Seth, street artiste pas si naïf

France Culture

il y a 3 ans

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Art et design

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00:00 Si vous avez l'impression d'avoir déjà vu cette petite fille au drapeau ukrainien,

00:03 c'est normal.

00:04 Elle est l'oeuvre de Seth, un street artist français, qui la peinte dans son quartier

00:08 de Paris, deux jours après l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

00:10 Après ce qui a été impressionnant c'est que cette petite fille a été reprise partout.

00:13 Il y a des enfants qui l'ont redessinée dans un abri anti-bombe, il était à la mairie

00:20 de Kharkiv.

00:21 Partout dans le monde, Seth dessine des enfants sur les murs pour dénoncer la guerre et la

00:26 misère.

00:27 S'il se rend régulièrement en Ukraine depuis une dizaine d'années, Seth n'est pas seulement

00:32 inspiré par cette destination.

00:33 En Corée, en Palestine ou dans nos villes françaises, c'est l'enfance qui passionne

00:37 l'artiste.

00:38 Je me suis aperçu qu'il y avait beaucoup d'enfants qui traînaient dans ces lieux-là

00:41 donc je me disais qu'il fallait que ça s'adresse à eux aussi.

00:43 Ça permettait aussi de parler de choses très compliquées d'une manière qui paraissait

00:47 innocente.

00:48 Je sais qu'il y a eu un déclic qui s'est fait vraiment en Indonésie où j'avais peint

00:52 en 2011 dans un village qui avait été détruit par le volcan Merapi.

00:56 Moi je n'aurais pas peint tout seul là-bas parce que je trouvais que c'était un peu

00:59 dark touriste.

01:00 J'avais proposé aux habitants qui étaient dans un camp à côté, un camp de réfugiés,

01:03 de venir avec moi et de faire des personnages sur les murs.

01:06 Moi je faisais un peu les contours et puis eux, ils peignaient les couleurs, les choses

01:10 comme ça.

01:11 Et c'était vraiment presque de l'art thérapie.

01:16 J'y suis retourné 7-8 ans après et les peintures y étaient encore.

01:22 Certaines qui étaient à l'extérieur, elles étaient maintenant à l'intérieur des maisons.

01:25 Je me suis dit qu'on avait une responsabilité, en tout cas que j'avais une responsabilité

01:29 quand je peignais dans ce genre d'endroit.

01:31 Une responsabilité qui implique que s'approprier les murs veut parfois dire savoir les restituer

01:36 à leurs habitants.

01:37 Ce fut le cas avec cette fresque à Bethléem en Palestine.

01:39 Je voulais montrer leur point de vue et donc j'avais peint une femme avec la clé qui regarde

01:43 du côté de Jérusalem.

01:44 C'est la clé avec laquelle les palestiniens sont partis, notamment ceux qui sont dans

01:50 les camps de réfugiés.

01:51 C'était la clé de leur maison, croyant qu'ils allaient revenir un jour.

01:52 Donc c'est le symbole du retour un jour chez eux.

01:55 Et puis à la fin de la journée, je l'ai effacé pour justement expliquer qu'il y avait

02:00 des endroits qui ne méritaient peut-être pas d'être peints.

02:03 C'était du mur presque un objet touristique.

02:06 Si ses dessins sont à la fois légers visuellement mais porteurs d'un message efficace, c'est

02:11 aussi de par ses expériences passées, dans la bande dessinée, l'animation, la pub.

02:15 J'avais fait les arts déco, je savais un peu dessiner et puis à partir de là, j'ai

02:19 travaillé un peu dans la BD, j'avais travaillé pour les Lascars et puis les dessins animés,

02:24 je faisais des trucs pour Sacartine, je me souviens de l'époque.

02:28 La BD, ça m'a conforté dans mon dessin.

02:31 Peut-être que la pub, ça m'a aidé pour trouver les idées aujourd'hui, pour avoir

02:35 des choses qui vont parler plus facilement aux gens, même si je ne vends rien.

02:38 Mais c'est finalement un nouvel horizon qui s'est ouvert à lui lorsqu'il a décidé

02:42 d'investir la rue et ses murs.

02:43 Je savais que je n'arrêterais jamais.

02:45 L'espace public était important pour moi parce que c'était un moyen de m'ancrer

02:49 beaucoup plus dans le réel et puis de vivre des choses.

02:51 L'idée, c'est toujours d'avoir un discours qui va parler aux gens qui vivent à l'endroit

02:55 où je peins.

02:56 Et ensuite, si ça parle aux autres, c'est parfait, mais il y a toujours cette idée

03:00 d'avoir quelque chose qui va parler au type qui habite devant la peinture que je peins.

03:03 L'artiste diversifie sa palette en élaborant aussi des installations plastiques, toujours

03:08 sur le thème de l'Ukraine.

03:09 C'est inspiré d'une expérience que j'ai vécue en me rendant dans une école sur le

03:13 front, dans le Donbass.

03:14 J'avais fait des ateliers où j'avais peint l'école avec les enfants.

03:17 J'ai pris des éléments aussi à l'oeuvre de Maria Primashchenko, qui est une peintre

03:22 populaire ukrainienne, une peinte naïve.

03:24 Sur les murs ou en expo, l'univers de l'enfance comme contrepied à la dureté du monde n'est

03:30 naïve qu'en apparence.

03:31 C'est ça, c'est la peinture.

03:43 *Bruit de bouche*

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