00:00 Comme attendue la présidente de l'Assemblée nationale, Yael Brown-Piguet, a brandi l'article 40 de la Constitution hier
00:06 pour faire barrage à la proposition qui visait à abroger la réforme des retraites. Est-ce que c'est grave ?
00:11 C'est grave parce que cette loi sur les retraites, elle va changer la vie fondamentalement de millions et millions de travailleurs
00:19 qui vont devoir travailler à terme deux ans de plus.
00:22 Et il n'y aura jamais eu un vote en Assemblée plénière à l'Assemblée nationale.
00:25 Et donc ça pose un problème de légitimité démocratique. C'est clair, ce n'est pas illégal, ce n'est pas antidémocratique au sens pur du terme.
00:33 Ça pose un problème de légitimité démocratique. Et donc on a finalement une population de salariés qui a manifesté,
00:40 qui s'est opposé massivement, y compris dans l'opinion, quand ils n'ont pas pu manifester ou pas voulu manifester.
00:45 Et un texte qui va s'appliquer sans qu'à aucun moment il n'y ait eu un vote à l'Assemblée nationale.
00:50 Est-ce que vous dites comme l'opposition que la présidente de l'Assemblée a cédé face à la pression ?
00:55 Moi je ne sais pas parce que de l'autre côté, ce que je ne veux pas face à ce gâchis, je pense que la réforme des retraites est un gâchis
01:02 parce qu'on a nié la réalité du travail, parce qu'on n'a pas écouté la démocratie sociale, parce qu'il y a ce problème de légitimité démocratique.
01:08 Et à la fin, in file, ce texte qui va malgré tout s'appliquer, eh bien ce qu'il ne faut pas y rajouter, c'est une forme de gâchis de la représentation nationale.
01:18 Donc vous voyez ce que je veux dire, c'est que je ne sais pas ce qui va se passer aujourd'hui à l'Assemblée nationale,
01:22 mais il faut de la dignité parce que derrière, il y a tous les citoyens et citoyennes de ce pays qui regardent et qui se disent
01:27 "Ce n'est pas normal ce qui est en train de se passer", mais il ne faut pas qu'ils perdent encore plus confiance dans les institutions de notre pays.
01:32 Ça veut dire quoi ? Il faut de la dignité ? Vous dites par exemple à l'opposition, à l'opposition de gauche,
01:36 je ne dis rien à personne, je dis juste que c'est une forme de naufrage ce débat politique, ce débat parlementaire sur cette réforme des retraites,
01:49 et que tout ça, ce n'est pas un jeu politique. Tout ça, ça se concrétise dès l'automne prochain pour nombre de salariés,
01:57 par le fait d'être obligé de travailler plus longtemps, etc. Et moi, ça m'horrifie. En fait, je vais vous dire franchement,
02:03 quelque part, ça me fait peur qu'on puisse changer l'avis aussi concrètement de millions de salariés, qu'il n'y ait pas un vote sur cet article,
02:13 sur cette fameuse mesure de 62 à 64 ans, et qu'en plus, il y a un spectacle qui puisse être donné, qui n'est pas digne d'une Assemblée nationale.
02:22 La seule issue possible à une colère populaire devient la violence, c'est ce qu'a tweeté l'écologiste Sandrine Rousseau. Quelle est votre réaction ?
02:29 C'est irresponsable. C'est irresponsable d'en appeler à la violence comme est le seul débouché possible. Vous savez, ce qui s'est passé pendant ces mois,
02:37 c'est d'abord l'expression d'une grande dignité du monde du travail. Moi, je n'ai aucun regret sur le fait qu'on se soit mobilisés.
02:43 À la fin, le texte va s'appliquer, et je vais vous dire, ça me fait mal au bide, vous l'avez compris, pour les salariés qui vont être concernés.
02:48 On a exprimé cette dignité par des mobilisations qui sont inédites, par leur forme, par leur nombre, par le nombre de manifestants,
02:55 par l'épaisseur de professions qui se sont mobilisées, le nombre de professions, la géographie de ces mobilisations. On a exprimé une dignité.
03:04 Il y a eu ce texte de passe. Ça provoque de la colère. Je l'ai même écrit dans un essai, du mépris à la colère. Mais cette colère, il faut qu'on s'en serve aujourd'hui
03:11 pour construire du progrès social sur la question des salaires, sur la question des conditions de travail, etc. En appeler à la violence, ça n'est pas dissu dans une démocratie.
03:19 Ça n'a pas dissu, la violence, dans une démocratie.