Berezina Pour Kindle
- 4 years ago
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En octobre 1812, pi?g? dans Moscou en flammes, Napol?on replie la Grande Arm?e vers la France. Commence La retraite de Russie, l'une des plus tragique ?pop?e de l'Histoire humaine. La Retraite est une course ? La mort, une marche des fous, une ?chapp?e d'enfer. Deux cents ans plus tard, je d?cide de r?p?ter l'itin?raire de l'arm?e agonisante, de ces cavaliers d?sar?onn?s, de ces fantassins squelettiques, de ces hommes ? plumets qui avaient pr?jug? de l'invincibilit? de l'Aigle. Il ne s'agit pas d'une comm?moration (comm?more-t-on l'horreur ?), encore moins d'une c?l?bration, il s'agit de saluer par-del? les si?cles et les verstes, ces Fran?ais de l'an XII aveugl?s par le soleil corse et fracass?s sur les r?cifs du cauchemar. Le g?ographe C?dric Gras, le photographe Thomas Goisque et deux amis russes, Vassili et Vitaly, sont de la partie. Pour l'aventure, nous enfourchons des side-cars sovi?tiques de marque Oural. Ces motocyclettes red?finissent en permanence les lois ?l?mentaires de la m?canique. Rien ne saurait les arr?ter (pas m?me leurs freins). Notre escouade se compose de trois Oural, charg?es ras la gueule de pi?ces d?tach?es et de livres d'Histoire. Au long de quatre mille kilom?tres, en plein hiver, nous allons d?rouler le fil de la m?moire entre Moscou et Paris o? l'Empereur arrivera le 15 XII 1812, laissant derri?re lui son arm?e en lambeaux. Le jour, les mains luisantes de cambouis, nous lisons les M?moires du g?n?ral de Caulaincourt. Le soir, nous nous assommons de vodka pour ?loigner les fant?mes. A l'aube, nous remettons les gaz vers une nouvelle ?tape du chemin de croix. Smolensk, Minsk, Berezina, Vilnius : les st?les de la souffrance d?filent ? cinquante ? l'heure. Partout, nous rencontrons des Russes qui ne tiennent aucune rigueur ? l'Empereur ? bicorne. Sous nos casques cr?nel?s de stalactites, nous prenons la mesure des tourments des soldats et nous menons grand train ce d?bat int?rieur : Napol?on ?tait-il un ant?christ qui pr?cipita l'Europe dans l'ab?me ou bien un visionnaire g?nial dont le seul tort fut de croire qu'il suffisait de vouloir pour triompher, et que les contingences se pliaient toujours aux r?ves ? Mais tr?s vite, nous devons abandonner ces questions m?taphysiques car un cylindre vient de rendre l'?me, la nuit tombe sur la Bi?lorussie et trois foutus camions polonais sont d?j? en travers de la route.
En octobre 1812, pi?g? dans Moscou en flammes, Napol?on replie la Grande Arm?e vers la France. Commence La retraite de Russie, l'une des plus tragique ?pop?e de l'Histoire humaine. La Retraite est une course ? La mort, une marche des fous, une ?chapp?e d'enfer. Deux cents ans plus tard, je d?cide de r?p?ter l'itin?raire de l'arm?e agonisante, de ces cavaliers d?sar?onn?s, de ces fantassins squelettiques, de ces hommes ? plumets qui avaient pr?jug? de l'invincibilit? de l'Aigle. Il ne s'agit pas d'une comm?moration (comm?more-t-on l'horreur ?), encore moins d'une c?l?bration, il s'agit de saluer par-del? les si?cles et les verstes, ces Fran?ais de l'an XII aveugl?s par le soleil corse et fracass?s sur les r?cifs du cauchemar. Le g?ographe C?dric Gras, le photographe Thomas Goisque et deux amis russes, Vassili et Vitaly, sont de la partie. Pour l'aventure, nous enfourchons des side-cars sovi?tiques de marque Oural. Ces motocyclettes red?finissent en permanence les lois ?l?mentaires de la m?canique. Rien ne saurait les arr?ter (pas m?me leurs freins). Notre escouade se compose de trois Oural, charg?es ras la gueule de pi?ces d?tach?es et de livres d'Histoire. Au long de quatre mille kilom?tres, en plein hiver, nous allons d?rouler le fil de la m?moire entre Moscou et Paris o? l'Empereur arrivera le 15 XII 1812, laissant derri?re lui son arm?e en lambeaux. Le jour, les mains luisantes de cambouis, nous lisons les M?moires du g?n?ral de Caulaincourt. Le soir, nous nous assommons de vodka pour ?loigner les fant?mes. A l'aube, nous remettons les gaz vers une nouvelle ?tape du chemin de croix. Smolensk, Minsk, Berezina, Vilnius : les st?les de la souffrance d?filent ? cinquante ? l'heure. Partout, nous rencontrons des Russes qui ne tiennent aucune rigueur ? l'Empereur ? bicorne. Sous nos casques cr?nel?s de stalactites, nous prenons la mesure des tourments des soldats et nous menons grand train ce d?bat int?rieur : Napol?on ?tait-il un ant?christ qui pr?cipita l'Europe dans l'ab?me ou bien un visionnaire g?nial dont le seul tort fut de croire qu'il suffisait de vouloir pour triompher, et que les contingences se pliaient toujours aux r?ves ? Mais tr?s vite, nous devons abandonner ces questions m?taphysiques car un cylindre vient de rendre l'?me, la nuit tombe sur la Bi?lorussie et trois foutus camions polonais sont d?j? en travers de la route.