(Tiré du recueil "Sous la main de l'hiver", disponible ici: http://www.lulu.com/spotlight/cesariondalexandrie)
Sous un ciel rare et gris, la neige s’abattait, Rapide, en rangs serrés, violente, et fouettait Montures et soldats, tel un cocher sans âme Avide de souffrance et de peur et de drame. Pour la première fois, sous un refus cinglant, L’Aigle se retirait, défait, meurtri, sanglant, Les ailes en proie à la colère du monde, Dont le grand hiver russe, en sa rude faconde, S’était fait le héraut puissant et mystérieux. Napoléon marchait, sombre, et baissait les yeux ; Au fond du gouffre, encore, il soupesait ses chances ; Il comptait sans faillir, morts, vitesse, distances ; Et tous lui répondaient, bien qu’il fût un géant, En le persécutant des foudres du néant. Rien ne pouvait masquer désormais la débâcle : On fuyait ! Et l’horreur se donnait en spectacle ; La fatigue et la faim torturaient tous les corps Presque autant que le froid, qui hantait les plus forts : Une halte timide, une chute banale, Et l’on se pétrifiait, glacé jusqu’à la moelle Dans le temps d’un soupir, sans espoir de retour, Sous l’œil d’hommes marqués du signe du Vautour. Toute chair était bonne à manger dans la plaine ; Tout valait qui pouvait faire reprendre haleine ! Et dans l’esprit du Chef l’Espoir se dessina Quand apparut le pont de la Bérézina.
(Tiré du recueil "Sous la main de l'hiver", disponible ici: http://www.lulu.com/spotlight/cesariondalexandrie)