SMART BOURSE - Emission du vendredi 22 septembre

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Vendredi 22 septembre 2023, SMART BOURSE reçoit Julien Nebenzahl (Futur AM) , Olivier Raingeard (Directeur des investissements, Neuflize OBC) et Jérémie Boudinet (Head of Investment Grade Credit Portfolio Management, La Française AM)

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00:00 Bienvenue dans Smart Bourse, votre émission quotidienne pour rester à l'écoute des
00:11 marchés sur Bsmart. Chaque jour du lundi au vendredi à 17h en direct si vous nous
00:15 suivez via vos box à la télévision sur Bsmart TV ou en replay bien sûr à consommer
00:19 sans modération à travers notre plateforme bsmart.fr ou encore en podcast sur l'ensemble
00:24 de vos plateformes préférées. Au sommaire de cette édition ce soir, le bilan d'une
00:29 semaine qui aura été marqué sur les marchés par un retour de volatilité, toute classe
00:34 d'actifs confondue. On a vu en tout cas des mouvements de marché plutôt orientés dans
00:39 l'idée du risk off avec des indices actions qui auront accusé une baisse hebdomadaire
00:45 en Europe, aux Etats-Unis même si on reste dans des bornes bien identifiées depuis plusieurs
00:50 mois. Le CAC 40 se stabilise dans cette fin de semaine juste sous le niveau des 7200 points.
00:56 Je vous donnerai le détail dans un instant avec Alix Nguyen. Volatilité au moment où
01:01 toutes les grandes banques centrales depuis une semaine ont pu communiquer leur message
01:06 de rentrée aux investisseurs depuis la BCE jeudi dernier, il y a un peu plus d'une semaine,
01:11 jusqu'à la Banque du Japon encore ce matin. Toutes les grandes banques centrales se sont
01:15 exprimées avec des sorts un peu divers entre celles qui ont choisi la pause, celles qui
01:22 ont choisi de continuer de monter les taux. On a vu que toutes à ce stade n'avaient pas
01:28 forcément la même approche. Nous en parlerons bien sûr avec nos invités de Planète Marché.
01:32 Une chose est sûre et c'est vérifié depuis cet été maintenant, le retour du dollar,
01:38 les taux sous tension, le pétrole également qu'on avait vu un peu baisser après la décision
01:44 de la réserve fédérale américaine mais qui a vite rebondi, plus de 90 dollars toujours
01:49 pour le baril WTI et le dollar face aux autres devises qui restent au plus haut, toujours
01:56 aussi ferme après un rebond de plus de 5% cet été face aux grandes devises majeures.
02:01 Les sujets à suivre pour notre discussion de marché avec nos invités et puis dans
02:05 le dernier quart d'heure, nous évoquerons le segment spécifique de la dette bancaire,
02:10 les dettes financières, pourquoi est-ce que c'est un segment de marché qui peut être
02:14 intéressant aujourd'hui pour s'exposer au secteur bancaire, nous en parlerons avec
02:18 les équipes de La Française AM et Jérémy Boudin est responsable de la gestion obligataire
02:23 Investment Grid à La Française AM qui sera avec nous au plateau à partir de 17h45.
02:27 Tendance mon ami, chaque soir en ouverture de Smart Bourse, c'est Alix Enguyen qui
02:41 nous accompagne ce soir pour nous apporter les infos clés de marché.
02:44 Alix, avec tout d'abord une petite baisse à signaler en cette fin de semaine pour les
02:49 indices actions en Europe qui auront connu une semaine un peu en dent de scie.
02:54 Oui, plus globalement, les marchés européens peinent à digérer les derniers chiffres
02:58 quant à l'économie européenne.
03:00 Les indices préliminaires d'activité suggèrent que l'économie de la zone euro devrait
03:05 se contracter au troisième trimestre.
03:07 L'indice PMI est ressorti à 47,1 points en première estimation de septembre.
03:13 Aux Etats-Unis, les indices PMI d'activité dans le secteur privé restent mordes en septembre.
03:18 L'indice PMI ressort à 50,1 en estimation flash.
03:22 C'est un plus bas de sept mois.
03:24 Du côté des banques centrales, c'est la Banque du Japon qui est venue clôturer la
03:28 séquence de rentrée ce matin en laissant ses taux inchangés.
03:32 Et oui, au sortir d'une réunion de deux jours, la Banque centrale japonaise a décidé
03:37 de maintenir son objectif de taux d'intérêt à court terme à -0,1%.
03:43 Et son engagement à encadrer les rendements à long terme autour de zéro.
03:47 La banque indique qu'elle n'est pas pressée de mettre fin à ces mesures de relance.
03:51 Et puis du côté des valeurs spécifiques qui font l'actualité aujourd'hui, on peut
03:56 retenir la chute du district Solution 30 à Paris.
03:59 Et oui, Solution 30 reste dans le rouge au premier semestre.
04:03 Le fournisseur de services d'assistance numérique a publié une perte nette proche de 14,4 millions
04:09 d'euros.
04:10 Et ce, alors qu'il poursuit son développement en Europe.
04:13 Le chiffre d'affaires du groupe a quant à lui progressé de près de 17%.
04:16 On termine avec l'agenda la semaine prochaine.
04:20 On attend les résultats du premier semestre de nombreuses entreprises.
04:24 Mais aussi une bonne poignée d'indicateurs économiques.
04:27 Allant de la confiance des consommateurs à l'estimation flash de l'inflation en zone
04:31 euro, l'indice des prix PCEO aux Etats-Unis, sans oublier les PMI en Chine.
04:36 Tendance mon ami.
04:37 Chaque soir, les infos clés de marché, le résumé de la séance.
04:40 Et c'est Alix Enghien qui nous accompagne aujourd'hui dans Smart Bourse sur Bsmart.
04:43 Deux invités avec nous ce soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
04:57 Olivier Ringard est avec nous, le directeur des investissements de Neuflys OBC.
05:00 Bonsoir Olivier.
05:01 Bonsoir Grégoire.
05:02 Merci d'être là.
05:03 Ravis de vous retrouver.
05:04 Ravis de retrouver également Julien Nebbenzal qui est à vos côtés.
05:07 Bonsoir Julien.
05:08 Bonsoir Grégoire.
05:09 Vous êtes administrateur d'Advise.
05:11 Peut-être revenons sur la séquence Banque Centrale qui a animé quand même les marchés,
05:15 les investisseurs depuis un peu plus d'une semaine maintenant.
05:18 Je le disais en introduction, toutes les grandes banques centrales des pays développés,
05:23 mais des pays émergents également, ont pu s'exprimer depuis un peu plus d'une semaine
05:26 maintenant.
05:27 Est-ce qu'ils coïncident sur le plan des marchés à un retour de volatilité un peu
05:32 généralisé, pas que sur les marchés actions, mais on a vu des mouvements obligataires,
05:36 on a vu des mouvements de devise, on voit des mouvements également toujours sur les
05:40 matières premières et sur le pétrole.
05:42 Il y a peut-être un lien d'ailleurs entre les deux, entre le déluge de communication
05:45 de Banque Centrale et le retour d'un marché peut-être un peu plus agité sur la séquence
05:51 Olivier.
05:52 C'est vrai que les banques centrales ont retenu l'attention, c'est vrai que leur
05:55 communication a été somme toute assez habile.
05:58 Si on regarde la Banque Centrale Européenne, on a eu une hausse d'oviches, si on regarde
06:04 la Banque Centrale Américaine, on a eu une pause au quiche, donc c'était à peu près
06:08 conforme aux anticipations.
06:11 Mais ce qui retient plus particulièrement l'attention, c'est ce qui se passe sur
06:15 l'autodisant américain.
06:16 Et c'est lui qui est vraiment le facteur explicatif de ce petit regain de volatilité
06:24 pour l'instant, en espérant qu'il reste petit, puisque les investisseurs considèrent
06:30 que la Banque Centrale Américaine d'abord laisse la porte ouverte à une hausse de taux
06:34 directeurs d'ici à la fin de l'année, même si pour notre part nous pensons qu'elle
06:39 ne franchira pas le pas, et d'autre part dit qu'elle ne souhaite plus vraiment baisser
06:45 les taux à l'horizon fin 2024, moins qu'initialement anticipé.
06:52 Ce qui retient également l'attention, c'est qu'au sein du comité de politique monétaire
06:58 américaine, il semble qu'il y ait des différences d'opinion qui soient assez spectaculaires,
07:05 avec des oppositions entre ceux qui souhaitent continuer à durcir et ceux qui pensent que
07:11 le mouvement de durcissement est désormais derrière nous.
07:15 En fait, cette opposition, elle caractérise probablement, ou elle matérialise le fait
07:20 qu'on est dans une période d'incertitude sur deux ou trois questions qui sont sur la
07:26 table depuis maintenant 15, 18 mois à peu près.
07:30 Le taux directeur, jusqu'où il va ? Le taux neutre de la Banque Centrale Américaine,
07:37 est-ce qu'il est à 2, 3, 3,5, 4% ? Ça reste une question.
07:43 Et puis derrière cette question, que fait l'inflation ? Et in fine, quelles conséquences
07:49 pour la croissance ? Donc en fait, on est en train de se reposer ces questions et le
07:54 fait qu'on se repose ces questions, génère un peu de volatilité sur les différentes
07:58 classes actives.
07:59 Oui, effectivement, les décisions de la Fed et de l'ABCE étaient peut-être convenues,
08:04 consensuelles.
08:05 Néanmoins, notamment après la décision de la Fed, comme vous le remarquez, Olivier,
08:10 ça a bougé sur les taux.
08:11 C'est-à-dire qu'on a quand même marqué de nouveaux sommets sur l'ensemble de la
08:14 courbe des taux aux Etats-Unis.
08:15 Alors, c'est à chaque fois des dixièmes de point de base, mais quand même, sur des
08:19 marches obligataires, ça compte.
08:22 4,50 et plus sur le 10 ans américain.
08:24 On était à 3,80, 3,90 au début de l'été.
08:28 Et le taux réel monte avec tout ça.
08:30 Il continue de monter.
08:31 Oui, c'est vrai qu'on est un peu plus élevé.
08:34 Après, quand on regarde là où on était en fin d'année dernière, on est 15 points
08:39 de basse, je pense, au-dessus des niveaux qu'on avait connus en fin d'année dernière
08:42 sur la partie longue de la courbe.
08:44 Donc, c'est rien de spectaculaire.
08:46 Ce n'est pas un break-out qui laisse entrevoir des niveaux de taux auxquels on ne pense
08:52 même pas aujourd'hui, pour dire les choses.
08:54 Pas encore.
08:55 Je pense qu'aujourd'hui, la Banque centrale américaine a signalé qu'elle n'était
08:58 pas prête à baisser rapidement les taux directeurs.
09:02 Elle n'a fait que confirmer ce message avec ces fameuses dots.
09:05 Maintenant, pour que le mouvement sur les taux longs continue, il semblerait y avoir
09:11 un chaos, il faudrait des statistiques, en particulier sur le marché de l'emploi,
09:14 qui corroborent l'idée que cette économie américaine ne veut décidément pas atterrir.
09:18 On l'a vu encore, les derniers chiffres, effectivement.
09:21 Alors, les enquêtes ont tendance à être beaucoup plus pessimistes que la réalité.
09:26 Ça se vérifie encore aujourd'hui.
09:27 Mais on a vu hier les inscriptions hebdomadaires au chômage, qu'on voyait tendre à un moment
09:31 peut-être jusqu'à 300 000.
09:33 Et en fait, non, on se retombe à 200 000 inscriptions hebdomadaires au chômage, ce
09:37 qui est le chiffre le plus faible depuis, je crois, le mois de mars de cette année.
09:41 Oui, tout à fait.
09:42 Julien, vos commentaires de rentrée sur cette séquence d'une semaine ou d'une dizaine
09:48 de jours, retour de volatilité ou pas ? Est-ce que les marchés sont en train de changer
09:54 de régime, de changer de monde, de changer de logique ou pas ?
09:58 Il y a eu quelques mouvements cette semaine, effectivement, les banques centrales qui
10:04 se sont exprimées, des réactions instantanées qui étaient opposées, réaction positive
10:09 des marchés actions avec la Banque centrale européenne un petit peu avant.
10:13 La semaine dernière.
10:14 La réaction négative sur la décision de la banque, enfin le communiqué de la Banque
10:19 centrale américaine.
10:20 Il y a toujours, quand il y a une annonce, un chiffre, etc., il y a toujours un ajustement.
10:25 Mais le niveau, la valeur retenue, en tout cas le prix de marché qu'on constate, pour
10:31 moi, il reflète beaucoup plus ce qui est anticipé dans six mois.
10:34 Donc en fait, quand on a ces mouvements, on a des mouvements d'ajustement, simplement.
10:40 Est-ce que ces mouvements d'ajustement peuvent participer de la création d'une tendance ?
10:43 Là, il faudrait se pencher sur l'analyse technique du marché et pour l'instant, aucune
10:49 indication n'est donnée.
10:50 Donc on est dans une évolution qu'on appelle latérale.
10:52 Je vous fixais, je crois, en avril-mai, une sorte de range d'évolution de 10% sur les
10:58 actions européennes.
10:59 On n'a même pas fait ces 10%, on est sur un chiffre inférieur.
11:01 C'est qu'on fait plus 5, moins 5, là, depuis 6, 7 mois, c'est ça ?
11:04 Non, non, mais entre le sommet et le creux, on n'a pas fait 10%, on a fait plutôt 7
11:08 ou 8, ce qui est vraiment très étroit, c'est assez exceptionnel.
11:11 On peut se poser la question de l'origine de ça du point de vue de la finance classique,
11:18 orthodoxe.
11:19 Moi, à mon point de vue, ma théorie, mais ce n'est pas de mon domaine d'intervention,
11:24 c'est qu'on assiste à une période de... on revalorise les actifs longs, risqués,
11:32 donc les marchés d'action essentiellement, à l'aune de la nouvelle donne de taux et
11:37 de taux longs.
11:38 C'est-à-dire par le mécanisme d'actualisation des flux futurs, une fois que les années
11:42 financières ont fait leur travail d'anticipation de bénéfices, on reconstitue le prix tel
11:47 qu'il devrait sortir des modèles financiers.
11:49 Alors, ça n'a pas de sens en soi, c'est juste une norme, mais ça aide quand même
11:53 toujours l'ensemble des investisseurs de fixer ce cadre.
11:56 C'est pour ça qu'on a eu une disparité sectorielle cet été, au cours des derniers
12:02 mois.
12:03 Maintenant, sur la Banque Centrale, sur les décisions des banques centrales elles-mêmes,
12:06 moi, mon point de vue, c'est que ce qui se passe, c'est simplement, je dis ça depuis
12:10 quelques trimestres, c'est une normalisation de politique monétaire.
12:14 Je ne suis pas convaincu, et les faits montrent sur 150 ans, que les décisions de politique
12:20 monétaire ont un réel impact sur la baisse de l'inflation.
12:23 Donc je pars de ce principe-là.
12:24 Mais qu'en revanche, la normalisation de politique monétaire, ça y participe et c'est
12:29 tout à fait normal.
12:30 C'est quelque chose qui est tout à fait normal.
12:31 Donc, il se trouve que l'inflation est arrivée et les banques centrales, les premières,
12:38 ont collé la normalisation à la notion d'inflation.
12:40 Tant mieux.
12:41 Ça a justifié tout ce qui était en train d'être fait.
12:43 Tout ce qui a été fait jusqu'à présent.
12:45 Mais si on revient au point de départ, avant l'inflation, on a passé quand même 15 ans
12:49 à vouloir de l'inflation, du côté des autorités monétaires, et donc à créer
12:53 les conditions pour celle-ci.
12:54 Les conditions monétaires, c'est le terreau, ça a été mis en place, mais ce n'est
12:58 pas ça qui fait l'inflation.
13:00 L'inflation est arrivée de manière vraiment...
13:04 La source principale du démarrage de l'inflation, c'est le problème de dysfonctionnement de
13:11 la chaîne de production suite à l'événement exceptionnel qu'est le Covid.
13:15 Donc, on s'est aperçu que le flux tendu, quand on le remet en marche, il ne marche
13:18 pas parfaitement.
13:19 Il y a ça et des facteurs géopolitiques qui sont tout à fait liés et qui disent
13:24 maintenant il faut qu'on puisse produire quand même des choses un petit peu plus
13:28 près de chez nous.
13:29 Donc, ça modifie le système de production.
13:31 Est arrivée ensuite la deuxième étape, pas majoritaire mais qui est significative,
13:34 qui est la survenance de la guerre en Europe.
13:36 Et une forme de déstabilisation un peu de la logique sur le marché de l'énergie.
13:42 Ces éléments-là, ce sont des éléments sur lesquels les banques centrales n'ont
13:45 aucune autorité.
13:47 On ne peut pas leur reprocher, elles ne peuvent rien faire.
13:50 En revanche, normaliser une politique monétaire qui avait pour but de permettre l'inflation
13:56 et qui a donné ce terreau, c'est nécessaire.
13:59 Parce qu'on ne peut pas dans un contexte d'inflation laisser une politique monétaire
14:03 extrêmement laxiste.
14:04 Donc, elles ont lâché pour faire ce chemin, ce qu'on appelle la "forward guidance",
14:10 de manière à pouvoir se raccrocher à des données, le fameux "on suit les données
14:14 de marché", etc.
14:15 Mais en fait, l'objectif c'est simplement que les taux soient à un niveau qui soit
14:19 compatible avec le niveau de croissance tel qu'on le voit en ce moment et le niveau
14:23 d'inflation.
14:24 Quel est le bon ? Moi, je ne rentre pas dans ce débat mais c'est bien leur projet.
14:28 Et leur projet n'est que leur...
14:29 Vous êtes en train de dire que les banques centrales, par construction, sont pro-croissance
14:33 et resteront pro-croissance dans leur approche.
14:35 Parce que dans le discours, ce n'est pas forcément ce qu'on entend tous les jours.
14:39 Je ne vous citerai pas encore Joachim Nagel hier, etc.
14:42 Mais il y a l'idée chez certains banquiers centraux qu'en Europe, alors c'était le
14:47 discours aux Etats-Unis, ça l'est moins aujourd'hui, mais en Europe, s'il faut une récession,
14:51 ne vous inquiétez pas, ça ne nous fera pas peur.
14:53 Non mais qu'il y ait...
14:56 Quand on monte par exemple les taux, on impacte tout ce qui va dépendre par la transmission
15:01 sur la partie longue, on va impacter tout ce qui va dépendre, tout ce qui va générer
15:05 l'investissement à long terme.
15:07 Et là-dedans, il y a des tas de choses dont par exemple l'immobilier.
15:09 Et on voit évidemment aux Etats-Unis et maintenant en Europe qu'il y a des choses qui bougent
15:13 de ce côté-là, c'est tout à fait normal.
15:14 Donc il y a un impact de la décision monétaire sur la conjoncture économique.
15:21 Mais pas sur la structure.
15:22 La structure n'est pas impactée par ça.
15:25 Ce sont des variations et des ajustements qui se mettent en place.
15:28 Est-ce que les banques centrales sont pro-croissance ? Mon professeur de politique monétaire me
15:33 disait il y a...
15:34 C'était en 93, donc ça remonte à un petit moment maintenant.
15:36 Il me disait, n'oubliez pas, à nous étudiants, n'oubliez pas chers amis, que dans le cours
15:40 de politique monétaire, il y a le mot politique.
15:43 Il voulait bien nous rappeler que l'indépendance des banques centrales, il nous disait ça
15:47 dès le début, dont on parle, etc. n'existe pas.
15:49 C'est une apparence.
15:52 Donc les banques centrales sont tout aussi concernées par la situation sociale, par
15:57 la situation politique, par la situation géopolitique, que les politiques eux-mêmes.
16:01 Sauf que leur domaine d'intervention n'est pas celui-là.
16:04 Oui, c'est la solidité des prix.
16:06 Donc est-ce que les banques centrales ont envie de créer une récession profonde qui
16:10 va créer des bouleversements dans la zone politique dans laquelle elles travaillent ?
16:14 Probablement pas.
16:15 Je vous réponds indirectement.
16:17 Oui, je comprends.
16:20 À propos de récession ou pas d'ailleurs, Olivier, qu'est-ce qu'on peut dire à ce
16:24 stade ? Est-ce qu'on a toujours sur la table plusieurs scénarios macro pour les 3, 6, 9
16:30 prochains mois avec des probabilités qui restent équivalentes entre l'idée du soft
16:35 lending américain, pourquoi pas l'idée d'un no lending aux Etats-Unis ? Non mais
16:40 je veux dire, on sort d'un troisième trimestre aux Etats-Unis en termes de croissance qui
16:43 aura été sans doute très bon, au-delà du potentiel peut-être.
16:47 L'idée de la récession ou du hard lending qui est peut-être pas totalement écartée
16:52 non plus.
16:53 Où est-ce qu'on en est dans la navigation là entre ces différents scénarios ? Sachant
16:57 que les perspectives qui ont été offertes par la Fed cette semaine, qui met à jour
17:02 régulièrement ces prévisions, montrent quand même un cerneau de croissance pour
17:07 cette année et pour l'an prochain qui a été révisé en nette hausse par rapport
17:11 aux prévisions précédentes du mois de juin et du mois de mars.
17:14 Je n'ose pas vraiment répondre à votre question parce qu'on faisait partie des
17:19 personnes qui considéraient que nous aurions une récession en 2023.
17:23 Vous n'étiez pas le seul Olivier.
17:25 Ce qui me rassure.
17:26 C'est lui ! Je ne sais pas mais en tout cas oui.
17:29 Mais c'était un consensus en début d'année.
17:31 C'était la récession la plus attendue de l'histoire économique et financière.
17:35 La Fed a cassé quelque chose, ça craquera.
17:37 Qui n'a pas eu lieu.
17:38 Et d'ailleurs cette histoire avait été aiguisée si je puis dire par la crise sur
17:45 les banques ou les fortes tensions sur les banques régionales américaines au mois de
17:49 mars et finalement notre économie américaine pour l'instant est toujours très dynamique.
17:55 Et donc une fois qu'on s'est trompé, on essaie de comprendre pourquoi on s'est trompé.
18:00 La manière dont on analyse la situation est la suivante.
18:05 D'abord il y a tout de même des facteurs exceptionnels que l'on a du mal à quantifier
18:12 qui soutiennent l'économie américaine.
18:13 Facteurs exceptionnels que sont l'excès d'épargne.
18:16 On n'arrive pas tout à fait bien à estimer.
18:19 Vous avez différentes estimations sur cet excès d'épargne en particulier aux Etats-Unis.
18:23 Certaines disent que fin d'année cet excès d'épargne aura été totalement dépensé.
18:28 D'autres disent que ça va même jusqu'en 2025.
18:31 Donc ça c'est le premier élément.
18:35 Deuxième élément, la politique budgétaire qui a quand même été un facteur de soutien
18:42 qui a sans doute soutenu un peu la demande et donc peut-être l'inflation aussi dans
18:46 un contexte où on avait une problématique sur l'offre qui a alimenté l'accélération
18:51 de l'inflation.
18:52 Cette politique budgétaire, on voit que progressivement elle devient moins accommodante mais il n'est
18:59 pas évident que dans une année d'élections l'année prochaine, l'administration Biden
19:05 par exemple n'ait pas envie de réutiliser cet outil budgétaire.
19:09 Troisième élément, la croissance du crédit.
19:11 La croissance du crédit a été quand même très vigoureuse jusqu'à la fin de l'année
19:16 dernière, début de cette année.
19:18 Potentiellement on a eu un excès de croissance du crédit dans l'anticipation d'un durcissement
19:22 de la politique monétaire.
19:24 Et puis dernier élément, le marché de l'emploi qui est extraordinairement résilient et puissant.
19:31 Si on regarde ces quatre facteurs et qu'on essaye de les projeter à six mois, on se
19:37 dit que l'excès d'épargne, effectivement il y a une grosse incertitude sur quand il
19:43 sera totalement dilapidé mais on avance dans le temps et progressivement celui-ci est
19:48 en train de diminuer significativement.
19:51 Sur la problématique budgétaire, a priori on a des signaux aujourd'hui qui montrent
19:56 que la politique budgétaire américaine est en train légèrement de se refermer.
20:04 On va également voir dans quelques jours le débat budgétaire aux Etats-Unis et une
20:11 potentielle refermeture des services publics américains.
20:15 Mais ce qui donnera un peu le ton sur la manière dont sera utilisé ce levier budgétaire
20:21 au cours de ces prochains mois.
20:23 Le crédit est en train de ralentir, là les statistiques sont assez claires, on a un
20:29 ralentissement sensible du crédit et sur l'emploi, celui-ci reste dynamique mais quand
20:35 vous regardez les créations d'emplois en rythme mensuel, la tendance est très claire.
20:40 On n'est plus sur 500 000 créations d'emplois en rythme mensuel, on commence à tangenter
20:47 tranquillement vers les 200 000 créations d'emplois.
20:51 Les jobs ouverts sont en train également de corriger de manière assez significative
20:56 depuis deux mois.
20:57 Donc là aussi on voit que le marché de l'emploi ralentit.
21:03 Donc ces quatre variables sont progressivement en train de s'éteindre.
21:07 Est-ce que ces quatre variables peuvent générer une économie américaine qui tombe en récession
21:16 ? Probablement pas, mais une question subsidiaire
21:23 demeure qui est ce durcissement monétaire et cette diffusion à l'ensemble de la sphère
21:28 économique.
21:29 Et à ce sujet là on est un peu mal à l'aise parce que ce que l'on voit c'est qu'on
21:35 a ce durcissement monétaire dont le délai de transmission est potentiellement plus
21:42 long que celui que l'on avait avant.
21:45 Pourquoi ? Parce qu'on est dans un monde où d'abord l'endettement à taux variable
21:51 est moins important par exemple que ce qu'on avait en 2005, 2006, 2007 aux Etats-Unis
21:56 et ensuite on a eu des entreprises qui ont eu la très bonne idée de se refinancer en
22:02 2020, 2021 au moment où les taux étaient extrêmement bas.
22:05 Quand on projette ça, ce que l'on voit c'est que sur la partie refinancement, les
22:10 refinancements vont de nouveau redevenir progressivement importants sur l'année 24, mais surtout
22:14 le 25 et 26 donc ce délai de transmission il est plus long et donc l'effet va progressivement
22:21 se faire sentir.
22:23 Ça, ça nous inquiète un peu et ça, ça nous laisse penser que l'économie américaine
22:27 va quand même vraiment ralentir au cours de ces prochains mois.
22:31 Après, est-ce qu'on continue à appeler ou à considérer qu'on va vers une récession ?
22:35 Non, on est plutôt sur un scénario de stagnation parce que d'un autre côté l'inflation
22:39 décélère, ça recrée un peu de pouvoir d'achat réel, positif et ça soutient le
22:44 revenu réel du consommateur américain.
22:46 Ça change beaucoup de choses pour l'investisseur ? Qu'on soit dans l'idée d'un scénario
22:50 de stagnation, une économie sous le potentiel, mais qui ne bascule pas dans quelque chose
22:57 de négatif, auto-entretenu sur plusieurs trimestres ?
23:00 Je pense que ça, c'est un changement significatif et c'est d'une certaine manière ce qui
23:04 se matérialise un peu sur les marchés, c'est que si on exclut le scénario de récession,
23:10 on exclut le scénario de chute brutale des bénéfices et donc dans ce cas-là, on ne
23:17 met pas les valorisations sous tension.
23:20 Et donc, ça justifie, ça écarte les scénarios très adverses et ça justifie d'avoir une
23:28 espèce de palier sur le marché, un facteur de soutien.
23:33 Une force de rappel.
23:35 Une force de rappel.
23:36 A contrario, si tout d'un coup on basculait dans le scénario de récession, on basculerait
23:40 dans un scénario de contraction assez significatif des résultats des entreprises et là, le
23:46 facteur de rappel, il serait beaucoup plus difficile à estimer, à quantifier, ça générait
23:54 probablement un mouvement de volatilité plus puissant que celui qu'on vit aujourd'hui.
24:00 Julien, je veux bien qu'on reprenne ce que vous nous racontiez sur cette séquence de
24:06 repricing à nouveau des valorisations, notamment des actifs risqués à duration longue sur
24:11 les marchés actions.
24:12 Voilà, LVMH a perdu 20% au cours de l'été ou quasiment, on n'a peut-être pas fait
24:15 20% pile mais voilà, en tout cas, c'est le genre de valeur à duration longue qui
24:21 a souffert tout au long de l'été face à la remontée des taux réels, etc.
24:26 On en est encore là.
24:28 C'était pour moi la grande histoire de 2022 quand même.
24:31 C'est ce qu'on a vu pendant 6-9 mois en 2022 jusqu'au point bas du mois de septembre
24:37 pour les indices actions en Europe.
24:39 On repart pour un tour, on est encore dans cette phase où le marché doit réapprécier
24:45 la valeur des actifs risqués par rapport à des taux qui ont monté mais on le soulignait,
24:51 bon 4,50 sur le 10 ans américain ou 5,20 sur le 2 ans, on reste dans le cadre quand
24:56 même de ce qu'on connaît depuis quelques mois maintenant.
24:59 On en est encore là.
25:00 C'est la tentation malheureusement pour moi, pour le dire de manière extrêmement naïve,
25:10 de faire des confitures et de mettre les étiquettes sur les pots après.
25:13 Je le dis, je reconnais que c'est une expression un peu triviale.
25:19 Moi je travaille sur les cycles, principalement les grands cycles de comportement.
25:25 J'ai parlé tout à l'heure de structure et d'infrastructure.
25:28 Il y a un auteur dans l'économie qui travaille tout le temps sur ces deux notions, qui les
25:35 met toujours côte à côte, qui est très peu lu, qui est Nicolas Kondratieff et qui
25:40 évidemment est mal interprété.
25:41 Il est dans tous les manuels scolaires, aujourd'hui je ne sais pas encore, à mon époque il était
25:46 dans tous les manuels scolaires mais on ne le lit pas.
25:48 Il y a toujours des hurlus berlus qui ont des fantasmes complotistes qui prennent Kondratieff
25:53 parce qu'en fait si on leur donne Eugène Fama ou Milton Friedman...
25:56 C'est comme les prévisions des mayas ou des incas, c'est ça ?
25:58 Non mais vous leur donnez Milton Friedman ou Eugène Fama, ils ne comprennent pas ce
26:02 que ces types ont écrit donc ils n'arrivent pas à le détourner.
26:04 Or que Kondratieff, ils ont l'impression de comprendre.
26:06 Le travail de Kondratieff est un travail de scientifique.
26:08 Il est mal lu en plus.
26:09 Quand il est lu, il est mal lu.
26:10 C'est un travail de scientifique, il y a structure justement et infrastructure.
26:16 Donc pourquoi est-ce que je dis ça en relation avec la question ? C'est que le travail sur
26:21 les cycles, quand on regarde vraiment la conjoncture, ce sont des cycles courts.
26:26 C'est des cycles de 3 ans et demi, 4 ans.
26:27 Et c'est aussi, c'est ce qu'on appelle le cycle de Kitchin.
26:30 Et c'est aussi le cycle qui a été découvert par le français Clément Jugglar en 1964,
26:34 le cycle de Jugglar, aussi appelé cycle des affaires, qui fait entre 7 et 11 ans selon
26:40 Jugglar lui-même mais jusqu'au NBER américain qui a travaillé là-dessus et qui continue
26:43 de dire que le cycle de Jugglar fait entre 7 et 11 ans.
26:46 Lui c'est encore un cycle de conjoncture mais il a déjà des éléments d'infrastructure.
26:50 Il a déjà des éléments, voilà.
26:52 Le cycle Jugglar dans lequel nous sommes a très probablement commencé autour de 2016,
26:58 très probablement.
26:59 Il se décompose assez logiquement en 3 cycles de Kitchin et nous venons d'entrer depuis
27:05 mi-2022 dans le 3ème cycle de Kitchin.
27:08 Ce cycle-là, c'est un cycle qui commence comme tout cycle par une forme d'expansion
27:14 pour aboutir à la fin, non pas un retour au point de départ mais une phase un peu
27:17 plus récessive.
27:18 Mais c'est 3 ans et demi.
27:20 Donc en fait depuis 2022, c'est du progrès économique qui est devant nous pendant 2
27:27 ans et demi.
27:28 C'était mon point l'an dernier.
27:29 Sauf que la particularité de ce cycle, dans ce cycle de Jugglar, c'est qu'il est faible.
27:34 Et il n'est pas faible, c'est un peu complexe ce que je veux dire mais je suis obligé d'en
27:38 passer par là pour que tu puisses répondre.
27:39 Il n'est pas faible parce que c'est le 3ème élément de Jugglar, il est faible parce
27:44 que c'est le premier élément d'un autre cycle d'un degré supérieur qui a été
27:50 découvert par un économiste américain d'origine russe qui s'appelle Kuznets, qui a eu un
27:54 prix Nobel mais pas pour ce travail-là en 1927, qui a un cycle dite d'infrastructure.
27:59 Ça c'est le cycle qui nous parle vraiment parce qu'on peut le comprendre au niveau
28:05 de ce qui se passe dans nos vies courantes.
28:06 Les années 80, il y a des marqueurs.
28:09 Reagan-Thatcher, c'est un marqueur.
28:11 L'entrée de la Chine dans le commerce mondial, c'est un marqueur.
28:15 Et un cycle de Kuznets, qu'on appelle maintenant cycle de Berry, fait entre 25 et 30 ans, et
28:22 se termine toujours par un excès qui est le reflet de sa propre identité.
28:26 C'est exactement ce qui s'est passé en 2007-2008.
28:29 Ce qui suit après, c'est un nouveau cycle et il nous faut d'abord nous détacher du
28:34 précédent.
28:35 Pour nous détacher du précédent, il y a des marqueurs qui arrivent.
28:38 Il y a eu le Brexit, il y a eu Trump, et de manière générale, le populisme entre 2013
28:44 et 2018 a beaucoup progressé dans le monde entier.
28:48 Pas seulement en Occident, aussi dans les émergents.
28:50 Nous sommes dans ce premier cycle de jugular qui est le début d'un nouveau cycle d'infrastructure
28:55 et la troisième partie, elle est faible.
28:58 Donc, ce que nous avons devant nous, c'est un marché qui évalue la capacité de croissance
29:03 en s'interrogeant, en s'inquiétant, parce qu'elle n'est pas si forte que ça.
29:06 Du coup, il s'est posé la question en 2022 de la récession, puisqu'évidemment les
29:11 données économiques se dégradaient.
29:12 Donc, il se posait la question.
29:14 Donc, si repricing des actions il y a eu à ce moment-là, ce n'est pas du tout pour moi
29:17 relativement tôt, c'est relativement aux anticipations de croissance, anticipations
29:21 de récession qui ont prévalu jusqu'en début d'année, qui maintenant, qui dès le début
29:25 d'année ont commencé à s'étioler.
29:26 La raison pour laquelle elles ont été étiolées, les raisons, à mon avis, il y en a deux.
29:30 La première évidente, c'est que les données économiques ont cessé de chuter, elles se
29:33 sont stabilisées et elles sont toujours au peu près au même niveau.
29:36 La deuxième raison, c'est quand on voit les marchés d'action gagner 25 ou 30% en quelques
29:41 mois, on se dit qu'il y a peut-être une anticipation cohérente qui est là-dedans.
29:47 Puisqu'encore une fois, le cours du jour n'est pas le cours de l'information du jour, c'est
29:51 le reflet de ce qu'il se passera plus tard.
29:53 En revanche, là, ce qui se passe depuis février-mars, cette espèce d'évolution latérale en Europe
29:58 et d'oscillations aux Etats-Unis, c'est ma lecture.
30:02 Alors, ça devait arriver parce que, pour des raisons, pour moi, c'est que la croissance
30:06 ne sera pas si forte que ça.
30:08 Mais si je mets une étiquette sur le pot de confiture, après, je crois que c'est un
30:11 travail de réajustement de la recherche par l'analyse financière classique de la valeur
30:16 des actifs longs en fonction de l'anticipation de taux économiques.
30:20 C'est ce schéma qui est en train de se passer.
30:22 Olivier disait, voilà, jusqu'où les taux directeurs, où est le taux réel d'équilibre,
30:28 etc.
30:29 On est perdu.
30:30 Je vais répondre à ces questions aujourd'hui, à commencer par les banquiers centraux eux-mêmes,
30:32 en tout cas de manière claire, limpide et définitive.
30:35 Désolé, je suis un peu trivial, mais conclusion pour les indices actions, qu'est-ce que ça
30:40 veut dire cette logique de range ?
30:42 Parce que là, je parle sous votre contrôle, Julien, mais c'est vrai qu'on voit quand
30:47 même des rebonds indiciels qui sont toujours un peu plus faibles, qui semblent être un
30:54 peu plus fragiles.
30:55 On voit des tests quand même sur des zones techniques importantes.
30:58 Je ne me glisse pas dans la peau d'un analyste technique.
31:01 Je les écoute, je les lis, je vois qu'il y a le sentiment de quelque chose qui pourrait
31:05 se fragiliser.
31:06 Comment vous évaluez le risque de voir les indices sortir par le bas de ce range, encore
31:11 une fois bien installé, encore une fois aujourd'hui, en cette fin de semaine, le cas qui est autour
31:16 des 7200, etc. ? On n'a pas craqué pour l'instant.
31:20 Mais on a le sentiment qu'il y a une pression un peu qui s'installe de ce point de vue-là.
31:26 Vous parlez des variations des indices.
31:30 On pourrait presque faire la réflexion sur l'analyse technique, l'utiliser pour voir
31:34 si elle nous dit quelque chose.
31:35 Mais la particularité d'un marché action qui monte de 10% par an pendant trois ans,
31:41 c'est que les analystes financiers et les gérants qui travaillent sur les indices financiers
31:44 sont ravis parce que tout est clair et limpide.
31:45 Mais en fait, pour les analystes techniques, c'est exactement la même chose.
31:48 C'est une tendance.
31:49 Ce qui est à la base de l'analyse technique, c'est l'exploitation de la tendance.
31:52 En revanche, dès qu'un marché n'a plus de tendance, vous pouvez demander aux analystes
31:55 de dire "il n'y a plus grand monde qui s'exploite".
31:57 Mais la réalité, c'est que les analystes techniques sont complètement paumés aussi.
32:00 Ce qu'on vient de voir, ça arrive régulièrement des périodes sans tendance.
32:05 C'est une période où personne n'a rien à dire de solide, de concret, de sérieux.
32:09 Ce qui se passe, c'est qu'il y a une digestion de l'information précédente, ce qui est
32:12 en train de se passer.
32:13 J'ai mis une étiquette dessus, mais ça peut être autre chose.
32:15 En tout cas, je crois que c'est ça.
32:16 Et il n'y a rien à dégager de ça.
32:19 Pour vous, à ce stade circulé, il n'y a rien à voir.
32:21 C'est plutôt même.
32:22 Non, je vais essayer quand même de répondre.
32:23 Je vais juste dire qu'il y a peu à dire là-dessus.
32:25 Je dirais que c'est plutôt même pour les gens qui font des opérations à court terme,
32:30 vraiment une grande séquence pour perdre de l'argent.
32:32 C'est vraiment fait pour faire des erreurs, en quelque sorte.
32:36 Maintenant, cette période de pause, elle devait se produire.
32:40 Elle devait être dans un range, pour moi, que j'ai fixé de 10%.
32:42 Il est inférieur, je le disais tout à l'heure, il est de l'ordre de 8%.
32:44 Je l'interprète comme le fait que le sentiment de marché qui était récession au début
32:49 d'année est devenu moindre récession, pas de récession.
32:53 Donc en fait, il y a un courant acheteur qui est rentré pendant cette période-là.
32:56 Ce courant acheteur, je le pense assez solide.
32:58 Je pense qu'il est significatif, qu'il n'apparaît pas ni dans les indicateurs de sentiments,
33:05 etc.
33:06 Mais je l'entends en fait sur les plateaux de télévision.
33:07 Je l'entends dans votre émission.
33:08 Et je pense que ça va générer...
33:11 Vous avez une meilleure oreille que moi.
33:12 Je veux bien.
33:13 Les mots ont totalement changé par rapport...
33:18 Les mots ont totalement changé par rapport à décembre, janvier, février.
33:21 Ah oui, oui, oui.
33:22 Les mots utilisés.
33:23 Par rapport à il y a un an, oui.
33:24 Et donc, quand dans une période de plat, on a cette reprise modérée du sentiment,
33:29 il y a un risque de déception.
33:31 Donc, je vous le dis, moi, ce que je vois en ce moment, contrairement à ce que j'aurais
33:35 dit il y a 6 mois, c'est qu'on devrait avoir un moment d'émotion sur les marchés d'action.
33:40 On va difficilement l'éviter.
33:42 En plus, c'est facile pour moi, septembre, octobre, novembre, c'est toujours un peu cette
33:46 période-là.
33:47 Il y a des risques d'évolution.
33:48 Mais un moment d'émotion, ça veut dire qu'on va se faire peur, quoi.
33:49 Oui, oui, je pense.
33:50 Oui, oui, il va se passer quelque chose là, parce que le sentiment est remonté un peu
33:54 fort sans données particulières.
33:55 Ce n'est pas une forme d'optimisme exacerbé du tout, mais ce sentiment qui a évolué
34:01 n'est pas étayé par des données.
34:03 C'est simplement une décision...
34:04 Il y a une divergence.
34:05 Il s'est créé une divergence entre l'évolution du sentiment et des données.
34:07 C'est une décision qui a été prise par rapport à tout ce qui s'est passé avant.
34:10 On essaie de se dire, tiens, le marché ne bouge plus trop, on se remet un petit peu
34:13 dedans.
34:14 C'est extrêmement dangereux à très court terme.
34:16 Mais donc, sinon, ça ne change pas du tout.
34:18 Et se faire peur, ça veut dire quoi en termes de niveau de marché, Julien ? C'est ça
34:23 que je veux savoir.
34:24 Après, je passe la parole à Olivier Mouchon.
34:25 Je vais terminer ce que je voulais dire par quelque chose.
34:27 Autant je pense que les marchés d'action vont faire de nouveaux sommets historiques
34:30 l'an prochain.
34:31 Je n'ai aucune hésitation là-dessus.
34:33 Donc, je ne sais pas quantifier la correction qui est devant nous.
34:37 Je vous parlais de 10 %, on est plutôt sur 8.
34:40 Si je répercute l'intérieur d'anticipation, entre le sommet et le creux, on doit faire
34:45 entre 15 et 17, moins de 20 %, autour de 15 % par rapport au précédent sommet.
34:50 Donc, on mesure ça sur les principaux.
34:51 Donc, vous dites à court terme, risque d'un nouveau point bas.
34:54 C'est quoi la référence ? C'est les points bas de 2022 ?
34:57 Non, parce qu'heureusement, on a bien monté.
35:01 Ça sera bien au-dessus des points bas de 2022.
35:04 Risque d'un nouveau point bas qui sera au-dessus en Europe des points bas de septembre 2022
35:09 et 2024, nouveau sommet.
35:10 Et 2024, nouveau sommet.
35:12 La tendance au siècle est continue.
35:13 Bon, Olivier, comment on gère la situation présente sur les trois à six prochains mois
35:19 dans une allocation d'actifs ? Comment on gère toutes les possibilités, tous les scénarios
35:26 macro qui sont encore devant nous ?
35:28 Alors, on retourne à l'université déjà pour retravailler les cycles.
35:32 Oui, moi je vais réécouter parce que je me suis un peu perdu à un moment, je pense
35:36 que c'est l'enchevêtrement des cycles, mais c'était très clair, Julien, c'est juste
35:39 qu'il faut réécouter.
35:40 Alors, mais je pense que...
35:43 Alors, nous, on ne travaille pas avec cette analyse de cycle, même si c'est quelque chose
35:49 avec lequel on est familier, en particulier pour essayer d'estimer les durées de phase
35:56 d'expansion et de récession.
35:59 La manière dont on analyse la situation aujourd'hui est la suivante, c'est qu'on a trois scénarios
36:06 dont on parle depuis 18 mois, que sont récession, soft lending et no lending, en particulier
36:15 pour l'économie américaine, c'est moins vrai pour l'économie européenne et l'économie
36:19 chinoise.
36:20 Sur ces trois scénarios, en fin d'année dernière, on était plutôt sur le scénario
36:28 de récession.
36:29 Aujourd'hui, on est plutôt sur le scénario de soft lending, motivé en particulier par
36:37 une désinflation qui soutient le consommateur.
36:40 Et on considère que les deux autres scénarios restent quand même sur la table et peuvent
36:46 ressurgir assez rapidement, à l'instar de ce que l'on voit de cette semaine sur les
36:53 taulons américains ou des interrogations qu'on peut avoir sur l'économie européenne,
36:59 quand on regarde par exemple ces fameux indices PMI.
37:03 Donc la conséquence de cela, c'est qu'on a aussi bien sur la partie action que sur
37:09 la partie obligation, une allocation relativement neutre par rapport à nos indices de référence.
37:16 Donc on ne se prononce pas sur le coup d'après, considérant que la visibilité est somme
37:22 toute assez réduite et on préfère donc être investi à hauteur de nos indices de
37:29 référence sur la partie action et sur la partie obligataire.
37:32 Ensuite, au sein de la partie action, on a une légère préférence pour les actions
37:39 américaines et j'ai l'impression qu'on n'est pas les seuls.
37:41 - Un moment, la croissance, oui, c'est ce qui attire.
37:46 - C'est ce qui attire.
37:50 Après, le marché est quand même assez complexe.
37:53 Vous voyez qu'aux Etats-Unis, c'est la croissance qui, depuis, enfin c'est tout
37:58 le style croissance.
37:59 - Oui, le style croissance, oui, bien sûr.
38:00 - Qui surperforme de manière somme toute incroyable.
38:06 On est à plus de 33% sur le style croissance aux Etats-Unis et la value est à zéro.
38:12 Et en Europe, l'analyse est beaucoup plus contrastée puisque value et croissance font
38:18 peu ou prou la même chose.
38:19 Et quand vous regardez depuis début 2022, c'est la value qui fait plus que la croissance.
38:25 Mais aujourd'hui, on préfère plutôt les Etats-Unis et au sein de notre allocation
38:32 sectorielle, on n'a pas de préférence sur le style value, sur le style croissance,
38:38 puisqu'on voit bien que c'est complexe selon les...
38:41 - Ça tourne.
38:42 - Ça tourne, selon les régions également.
38:44 Ça bouge assez vite.
38:46 On a toujours une préférence pour le secteur technologique, assis sur des croissances qui
38:52 doivent rester plutôt bonnes au cours des prochains mois, avec un point d'attention
38:58 sur la valorisation, ce qui se passe sur les taux lents.
39:02 On a un biais qualité avec une surpionnération de la santé qui a bien sous-performé cette
39:09 année en particulier aux Etats-Unis, mais qui peut offrir de la stabilité dans un environnement
39:16 peu lisible à court terme.
39:19 Et puis de l'autre côté, ce qu'on n'aime pas trop, ce sont les financières.
39:23 On est plutôt absent du secteur financier et également la consommation discrétionnaire,
39:30 qui dans un scénario de poursuite du ralentissement économique peut envoyer quelques signaux
39:36 déceptifs.
39:37 - Moi j'ai une question sur les taux américains, enfin quand même sur les treasuries.
39:40 Alors, dans un portefeuille obligataire, je comprends, on peut loquer du rendement aujourd'hui
39:45 sur de la dette privée, de la dette d'entreprise, etc.
39:48 Et pourquoi pas sur une partie de la courbe obligataire.
39:50 Le cash le rapporte beaucoup, on l'a beaucoup raconté.
39:54 Mais je vois que dans des phases à nouveau de correction ou de repricing des actifs risqués,
40:01 le 10 ans américain joue absolument plus le rôle d'actif clé de protection qu'il
40:07 est censé jouer dans un portefeuille balancé, équilibré.
40:11 La période estivale, le début du mois de septembre, nous le montre bien et nous le
40:16 démontre à nouveau, s'il fallait un exemple supplémentaire, Olivier.
40:20 - C'est vrai que le consensus a été un peu pris à défaut de nouveau sur cette thématique,
40:25 puisque en fin d'année dernière, début de cette année, c'était le 60-40.
40:28 - Mais bien sûr, les trois premiers mois de l'année ont été exceptionnels pour le 60-40.
40:32 - C'était exceptionnel, il fallait plutôt être absent du high yield parce qu'il y avait
40:36 ce risque de récession et au mois de septembre, on regarde les performances.
40:40 L'obligataire d'état américain est en performance négative depuis le début de l'année.
40:44 L'obligataire d'état de la zone euro est en performance légèrement positive.
40:47 Et le high yield américain et européen est au-delà de +5% depuis le début de l'année.
40:51 Donc en fait, il fallait de nouveau faire un peu le contraire des anticipations de début d'année.
40:55 Mais au-delà de ça, on est toujours, et je rejoins ce qui a été dit, on est toujours
41:04 dans ce mouvement d'ajustement des taux courts, taux longs et ce mouvement d'ajustement des valorisations.
41:11 - Donc c'est normal qu'à ce stade... - Et pour l'instant, c'est facile à dire maintenant...
41:15 - Les dettes souveraines américaines ne jouent pas ce rôle d'actif de protection ou d'actif refuge ?
41:20 - Non, oui, pour l'instant c'est normal parce qu'on est toujours dans la même dynamique
41:22 que l'on a initiée l'année dernière.
41:26 Les taux d'état américains rejoueront peut-être leur rôle de diversification,
41:32 et sans doute, en tout cas historiquement, ça s'est passé comme ça,
41:35 lorsqu'on sera dans un scénario de récession.
41:36 Mais tant qu'on n'est pas dans un scénario de récession et tant qu'on est toujours dans cette logique
41:40 de régime d'inflation plus élevé, donc taux courts plus élevés, donc taux longs potentiellement plus élevés,
41:45 tant qu'on est dans cette thématique-là, l'obligataire américain va avoir du mal à jouer son rôle de diversification.
41:52 - Julien, pour conclure avec vous, vous avez apporté déjà à tous les deux beaucoup d'informations,
41:57 mais sur la partie investissement, Julien, il y a un risque d'émotion devant nous.
42:03 Déjà, comment on se prépare peut-être tactiquement ?
42:05 Est-ce qu'il y a tactiquement quelque chose à faire pour se préparer à ce risque d'émotion,
42:10 comme vous l'avez appelé, et avec quels actifs, là, on est confortable aujourd'hui ?
42:16 - Je disais en avril, je crois, ou en mai, je ne change pas l'exposition aux actions,
42:23 alors que normalement je pourrais le faire, parce que je voyais bien la conso se profiler.
42:27 Je vais rester en cette logique, je vais vraiment partir du principe que s'il y a l'accident dont je parle,
42:33 ça peut être un équivalent SVB, il y a beaucoup d'hypothèses sur la table.
42:37 Si il y a un accident, on va l'accepter et rester à l'intérieur du cycle haussier sur les marchés d'action.
42:43 Après, s'il y a des gens qui sont très équipés pour arriver à très bien se couvrir,
42:48 et être capable aussi de relever sa couverture au bon moment, parce qu'une chose est de se couvrir,
42:51 une autre, si on attend que tout aille mieux pour lever sa couverture, en général on est 15% du repas.
42:56 - Quand on a plus rendu, c'est difficile de racheter.
42:59 - Voilà, je pense qu'il n'y a pas de raison de se préoccuper.
43:05 - Pour quelqu'un qui a du temps, vous dites, touchez pas votre portefeuille action.
43:10 - Non, pour la partie obligataire, je me suis battu des années pour avoir aucune obligation,
43:13 j'ai accepté il y a un an de remettre un petit peu en disant, au moins il y a du taux, ça compensera un risque de moins-value.
43:20 La moins-value s'est bien matérialisée, le taux n'a pas compensé en totalité, loin de là, je pense que cette situation va perdurer.
43:26 Je crois que les marchés obligataires vont glisser et glisser à horizon de 2-3 ans.
43:31 De temps en temps, il y aura des souffles, des respirations, etc.
43:35 - Ce n'est pas une hausse continue des taux, mais la correction obligataire est encore devant nous.
43:40 - Le marché obligataire va rester un marché baissier, pour moi c'est un marché qui est baissier.
43:45 Ça ne veut pas dire que les obligations n'ont pas de raison d'être en portefeuille,
43:48 parce qu'en effet, un peu stabilisateur, corrélé parfois, c'est souvent...
43:54 - Non, il y a du taux, mais il n'y a plus la même protection qu'avant.
43:57 - Voilà. Et puis, si on résonne à 2-3 ans, l'Europe, je suis plus Europe que QSA,
44:05 mais je suis vraiment totalement still value, je pense qu'il faut détenir des matières premières,
44:10 tout ce qui existe depuis 2-3 ans va prendre de l'ampleur.
44:13 Donc il ne faut pas du tout avoir un portefeuille.
44:15 - Sur un horizon de 2-3 ans ?
44:17 - Ni défensif, ni totalement sur les valeurs de croissance.
44:19 Ça ne veut pas dire que des choses ne joueront pas dans l'infotech, dans la biotech, etc.
44:22 Je crois évidemment que c'est tout à fait central et que ça se passe aux Etats-Unis,
44:25 et qu'il en faut, il faut détenir de ça.
44:27 Mais l'essentiel, pour moi, va se situer dans un monde où l'inflation va rester élevée,
44:34 les taux vont plutôt monter que baisser,
44:36 et les marchés d'action vont se comporter dans ce contexte.
44:40 - Merci beaucoup, messieurs. Merci d'avoir passé ces 45 minutes avec nous
44:44 pour débriefer l'actualité de la semaine sur les marchés et nous offrir vos perspectives.
44:49 Olivier Rajard, directeur des investissements de Neuf Lys au BC,
44:51 et Julien Ebbenzal, administrateur d'Advise, étaient les invités de Planète Marché ce soir sur Bsmart.
44:56 Le dernier quart d'heure de Smart Bourg, chaque soir, c'est le quart d'heure thématique.
45:10 Le thème ce soir nous amène à nous intéresser au secteur bancaire à travers la dette bancaire,
45:15 de l'intérêt de la dette bancaire dans ces marchés.
45:17 Nous en parlons avec Jérémy Boudinet, à mes côtés en plateau,
45:20 le responsable de la gestion Investment Grade à la française AM.
45:23 Bonsoir Jérémy. - Bonsoir.
45:25 - Merci beaucoup d'être là. L'actualité qui démontre l'intérêt qu'on peut avoir pour le secteur bancaire,
45:32 c'est le lancement d'une stratégie dédiée à la dette bancaire, c'est ça ?
45:35 - Tout à fait. - À travers un fonds à échéance 2027.
45:38 On va parler de la stratégie que vous avez mise en place pour aborder ce segment de marché de la dette bancaire.
45:45 J'y vois déjà le signe que pour certains professionnels, analystes, gérants,
45:50 il y a vraiment de la valeur et de la valeur de qualité, même j'ai envie de dire, dans ce secteur bancaire,
45:56 qui reste quand même un objet à part dans le monde des marchés, un secteur à part,
46:00 que ce soit pour la partie equity, mais j'imagine qu'on retrouve à peu près la même chose
46:04 pour la partie dette bancaire par rapport à de la dette d'entreprise plus classique, plus traditionnelle.
46:09 Il y a toujours l'idée que ce secteur a du mal à surmonter sa mauvaise réputation.
46:13 Alors évidemment, l'histoire des dernières années montre que oui, il y a des raisons pour que
46:18 certains établissements ou certains acteurs de ce secteur bancaire puissent encore avoir une mauvaise réputation aujourd'hui.
46:26 Néanmoins, je trouve que l'ampleur de l'écart entre l'analyse des fondamentaux que me rapportent
46:32 les analystes spécialistes du secteur et la psychologie des investisseurs vis-à-vis de ce secteur bancaire,
46:38 j'ai l'impression que cet écart ne fait que grandir.
46:40 Tout à fait. Comment vous expliquez, est-ce qu'il y a une explication rationnelle
46:44 qui permet de comprendre ce désamour finalement entre les marchés et ce qu'on peut regarder des fondamentaux du secteur ?
46:52 Tout à fait. Là-dessus, on a une thèse qui est un petit peu iconoclaste,
46:56 c'est-à-dire que historiquement, les banques sont considérées comme un secteur cyclique.
47:00 Eh bien nous, et notamment pour les porteurs obligataires, désormais, nous pensons que les banques ne sont plus cycliques.
47:08 Et ça, c'est quelque chose qui n'est pas du tout naturel.
47:11 Normalement, elles sont vecteurs de transmission de l'économie réelle.
47:17 Néanmoins, ce dont on se rend compte depuis la faillite de Lehman Brothers,
47:22 c'est qu'en réalité, elles n'ont fait qu'être régulées davantage.
47:26 Alors, pour nous, porteurs obligataires, c'est magnifique.
47:29 On a des banques qui sont plus solides, qui ont été forcées de se délaisser de leurs actifs non performants,
47:34 qui ont été forcées de se consolider de manière importante,
47:37 et cela atteint désormais des sommets, puisque la Banque Centrale Européenne et les autres régulateurs
47:43 contrôlent en réalité la totalité de la politique bilentielle de rentabilité,
47:49 et même la politique de distribution de dividendes et de rachat d'actions.
47:53 Donc, on se retrouve dans un secteur qui est administré tel des utilities,
47:58 donc des secteurs de services aux collectivités,
48:01 ou alors des compagnies d'assurance qui sont surcapitalisées, très liquides,
48:07 et cela est relativement négatif pour les actionnaires,
48:12 puisque eux ont des returns non equity qui ne sont vraiment pas fameux depuis 2008.
48:17 Néanmoins, et ça a été démontré pendant le Covid, les porteurs obligataires ont toujours été protégés.
48:23 Et cela va être, selon nous, encore le cas dans le cycle à venir,
48:28 une potentielle récession qui se fait attendre,
48:31 même si là les chiffres macroéconomiques, notamment ceux d'aujourd'hui,
48:34 renforcent ce poids-là peut-être, viendra néanmoins.
48:38 Comme vous le soulignez, en effet, c'est un secteur qui est très décoté.
48:41 Mais vous dites, ça veut dire, quand je dis les investisseurs,
48:43 non, il y a des investisseurs qui vont dans le secteur bancaire,
48:46 et d'ailleurs qui ont plutôt eu raison de le faire, au moins depuis quelques mois,
48:50 voire depuis une paire d'années maintenant.
48:52 Mais il y a l'idée quand même que le monde des marchés regarde encore ce secteur
48:56 avec les yeux de 2008, de la grande crise financière,
49:00 et de toute la période qui s'en est suivie jusqu'à aujourd'hui.
49:04 Tout à fait. Et d'ailleurs, on le ressent en termes de valorisation.
49:07 Aujourd'hui, l'écart de valorisation entre des titres de dette bancaires et non bancaires,
49:12 cet écart de valorisation en termes de marge de crédit, de spread, de rendement,
49:16 est au plus haut depuis 2012.
49:18 Et à l'époque, pour le coup, le secteur bancaire était véritablement en crise.
49:22 On avait vraiment des banques, notamment des pays qu'on appelait périphériques,
49:25 des banques qui ne tenaient qu'à un fil, celui de la liquidité de la Banque Centrale Européenne.
49:29 Désormais, ce n'est plus le cas.
49:31 Désormais, ces banques-là vont bien mieux,
49:33 et pourraient même arguer que bon nombre de banques de ces pays dits périphériques,
49:39 en réalité, se comportent bien mieux, à la fois pour leurs actionnaires et pour leurs créanciers,
49:44 que certaines banques de grands pays.
49:46 Et je pense que l'exemple récent de Société Générale peut le démontrer.
49:50 Même si, encore une fois, le plan de Société Générale qui a tant déçu les investisseurs côté actions,
49:54 pour nous, c'est du pain béni.
49:56 Oui, je comprends.
49:58 Néanmoins, qu'est-ce que vous retenez des épisodes ?
50:00 La mauvaise réputation, elle vient aussi du fait que, effectivement,
50:04 contrairement à des sociétés non financières, une banque, ça peut mourir de liquidité en quelques heures.
50:10 Le passé récent nous le montre encore,
50:13 que ce soit dans le tissu des banques régionales américaines,
50:15 ou Crédit Suisse sur le territoire européen.
50:18 Qu'est-ce que vous retenez de ces événements, du stress de marché que ça a provoqué,
50:22 et six mois après, en tant que porteur obligataire,
50:26 puisqu'on regarde ce marché-là, la dette financière, Jérémy,
50:30 quelle conclusion vous en retirez ?
50:32 Alors, en effet, c'est pas anodin.
50:35 On a quatre banques qui sont parties en fumée en l'espace de quelques semaines,
50:38 dont une banque dite systémique à l'échelle mondiale, Crédit Suisse, c'est pas rien.
50:42 C'était des banques qui étaient relativement mal gérées.
50:45 Les leçons que l'on peut en tirer, c'est qu'en effet,
50:48 une banque pourrait être aussi solide qu'elle le souhaite,
50:52 si elle n'a pas la confiance de ses épargnants ou de ses contreparties,
50:55 en 48 heures, elle est morte.
50:58 Et ça, ça sera toujours valable.
51:00 Donc en effet...
51:01 Ça explique pourquoi le secteur bancaire est un secteur à part, fondamentalement.
51:04 Complètement. C'est le seul secteur, presque, où cela peut se produire,
51:07 puisque une banque est toujours gérée,
51:10 et bien presque au jour le jour, en termes de liquidité.
51:13 Donc, évidemment, là-dessus, c'est un secteur à part.
51:16 Néanmoins, on a vu que ce n'était pas une crise systémique.
51:19 Et ça, c'est relativement intéressant.
51:22 Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas d'autres faillites à venir.
51:25 Je pense notamment aux Etats-Unis, où ils ont quand même un très long chemin devant eux,
51:29 parce que, eh bien, ils ont 10 ans de retard en termes de réglementation,
51:33 ils n'ont pas voulu suivre les efforts des Européens,
51:36 ils les payent un petit peu.
51:37 Quant à Crédit Suisse, c'était une banque qui était engluée
51:41 dans des problèmes financiers et extra-financiers,
51:44 avec une gouvernance qui était désastreuse,
51:46 et avec ses clients, tout simplement, qui la fuyaient.
51:49 Donc, la conséquence, c'est qu'en effet,
51:52 évidemment, il vaut.
51:55 Les pertes peuvent être extrêmement importantes,
51:57 et très violentes, et très soudaines.
51:59 Par contre, en Europe, on a maintenant des banques
52:03 qui sont très solides, et surtout beaucoup plus tranquilles,
52:06 parce que le vrai risque, c'est que les déposants s'en aillent.
52:09 - Et aujourd'hui, c'est un risque... - Ce n'est pas ce qu'on a vu ?
52:11 - Ce n'est pas ce qu'on a vu, et je ne pense pas qu'on le voit.
52:13 Alors, je dirais même, il y a un indicateur que l'on voit de plus en plus,
52:16 ce sont les comptes à terme, qui reviennent beaucoup à la mode,
52:19 et à juste titre, tout simplement,
52:21 parce qu'il faut rémunérer ces dépôts-là.
52:23 Alors, en France, on a le livret A,
52:25 mais dans plein d'autres pays, les dépôts étaient encore peu,
52:28 voire pas rémunérés, jusqu'à il y a encore quelques mois.
52:31 Donc, évidemment, les banques, pour le moment,
52:34 ne voient pas de fuite de leurs dépôts.
52:36 Je ne pense pas que cela se produise en réalité,
52:38 tout simplement parce que le comportement des épargnants européens
52:41 est bien plus conservateur que ceux des épargnants américains
52:44 qui, en un claquement de doigts, eux, vont chercher la concurrence.
52:47 - Exactement.
52:48 - Il y a une viscosité structurelle de l'épargnant en Europe ?
52:51 - Totalement.
52:52 - Qui prémunit les banques de ce phénomène de fuite ?
52:56 - Un exemple très simple, c'est que, par exemple,
52:58 les épargnants américains peuvent très facilement acheter
53:01 de la dette gouvernementale américaine,
53:04 court terme, qui rapporte bien mieux que leurs comptes de dépôt,
53:08 là où en Europe, cela se développe à peine.
53:10 Aujourd'hui, on a vu...
53:12 - Il y a des offres qui arrivent.
53:13 - Justement, à partir de 1 euro.
53:15 Et ça, c'est très bien, parce que la dynamie
53:17 est un petit peu de ces marchés-là,
53:18 et ça force les banques à sortir du guet.
53:21 Mais encore une fois, au détriment de leur rentabilité,
53:23 ce qui n'est pas forcément bon pour leurs actionnaires.
53:25 - Qu'est-ce qu'on peut dire de l'univers d'investissement
53:28 et en matière de stratégie,
53:30 avec quel type de dette financière vous êtes à l'aise aujourd'hui,
53:35 en termes de maturité, en termes de niveau de risque ?
53:38 Je vois que vous êtes responsable de la gestion "investment grade".
53:40 Est-ce qu'il n'y a que de l'IG dans ce portefeuille,
53:42 ou est-ce que c'est un univers d'investissement
53:44 qui va au-delà de la seule notation "investment grade" ?
53:47 - Alors, l'univers des dettes financières,
53:49 mais ici, pour nous, c'est quasiment exclusivement des banques,
53:52 c'est là, de toute façon, où on est le plus confiant,
53:54 et en plus, c'est là où il y a de la décote,
53:56 donc ça tombe bien, ça nous arrange,
53:58 il est essentiellement "investment grade".
54:00 Les banques en Europe sont relativement bien notées,
54:03 hormis quelques banques de pays dits "périphériques",
54:06 mais encore, on l'a vu ces derniers jours,
54:09 plusieurs banques qui voient leurs notations être rehaussées.
54:13 - Remontées. - Voilà.
54:14 On a eu, par exemple, une banque portugaise,
54:16 on a eu des banques grecques qui reviennent un petit peu.
54:18 Les agents de notation ont toujours un an ou deux de retard
54:20 sur la réalité des chiffres financiers,
54:23 néanmoins, ce n'est pas anodin.
54:25 Donc aujourd'hui, on est sur une stratégie
54:27 qui est environ à 80% "investment grade".
54:29 Par contre, nous avons des rendements
54:31 qui sont dignes du "high yield",
54:33 et ça, c'est quelque chose qui est véritablement inédit.
54:37 Donc, là où on va,
54:39 ce sont essentiellement sur des banques européennes,
54:41 quand je dis "essentiellement",
54:43 c'est même à plus de 95% en Europe,
54:45 tout simplement parce que c'est là
54:47 où il y a des rendements attractifs,
54:50 et ce, aussi, pour une raison supplémentaire,
54:53 c'est que les banques sont forcées
54:55 d'émettre énormément de dettes.
54:57 Alors, ça paraît très paradoxal,
54:59 les banques sont aussi le seul secteur
55:01 où, pour être considérées comme plus sûres,
55:03 il faut qu'elles s'endettent davantage,
55:05 tout simplement pour protéger les déposants.
55:07 Ça nous arrange, elles doivent venir émettre davantage,
55:10 et bien, les conditions...
55:12 - Elles en payent le prix aujourd'hui.
55:13 - Exactement.
55:14 Et nous, nous venons pour investir là-dessus.
55:16 Et pour répondre à votre question sur les maturités,
55:19 eh bien, l'épente de taux,
55:21 aujourd'hui, gouvernementaux, sont inversées.
55:23 Il y a relativement peu d'intérêt,
55:25 en réalité, à aller au-delà de 3, 4, 5 ans.
55:28 En fait, au-delà de 5 ans, ça n'a aucun intérêt.
55:30 - Oui, je comprends.
55:31 - On prend juste du risque de taux,
55:33 de la sensibilité au taux d'intérêt.
55:35 Autant le faire avec d'autres obligations
55:37 que celle de la dette bancaire.
55:39 Par contre, sur les obligations,
55:41 que j'irais plus courtes,
55:43 donc, 2027, 2028,
55:45 là, on a vraiment de très belles choses.
55:47 C'est ce qu'explique d'ailleurs le lancement
55:49 de nombreux fonds à échéance
55:51 depuis ces derniers mois.
55:53 - Quel type d'espérance de rendement,
55:54 avec cette stratégie,
55:56 est-ce qu'on peut attendre, Jérémy ?
55:57 - Alors, aujourd'hui, le portefeuille
55:59 fait état d'un rendement actuariel,
56:01 de frais bien sûr, de 6,4%.
56:03 - D'accord.
56:04 - Ce qui est vraiment intéressant,
56:06 encore une fois, ce sont des rendements
56:08 de high yield, alors que nous sommes
56:10 sur un portefeuille qui est noté
56:12 en moyenne "investment grade".
56:14 Donc, là-dessus, on le voit vraiment,
56:16 c'est très attractif,
56:19 et notamment, en allant chercher
56:21 des émetteurs, pas seulement
56:23 les banques les plus connues,
56:24 les dix plus grosses banques européennes,
56:26 on va aussi aller chercher des petites pépites.
56:28 Je pense, par exemple, à la première
56:30 banque slovéne, qui est détenue
56:32 partiellement par l'État, donc
56:34 relativement peu de risques, elle part de marché de 30%.
56:36 Eh bien, elle doit émettre
56:38 avec des coupons de plus de 7%.
56:40 On va aller sur des banques polonaises,
56:41 qui viennent avec des coupons de plus de 9%.
56:43 Donc, sur de la dette senior,
56:46 qui, elle, contrairement
56:48 aux dettes subordonnées, et ça, on peut en parler,
56:50 qui font faillite,
56:52 on a beaucoup moins de risques.
56:53 - Il faut sortir un peu, effectivement,
56:55 des grands noms et des indices, des benchmark
56:57 pour aller chercher ces rendements.
56:59 C'est l'objet, justement,
57:01 d'avoir des spécialistes pour gérer ça.
57:03 Alors, 30 secondes, on ne va pas faire
57:05 l'histoire des hybrides, mais
57:07 ça fait partie de votre univers d'investissement.
57:09 Sans refaire toute l'histoire,
57:10 le crédit suisse a été un choc majeur
57:12 pour ce segment de marché, quand on a vu les AT1
57:14 de crédit suisse mis à zéro
57:16 dans le rachat par UBS.
57:18 Est-ce que c'est un marché qui respire,
57:20 qui vit encore, six mois après ?
57:21 - C'est un marché qui vit encore,
57:23 mais tout de même,
57:25 les investisseurs asiatiques
57:27 à qui ces titres-là
57:29 étaient refourgués, notamment à la clientèle
57:31 de banques de détails,
57:33 ce qui, en Europe, est complètement interdit,
57:35 n'ont pas l'air de vouloir revenir.
57:37 Néanmoins, c'est un marché qui vit, et surtout,
57:39 tout le monde attend le grand retour d'UBS
57:41 sur le marché primaire. Six mois après,
57:43 il y a un petit côté symbolique.
57:45 Donc, tout le monde l'attend.
57:47 Néanmoins, c'est un marché, malgré tout,
57:49 qui a de bons rendements et qui vit encore,
57:51 il y a de nouvelles émissions, les émetteurs se portent bien,
57:53 et on a des coupons relativement intéressants.
57:55 - Donc, ce n'est pas un marché qui est mort au nord ?
57:57 - Non.
57:59 - Intéressant de voir, effectivement, à quelles conditions UBS
58:01 pourrait émettre ces nouvelles AT1,
58:03 puisque c'est visiblement une volonté
58:05 chez UBS,
58:07 quelques mois après le rachat de Crédit Suisse.
58:09 Merci beaucoup, Jérémy. Merci d'être venu évoquer
58:11 ce secteur bancaire à travers
58:13 l'investissement dans la dette financière.
58:15 Vous êtes responsable de la gestion Investment Grid
58:17 à la française Asset Management.
58:19 Merci beaucoup.
58:21 [Musique]
58:23 [Musique]

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