SMART BOURSE - Marchés : que nous dit l’IA ?

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Jeudi 5 octobre 2023, SMART BOURSE reçoit Jean-Jacques Ohana (Consultant indépendant - Membre du Board, Ai For Alpha)

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00:00 Le dernier quart d'heure de Smart Bourg chaque soir, c'est le quart d'heure thématique.
00:13 Et régulièrement, nous avons rendez-vous avec l'intelligence artificielle dans cette
00:18 émission et l'intelligence de Jean-Jacques Oana, à nos côtés consultant indépendant
00:21 et membre du board de la fintech AI4Alpha.
00:24 Bonsoir Jean-Jacques.
00:25 Bonsoir Grégoire.
00:26 Merci beaucoup d'être avec nous, c'est un peu le thème de notre discussion "marché
00:31 deux points, que dit l'intelligence artificielle" puisque c'est quand même le domaine des AI4Alpha.
00:35 On appelle ça de la détection de signaux, c'est ça Jean-Jacques ?
00:38 Absolument, absolument.
00:39 Des détections de signaux faibles qui parfois sont des signaux forts, avec le bruit des
00:45 marchés quand même, il faut le noter.
00:48 Donc en réalité des signaux qui, c'est bien documenté, qui sont peu prédictifs
00:54 en moyenne, mais qui le sont un peu plus que l'aléa totale.
00:59 Et le filtre humain évidemment qui permet de compléter l'analyse pour dire les choses
01:04 Jean-Jacques, le sujet pour vous c'est le retour de la macro dans les marchés.
01:08 Absolument.
01:09 Alors il y a une dialectique intéressante à analyser finalement depuis plusieurs années.
01:14 Quand les actions sont très fortes en général c'est que la macro est stable, c'est à
01:20 dire qu'on a un environnement de taux d'intérêt, de devises, de matières premières qui est
01:25 plutôt stable et on a des actions qui peuvent s'exprimer.
01:29 Et à l'inverse, quand l'environnement macro économique devient instable, avec des mouvements
01:36 très forts soit sur les devises, soit sur les taux d'intérêt, soit les deux, soit
01:39 sur les matières premières, et bien on a des marchés à action qui sont plus en difficulté.
01:44 Et on a exactement cette dialectique qui est en train de se jouer depuis quelques semaines,
01:49 qui est assez intéressante à analyser, c'est à dire qu'on avait depuis le début de l'année
01:53 un environnement macro économique jusqu'à l'été qui était à peu près stabilisé,
01:58 quoi qu'on dise, même s'il y a eu l'alerte sérieuse, on en reparlera sur le sauvetage
02:05 de SVB et le sauvetage aussi de crédit suisse en Europe.
02:09 Malgré tout, finalement les taux d'intérêt étaient à peu près à un niveau stable.
02:14 On disait que la Fed avait le consensus et que la Fed en avait fini avec ses hausses de taux.
02:20 L'euro/dollar était stable, à 1,10, remarquablement stable, finalement, entre 1,05 et 1,10 depuis
02:28 le début de l'année.
02:29 Et finalement il ne se passait pas grand-chose, hormis les actions, et au sein des actions,
02:36 le Nasdaq, pour simplifier, pour caricaturer, mais je dirais qu'il y a eu le luxe en Europe,
02:41 chacun pourra trouver d'autres thèmes, mais en réalité...
02:44 Le Nasdaq et ce qui est relié au thème du Nasdaq.
02:46 Voilà, l'intelligence artificielle.
02:48 Et puis, ce qui s'est passé, je dirais que depuis le mois de septembre, fin du mois d'août,
02:58 début de septembre, on a eu une accélération sur les taux d'intérêt.
03:02 Donc aujourd'hui, par exemple, sur le taux d'isent américain, on est à 4,70.
03:08 On était à 3,85 en début d'année, donc on est quasiment à 100 points de base de
03:14 hausse sur les taux longs américains.
03:16 Sur le 30 ans, c'est encore plus élevé.
03:18 On était à 3,85 encore au mois de juin.
03:20 Oui, oui, absolument.
03:21 En début d'année, au mois de juin, on était sur ces niveaux-là.
03:23 Et donc, finalement, ce qu'on voit, c'est que sur les taux d'intérêt américains,
03:27 ça va très très vite.
03:28 Il y a une pentification de la courbe, ce qui est à noter, parce qu'on avait des courbes
03:33 qui étaient inversées en record à -100 points de base entre le 2 ans et le 10 ans.
03:37 Et maintenant, on est à -30.
03:39 Donc il y a une pentification.
03:40 On est encore inversé, mais beaucoup moins qu'avant.
03:42 Ce qui traduit deux choses importantes.
03:46 La première chose, c'est que les craintes de récession qu'on pouvait avoir en début
03:55 d'année ne se sont pas reflétées.
03:57 En tout cas, elles sont différées.
03:58 L'économie est plus résiliente que prévue.
04:00 Et donc, c'est la thématique "Rates higher for longer".
04:05 Les taux plus élevés pendant plus longtemps, qui a été maintes fois exprimée.
04:11 Il y a une deuxième raison qui est un peu plus inquiétante.
04:14 C'est les déficits américains.
04:17 On est à 6% de déficit aux Etats-Unis.
04:20 Globalement, dans le monde développé, on a des déficits qu'on n'arrive pas tellement
04:24 à contrôler, avec de plus, une inflation qui semble persistante.
04:28 Et donc, finalement, on a une sorte de spirale qui est en train de se mettre en place entre
04:33 des déficits plus élevés, de l'inflation moins contrôlable, en tout cas qui est persistante.
04:38 Et finalement, c'est aussi la surprise de l'année.
04:42 C'est en fait une inflation qu'on a du mal à faire rebaisser naturellement.
04:47 Le résidu d'inflation, alors il y a une partie de l'inflation qui s'est enlevée.
04:50 Les chocs ont été transitoires en partie pour un bon nombre de prix sur les biens,
04:54 etc.
04:55 Mais il y a un résidu d'inflation, vous dites, avec lequel il va falloir apprendre à vivre.
04:59 Et d'autre part, finalement, les déficits budgétaires n'arrangent pas, ne feront qu'aggraver
05:05 cette situation.
05:06 On pourrait même rajouter une troisième raison, qui est un peu plus politique, mais
05:09 qui est intéressante à analyser.
05:11 C'est que les réserves, finalement, de bons du trésor international sont en train de
05:16 baisser, et notamment les ventes de la Chine.
05:19 Ces facteurs expliquent le fait qu'on a une hausse des taux longs aux États-Unis et pas
05:27 tellement des taux courts.
05:28 Parce que finalement, les taux courts, l'idée que la Fed va peut-être faire une hausse
05:33 d'ajustement d'ici la fin de l'année, ce n'est même pas sûr, on verra.
05:36 Mais ce n'est pas essentiel, finalement.
05:39 L'essentiel, c'est que finalement, on a une accélération assez dramatique des taux
05:43 longs, et que cette hausse des taux longs, elle reflète aussi une hausse des taux d'intérêt
05:48 réel.
05:49 On en avait parlé lors d'une précédente émission.
05:51 Et donc voilà, finalement, la macro est venue supplanter les actions.
05:58 La hausse des taux longs, c'est vraiment purement de la macro.
06:02 Ça a provoqué une onde de choc sur les marchés, et qu'on peut voir sous plusieurs formes.
06:08 La première forme, c'est la hausse du dollar, contre à peu près tout.
06:12 Contre le yéne, c'était depuis longtemps.
06:14 Mais pas uniquement, on le voit contre l'euro, contre les devises cycliques aussi, contre
06:20 les devises émergentes aussi.
06:22 Et on sait que la hausse du dollar, c'est quand même une diminution de la liquidité
06:26 globalement dans les marchés financiers internationaux.
06:28 Deuxième onde de choc, la baisse des matières premières cycliques, qui sont corrélées
06:36 à la hausse du dollar aussi.
06:38 On le voit sur le cuivre, par exemple, qui a baissé.
06:40 On le voit aussi sur l'or, qui baisse aussi.
06:45 Et puis, troisième onde de choc, c'est la correction des actifs cycliques.
06:52 Alors, qui pour l'instant, il faut relativiser, qui n'est pas très significatif.
06:58 C'est un effritement, une baisse.
06:59 On est à 8% de correction par rapport aux plus hauts atteints pendant l'été, aussi
07:05 bien aux Etats-Unis qu'en Europe.
07:06 C'est pareil.
07:07 Par exemple, sur le Nasdaq, on est encore à 35% de hausse depuis des années, ce qui
07:14 est quand même considérable.
07:16 Par contre, sur le resoldemi, les petites capitalisations américaines, on est négatif
07:24 depuis le début de l'année.
07:26 Sur les actions chinoises, on est à -10% depuis le début de l'année.
07:30 Et puis, finalement, il y a une disparité très forte, en réalité.
07:36 On n'est pas capable d'avoir, en lisant les performances et finalement en regardant la
07:42 situation de manière très pragmatique, de tirer un jugement sur est-ce qu'on est en
07:48 bull market ou en bear market.
07:51 On ne peut pas le savoir.
07:52 Si vous regardez le resoldemi, on n'est pas loin des plus bas de 2022, vous dites que
07:55 c'est un bear market.
07:56 Vous regardez les petites banques américaines, c'est un bear market.
08:00 Vous regardez le Nasdaq, c'est un bull market.
08:02 Donc, cela illustre tout à fait la situation.
08:06 Mais dans ce cadre-là, il y a eu quand même aussi une hausse des indicateurs d'aversion
08:11 au risque qu'on doit regarder de près.
08:12 Jusqu'à présent, l'aversion au risque était faible.
08:17 Il n'y avait pas de stress dans le marché.
08:18 Désormais, on a une hausse du stress.
08:21 Alors, des volatilités implicites qui sont plus élevées.
08:23 C'est ce qu'on voit sur le VIX notamment, mais d'autres volatilités implicites.
08:27 On voit également des hausses de volatilité sur d'autres marchés que les actions.
08:34 Je parlais des taux, mais aussi sur les devises.
08:37 La vol monte sur d'autres classes d'actifs que les actions.
08:40 Absolument.
08:41 On voit aussi les spread de crédit s'écarter.
08:44 Cela commence.
08:46 En réalité, on avait finalement un marché du crédit qui était très résilient.
08:50 Il suit maintenant, il emboîte le pas de la hausse de la volatilité, la hausse du VIX
08:55 qui est un peu leader dans ce mouvement de retrait.
08:58 Et donc, finalement, on a une tension des conditions financières qui est aujourd'hui
09:02 palpable et qu'on peut expliciter.
09:05 Dans cet ensemble, ce qu'il faut voir, c'est que tant que la macroéconomie n'est pas stabilisée,
09:14 les marchés d'action seront instables.
09:15 Parce que ce ne sont pas des taux qui accélèrent violemment à la hausse, mais des taux réels.
09:21 Ce n'est pas une situation stable pour les marchés.
09:23 On le voit aussi dans les compartiments de l'économie réelle.
09:26 Et paradoxalement, je dirais que les disparités qu'on voit en bourse et dans l'économie
09:33 réelle peuvent précipiter, peuvent entamer la stabilité financière mondiale.
09:43 Tout simplement parce que les hausses de taux sont plus justifiées par les exubérances
09:48 et les excès de valorisation de quelques secteurs.
09:51 Ce qui est très perturbant dans la repentification de la courbe de taux, de ce que je comprends,
09:56 c'est qu'on pouvait attendre ce qu'on appelle un bull steepening, c'est-à-dire l'idée
10:00 que la courbe allait se repentifier par le bas, par les taux courts, le ralentissement
10:04 devenant potentiellement une récession économique aux Etats-Unis.
10:08 Le marché anticipe que la Fed va commencer à souplir ses conditions, commencer à baisser
10:13 ses taux.
10:14 Et donc dans un bull steepening, c'est la partie courte, ce sont les taux courts qui
10:17 baissent et qui donnent ce mouvement de repentification de la courbe.
10:21 Là, ce n'est pas du tout ça.
10:22 Là, les taux courts restent higher et c'est la partie longue qui décroche avec un phénomène
10:26 de correction obligatoire qui continue.
10:28 Tout à fait.
10:30 C'est vraiment en quelque sorte un playbook, un cas d'exemple de krach obligataire.
10:37 46% de baisse j'ai vu pour une obligation du Trésor américain.
10:42 Absolument.
10:43 Le pic de mars 2020.
10:44 Et ce n'est pas un krach obligataire qui est provoqué tant par la Banque centrale,
10:47 encore qu'on l'a dit aussi dans des émissions précédentes que les banques centrales, il
10:51 faut le savoir quand même, purgent leur bilan.
10:53 Donc il y a quand même une baisse de bilan.
10:55 Il y a un resserrement monétaire par la hausse de taux, mais il y a aussi un resserrement
10:59 monétaire par la baisse des bilans.
11:00 Que cette baisse des bilans, elle se prolonge à un rythme constant, tant aux Etats-Unis
11:07 qu'en Europe, dans toutes les zones géographiques d'ailleurs, sauf en Chine.
11:10 Mais en tout cas, on a les ingrédients d'un krach obligataire qui s'est déjà produit.
11:22 On ne sait pas où il va s'arrêter parce qu'on sait très bien que dans un krach, il
11:27 y a de l'exagération aussi.
11:28 Et finalement, des investisseurs très célèbres comme je pense par exemple à Bill Ackman
11:36 avaient parfaitement vu la situation.
11:39 Et en réalité, ce qui se produit, c'est vraiment une hausse des taux sur les parties
11:44 vraiment longues de la courbe américaine et qui est engendrée par les différents
11:50 facteurs que nous avons explorés au début.
11:52 Ce krach obligataire est tellement puissant semble-t-il que les analystes de Barclays
11:59 disent que pour stopper le krach obligataire, il faut un krach action.
12:02 C'est-à-dire que pour redonner de l'intérêt et pour qu'on voit les marchés obligataires
12:06 rallier à nouveau, il faudra qu'on passe par un stock-scratch.
12:09 C'est le message malheureusement que nous donnent les indicateurs de stress.
12:14 C'est-à-dire que les indicateurs de stress nous disent aujourd'hui que ce krach obligataire
12:19 a un impact sur la stabilité financière.
12:21 Alors soit les banques centrales capitulent d'elles-mêmes, ce qui ne semble pas être
12:27 le cas.
12:28 Même SBB ça les a fait reculer temporairement.
12:30 Voilà.
12:31 Soit les marchés financiers capitulent eux-mêmes, ce qui fera réagir les banquiers centraux.
12:37 Eh bien voilà ce qui est dit.
12:41 Merci beaucoup pour cette mise en perspective Jean-Jacques.
12:43 Jean-Jacques Oana qui était avec nous, l'invité de ce dernier quart d'heure de Smartbourse.
12:47 Jean-Jacques qu'on retrouve régulièrement dans l'émission à 17h45.
12:51 Donc consultant indépendant et membre du board de la fintech AI4Alpha.
12:55 Merci.
12:56 Au revoir.
12:56 [Musique]

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