Avec Didier Testot, fondateur de la Bourse et la Vie TV.
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NewsTranscription
00:00 (Générique)
00:05 Bonjour Didier.
00:06 Bonjour Jean-Marie.
00:07 Toute l'actualité de l'économie sur la semaine.
00:09 Vous allez commencer par ce que vous appelez une leçon.
00:12 Une leçon infligée par Patrick Pouyanné, le PDG de Total Energy,
00:17 aux sénateurs qui tentaient de l'interroger cette semaine.
00:20 Pour quelle raison c'était une leçon ?
00:22 Alors pour suivre, la bourse depuis près de 35 ans, je peux vous dire qu'elle n'a pas bonne presse.
00:26 La bourse, une presse d'ailleurs qui ne parle que du CAC 40.
00:29 Total Energy en fait partie, pas des PME ou des ETI.
00:32 La bourse reste la mal aimée, celle de toutes les spéculations, des dividendes.
00:36 Tout le monde oublie la fiscalité pour ne voir que l'argent,
00:39 en oubliant la prise de risque de tout investisseur.
00:41 Alors je n'ai pas le temps de détailler ici le schisme entre la réalité des dirigeants que je peux connaître
00:46 et la vision générale de la bourse par les Français.
00:48 Alors quand un patron du CAC 40 vient devant les sénateurs, c'est intéressant de l'écouter.
00:53 Surtout les questions des sénateurs qui se sont pris un boomerang.
00:56 D'abord le sujet de la cotation en bourse.
00:58 Justement Patrick Pouyanné a pu évoquer l'idée d'un transfert à New York
01:02 avec un premier argument, celui de la valorisation supérieure des sociétés cotées dans son secteur aux Etats-Unis.
01:08 Par rapport aux sociétés européennes, il y a Exxon et Shell avec un ratio court sur bénéfice,
01:15 comme disent les spécialistes, de 12 fois contre 7 à 8 pour total.
01:19 Quand vous êtes dirigeant d'entreprise, vous ne pouvez pas ne pas voir ce genre de sujet de valorisation.
01:25 L'autre thème, c'est la politique choisie par l'Europe qui décide de frapper ses entreprises
01:29 afin qu'elles soient vertes ou ne le soient pas.
01:31 Comme si la transition énergétique pouvait se faire d'un claquement de doigts
01:34 quitte à fermer l'entreprise qui n'est pas verte.
01:37 Tout simplement parce qu'il s'agit de changer aujourd'hui les infrastructures.
01:40 On sait qu'il va falloir des décennies pour se passer des énergies fossiles.
01:43 Pas juste une pompe à chaleur à la place d'une cuve de fioul pour faire simple.
01:47 Et donc on oublie un petit peu qu'il faut financer la transition avec de l'argent.
01:51 Autre élément Didier, là on parle de la bourse.
01:53 De plus en plus d'investisseurs américains achètent alors que les européens vendent des actions totales.
02:00 Oui, j'ai envie de partager avec vous ici un souvenir.
02:02 Quand j'étais porte-parole du gendarme de la bourse,
02:04 alors ça remonte aux années 90 pour les plus anciens qui nous écoutent,
02:08 un avocat américain m'avait appelé pour me demander qui était Total,
02:12 qu'il ne connaissait pas et j'avais dû lui épeler le nom T-O-T-A-L.
02:17 J'avais eu du mal d'ailleurs.
02:18 Un sacré parcours depuis pour Total et le poids des investisseurs anglo-saxons
02:22 au capital de Total Energy n'a cessé de grandir.
02:25 Les retraités californiens aiment notre CAC 40
02:28 pendant que nous refusons nous les fonds de pension sous peine de mettre le pays à feu et à sang.
02:32 Et puis avec la gestion passive venue des Etats-Unis,
02:35 elle a pris sa place. La gestion passive n'a pas d'avis sur le lieu de cotation.
02:39 Eh bien cette gestion passive aujourd'hui c'est 50% du capital des entreprises contre 22% en 2010.
02:44 Elle est contrôlée par trois sociétés de gestion américaines, BlackRock, Vanguard, State Street,
02:49 qui ont 75% de ce marché.
02:51 Ces nouveaux actionnaires américains, ce poids,
02:54 se fait au détriment des actionnaires européens.
02:56 C'est ce que constate Total Energy et Patrick Pouyanné.
02:58 Alors tant que nos élites n'auront pas compris l'utilité,
03:01 l'élite je le mets entre guillemets,
03:02 l'utilité de la bourse pour notre souveraineté,
03:04 ils brasseront du vent.
03:05 Faut-il laisser aux retraités californiens le capital de nos entreprises
03:09 comme on laisse à Microsoft nos données de santé ?
03:11 Ce sont des choix politiques.
03:12 Alors à propos de cette audition, le PDG de Total explique pourquoi lui,
03:15 il n'a pas construit de panneau solaire en France.
03:17 En tout cas il a arrêté.
03:19 Oui parce qu'il en a.
03:20 Il avait une entreprise qui s'appelait Sun Power.
03:22 Il avait vu ce cycle d'investissement dans les usines en Europe et en France.
03:26 Mais il a vu le cycle aussi de devoir toutes les former.
03:28 Donc il dit aux sénateurs, en 2016-2017,
03:31 l'Europe a décidé d'enlever toutes les barrières qu'il y avait sur les panneaux chinois.
03:36 Je suis allé à Bruxelles, je suis allé voir le ministre de l'économie pour lui dire,
03:39 si vous levez les barrières douanières, nous devrons fermer ces usines
03:42 que nous avons à Toulouse notamment et à Sarla.
03:45 Et à la fin, ce choix a été fait.
03:46 Le choix a été fait par l'Europe.
03:47 On nous a dit, on laissera les panneaux chinois entrer
03:50 parce que ce choix que nous faisons, c'est le coût de l'énergie solaire,
03:52 pour que le coût de l'énergie solaire soit le plus bas.
03:54 Et donc Total a pris cette décision.
03:56 Et contrairement à une idée très répandue que l'Europe ne sert à rien,
03:59 ces décisions validées par un gouvernement français
04:02 ont donc bien des conséquences concrètes sur nos industries.
04:05 En l'occurrence, dans ce cas, pour sa destruction.
04:08 Car ce que ne dit pas le PDG de Total,
04:11 pour ne pas froisser sans doute les chinois,
04:13 il y a bientôt une visite ici,
04:15 c'est que eux subventionnent lourdement cette industrie des panneaux solaires.
04:18 Et aux Etats-Unis, où Total Energy en fabrique,
04:21 pour le coup Patrick Poiranet,
04:23 explique qu'il a un avantage fiscal pour cela.
04:26 Donc on a le pragmatisme versus l'idéologie mortifère
04:29 qui conduit à une concurrence déloyale,
04:31 au détriment de notre industrie.
04:32 Ce n'est pas moins d'Europe qu'il faut,
04:33 c'est une Europe intelligente,
04:35 qui protège ses citoyens
04:36 et qui exige la réciprocité dans ses échanges.
04:39 Parce que défendre les panneaux chinois
04:41 n'apporte aucune garantie de prix.
04:43 On le sait, comme pour les batteries électriques,
04:45 une fois qu'ils dominent le marché,
04:46 s'ils augmentent les prix, vous êtes mort.
04:48 Patrick Poiranet d'ailleurs explique
04:50 qu'il s'approvisionne désormais aussi chez les Indiens.
04:52 Pour faire de la concurrence aux chinois
04:53 et faire un peu baisser les prix.
04:55 Bruno Le Maire, le ministre de l'économie,
04:57 et l'Etat en tant que tel,
04:59 ne pourrait-il pas s'opposer
05:01 à une cotation de Total Energy à New York ?
05:03 Total Energy et l'Etat,
05:05 l'Etat n'a plus d'action chez Total aujourd'hui.
05:08 Donc c'est un peu une illusion
05:09 de la part de Bruno Le Maire.
05:11 Effectivement. Merci beaucoup Didier Teston.
05:13 On vous retrouve samedi prochain
05:15 pour une nouvelle Minute d'Information.
05:17 A bientôt et je rappelle que toutes vos informations
05:19 sont à retrouver sur la Bourse et la Vité.