00:00 L'invité du 6/9
00:02 Notre invitée ce matin c'est la patronne de la CGT Sophie Binet, la secrétaire générale du syndicat est en visite à Perpignan ce matin.
00:09 Elle va notamment participer à un événement sur la montée des idées d'extrême droite en Europe et également à une action à l'hôpital de Perpignan.
00:17 Mais avant ça elle est donc dans notre studio Suzanne Chaudjahi.
00:21 Bonjour Sophie Binet.
00:22 Bonjour.
00:23 Avant de détailler votre visite en terre catalane, un mot sur la réforme de l'assurance chômage.
00:28 Le premier ministre Gabriel Attal convoque aujourd'hui tous ses ministres pour un séminaire à ce sujet.
00:33 Il est question notamment de réduire la durée d'indemnisation des demandeurs d'emploi et aussi de multiplier les contrôles.
00:40 Vous l'apprenez comment cette réforme ? C'est une déclaration de guerre ?
00:44 Oui clairement, je rappelle au premier ministre que ce sont les acteurs sociaux qui doivent gérer l'assurance chômage.
00:51 Donc il n'y a pas besoin de faire de séminaire gouvernemental pour brainstormer.
00:54 Il faut organiser la discussion avec les organisations syndicales.
00:59 Elles sont en cours ces négociations ?
01:01 Non, pas du tout. Il y a eu un accord qui a été signé par certaines organisations au mois de décembre que la CGT n'a pas signé
01:07 parce qu'il y a des reculs dans cet accord sur l'assurance chômage.
01:10 Et le problème c'est que ces reculs visiblement ne suffisent pas au gouvernement qui veut imposer une réforme violente pour les privés d'emploi.
01:17 Violente ?
01:18 Violente oui, tout à fait. Il y a déjà eu quatre réformes violentes qui ont été imposées ces dernières années.
01:23 Et aujourd'hui c'est seulement 35% des personnes qui sont inscrites à Pôle emploi qui sont indemnisées.
01:29 Et c'est 40% des personnes indemnisées qui sont en dessous du seuil de pauvreté.
01:33 Donc on voit qu'aujourd'hui, contrairement à l'image qui est entretenue sur ces chômeurs qui abuseraient, ça n'est pas du tout le cas.
01:39 Il y a des réformes violentes qui ont été imposées.
01:41 Et en plus là, le taux de chômage remonte.
01:43 Donc quand le taux de chômage remonte, il faudrait au contraire augmenter les protections pour les personnes privées d'emploi.
01:48 Mais on a vu hier les chiffres de l'INSEE. La France a un déficit beaucoup plus important que prévu.
01:53 5,5% du PIB. Il manque près de 16 milliards d'euros dans les caisses de l'État.
01:57 Dans ce contexte, il faut bien trouver des moyens de faire rentrer de l'argent.
02:01 Oui bien sûr, mais ce déficit c'est le gouvernement qui l'a lui-même créé avec la multiplication des cadeaux fiscaux aux entreprises.
02:08 Puisque là on atteint plus de 170 milliards d'euros chaque année d'aides sans contrepartie aux entreprises.
02:14 Un montant qui a explosé sous les différents quinquennats Macron.
02:18 Et aujourd'hui on veut nous faire payer la dette.
02:23 Ils ont braqué la caisse et ils veulent nous faire payer. C'est ça le résultat.
02:27 Alors pendant le Covid, il y a eu des aides qui étaient quand même nécessaires.
02:30 Il y a eu des aides qui étaient nécessaires. Il y a aussi eu quelques abus sur ces aides.
02:35 Et le problème c'est qu'aujourd'hui on n'est plus pendant le Covid.
02:38 Et on a plus de 170 milliards chaque année d'aides aux entreprises qui ne sont pas conditionnées ni évaluées.
02:44 Il est là le souci. Et le problème c'est que ces mesures d'austérité que le gouvernement veut nous imposer,
02:48 c'est un peu comme la saignée de Molière.
02:50 Vous vous souvenez, c'est ce soi-disant traitement qui en fait accélère la mort du patient.
02:55 Ces mesures d'austérité elles sont très dangereuses parce que tous les économistes disent qu'elles risquent d'avoir un effet récessif
03:00 et donc d'augmenter les difficultés économiques du pays.
03:03 Et je ne parle pas des difficultés sociales.
03:06 Puisque moi je suis venue ici pour parler de la situation dans les hôpitaux et dans l'action sociale qui est catastrophique.
03:12 On a une dette des hôpitaux qui explose, des hôpitaux qui alertent depuis des mois sur leur situation.
03:19 Et le gouvernement qui refuse de répondre et qui va accélérer les difficultés des hôpitaux.
03:23 Justement vous êtes dans les Pyrénées-Orientales, aujourd'hui le plus fort taux de chômage en France métropolitaine.
03:29 Plus de 12% de chômage dans ce département.
03:32 Et pourtant il y a plusieurs secteurs qui n'arrivent toujours pas à recruter.
03:35 Le BTP, l'hôtellerie-restauration, on le voit encore aujourd'hui au salon TAF au parc des Expos de Perpignan.
03:41 Il y a des centaines de postes à pourvoir.
03:43 Il y a quand même un problème.
03:45 Est-ce qu'il ne faut pas justement s'attaquer à ce sujet-là ?
03:48 Oui, il y a un problème.
03:50 Et donc justement il faut aussi attaquer la CGT.
03:52 Évidemment elle pense qu'il faut avoir une vraie politique d'emploi.
03:56 Cette politique d'emploi par exemple dans le département, ça serait d'avoir une stratégie de filière.
04:00 Notamment pour tout ce qui est santé et action sociale où on peine à recruter des professionnels.
04:04 Pour développer les écoles de formation et pouvoir avoir des dispositifs de pré-recrutement.
04:11 Pour financer les études des étudiants.
04:15 Parce que tout le monde ne peut pas forcément se payer des études de santé.
04:18 De façon à pouvoir augmenter le nombre de professionnels qui manquent cruellement dans le département.
04:23 Il faut aussi revaloriser un certain nombre de métiers.
04:25 Par exemple l'aide à domicile est un secteur qui manque cruellement de bras.
04:31 On a beaucoup de difficultés à prendre en charge les personnes âgées qui sont importantes dans le département.
04:36 Il faut augmenter la formation, le recrutement des professionnels.
04:39 Mais il faut aussi revaloriser ces métiers qui, parce que féminisés, sont dévalorisés et très très mal payés.
04:45 Vous parlez aussi de la revalorisation du point d'indice dans la fonction publique.
04:50 En tout cas c'est ce que vous réclamez pour rehausser le salaire brut.
04:53 Est-ce que c'est raisonnable ou en tout cas réaliste dans ce contexte-là ?
04:57 Ce que je sais c'est que les fonctionnaires français sont parmi les moins bien payés de l'OCDE.
05:01 Nos infirmières, nos enseignants, etc.
05:05 Nos juges sont très mal payés.
05:07 Et le problème c'est qu'on a du coup de vraies difficultés de recrutement et d'attractivité.
05:12 Avec par exemple des chercheurs et chercheuses de très haut niveau qui ne s'installent plus en France
05:17 mais qui partent à l'étranger au vu de l'état de paupérisation de la recherche et de l'université française.
05:22 C'est très grave parce qu'on est en train de perdre toutes nos potentialités.
05:26 Il y a besoin de payer les fonctionnaires au juste niveau.
05:28 En deux ans les fonctionnaires ont perdu cinq points de pouvoir d'achat
05:31 parce que les salaires n'ont pas suivi l'inflation.
05:33 Les services publics ce n'est pas un coût, c'est un investissement pour l'avenir.
05:37 On a un pays qui vieillit avec un vieillissement de la population qui est un défi considérable
05:42 notamment dans le département.
05:43 Pour qu'on puisse y faire face il faut investir dans nos services publics.
05:46 8h au mois d'ici en France Bleu Roussillon.
05:48 Suzanne Chaudrier, notre invitée, Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT.
05:51 Et donc ce matin vous êtes en visite à Perpignan, la plus grande ville de France gérée par le Rassemblement National.
05:57 Dans une heure vous serez à l'ancienne bourse du travail pour une expo photo sur la montée de l'extrême droite en Europe.
06:03 Est-ce que vous comprenez que l'extrême droite progresse aujourd'hui ?
06:06 Oui parce que malheureusement l'extrême droite elle prospère sur les cendres laissées derrière elle
06:12 par les politiques néolibérales qui détruisent les services publics,
06:16 détruisent les droits des travailleuses et des travailleurs et conduisent à la fermeture de nos usines et à la casse de nos emplois.
06:23 Ces politiques que la CGT combat.
06:25 Ce que je veux dire ici c'est qu'il n'y a pas pire ennemi pour les travailleuses et les travailleurs que le Rassemblement National.
06:31 Il y a un discours de façade du Rassemblement National qui veut séduire un certain nombre de personnes,
06:37 notamment de travailleuses et de travailleurs, mais qui en fait quand on regarde leur positionnement effectif relève de l'imposture sociale.
06:43 C'est important de regarder ce que votent les députés à l'Assemblée Nationale.
06:46 Quand il a fallu se prononcer sur l'augmentation des salaires parce qu'il y a eu des propositions de loi qui ont été déposées
06:52 pour garantir l'indexation des salaires sur les prix, ce qui aurait évité que les salaires s'écroulent,
06:57 le Rassemblement National a voté contre.
06:59 Quand il y a eu des votes pour multiplier les aides aux entreprises, le Rassemblement National a voté pour.
07:05 Mais quand les partis traditionnels abandonnent, ou en tout cas c'est le sentiment qu'ont les électeurs,
07:09 notamment dans ce département, quand les partis traditionnels abandonnent un peu les électeurs, vers qui doivent se tourner ?
07:15 Eh bien les électeurs, enfin la CGT n'est pas un parti politique, nous sommes une organisation syndicale
07:22 et ce que nous savons c'est que c'est par l'organisation collective, la lutte collective qu'on peut gagner et faire changer les choses.
07:29 Par exemple c'est la CGT qui a été à l'origine avec les pompiers qui ont dénoncé ces délais d'attente insupportables aux urgences à Perpignan.
07:38 Grâce à cette vidéo qui a lancé l'alerte dans le département des pompiers,
07:42 on a fait bouger les choses avec des médecins régulateurs qui ont été recrutés.
07:45 Ce n'est pas haut niveau mais ça a fait bouger les choses.
07:47 La CGT a obtenu un plan de recrutement de 100 pompiers pour le département sur 10 ans, grâce à notre stratégie, notre mobilisation.
07:56 Ce que je veux dire ici aux personnes qui sont désespérées par la situation,
08:01 et je le comprends parce qu'honnêtement on vit une violence sociale et environnementale sans nom,
08:05 c'est qu'il faut s'organiser collectivement pour faire changer les choses
08:09 et que le syndicalisme et la CGT aient grand ouvert pour leur permettre de s'organiser et de se faire respecter
08:14 face aux patrons et face au gouvernement qui méprise les travailleurs et les travailleuses.
08:17 Dernière question, rapidement s'il vous plaît.
08:19 Vous avez annoncé au début du mois que vous alliez déposer un préavis de grève pour la période des Jeux Olympiques de Paris.
08:26 Donc cet été, une grève dans les trois fonctions publiques, notamment dans les hôpitaux, vous en parliez tout à l'heure.
08:31 Vous n'avez pas changé d'avis, ce sera maintenu ?
08:33 Non, ce que nous avons annoncé, c'est que nous attendions qu'il y ait des discussions qui s'ouvrent au gouvernement.
08:40 J'ai demandé à ce qu'il y ait une table ronde qui se tienne à Matignon.
08:44 Pour l'instant, je n'ai aucune réponse à cette demande.
08:47 C'est un problème parce qu'on a un Premier ministre qui est là plus pour faire la campagne des élections européennes
08:51 plutôt que pour gérer le pays.
08:52 Je rappelle que les JO, c'est des centaines de milliers de travailleuses et de travailleurs
08:55 et donc il y a un minimum de gestion sociale, ça s'organise.
08:58 Donc il va y avoir une grève pendant les JO ?
09:00 Sauf si le gouvernement répond à nos demandes.
09:02 Nos demandes, elles sont très simples.
09:04 Elles sont d'abord pour toutes celles et ceux qui ne pourront pas travailler pendant les JO
09:08 parce que leurs entreprises seront dans des périmètres de sécurité,
09:11 d'avoir une compensation à 100% pour paquets de pertes de salaire.
09:14 Elles sont ensuite pour celles et ceux qui doivent travailler plus,
09:17 notamment dans le secteur de la santé, d'avoir des compensations à la hauteur de ce travail supplémentaire.
09:22 Ce n'est pas normal que la prime supplémentaire pour les policiers, les soignantes par exemple, en soient exclues.
09:28 Et ce n'est pas mauvais pour l'image de la France, une grève en plein JO ?
09:32 Mais personne ne le souhaite.
09:34 Nous ce qu'on souhaite c'est qu'il y ait une réponse aux revendications des travailleuses et des travailleurs.
09:37 Et s'il n'y a pas de réponse, les travailleurs s'organiseront et se mettront en grève le cas échéant.
09:41 C'est notre droit le plus fondamental.
09:45 Mais ce que nous souhaitons, c'est pour ça qu'on en parle aujourd'hui.
09:48 On est à un peu moins de six mois des JO, c'est avoir des réponses maintenant.
09:51 Le gouvernement doit nous répondre maintenant.
09:53 Vous êtes en visite ce matin à Perpignan, d'abord à l'ancienne Bourse du Travail, puis à l'hôpital.
09:58 Merci beaucoup Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT d'être passée dans nos studios ce matin.
10:03 Merci, bonne journée en Pays-Catalan.