront majeures, on le sait bien, pour les JO de 2024.
02:15Mais en dehors de cela, les chiffres ne sont pas les mêmes, mais on retrouve des priorités, des défis, notamment pour les pouvoirs publics.
02:22Un peu l'impression que l'histoire se répète, non, Guy Drude ?
02:25Totalement. Moi, j'ai eu l'occasion, depuis 1972, de vivre tous les Jeux olympiques, d'été ou d'hiver, pratiquement, sauf Séoul et Moscou.
02:38À chaque fois, dans toutes les villes, il y a les mêmes problèmes de circulation, les mêmes problèmes, les mêmes questions.
02:43Et je suis tout à fait d'accord avec ce que dit Patrick sur le développement durable et la sécurité,
02:48parce que c'est vrai que les problèmes de sécurité étaient quand même nettement moins importants à l'époque.
02:53On a vraiment l'impression que c'est nouveau, alors que pas du tout, en fait.
02:56Les téléspectateurs qui viennent de découvrir ce documentaire, Pascal Blanchard, ils viennent de se rendre compte qu'en fait,
03:00c'est très précis, on parle des prix des billets, c'est exactement ce qui se passe en ce moment.
03:03Le choix du stade de Colombes, qui avait fait polémique à l'époque, c'est fou.
03:07Qui paye ? Comment ça va se passer ? Est-ce qu'il y aura assez de places ? Est-ce qu'on va replier les tribunes ?
03:12Vous avez vu, d'ailleurs, sur certains moments, on voit que les tribunes sont un peu vides, ils se posaient les mêmes questions.
03:15Alors, on dit qu'ils ne se posent pas de questions de sécurité, ils s'en posaient quand même un tout petit peu à Paris,
03:18puisqu'on avait très peur des pickpockets. La presse ne parlait que de ça.
03:21Ce qui veut dire qu'à chaque époque avait ses passions, et en même temps, il y a tout le débat sur le financement.
03:26Déjà, à Paris, en 1924, le débat qui traverse les trois années qui précèdent, c'est qui va payer quoi ?
03:30Vous voyez que ce ne sont pas des questions nouvelles, et ça se comprend.
03:33On organise le premier événement au monde.
03:35Donc, quel que soit le pays, qu'on soit en hiver ou en été, quel que soit l'hémisphère au sud ou au nord,
03:41c'est tellement un événement majeur dont on sait que les journalistes du monde vont venir, des sportifs du monde entier vont venir.
03:46L'événement va être regardé ou lu à l'époque, parce qu'on n'était pas encore dans le regard, on était dans l'écoute à la radio et dans la presse.
03:51Un événement au monde, ça ne peut que déclencher, par définition, l'état de préoccupation.
03:55Et puis, quand les Jeux démarrent, c'est quelque chose d'assez magique. Tout le monde oublie tout.
03:59On va au stade, et on écoute, on regarde, on lit les épreuves le lendemain.
04:04C'est ça aussi qui est la magie, certainement, des Jeux olympiques.
04:06Les polémiques n'existent plus à partir du moment où ils existent.
04:08C'est pas qu'elles n'existent plus, mais derrière l'acte sportif,
04:11derrière le fait d'avoir les sportifs du monde entier qui sont là,
04:14derrière le moment qui va être après la cérémonie d'ouverture,
04:17vous rentrez dans une autre temporité, tout ça est derrière vous à ce moment-là.
04:20Et c'est pour ça qu'à part dans 2-3 Jeux qui ont eu des problèmes d'organisation,
04:23on pense à Athènes, par exemple, où jusqu'à la dernière minute, ça a été assez problématique,
04:27la plupart des Jeux basculent à un moment dans l'ouverture des Jeux.
04:30Parce que vous assistez dans votre vie,
04:32quand quelqu'un a la chance de l'en faire plusieurs, c'est merveilleux,
04:35mais beaucoup d'individus n'ont fait qu'une seule fois des Jeux olympiques dans leur vie.
04:38Et on s'en souvient, parce que vous avez affaire, je le redis,
04:40au premier événement médiatique monde.
04:42– Donc finalement, on s'en sort pas mal, presque, j'ai envie de dire.
04:45– C'est pas qu'on s'en sort pas mal, mais comme on le vit encore,
04:47et que dans les transports, dites pas ça, aujourd'hui de France et aux Parisiens,
04:50mais comme on le vit, c'est normal qu'on ait ces réactions-là,
04:53parce qu'il y a des contraintes, les grands travaux,
04:54les infrastructures, la circulation, c'est tout à fait logique.
04:57Maintenant, on sait aussi qu'on organise un événement monde,
04:59et en même temps, il y a une forme de fierté d'organiser ce type d'événement dans son pays.
05:02– Pauline et Combi ?
05:04– Oui, pour moi, je pense qu'on va oublier une fois le top départ lancé, enfin donné,
05:11c'est une grande fête populaire qui rassemble,
05:15qui promeut l'attractivité aussi de la France,
05:19qui est aussi vecteur économique, vecteur de changements aussi.
05:25– Oui, ça on va y venir, aux changements sociétaux, effectivement.
05:29– Donc c'est cette partie-là qui va être beaucoup mise en avant,
05:32et qu'on n'évoque pas souvent en ce moment, à part les problèmes.
05:37Est-ce que c'est un mal français ?
05:38– Non, apparemment non.
05:39– Je rejoins Guy Drude, parce qu'en ayant regardé effectivement le documentaire,
05:44je m'aperçois, et même dans d'autres pays,
05:46c'était toujours les mêmes problèmes qui ressortaient,
05:48et on ne parlait pas de l'impact positif de cet événement international et planétaire,
05:56qui incarne l'esprit de l'unité mondiale aussi,
05:59de l'innovation, de l'excellence à la française, comme je le dis,
06:03et qui laissera un impact significatif.
06:05– Est-ce que c'est un moment politiquement risqué aussi, Patrick Kenner,
06:08pour le gouvernement en place ?
06:10Est-ce qu'on a déjà vu, je ne sais pas, des ministres sauter
06:12après un événement, des JO ratés ?
06:16Quelqu'un a ça en mémoire ?
06:17– Vous savez, nous sommes quand même à une semaine du premier tour
06:21des élections législatives.
06:23Je ne suis pas certain, mais comme d'autres,
06:25que la période qui nous attend devait se passer dans une forme d'incertitude.
06:33C'est important qu'un pays ait une grande stabilité politique
06:35quand il organise les Jeux Olympiques.
06:37Et je dis d'autant plus que c'est un gouvernement de gauche
06:40qui a porté la candidature, ce sont des gouvernements,
06:42centre, centre-droite, droite, qui l'ont mise en œuvre.
06:47Et que donc, tout le monde y a cru.
06:49Il ne faudrait pas qu'il y ait une perturbation.
06:51J'entends dire que des mouvements un peu extrêmes
06:54pourraient vouloir perturber les Jeux.
06:57À Paris, je ne le souhaite pas, naturellement.
07:00Pour un gouvernement, c'est ce qu'on appelle du soft power.
07:02C'est l'occasion de montrer sa force.
07:05Parce que les JO, on se bat pour les avoir.
07:09Paris s'est battu, notamment en 1924,
07:13contre des villes comme Amsterdam ou Los Angeles, déjà.
07:17Pour ce qui concerne la candidature de Paris 2024,
07:21on avait en face de nous Budapest, Rome, Hambourg, Los Angeles.
07:25Et la qualité de la candidature était tellement forte
07:28que tout le monde est tombé comme dans un jeu de domino.
07:31Paris est sorti seul candidat parce que L.A. avait compris
07:35à un moment donné qu'il ne serait pas retenu par...
07:37Je parle sous le contrôle d'un immédiat membre du CIO.
07:40Donc on a gagné au point.
07:42Peut-être pas par chaos, mais au point.
07:44C'est bien négocié.
07:45On avait bien joué, mais bon...
07:48D'où l'importance d'avoir un pouvoir politique fort
07:50à un moment donné comme celui-là.
07:53Et en plus, pour un gouvernement, c'est aussi des retombées économiques.
07:56On évalue entre 9 et 10 milliards d'euros
07:59de retombées économiques pour le pays.
08:01Paris de 1924, c'était 600 000 billets vendus.
08:06Ici, on va être à plus de 3 millions.
08:08Mais on parle de bénéfices ou de recettes par rapport aux investissements ?
08:11Non, de retombées économiques.
08:12Les seuls jeux à priori qu'on peut considérer comme rentables,
08:15ce sont les jeux de 1932 à Los Angeles.
08:17Si on est uniquement sur les jeux en tant que tels.
08:19Financés, je vous le rappelle, à 90 % par la ville et les marques privées.
08:24C'est la première fois que les marques, puisque ouverts,
08:26refusaient, en pleine crise économique en 1932, de financer les jeux.
08:29Donc les capitalistes se sont posés la question
08:32de comment rentabiliser et ils l'ont très bien fait.
08:34Guy Drude, puisque Patrick Cannaire a évoqué d'un mot l'actualité...
08:37Je ne suis pas tout à fait d'accord avec Patrick, ça arrive.
08:40Est-ce que vous craignez que les jeux soient perturbés,
08:42voire que ce soit un grand gâchis ?
08:43Non, je ne pense pas. Pourquoi ? Pour quelle raison ?
08:46Parce qu'on a été marqué par le Mexico et les problèmes géopolitiques.
08:51Les jeux se sont toujours bien passés.
08:54Oui, c'est vrai, mais...
08:56Depuis 68, depuis 72, depuis 76, depuis 80, depuis 84.
09:01Les boycotts, les événements géopolitiques, les pandémies, tout ça...
09:06Les jeux se sont quand même bien passés.
09:08Munich, par exemple.
09:09Oui, Munich, pour des raisons de sécurité.
09:12Mais les jeux continuent, le président du CIO décide...
09:14On a même crainte aujourd'hui par rapport aux mêmes raisons géopolitiques actuelles.
09:19En tout cas, moi, je le ressens comme ça, personnellement.
09:23Je vais être...
09:24De géopolitique par rapport au monde international, alors ?
09:27Oui, au problème géopolitique actuel, oui, on a une crainte.
09:31Ah oui, c'est sûr qu'il y a une crainte.
09:32C'est pour ça que je n'ai pas voulu prendre part au vote
09:33quand on a évoqué cette rémunéverture sur la scène.
09:37Oui, tout n'est pas tout rose, il y a quand même des craintes, je sais.
09:40À ce qu'il y a là, il y a des craintes au niveau, on disait, du transport,
09:45même si on est en train d'arranger ça,
09:50mais c'est des craintes des Parisiens, en tout cas, les Parisiens.
09:53Depuis 72, le président du CIO le dit très bien,
09:56après les attentats, les jeux continuent.
09:58Il y a aussi une dynamique qui fait que, malgré un contexte,
10:00y compris à l'intérieur des Jeux ou à l'extérieur des Jeux,
10:02rappelez-vous les Jeux de 68 à Mexico dont tout le monde se rappelle les voix levées,
10:05avant, c'est d'abord 400 étudiants qui sont tués 15 jours avant les Jeux,
10:09par un régime que l'on ne peut pas véritablement conserver par une grande démocratie,
10:13qui a une manifestation très importante, des centaines de milliers de personnes,
10:16et notamment des étudiants, 400 seront massacrés sur la grande place de Mexico City.
10:20Et les Jeux, je vous rappelle que les Jeux sont placés sous le signe de la paix des colons,
10:24ce qui est un paradoxe absolu pour ces Jeux.
10:25Ce que je veux dire, c'est que, par définition,
10:27les Jeux sont aussi un lieu de respiration du monde.
10:29– Vous venez de le dire deux fois, vous avez employé le mot boycott,
10:3276 avec les athlètes africains, 80, rappelez-vous les Jeux de Moscou, boycott 84.
10:36Donc ça veut dire que les Jeux arrivent… – La trêve olympique.
10:39– La trêve olympique, d'ailleurs, qui est intéressante,
10:41parce qu'elle est maintenant utilisée aussi comme un moment politique.
10:44– Oui, géopolitique, une concurrence féroce entre nations,
10:47on règle presque des comptes avec l'ONU.
10:49– Mais c'est normal, vous avez presque plus de nations qu'à l'ONU,
10:51c'est un endroit où toutes les nations se présentent, existent, sont en dynamique.
10:55Pendant la guerre froide, se confrontaient, au moment de la montée des nationalismes,
10:58l'italifascisme considérait le sport, quand même,
11:00et l'Union soviétique n'y vient pas jusqu'en 1952,
11:03en considérant qu'il faut aller après battre les nations bourgeoises à partir de 1952.
11:06Le sport est politique parce que vous avez encore,
11:08c'est le dernier endroit où vous voyez défiler des nations,
11:10avec des drapeaux, avec un hymne, et vous symbolisez la paix,
11:13et on pleure pour son pays.
11:14Vous n'avez pas un endroit plus nationaliste. – Oui, c'est incroyable.
11:17On découvre dans le film que les lignes ont bougé dans plusieurs domaines
11:20lors des Jeux de 1924, la pratique du sport s'est diffusée
11:23dans toutes les catégories sociales, la question de la santé des athlètes
11:27a été posée, le sport féminin a été rendu plus visible,
11:31même si le climat était encore très misogyne, on en parlera,
11:34moment aussi de développement technologique, médiatique,
11:36et puis moment de lutte contre les théories racistes.
11:39C'est un des moments forts du film, on le regarde ensemble et on en parle après.
11:43Le 9 juillet 1924, Le Miroir des Sports publie des dessins
11:47qui feraient scandale aujourd'hui.
11:49Une pleine page pour détailler les quatre races représentées aux Jeux olympiques.
11:54Les races blanches, noires, jaunes et rouges.
11:58Le journaliste ne manque pas de rassurer le lecteur
12:00en soulignant que la supériorité de la race blanche
12:03n'est pas compromise par les trois autres.
12:08Pourtant, une épreuve va mettre à mal ce préjugé
12:12et ce complexe de supériorité de l'homme blanc.
12:17William de Hart-Hubbard, un jeune athlète de 19 ans,
12:21parvient à décrocher une médaille d'or en saut en longueur
12:24en franchissant 7 mètres 44.
12:27On partait de très très loin.
12:29Est-ce que les JO sont justement un moment de lutte très important
12:34contre les racismes et les discriminations paulines et cambies ?
12:36Oui, tout à fait.
12:38Même si ça persiste encore maintenant,
12:40le sport a ce pouvoir de changer le monde, on va dire.
12:45En tout cas, c'est un impact significatif pour rassembler les jeunes
12:49et fédérer la cohésion sociale,
12:54les luttes contre les discriminations,
12:57qu'elles soient raciales, sexistes,
13:00toutes les problématiques qu'on rencontre actuellement aussi.
13:03C'est le seul domaine, je dirais même,
13:06qui a cet impact ou qui est un accélérateur de changement.
13:10Le sport en général ou les JO en particulier ?
13:13Les deux.
13:14Le sport, parce que c'est un des rares espaces,
13:16moi disais Mohamed Ali,
13:17il est plus facile de devenir champion olympique en 1960
13:19que président des Etats-Unis.
13:21Il n'avait pas tort.
13:22C'est un des rares espaces où, par exemple,
13:24un noir américain ou un noir français peut exister
13:26alors qu'il n'avait même pas forcément la citoyenneté américaine.
13:28Je rappelle qu'il y a un Amérindien qui devient champion olympique
13:31alors qu'il n'est toujours pas citoyen américain.
13:33C'est un paradoxe de nos sociétés
13:34où vous pouviez ne pas avoir les droits politiques
13:36mais avoir les droits de sportif.
13:38Et donc c'était un espace,
13:39pour ceux qui étaient professionnels, faire carrière, gagner de l'argent.
13:42Donc ils ne pouvaient pas être au jeu.
13:43C'est pour ça que je vous dis qu'en dehors des jeux, ça existait.
13:45Et dans les jeux, c'était une manière...
13:46Quand Wens gagne, il ne faut pas oublier que, certes,
13:49il répond à Hitler à travers ses victoires,
13:51mais il répond aussi à l'Amérique blanche.
13:52Je rappelle qu'il n'est pas reçu à la Maison Blanche,
13:54ce sera avec tous les athlètes noirs.
13:56Et donc il est à savoir, alors qu'il est acclamé par le peuple.
13:58C'est tous les paradoxes de nos sociétés.
14:00Donc le sport est un espace où ces combats militants,
14:03ces combats des femmes, comme d'ailleurs des minorités,
14:05ont pu exister parce que c'est un des premiers espaces,
14:08un peu comme le monde du spectacle.
14:09Rappelons-nous Joséphine Baker qui vient à Paris en 1925,
14:12où vous pouvez être à seul coup, en tant que minorité,
14:14revendiquer, symboliser, exister et prendre la parole.
14:17Mohamed Ali, s'il peut prendre cette parole mondiale,
14:20c'est bien parce qu'il est champion olympique en 1960 à Rome.
14:22– Patrick Canard ?
14:22– 1924, 3 000 à peu près athlètes,
14:26que 4 % de femmes à l'époque, on y reviendra sûrement.
14:302024, on sera 10 000, 10 500 de mémoire.
14:34– La parité.
14:36– La parité qui est affichée, annoncée.
14:40Donc on peut se dire que ces 10 000 athlètes, hommes et femmes,
14:45vont porter finalement l'espoir d'une humanité rassemblée.
14:50Alors je sais bien qu'il peut paraître des mots illusoires
14:52au regard des conflits qui sont aujourd'hui dans le monde,
14:55mais il y a un message d'espoir et le sport vecteur,
15:00finalement, d'unité des nations.
15:02Effectivement, des nations qui se concurrencent,
15:06qui se combattent sur le terrain,
15:08mais avec un seul drapeau, le drapeau olympique.
15:11C'est un formidable message pour 3 ou 4 milliards de personnes
15:14qui vont les regarder à la télévision.
15:17– On pense promouvoir un grand moment de multiculturalisme.
15:20– Vous savez, Jean-Claude Killy, qui est quand même un maître en la matière,
15:23a dit une phrase exceptionnelle au congrès de Copenhague,
15:27on dit souvent que le monde est un village,
15:31le village olympique, lui, c'est le monde, c'est tout.
15:34Ce n'est pas la peine d'aller plus loin.
15:35– C'est un beau résumé.
15:36– Oui, c'est exactement ça, Pauline Hécant-Gypte…
15:37– Je n'ai jamais vu une bagarre au village olympique.
15:39Mais il y a certainement des Noirs qui n'aiment pas les Blancs,
15:43des Chinois qui n'aiment pas les…
15:44– Des grands qui n'aiment pas les petits.
15:45– Oui.
15:46– Des petits qui n'aiment pas les grands.
15:47– Comme on véhicule des valeurs universelles,
15:50éducatives et de respect.
15:52– Avec des questions tout de même aussi sur les nationalités
15:54qu'on intègre ou pas aux Jeux olympiques.
15:56Il y a aussi toutes ces questions-là qui précèdent la compétition, non ?
16:00– A 24, c'est le choix de ne pas inviter l'Allemagne,
16:04qui a perdu la guerre, parce qu'on oublie que si c'est un monde diplomatique,
16:07le monde du sport et le monde de l'olympisme,
16:08c'est aussi donc un monde qui à un moment décide
16:10qui a amené la paix et qui a amené la guerre.
16:12Et l'Allemagne est punie.
16:12Alors la France, on imagine difficilement, les politiques français,
16:16imaginent organiser des Jeux à Paris et accepter l'Allemagne,
16:19qui déjà, je le rappelle avec l'Autriche et l'Empire,
16:21ex-Empire ottoman, avait été interdit des Jeux d'Anvers 1920.
16:24C'est là qu'on voit que la diplomatie et l'histoire olympique
16:26prend une dimension nouvelle dans l'entre-deux-guerres.
16:29Il y a le même débat en 1932, à savoir s'il faut inviter le Japon,
16:31qui vient d'envahir la Manchourie.
16:33C'est un très long débat au comité olympique.
16:34Faut-il sanctionner le Japon ou non ?
16:36Pourquoi ? Parce que d'un seul coup, les nations prennent beaucoup plus d'importance
16:39qu'avec les Jeux, on va dire, d'avant la Première Guerre mondiale.
16:42Le rapport politique a changé.
16:43Aujourd'hui, certains leaders politiques français,
16:47dont je tiendrai le nom par...
16:49Comment je vais dire ça ?
16:50Bon, enfin, peu importe.
16:51Qu'est-ce que vous allez nous dire, ça dépend.
16:53C'est-à-dire que quand des leaders politiques disent que les athlètes israéliens,
16:57quand on sait ce qui s'est passé à Munich,
16:59devraient défiler sous bannière neutre,
17:02je trouve que c'est un scandale absolu.
17:05C'est une importation d'un terrible conflit, on le sait bien,
17:09entre la Palestine et Israël, et en particulier sur Gaza,
17:11après le massacre terroriste du 7 octobre.
17:14Mais demander à ces athlètes, finalement,
17:17de renier leur nationalité israélienne,
17:22avec des relents que je préfère ne pas qualifier.
17:25Parce qu'il y a une respiration,
17:26puis vous y trouveriez la pression de votre pays.
17:29La pression même des médias, aujourd'hui, tout le monde regarde.
17:31Les Jeux Olympiques, on le sait,
17:32vous n'avez pas les 3 milliards, 4 milliards, peut-être,
17:34des personnes qui vont regarder.
17:35C'est quelque chose de très symbolique.
17:36Rappelons-nous des matchs de foot Iran-États-Unis,
17:38rappelons-nous des rencontres,
17:40une célèbre rencontre de Waterpolo-Hongrie-Russe,
17:43Urs, pardon, à l'époque, après l'invasion de l'Hongrie.
17:46Ce que je veux dire, c'est que ces athlètes ont aussi une pression.
17:48Pression de leur pays, pression de leur histoire, pression du récit.
17:51Tout ça existe dans les Jeux, ce n'est pas un petit moment.
17:54Vous savez que le monde va vous regarder,
17:55et c'est à une échelle réduite, on peut le considérer comme ça,
17:57parce que c'est un village.
17:59Mais le village est regardé par le monde entier,
18:00donc ce qui va s'y passer sont aussi les respirations politiques du monde.
18:03Et alors, pour les femmes, est-ce que les JO ont été facteurs de progrès ?
18:06Je rappelle juste les mots de Pierre de Coubertin,
18:09rénovateur des JO, repris dans le film.
18:11« Je n'approuve pas personnellement la participation des femmes
18:14à des concours publics, dit-il.
18:15Aux Jeux Olympiques, leur rôle devrait être surtout,
18:17comme aux anciens tournois, de couronner les vainqueurs.
18:20On doit conclure que le véritable héros olympique
18:23est, à mes yeux, l'adulte mâle individuel. »
18:26On partait de loin, là aussi, Guy de Ruth.
18:29Les JO facteurs de progrès ?
18:31Je pense que les JO et le CIO ont été facteurs de progrès
18:34sur la mixité, sur la parité, sans aucun problème.
18:39Et qui peut me dire aujourd'hui ce que dirait Pierre de Coubertin aujourd'hui ?
18:44Ce qui ne serait pas comme Thomas Barre,
18:46qui a été artisan, justement, de cette parité homme-femme
18:50au niveau du CIO d'abord, et ensuite des JO olympiques.
18:54Donc c'est pour ça que je suis un peu d'accord avec Patrick.
18:57J'ai horreur des gens qui jugent l'histoire avec les yeux du présent.
19:01Vous voulez dire que Pierre de Coubertin aurait probablement tenu
19:04un autre discours aujourd'hui, que c'était lié au contexte ?
19:06Évidemment, et à l'époque, moi je suis né en 50,
19:09quand j'allais à l'école primaire, les filles allaient à l'école ménagère.
19:12Bon, c'est tout, il faut pas aller plus loin.
19:15Et les écoles n'étaient pas mixtes.
19:17Et les écoles n'étaient pas mixtes.
19:19Et Dieu merci, aujourd'hui, il y a un maximum de femmes qui font,
19:22qui apprécient, et qui donnent une belle image du sport.
19:25Bon, c'est tout. À l'époque, ce n'était pas le cas.
19:28Pauline Écandie ?
19:30Professionnellement, oui, on en parle,
19:32mais il y a encore vraiment du progrès à faire,
19:34notamment dans la gouvernance du sport français,
19:36dans la sous-représentation des athlètes féminines,
19:43et là, c'est là où je dis que les médias ont un rôle majeur à jouer aussi.
19:47Pauline, c'est pas toujours la faute du sexe,
19:49c'est aussi de temps en temps parce que
19:51il y a des dames qui ne sont pas très compétentes non plus.
19:55Parce que femmes ?
19:57Attention à ce que vous dites, pas très compétentes parce que femmes ?
19:59Aucun rapport.
20:01Il y a des hommes pas très compétents non plus.
20:03Pour moi, les Jeux 2024, c'est les Jeux de la parité,
20:07ça a une raison conséquente.
20:09C'est un combat politique.
20:11Oui, c'est un combat politique,
20:13mais dont les femmes ont un rôle majeur à jouer aussi,
20:15dans le sport.
20:17À mon époque, quand j'ai démarré le sport,
20:19j'étais surprise d'entendre que la place des femmes était à la cuisine,
20:23à mon époque.
20:25Pardon ?
20:27Oui, c'était ça, c'était ça.
20:29Ironique.
20:31Moi, quand j'ai commencé, j'avais 14 ans et demi en 1976,
20:35et j'ai fait partie de la toute première promotion sport-études à l'INSEP,
20:39et j'entendais que le sport véhiculait des valeurs de virilité,
20:43et aujourd'hui, on va dire qu'il véhicule des valeurs de combativité,
20:47maintenant pour les femmes aussi,
20:49mais c'était la place des femmes était à la cuisine.
20:53Juste un mot, 4% d'athlètes femmes lors des JO de 1924,
20:57cette année, 2024, on est à 50-50.
20:59C'est un progrès incroyable.
21:01À Tokyo, on était à 48,8%.
21:05Oui, ça c'est un progrès au niveau de la participation.
21:07Mais sur la gouvernance ?
21:09Oui, sur la gouvernance du sport, il y a encore des avancées,
21:11sur la sous-représentation des femmes dans le sport,
21:13et c'est important pour notre jeunesse, pour les filles,
21:17pour qu'elles puissent avoir des rôles modèles,
21:21de montrer à travers des rôles modèles championnes,
21:25l'impact que le sport peut avoir sur l'empowerment,
21:27sur le développement personnel,
21:29sur la santé,
21:31et les ambitions qu'elles auraient envie de s'offrir.
21:35Qu'elles ont envie de s'offrir en intégrant le sport dans leur vie.
21:41Une anecdote sur le nombre de présidentes de fédérations olympiques en France.
21:4735 fédérations olympiques, ça a progressé de 100%.
21:51Parce qu'on est passé de 1 à 2.
21:53Entre mon époque, moi je connaissais Mme Lamour,
21:57la femme célèbre championne des scrims, championne olympique d'ailleurs,
22:01collègue à Guy.
22:05Yannou ?
22:07Oui, Yannou, en tant qu'ancien ministre, c'est vrai.
22:09Mais moi je n'ai jamais été un grand champion.
22:11Oui, vous êtes un grand ministre.
22:13Arrêtez-le, arrêtez-le.
22:15Pour dire simplement que,
22:17moi je me souviens quand je présidais
22:19avec le scandaletta Thierry Braillard
22:21les réunions du CNOSF,
22:23chaque fois je l'étonnais en disant
22:25mais je ne vois qu'une seule femme parmi vous, messieurs.
22:29Bon, maintenant on est à deux femmes présidentes,
22:33alors que le nombre de licenciées féminines,
22:37c'est un tiers de tous les licenciés en France.
22:39Donc il y a à peu près 16 millions ou 17 millions de licenciés,
22:43il y a quand même un tiers de femmes licenciées.
22:45Et que le sport féminin commence
22:47petit à petit dans les médias,
22:49c'est aussi ça qu'il faut dire.
22:51A quelle heure on regarde le 100 mètres homme,
22:53et à quelle heure on regarde le 100 mètres femme ?
22:55Regardez la différence de timing, c'est comme pour le tennis.
22:57Vous allez avoir le prime time pour le 100 mètres homme,
22:59malgré des fois le décalage d'horaire,
23:01si c'est au bout du monde, si c'est à Melbourne, ça je vous l'accorde.
23:03C'est chez nous.
23:05Donc on aura le prime time et vous aurez un horaire
23:07qui ne sera pas le prime time pour le sport féminin.
23:09Les médias sont encore aussi là-dessus,
23:11il n'y a pas que la société, les médias fabriquent.
23:13Le tennis c'était une petite révolution,
23:15parce qu'avant on a découvert qu'il y avait de plus en plus de gens,
23:17et puis à un moment presque autant de gens qui regardèrent Roland Garros.
23:19Le match féminin que le match masculin.
23:21Et d'un seul coup, comme par hasard,
23:23vous avez un horaire le samedi et le dimanche.
23:25Et ça aussi c'est une révolution,
23:27parce que le média, il n'y a pas que le politique là-dessus, que le CEO.
23:29Le média est un des acteurs majeurs,
23:31d'abord c'était la presse écrite,
23:33puis après c'était la presse radio,
23:35et après c'était le cinéma, et maintenant c'est la télévision,
23:37et maintenant nos portables.
23:39Il y a eu des actions menées par l'ARCOM en ex-CSA
23:41sur la journée internationale
23:43de la médiatisation du sport féminin.
23:45Il y a eu des avancées menées par les médias.
23:47Il y a aussi autre chose
23:49qu'on n'évoque pas,
23:51on a rétabli
23:53Alice Milla
23:55aux côtés de Pierre de Coubertin
23:57au CNEUF,
23:59le comité national olympique.
24:01C'est une très belle chose.
24:03Et aujourd'hui, il n'y a pas que
24:05l'égalité
24:07homme-femme ou la parité,
24:09mais il y a la diversité.
24:11Il faudrait peut-être aussi que la gouvernance du sport
24:13ressemble à sa diversité sportive.
24:15On n'en parle pas assez,
24:17mais pour moi,
24:19vous parliez tout à l'heure,
24:21on voyait que des blancs,
24:23maintenant on voit un peu plus de femmes.
24:25Je fais partie de cette diversité,
24:27je ne vois toujours que des blancs.
24:29Le sport, comme la société,
24:31doit incarner sa diversité.
24:33Donc des progrès sont faits, mais ce n'est pas encore suffisant.
24:35Et ces progrès sont faits au regard de ceux qui ont combattu.
24:37Vous l'avez cité, Alice Milla,
24:39si elle n'avait pas créé les Jeux féminins en 1922,
24:41jamais le mouvement olympique n'aurait entendu.
24:43Si les paralympiques ne s'étaient pas battus à partir de 1948,
24:45ils n'auraient pas été reconnus.
24:47Si les minorités dans certains pays
24:49ne s'étaient pas battues aussi,
24:51notamment à l'intérieur des empires coloniaux,
24:53ce qui était très compliqué.
24:55Les LWFI qui courent en 1924
24:57et qui galèrent un médaillé d'or pour la France en 1928,
24:59ce sont des gens qui avaient un courage à l'époque.
25:01C'est l'amateur parfait,
25:03il travaille ses 11 heures chez Renault,
25:05ouvrier absolu, il s'entraîne.
25:07C'était 10 fois plus dur
25:09quand vous étiez dans une minorité,
25:11dans un empire colonial, travailleur immigré,
25:13pour réussir.
25:15Ce que je veux dire, c'est que si ce sont des champions
25:17comme les bourgeois aristocrates, je prends un exemple simple,
25:19beaucoup qui pratiquent le sport au début du siècle
25:21sont plutôt dans les classes aisées. Pourquoi ?
25:23Quand vous êtes pauvre et que vous êtes bon dans un sport,
25:25vous êtes payé. Si vous êtes payé, vous n'êtes pas au JO.
25:27On a vu les avancées de Paris 1924
25:29pour la cause des femmes et contre le racisme.
25:31Les Jeux de Paris 2024
25:33permettront-ils des progrès sur d'autres sujets ?
25:35Et là, je vais prendre effectivement l'exemple du handicap
25:37que vous avez évoqué d'un mot.
25:39C'est la première fois de notre histoire que nous accueillons
25:41les Jeux paralympiques. Quelques chiffres.
25:4311 jours de compétition,
25:45400 athlètes, 19 sites, 22 sports,
25:47184 nations.
25:49Est-ce que ces Jeux, Guy Drude,
25:51sont aussi extrêmement positifs
25:53pour les athlètes en situation de handicap ?
25:55Pas complètement.
25:57C'est une révolution ?
25:59Je suis un fanat
26:01et un ardent supporter
26:05des Jeux paralympiques.
26:07D'abord,
26:09sur une valeur d'exemple, parce qu'ils sont
26:11exemplaires au niveau
26:13de la façon dont ils prennent les choses,
26:15le comportement, l'attitude,
26:17les vertus, etc.
26:19La résilience.
26:21Et puis,
26:23ensuite, ça fait progresser.
26:25Mais c'est de toute façon
26:27très difficile.
26:29Moi, comme Patrick,
26:31j'ai une petite carrière politique
26:33et j'ai été maire pendant 16 ans.
26:37Déjà, pour mettre des équipements
26:39publics
26:41aux normes handicapées,
26:43c'est pas évident.
26:45On a encore beaucoup de progrès à faire.
26:47Et les Jeux paralympiques
26:49permettent ces avancées.
26:51Et davantage encore
26:53cette prise de conscience de l'autre.
26:55De là à dire que les Jeux olympiques
26:57et les Jeux paralympiques font jeu égal aujourd'hui ?
26:59Non, y compris par rapport
27:01aux médias, aux marchands du temps.
27:03Je reprends l'expression de Guy.
27:05On sait bien que ça paye moins,
27:07ça ramène moins, c'est comme ça.
27:09Les tickets se vendent moins ?
27:11Oui, et puis ils sont moins chers.
27:13Ils sont moins chers.
27:15On le sait bien, mais on progresse.
27:17D'Olympiade en Olympiade, on progresse.
27:19Vis-à-vis de sportifs,
27:21et je confirme ce que vient de dire Guy Drude,
27:23qui sont exceptionnels.
27:25Je me souviens sur la candidature de Paris
27:27pour 2024,
27:29j'avais rencontré tout le monde paralympique.
27:31On a une fédération maintenant, en tant que telle,
27:33qui fait un boulot formidable.
27:35On progresse, mais on est encore loin du compte.
27:37Oui, notamment pour les spectateurs
27:39en situation de handicap.
27:41Là aussi, le bilan est quand même
27:43moins réjouissant. La promesse était de rendre
27:45ces Jeux accessibles à tous.
27:47Un plan d'un milliard et demi d'euros a été déployé
27:49pour rendre le réseau ferré accessible.
27:51Je vais prendre un seul exemple,
27:53la part des stations de métro accessibles.
27:55Regardons, si vous le voulez bien, la part de celles
27:57qui sont accessibles à tous les types de handicap
27:59par ville organisatrice des JO.
28:01Lors des JO de Tokyo en 2020,
28:033,2 % du réseau était accessible.
28:05Lors des JO de Londres en 2012,
28:0724 %, déjà,
28:09ce n'était pas beaucoup.
28:11Paris 2024, écoutez bien,
28:133,2 % du réseau sont accessibles
28:15à tous les handicaps.
28:17Vous me parlez de progrès, peut-être pour les athlètes.
28:19Pour l'accessibilité aux spectateurs
28:21en situation de handicap, on est extrêmement loin
28:23du compte.
28:25C'est la raison pour laquelle
28:27le regard par rapport au handicap
28:29permet de changer ce regard
28:31et de faire prendre conscience
28:33à la population et donc,
28:35évidemment, aux forces politiques
28:37de ce qui se passe.
28:39C'est vrai qu'on est en retard là-dessus.
28:41Le jour où
28:43toutes les personnes qui sont en situation
28:45de handicap expliqueront qu'ils n'iront plus voter,
28:47nous aurons 98 % d'accessibilité
28:49dans tous les transports. Il faut savoir que c'est comme tout sujet.
28:51En France, on a un vrai retard,
28:53c'est-à-dire que dans beaucoup de pays,
28:55ce que vous avez cité pour le Japon, ça explique que la plupart
28:57des infrastructures étaient déjà en accessibilité
28:59avant les jeux.
29:01Ils n'ont pas été mis aux normes
29:03pour les jeux. C'est une très grande différence.
29:05Et notamment, ce n'est pas forcément lié
29:07qu'au handicap physique, ça peut être aussi lié
29:09au handicap de âge. Au Japon, il faut savoir
29:11que les transports en commun sont utilisés par les personnes âgées.
29:13Et cette tradition, elle existe depuis très longtemps
29:15parce qu'il y a eu une pression politique de prise de conscience.
29:17C'est toujours ça.
29:19Le débat, on l'a dit, sur les minorités, sur les femmes,
29:21sur le handicap, toutes ces questions,
29:23elles sont liées à une historicité,
29:25à une prise de conscience par les politiques,
29:27par les infrastructures. On l'a dit. Quand un maire est confronté,
29:29notamment, à une pression sur son territoire,
29:31il sait la responsabilité qu'est la sienne.
29:33C'est ce que ça veut dire quand des familles viennent le voir en disant
29:35on ne peut pas aller au stade, on ne peut pas aller au gymnase,
29:37on ne peut pas aller à la piscine. C'est du contraire.
29:39Messieurs les élus, vous avez connu ça dans vos territoires.
29:41Il y a une loi qui a été prise d'ailleurs, et à juste titre,
29:43à l'époque de Jacques Chirac,
29:45loi Monchamps,
29:47qui visait à rendre
29:49tous les lieux publics accessibles.
29:51Ça devait être fait depuis 10 ans.
29:53Parce qu'on connaît peut-être tous,
29:55et vous aussi, des personnes en situation de handicap
29:57qui comptaient sur ces jeux pour
29:59peut-être que les choses changent dans les rues,
30:01sur les trottoirs, dans les transports en commun,
30:03et ils sont très déçus aujourd'hui.
30:05Non, ils savaient bien que ça n'arriverait pas.
30:07Parce qu'ils savent que c'est un processus où en France, on a un énorme retard.
30:09Il y a beaucoup de discours, mais les moyens nécessaires
30:11sont extrêmement importants, et que la France a un énorme retard.
30:13Dans ces affaires sociaux. Parce qu'elles sont anciennes aussi.
30:15Vous ne pouvez pas comparer le métro de Tokyo
30:17du métro parisien. Londres est un bon exemple.
30:19Vous dites 24%, ça nous paraît peu,
30:21mais 24% en Londres, ça a été un doublement
30:23de l'accessibilité.
30:25Un métro qui a été construit à peu près au même temps qu'à Paris.
30:27Exactement. Et Londres a fait des gros efforts.
30:29À un moment, il faut faire des choix. On voit bien que le Brésil,
30:31ça n'a pas été un très grand succès pour l'accessibilité handicapée
30:33sur le programme, alors que ça avait été annoncé.
30:35Donc, rassurez-vous, les personnes en invalidité
30:37étaient parfaitement conscients, ils ne rêvaient pas de cette question-là.
30:39Ils savent que ça va faire avancer
30:41la prise de conscience. Ils savent qu'en France,
30:43il y a un vrai travail qui est difficile.
30:45Je ne sais pas d'ailleurs, il faudra un jour
30:47étudier sociologiquement pourquoi en France, on ne se préoccupe pas
30:49de ces questions. Peut-être parce qu'en France,
30:51il n'y a pas un lobby politique sur cette question qui dit
30:53« Messieurs les élus, nous ne viendrons pas voter »
30:55ou « Voilà ce qu'on vous demande ».
30:57On n'imagine pas la partie des handicapés en France,
30:59par exemple, mais vous avez des pays anglo-saxons
31:01où ces questions-là font partie
31:03de véritables lobbies qui mettent la pression.
31:05Aux États-Unis, ce qu'on est en train de se dire
31:07serait quasi inconcevable. Et on le verra
31:09pour les Jeux de Los Angeles, où c'est un des éléments
31:11premium des infrastructures.
31:13Pour conclure cet échange,
31:15qu'est-ce qu'il restera des Jeux de Paris ?
31:17Est-ce que vous espérez qu'il reste des Jeux de Paris
31:19comme progrès social ?
31:21Ce qui ne restera pas, c'est ce qu'on appelle
31:23dans notre jargon technicien « les éléphants blancs ».
31:25C'est-à-dire ?
31:27C'est-à-dire des grands équipements sportifs
31:29qu'on n'utilise plus et qui restent en friche.
31:31Vous voyez ces images
31:33de bassins de piscine
31:35avec des éléphants blancs.
31:37Notamment Athènes, on se souvient.
31:39Athènes, mais aussi Rio. Ce qui a été construit à Barra,
31:41dans la banlieue de Rio,
31:43c'est ce qu'on appelle un « éléphant blanc ».
31:45C'est de l'argent qui ne sert plus.
31:47On n'aura absolument pas ça,
31:49puisque plus de 90% des équipements
31:51ont été construits avant les JO de Paris.
31:53C'est une très bonne nouvelle
31:55et on utilise des lieux magiques comme Versailles
31:57pour le sport hippique.
31:59Donc c'est tant mieux.
32:01Moi ce que j'espère, c'est une prise de conscience
32:03sur un sujet qui me tarabuste
32:05depuis maintenant plusieurs années.
32:07Je pense que Guy
32:09partagera cette priorité politique.
32:11C'est le sport universitaire.
32:13Le sport universitaire est dans un état
32:15déplorable.
32:17Équipements délabrés,
32:19des facs qui n'arrivent pas
32:21à payer ses équipements.
32:23Le sport n'est pas obligatoire,
32:25en dehors de la première année, ou quasiment.
32:27Moi ce que j'aimerais,
32:29c'est que la fabrique des champions français
32:31pour les 10-15 ans qui viennent
32:33commence aussi par le sport à l'université.
32:35Je suis très content de l'INSEF,
32:37je suis très content
32:39des Crêpes,
32:41mais il faut une masse
32:43du temps sportif et ça passe par l'université.
32:45Vous pouvez venir le sport
32:47à l'école, l'école du primaire
32:49à l'université.
32:51Votre conclusion, Pauline ?
32:53Pour moi, le sport va représenter
32:55une opportunité majeure
32:57pour mettre plus de gens au sport,
32:59déjà, en matière
33:01de santé, de bien-être,
33:03de cohésion, d'éducation,
33:05d'engagement.
33:07J'ai bien listé tout ça,
33:09d'inclusion,
33:11d'égalité, mais aussi
33:13de transformation écologique.
33:15C'est la grande cause nationale.
33:17Et vous, Pascal Blanchet ?
33:19Je suis historien, on vient de faire une exposition à la Porte Dorée
33:21qui s'appelle Olympisme, une histoire du monde, et je regarde les Jeux Olympiques
33:23qui ont marqué l'histoire.
33:2536, 68, 72, 88,
33:27avec la chute du mur qui va arriver dans peu de temps après,
33:292008, la Chine,
33:31on prend conscience. Je pense que ces Jeux,
33:33ce qu'ils vont marquer, c'est comme la France va vivre un tournant politique
33:35majeur de son histoire, qui sera présent
33:37dans la cérémonie de l'ouverture.
33:39Et vous verrez que dans 20 ans, quand vous ouvrirez un manuel scolaire et que vous raconterez
33:41cette histoire à vos enfants, vous direz
33:43c'est qui le monsieur à côté du Président de la République qui est Premier ministre ?
33:45Vous n'y pouvez rien.
33:47L'histoire du monde a toujours entrechoqué l'histoire de l'Olympisme.
33:49On peut le raconter comme on veut,
33:51ceux de 1901 à Paris, 1912.
33:53Et là, nous expliquerons à nos enfants
33:55qui est le monsieur ou la dame à côté du Président de la République
33:57parce que ce sera un moment d'histoire majeure
33:59du monde qui nous regardera
34:01et de la France qui se regardera.
34:03Et aucun d'entre nous ici ne sait exactement
34:05ce qui va se passer, mais sachez une chose, c'est que 4 milliards de personnes
34:07vont regarder la France
34:0920 jours après une élection électorale.
34:11Et il y a un moment,
34:13il y aura 4 milliards de personnes
34:15qui regarderont leur écran et l'histoire de France s'écrira à ce moment-là.
34:17Guy Drude ?
34:19Pouvez-vous me dire qui était ministre quand j'étais champion olympique
34:21ou médaille d'argent ?
34:23Non mais vous savez par contre
34:25qui était Président de l'Allemagne en 1936,
34:27vous vous en souvenez ?
34:29Oui.
34:31Il n'y a pas beaucoup de moments où on se souvient de ça.
34:33C'est des moments de l'histoire et du sport.
34:35Il n'y a pas que ça qui me fait souvenir
34:37de l'existence d'Hitler.
34:39Ce que je veux dire, c'est que
34:41c'est l'historien qui parle.
34:43L'historien regarde l'histoire.
34:45Qu'est-ce qui restera selon vous, Guy Drude, de ces Jeux ?
34:47On verra.
34:49Je pense à un bon souvenir
34:51et à ce qu'on dit depuis tout à l'heure,
34:53c'est-à-dire ce méchage
34:55durable. On verra bien.
34:57Laissons le temps au temps.
34:59Et ce n'est pas moi qui ai inventé la phrase.
35:01Oui, c'est sûr.
35:03Les gens se parlent au village olympique.
35:05C'est le monde.
35:07Ils sont heureux de se retrouver.
35:09Je pense que pendant les Jeux,
35:11rappelez-vous la Coupe du monde de football,
35:13c'était quand même
35:15une ambiance extraordinaire.
35:17Je pense qu'on retrouvera la même ambiance
35:19sauf accident regrettable.
35:21Je suis d'accord qu'il y aurait des problèmes
35:23de sécurité, etc.
35:25Réponse dans quelques semaines.
35:27Qui avait raison sur ce plateau ?
35:29Merci infiniment pour cet échange.
35:31Merci à vous d'y avoir participé.
35:33Merci à vous de nous avoir regardés
35:35comme chaque semaine.
35:37À très bientôt sur Public Sénat.

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