Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 23/03/2023
Transcription
00:00 Comment un film qui a presque un siècle peut-il inspirer autant d'artistes de musique électronique ?
00:04 Metropolis, le film de science-fiction de 1927, a nourri des artistes comme Jeff Mills,
00:09 Giorgio Moroder ou Kraftwerk.
00:11 Metropolis est vraiment l'épidémie de cette vision de ce que l'avenir est.
00:16 On est à l'époque du cinéma muet et le réalisateur allemand Fritz Lang
00:20 dépeint une mégapole du nom de Metropolis dans un futur dystopique en 2026.
00:25 En adaptant le roman de Thea von Arbau, sa femme,
00:28 il en fait un classique de l'expressionnisme allemand,
00:30 un courant qui déforme la réalité pour faire jaillir des émotions.
00:33 Bref, Metropolis, c'est...
00:34 Un des films les plus célèbres de la science-fiction, jamais.
00:39 A l'origine, il est habillé d'une musique symphonique signée Godfrey Duperts.
00:42 Mais son imagerie est ultra futuriste.
00:44 C'est le plus gros budget pour un film à l'époque,
00:46 ce qui permet de mettre au point des effets spéciaux en miniature inédits.
00:49 Si bien que le film inspire de nombreux compositeurs qui vont s'approprier la bande originale.
00:54 En 1984, John Joe Moroder propose une bande-son New Wave de 80 minutes,
00:58 sur laquelle on retrouve des chansons de Freddie Mercury ou de Bonnie Tyler,
01:02 le tout sur des images colorisées, pour un rendu très années 80.
01:05 C'est presque comme avoir un libretto,
01:08 au lieu d'avoir le libretto, j'avais le film.
01:10 Le groupe allemand Kraftwerk, pionnier de la musique électronique,
01:13 sort en 78 l'album Die Mensch-Maschine,
01:15 une référence au Machine and Mensch, le robot qui est un des personnages de l'histoire.
01:19 Et certains morceaux coïncident curieusement avec le rythme du film.
01:23 Dans une interview, un des membres du groupe souligne d'ailleurs un paradoxe,
01:26 la tendance des films de science-fiction, pourtant porteurs d'une vision futuriste,
01:30 à utiliser de la musique plutôt traditionnelle.
01:33 Quand on regarde Star Wars et tous ses accessoires de science-fiction,
01:36 on est gêné d'écouter cette musique.
01:38 Des instruments à cordes du 19ème siècle.
01:40 En 2001, le compositeur et DJ américain Jeff Mills,
01:43 compose sa propre bande originale du film, dans un registre techno,
01:46 avant de récidiver avec une deuxième adaptation, plus de 20 ans plus tard.
01:50 Ce qui a fait l'idée initiale, c'est que pendant une décennie,
01:54 environ 10 ans avant de réaliser le soundtrack,
01:57 il y avait beaucoup de discussions sur la considération de la musique électronique pour le film.
02:03 Mais personne n'avait vraiment atteint le point de créer quelque chose.
02:07 On avait entendu beaucoup parler de la musique,
02:10 mais avant l'année 2000, on devait peut-être commencer à voir ce que la musique sonnait.
02:16 Visuellement justement, ce film développe un univers singulier.
02:19 On y voit le décor machiniste de la ville, tout en géométrie, en engrenages, en va-et-vient.
02:24 La composition visuelle est une musique en elle-même.
02:26 Je n'ai pas seulement étudié le film, mais j'ai aussi étudié la période dans laquelle il a été créé.
02:32 Et où a-t-il reçu son inspiration ?
02:35 Il est allé à New York, à Manhattan, et a été inspiré par l'architecture,
02:40 et a pris ces idées pour dessiner l'architecture du film.
02:44 En ayant vécu à New York, en ayant vécu à Berlin,
02:47 ça m'a aidé à imaginer ce que sont les sons de ces villes.
02:54 C'est un mouvement très occupant, constante, sans dormir, 24 heures, 7 jours par semaine.
03:02 Metropolis n'est pas seulement une utopie urbanistique.
03:05 Fritz Lang prédit certaines évolutions.
03:07 La séparation accrue des catégories sociales,
03:09 les déplacements pendulaires massifs dans des lieux de plus en plus désincarnés.
03:12 Et c'est aussi ce message visionnaire qui inspire.
03:15 Dans l'histoire, Freder, le fils du dirigeant de Metropolis,
03:17 s'aventure dans la ville souterraine où vit la classe laborieuse.
03:20 Il tente d'aider ses travailleurs, suscitant malgré lui une révolte.
03:23 Je pensais que j'étais terminé avec ce film.
03:25 Mais au fil des temps,
03:28 j'ai pu voir que cette idée de la lutte entre les deux,
03:35 est toujours là, 100 ans plus tard.
03:39 Cette fois-ci, c'est de manière plus orchestrale qu'il a composé cette bande originale,
03:42 en essayant aussi de retranscrire une ambiance propre à l'ère du temps.
03:45 Une certaine quantité d'incertitude, une certaine quantité de manque de contrôle.
03:50 On ne sait pas vraiment quand la bande va commencer ou finir.
03:54 On est plus vulnérable à ce qui va se passer.
03:57 Et c'est ce que beaucoup de gens ressentent,
04:02 en ce moment, en sortant de la pandémie,
04:05 et en essayant de se réadapter pour revenir à la vie normale.
04:08 Si Metropolis est intemporelle, c'est aussi grâce au thème de l'homme et la machine.
04:12 Dans la société sur-industrialisée du film,
04:14 les travailleurs sont aliénés aux machines, elles-mêmes configurées par des humains.
04:18 On ne peut peut-être pas être satisfaits de ce que nous sommes.
04:24 Et donc, il faut créer quelque chose de plus parfait.
04:27 Créer des machines, utiliser des robots,
04:29 et créer des robots pour servir l'homme est attirant,
04:34 mais pas sans conséquences.
04:36 Et c'est ce que, même il y a 100 ans, la histoire nous montre.
04:40 Nous avons la capacité de créer ces machines,
04:43 mais c'est vraiment à nous de savoir combien d'intelligents nous voulons qu'elles soient.
04:47 Une idée résumée par le mantra de Metropolis,
04:50 le médiateur entre le cerveau et les mains, ce doit être le cœur.
04:53 [Musique]

Recommandations