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  • il y a 2 jours
À l'occasion de la sortie de son livre, « Logocratie », le chroniqueur, streamer et politologue Clément Viktorovitch nous a partagé ses réflexions autours de quelques mots appartenant au champs lexical de la politique.
Retrouvez l'intégralité de notre article ici : https://www.20minutes.fr/tempo/4189020-20251212-etat-democratie-devrait-susciter-indignation-clement-viktorovitch-face-logocratie (https://www.20minutes.fr/tempo/4189020-20251212-etat-democratie-devrait-susciter-indignation-clement-viktorovitch-face-logocratie)

Catégorie

📚
Éducation
Transcription
00:00Je crois au contraire que sortir de l'état de droit, c'est déjà sortir de la démocratie,
00:03et que nous devrions le défendre jusqu'au bout, quoi qu'il en coûte.
00:06Peuple de 20 minutes, bonjour, je suis Clément Victorovitch,
00:09chercheur en sciences politiques, streamer sur Twitch,
00:12et je viens de publier mon dernier livre, Logocratie, aux éditions du Seuil.
00:17On est ici pour faire un petit dictionnaire.
00:20La démocratie, c'est ce qui devrait être, je crois, notre idéal,
00:24ce vers quoi on devrait, chacune et chacun, être tendu.
00:27Idéalement, la démocratie, ça devrait être la capacité pour chacune et chacun d'entre nous,
00:31citoyennes et citoyens, d'influencer les décisions, de décider de notre avenir en commun.
00:36Hélas, la démocratie représentative, elle est, je crois, menacée,
00:39elle est en train de ployer sous le poids des mensonges, de la déloyauté des discours.
00:45C'est hélas ce que j'observe, c'est ce que j'analyse, ce que je déplore,
00:49et ce qu'on cherche, évidemment, à contrer.
00:51La logocratie, c'est la pratique du pouvoir qui consiste, pour la parole officielle,
00:54à utiliser le mensonge comme un mode quotidien de communication.
00:58Bien sûr, la parole politique est depuis longtemps mensongère,
01:01elle l'a même sans doute toujours été, Platon lui-même en parlait,
01:04mais le mensonge restait une exceptionnalité,
01:07restait finalement un trou qui déchirait la toile de la communication politique.
01:10Aujourd'hui, on observe que le mensonge est devenu quotidien, banalisé,
01:15utilisé chaque jour par pure commodité.
01:17On l'observe pas dans toutes les démocraties représentatives,
01:19mais dans certaines d'entre elles.
01:20Par exemple, on le voit aux Etats-Unis avec Donald Trump,
01:23on l'a vu au Brésil avec Bolsonaro,
01:25en Grande-Bretagne avec Boris Johnson,
01:27et hélas, et je crois le démontrer,
01:29on l'a vu en France depuis 2017,
01:31avec la présidence d'Emmanuel Macron.
01:32L'ère de la post-vérité, c'est ce qui a rendu possible la logocratie.
01:36L'ère de la post-vérité, c'est un état du débat public.
01:40C'est le moment où s'installe,
01:41chez chacune et chacun d'entre nous, citoyennes et citoyens,
01:43une forme d'indifférence au vrai et au faux.
01:46On abdique notre indignation devant les mensonges.
01:49On finit par ne plus s'indigner que l'on ne nous dise pas la vérité.
01:54Ce qui est vrai devient accessoire.
01:56Ce qui compte, ce n'est pas qu'une chose qui est dite soit vraie,
01:59c'est qu'elle soit vraisemblable,
02:01qu'elle nous plaise, qu'elle nous arrange,
02:03qu'elle nous renforce dans ce que nous pensions déjà.
02:05Cette ère de la post-vérité,
02:06elle s'installe en grande partie du fait des espaces numériques algorithmés.
02:11Donc, c'est un peu cliché de le dire,
02:13mais malheureusement, ce n'est pas complètement faux.
02:15C'est la faute aux réseaux sociaux.
02:16Et je pense que tout cela doit attirer notre attention,
02:18puisque c'est cette ère de la post-vérité
02:20qui a rendu possible, depuis le milieu des années 2010,
02:23la bascule de certaines démocraties représentatives,
02:25pas toutes, mais certaines d'entre elles, dont la nôtre,
02:28dans ce que j'appelle la logocratie.
02:29La crise de la démocratie représentative,
02:31je pense qu'effectivement, c'est ce que nous vivons aujourd'hui.
02:33Et au fond, cette crise, c'est la crise d'une fiction.
02:35Pendant longtemps, on a réussi à accepter la fiction
02:38selon laquelle, en élisant nos gouvernements,
02:41nous décidions de notre avenir en commun.
02:43Selon laquelle, la démocratie, c'était effectivement
02:46le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple,
02:48et que nous exerçons cette démocratie
02:50par le biais de nos représentants.
02:52Et je crois qu'on voit de plus en plus
02:53qu'au contraire, le peuple est dépossédé
02:56d'une partie de son pouvoir par la représentation.
02:58Je pense qu'on voit de plus en plus l'écart
02:59entre ce que nous voulons
03:01et ce qui est fait en notre nom par nos représentants.
03:04Et c'est cet écart qui commence à nous devenir,
03:06je crois, à une partie d'entre nous, insupportable.
03:09Toute la question, c'est de savoir ce qui vient après.
03:11Si la démocratie représentative est aujourd'hui
03:13de plus en plus affaiblie, de plus en plus contestée,
03:16par quoi va-t-elle être remplacée ?
03:17Est-ce qu'on va vivre une bascule vers l'autoritarisme ?
03:20C'est ce qui est en train de se passer, par exemple,
03:22aux États-Unis avec Donald Trump.
03:23Ou est-ce qu'au contraire, on va vivre une bascule
03:25vers une démocratie plus participative, plus délibérative,
03:28où chacune et chacun d'entre nous auront plus de poids
03:30dans l'élaboration des décisions ?
03:32C'est évidemment ce que je souhaite.
03:34Et c'est ce pourquoi j'essaye de me battre.
03:36L'État de droit, c'est un concept essentiel.
03:38Je crois qu'on ne le mesure pas suffisamment.
03:39L'État de droit, ça n'est rien d'autre
03:41qu'un des deux piliers de la démocratie.
03:43La démocratie, c'est la souveraineté populaire,
03:45la capacité pour chacune et chacun d'entre nous
03:46de décider de notre avenir en commun.
03:48Mais c'est aussi l'État de droit.
03:49Le fait que nos droits fondamentaux soient respectés,
03:52que nos libertés publiques soient garanties.
03:55Et ça, c'est capital.
03:56Parce que c'est vrai que l'État de droit
03:58sans la souveraineté populaire, ça n'est plus la démocratie.
04:00Ça devient quelque chose comme une monarchie constitutionnelle
04:03ou une dictature constitutionnelle.
04:04Mais la souveraineté populaire sans l'État de droit,
04:07ça n'est pas non plus la démocratie.
04:09La souveraineté populaire sans l'État de droit,
04:10qu'est-ce que c'est ?
04:11C'est au fond la dictature de la majorité
04:14et l'oppression des minorités.
04:16Une souveraineté populaire sans État de droit,
04:17c'est un gouvernement dans lequel les minorités
04:20peuvent être opprimées.
04:21Rien ne les protège de la dictature de la majorité.
04:24Et ça, je crois que c'est grave.
04:25Et je crois que c'est quelque chose qu'il faut garder en tête
04:27quand on entend certains, dans le débat public aujourd'hui,
04:29nous expliquer qu'il faudrait en finir avec l'État de droit.
04:32Que l'État de droit ne serait ni intangible ni sacré,
04:35comme le disait un ancien ministre de l'Intérieur.
04:37Moi, je crois au contraire que sortir de l'État de droit,
04:39c'est déjà sortir de la démocratie.
04:40Et que nous devrions le défendre jusqu'au bout,
04:43quoi qu'il en coûte.
04:43Sous-titrage Société Radio-Canada
04:46Sous-titrage Société Radio-Canada
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