Le boucher

  • il y a 16 ans
Rendez-vous de Madame Lune - Septembre 2008

Il avait les mains blanches et larges
Il avait un cou de taureau
Le dos cassé par trop de charges
A sa manière il était beau
Sur son tablier éclatant
On apercevait quelques traces
De lymphes séchées ou de sang
D'animaux devenus carcasses

Le jour où je l'ai rencontré
Au milieu d'un fatras de viande
Il n'a rien eu à me montrer
J'ai su comprendre sa demande
Un seul clin d'oeil a suffi
Pour que je le suive en silence
Il m'a ouvert son paradis
Sa chambre froide c'était Byzance

{Refrain}
Oh mon boucher oh mon roi
Vient me coucher contre toi
Oh mon boucher oh mon roi
Viens te coucher contre moi

Pendus au bout de leurs crochets
Ils étaient trente à m'observer
Roses comme un corps de ballet
Allaient-ils se mettre à danser
Le boucher me pris par les hanches
Et me bascula en arrière
J'étais comme un roseau qui penche
Face à un chêne centenaire

L'étreinte qui suivi fut brève
Et bénéfique, et angoissante
Il me revient souvent en rêve
Le goût de sa bouche insistante
Cernée par les cadavres nus
Des porcs voués à son billot
Je l'ai aimé sans retenue
Je l'ai aimé sans dire un mot

{refrain}

Quand il s'abandonna enfin
J'entendis comme un grognement
Un petit râle un peu éteint
Qui n'était pas de mon amant
Mais qui d'autre pouvait gémir?
Levant les yeux dans un effort
Oh je dus admettre le pire
L'un des porcs n'était pas mort

Il respirait si faiblement
Que je crus d'abord me tromper
Mais en un instant mon amant
Etait debout à mes côtés
Il attrapa une arme blanche
Et la leva vers le porcin
L'attaque fut précise et franche
Le cochon décéda soudain

{refrain}

Je n'ai pas revu mon amour
Ni les néons des chambres froides
Depuis j'ai banni pour toujours
Le goût du porc même en salade
Et je garde comme un trésor
Le souvenir chaud de ses mains
J'oublie le cochon demi-mort
Et je dors, et je dors, et je dors,
Jusqu'au lendemain!