La procureure de la République de Paris Laure Beccuau a tenu une conférence de presse ce mardi 14/05/2024. Elle a évoqué l’affaire du fourgon pénitentiaire attaqué dans lequel deux agents sont décédés.
00:00 Cette transmission d'informations que je souhaitais vous faire en raison de l'extrême gravité des faits et de l'émotion qu'elle suscite pour chacun d'entre nous.
00:10 Avant toute chose, je veux m'adresser à la famille des victimes pour les assurer de toute ma compassion et de tout mon soutien.
00:19 Je pense aussi à tous les agents pénitentiaires dont je partage l'émotion.
00:26 Je veux dire le total engagement des magistrats du parquet de Paris dont certains sont à mes côtés et des fonctionnaires de police dans la conduite des investigations.
00:36 Vous le savez, deux agents pénitentiaires sont décédés.
00:41 L'un, âgé de 52 ans, était capitaine, travaillait dans l'administration pénitentiaire depuis 1996.
00:50 Il était paxé et père de deux jumeaux nés en 2003, dont l'anniversaire allait être prochainement fêté.
00:58 Le second, âgé de 34 ans, était marié et attendait la naissance d'un enfant.
01:04 Il était surveillant brigadier depuis novembre 2009.
01:09 Les trois agents blessés, âgés de 48 ans, 52 ans et 55 ans, sont tous pères de famille.
01:18 Nos premières pensées vont donc à leur campagne, évidemment, à leurs enfants, à leur famille, à l'ensemble de leurs proches, amis et collègues.
01:27 Ces cinq agents pénitentiaires constituaient l'escorte en charge du détenu Amra Mohamed.
01:34 Ce détenu nécessitait pour tous ses déplacements une escorte niveau 3, c'est-à-dire un minima constitué de trois agents.
01:45 La vigilance de l'administration pénitentiaire l'avait conduite à mobiliser, ce matin-là, cinq agents, dont un officier d'expérience sur le trajet.
01:55 Ce niveau de sécurité avait été décidé il y a quelques semaines et non la veille des faits, contrairement à ce qui semble avoir circulé sur les réseaux sociaux.
02:05 Les agents de l'escorte étaient évidemment armés.
02:11 Les premières constatations sur place permettent de penser que certains ont pu faire usage de leurs armes de service.
02:18 Concernant la personne évadée, M. Mohamed Amra, âgé de 30 ans, il est très connu de la justice.
02:27 Son casier judiciaire porte mention de 13 condamnations, la première intervenue en octobre 2009, il était alors âgé de 15 ans.
02:37 La plupart ont été prononcés par le tribunal judiciaire d'Evreux et la cour d'appel de Rouen.
02:43 Elle porte sur des atteintes aux biens, notamment des vols avec effraction aggravée.
02:49 Son casier judiciaire ne porte à ce jour mention d'aucune condamnation pour infraction à la législation sur les stupéfiants.
02:56 Il était détenu depuis le 7 janvier 2022 dans différents cadres procéduraux.
03:05 Le premier d'entre eux, c'est en exécution de peine.
03:10 3 mois d'emprisonnement prononcé le 4 avril 2020 par le tribunal correctionnel d'Evreux pour un rodéo motorisé.
03:18 3 ans d'emprisonnement prononcé le 5 janvier 2022 par la cour d'appel de Rouen pour vol avec effraction,
03:25 association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime, extorsion par personne dissimulant son visage,
03:33 extorsion par moyen dangereux, vol en bande organisée, vol avec effraction aggravée par une autre circonstance,
03:40 vol avec arme n'ayant pas entraîné d'incapacité de travail.
03:44 La dernière a été prononcée par le tribunal correctionnel d'Evreux le 7 mai 2024.
03:51 Elle a un compte-homme de 18 mois d'emprisonnement pour vol avec effraction aggravé par une autre circonstance,
03:59 mais il était préalablement en détention provisoire dans ce dossier depuis le 25 avril 2023.
04:04 Il est par ailleurs en détention provisoire dans le cadre de plusieurs dossiers,
04:10 depuis le 26 janvier 2022 dans le cadre d'un dossier d'instruction du tribunal judiciaire de Rouen
04:15 dans lequel il a été mis en examen pour tentative d'extorsion avec arme, tentative d'assassinat et détention d'armes de catégorie B,
04:23 fait qui aurait été commis à Saint-Etienne-du-Rouvray.
04:27 Depuis le 26 septembre 2023 dans un dossier d'instruction du tribunal judiciaire de Marseille
04:32 dans lequel il est mis en examen pour complicité de meurtre avec préméditation en bande organisée,
04:37 complicité d'enlèvement et séquestration d'otages pour obtenir l'exécution d'une condition,
04:43 complicité de destruction par moyens dangereux en bande organisée,
04:47 participation à une association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime.
04:53 Ces faits auraient notamment été commis à Aubagne et sur le ressort de la Girs de Marseille.
04:57 Je ne peux, vous le comprendrez, pas m'exprimer davantage sur les dossiers d'instruction en cours.
05:05 Sur sa détention, il avait été détenu à Paris la Santé, Fleury-Mérogis puis à Marseille
05:12 et était transféré à la maison d'arrêt des Vreux depuis le 11 avril
05:17 pour être jugé par le tribunal correctionnel.
05:21 Il devait ensuite réintégrer la maison d'arrêt des Beaumet.
05:24 Au cours de cette courte détention à Evreux, il a été constaté que les barreaux de sa cellule
05:29 auraient commencé à être sciés.
05:32 Il devait être entendu très prochainement sur ces faits par les enquêteurs locaux.
05:36 Sur l'enquête, ce que je peux vous dire en l'état de mes informations,
05:41 et vu la mobilisation des services, les éléments qui nous parviennent sont évolutifs.
05:49 La juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée,
05:53 que vous connaissez sous l'acronyme Junalco, située au sein du parquet de Paris, s'est aussitôt saisie des faits.
05:58 Elle a chargé des investigations l'OCLO, c'est-à-dire l'Office Central de Lutte contre la Criminalité Organisée,
06:06 ainsi que la police judiciaire de Rouen et Marseille.
06:09 Cette enquête porte sur les infractions suivantes, meurtres et tentatives de meurtres en bande organisée,
06:17 ce qui fait encourir la peine de la réclusion criminelle à perpétuité,
06:21 évasion en bande organisée, acquisition et détention d'armes de guerre,
06:26 association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime ou n'indulge puni d'une peine de 10 ans d'emprisonnement.
06:32 En l'état de ce que nous savons, le détenu était à bord d'un fourgon pénitentiaire,
06:37 suivi d'un deuxième véhicule de l'administration pénitentiaire.
06:42 Quelques minutes avant le passage au péage d'Ancarville, en direction d'Evreux,
06:47 est passé dans le même sens un véhicule Peugeot volé quelques jours auparavant.
06:52 Ce véhicule s'est stationné sur le bas-côté, dans l'attente de l'arrivée du convoi.
06:57 À 10h57, le fourgon a à son tour franchi la barrière de péage
07:03 et aussitôt un véhicule Peugeot l'a percuté de face pour le stopper.
07:09 Deux hommes munis d'armes longues en sont descendus,
07:12 rejoints par d'autres hommes armés, descendus d'un véhicule Audi
07:16 qui suivait donc vraisemblablement le véhicule pénitentiaire.
07:21 Ils ont fait feu à plusieurs reprises sur les deux véhicules de l'administration pénitentiaire,
07:26 tuant deux agents, en blessant trois autres.
07:30 Et ils sont repartis en emmenant le détenu.
07:35 Deux véhicules ont été retrouvés brûlés à proximité des communes de Houteville et de Gauville-la-Campagne.
07:42 Les auteurs ont également manifestement tenté de mettre le feu au véhicule qui est abandonné à la barrière de péage.
07:51 Ces véhicules font actuellement l'objet de tous les prélèvements et de toutes les recherches nécessaires.
07:58 Aujourd'hui, à l'heure où je vous parle, plusieurs centaines d'effectifs de police et de gendarmerie sont mobilisés.
08:05 D'une part sur la scène de crime, d'autre part sur la recherche des criminels.
08:11 Le travail de constatation, les prélèvements minutieux sur la scène de crime sont actuellement effectués
08:20 par la division de la police scientifique du service interdépartemental de la police judiciaire de Rouen,
08:27 par le laboratoire balistique de Lille du service national de la police scientifique.
08:32 Autant le dire tout de suite, l'ensemble des laboratoires de police scientifique et technique seront mobilisés sur cette enquête.
08:39 Les vidéos du péage, celles fournies par les témoins qui ont déjà été diffusées sur les réseaux sociaux,
08:47 font évidemment l'objet d'une exploitation minutieuse.
08:52 Les magistrats de la Junalco et moi-même nous sommes rendus sur les lieux, nous y étions jusqu'à très récemment.
08:59 La scène est révélatrice de l'extrême violence dont se sont rendus coupables les criminels recherchés.
09:07 Et je le redis, la détermination des magistrats et des enquêteurs est et sera à la hauteur de ce déchaînement de violence.