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  • il y a 7 heures

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00:00Bienvenue au Cœur du crime, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:11Savez-vous que plus d'un tiers des crimes et délits commis en France sont traités par la Gendarmerie Nationale ?
00:19Je m'appelle Yann Kermadek, je suis commandant de gendarmerie.
00:25Je dirige une section de recherche dont la mission essentielle est une mission de police judiciaire.
00:41L'histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie.
00:46Tous les faits sont réels et se sont déroulés en France.
00:50Seuls les noms des personnes et des lieux ont été changés.
00:55Plutôt, Mitzik et moi, sommes tous les deux étudiants en droit international.
01:06Et nous appartenons tous les deux au club de la faculté, c'est-à-dire au cercle des intellectuels.
01:14À part ça, on n'a pas grand-chose en commun.
01:17Plutôt est grand, arrogant, antipathique.
01:19Mais les caisses du cercle sont toujours vides et le bon moyen de les remplir est évidemment d'accepter des médiocres comme Plutôt.
01:30Vous l'avez compris, Plutôt, Mitzik est riche, très riche.
01:35Quant à moi, je suis très pauvre.
01:39Je viens d'être coopté alors que je suis en dernière année.
01:41Je suis ce qu'il est permis d'appeler un bûcheur.
01:46Et pour payer mes études, je fais des petits boulots à droite et à gauche.
01:50Faire partie du cercle des intellectuels est surtout une reconnaissance sociale.
01:56On y trouve beaucoup de fils de famille aisés, bien que leur niveau ne soit en général pas très bon.
02:00Si le cercle a fini par faire appel à moi, c'est pour la caution cérébrale que je représente.
02:08Et moi, si j'ai accepté, c'est parce que mes diplômes ne suffisent pas pour être introduits dans la caste des avocats de droit international,
02:17alors que le cercle des intellectuels y a ses entrées.
02:22Les membres du cercle sont plutôt gentils.
02:25Plutôt Mitzik, lui, semble doté d'un fond de bêtises primaires.
02:29Tenez, vendredi dernier, son hypercute a envoyé chez le dentiste un étudiant du campus
02:34qui a eu le tort d'approcher une fille sur laquelle, plutôt à des vues.
02:39Pour l'instant, il ne m'a pas beaucoup embêté.
02:43Il faut dire que je n'ai pas beaucoup de temps libre et que je suis en bien meilleure forme physique que lui.
02:48La seule vraie dispute que j'ai eue avec lui remonte à deux jours
02:52quand il m'a accusé de lui avoir volé son briquet en or.
02:55C'est toi qui me l'as pris, Whitson, espèce de minable !
02:58Allons, rends-le-moi, ça vaudrait mieux pour toi.
03:00Hurle-t-il en me secouant comme un prunier.
03:03Je me dégage de son emprise et lui décoche une droite
03:06qu'il fait s'écrouler direct sur son lit.
03:09L'affaire en est restée là.
03:11Mais pour ce qui est de nos relations amicales,
03:14c'est terminé, comme bien vous pensez.
03:17Aujourd'hui, dimanche, c'est le dernier match de football de la saison.
03:21Il a lieu à Vermont et le campus est pratiquement désert.
03:24Je suis seul, dans le pavillon, en train de prendre le thé tout en lisant un bouquin.
03:32Soudain, Plutomitzik se plante devant moi et me reparle de son briquet en or.
03:37Visiblement, il n'a pas encore cuvé sa cuite de la veille.
03:42Il m'injurie.
03:43Je lui balance quelques vannes et je replonge dans mon livre.
03:47Soudain, il fait un pas vers moi et tente de me donner un coup de pied,
03:50mais j'esquive et je lui balance un une, deux, gauche, droite, qu'il est temps pour le compte.
03:57Avant de quitter la pièce, gentiment, je desserre sa cravate
04:01et ouvre son col de chemise pour que sa respiration reprenne un rythme régulier.
04:07Dans quelques heures, il sera probablement sur pied et de nouveau assoiffé.
04:12Le téléphone sonne dans le hall d'accueil.
04:17« Je regrette, il est ivre mort », dis-je à la fille qui est à l'autre bout du fil.
04:23« Il n'y a personne à part moi, ils sont tous partis pour assister au match de foot.
04:27Je peux quelque chose pour vous ? Je suis Walt Whitson. »
04:31J'essaie de prolonger la conversation et j'ai bien l'impression que ça marche.
04:37« Oh, Walt ! Salut ! C'est Jessie, Jessie Plémat.
04:41Écoute, je suis dans le pavillon d'à côté et quand j'ai vu le cabriolet de plus tôt,
04:44j'ai eu envie de lui proposer de prendre l'apéritif.
04:47J'exagère, hein ?
04:48« Mais pas du tout, pas du tout, Jessie.
04:50C'est un honneur que tu lui fais, »
04:52dis-je en me rappelant la plus belle fille du campus,
04:56mais pour qui les études ne sont qu'un prétexte.
05:00« Oh, c'est toi, Walt Whitson !
05:03On s'est perdu de vue, pas vrai ?
05:05Mais je garde un excellent souvenir de toi. »
05:08Le téléphone tremble dans ma main.
05:10Mon cœur bat la chamade.
05:13« Tant pis, je me lance. »
05:15« Eh bien, Jessie, peut-être que je peux remplacer plus tôt. »
05:20Comme je vous l'ai déjà dit, je travaille dur pour payer mes études
05:23et je connais le prix de l'argent.
05:26Malgré tout, je me suis constitué une cagnotte
05:29pour le jour où je trouverai une fille qui vaudra le coup.
05:32Je dispose donc aujourd'hui de 80 dollars,
05:36somme considérable pour moi.
05:39Et voilà que je veux les dépenser pour une fille
05:42à qui je n'ai même jamais parlé.
05:44Ma parole, je suis fou.
05:47« Faute de grives, on mange des merles, comme on dit, hein, Walt ?
05:50Et si je me laissais séduire par Walt, le merle siffleur, hein ? »
05:55« D'accord, Walt.
05:56À quelle heure ? »
05:58« Je passe te prendre dans 20 minutes, Jessie. »
06:02Tout tremblant et un peu étourdi,
06:04je passe en vue le contenu de mon armoire.
06:07Je sors mon costume, ma cravate et ma chemise.
06:11Quand je suis devant le placard du vestiaire,
06:14je prends le manteau en cuir de plus tôt.
06:17Après tout, c'est à lui qu'elle avait pensé en premier lieu, non ?
06:22Je prends mon portefeuille et mes 80 dollars,
06:25résultat de mes économies laborieuses.
06:28Je suis tenté d'emprunter le cabriolet de plus tôt,
06:31mais finalement, je n'ose pas.
06:33Et je prends la guimbarde du cercle.
06:37Je me garde devant le pavillon des filles
06:39et je vois apparaître Jessie.
06:43Elle est aussi ravissante que dans mon souvenir.
06:46Petite poupée aux yeux verts, pailletée d'or,
06:49aux cheveux blonds vénitiens relevés en un chignon à moitié défait.
06:54Quand elle se tient immobile,
06:56le bas de sa robe atteint juste le haut de ses cuisses.
06:59Mais elle n'est jamais immobile.
07:03Elle m'examine et sourit
07:05dans un lent et délicieux élargissement de sa bouche rouge,
07:10très rouge.
07:12Elle est accroquée, accroquée.
07:14Elle monte en voiture
07:17et je démarre.
07:20« Voyons, Walt,
07:22pourquoi es-tu resté si longtemps loin de moi ? »
07:25demande-t-elle en effleurant ma cuisse.
07:29« Pour être au comble du bonheur aujourd'hui,
07:31Jessie, mon ange,
07:33j'ai le cœur qui bat si fort
07:34que je peux à peine parler.
07:36Quand je pose timidement mon bras sur sa nuque
07:40et qu'elle laisse sa main sur ma cuisse,
07:43je me sens plein de force
07:45et plus léger clair.
07:48Je m'arrête à la première station-service
07:50et je mets cinq litres d'essence.
07:53Dix minutes plus tard,
07:54je garde la voiture sur le parking du Diabolic Night.
07:56Je prends deux billets
07:57qui donnent droit à deux entrées
07:59et à deux consommations.
08:00Quand Jessie entre dans la salle,
08:04toutes les têtes se tournent vers elle.
08:07J'ai toujours remarqué
08:08que Jessie exerce ce magnétisme
08:10quand elle apparaît quelque part.
08:13Le barman s'adresse à nous
08:14avec condescendance.
08:16« Qu'est-ce que vous prenez, mademoiselle ? »
08:18« Une vodka, s'il vous plaît,
08:20polonaise et glacée ! »
08:22dit-elle avec un sourire enjôleur.
08:25Au premier tango,
08:28j'invite Jessie à danser.
08:31Quand nous regagnons les banquettes
08:32de velours noir,
08:33je commande à nouveau
08:34deux vodkas glacées et polonaises,
08:37ce qui a pour effet
08:38de considérablement aplatir mon portefeuille,
08:41mais ça ne fait rien.
08:42Je suis heureux
08:43et le bonheur n'a pas de prix, n'est-ce pas ?
08:46Je pose mes lèvres brûlantes
08:48sur la main de Jessie.
08:51Des amis de Jessie
08:51et des membres du cercle des intellectuels
08:54passent à notre table
08:55et s'assied quelques minutes
08:56pour me montrer à la hauteur
08:58de la situation
08:59qu'en marge,
09:01la meilleure amie de Jessie
09:02arrive avec son petit ami,
09:04j'offre une tournée.
09:06Après avoir réglé
09:07toutes ces consommations,
09:09je constate avec désagrément
09:10qu'il me reste en tout et pour tout
09:13cinq dollars.
09:17Lorsque je lève les yeux,
09:19Jessie me regarde
09:20avec une expression étrange.
09:22Je comprends cinq minutes plus tard
09:25quand elle jette un coup d'œil
09:27à sa montre et s'écrit
09:28« Mon Dieu, neuf heures déjà !
09:29Oh, Walt, je suis désolé,
09:31il faut absolument que je parte,
09:32j'avais rendez-vous à 8h30.
09:33Je me sentais tellement bien
09:34que je n'ai pas vu le temps passer. »
09:37Et Jessie se lève.
09:40Je réalise seulement maintenant
09:41qu'elle n'est qu'une allumeuse,
09:43qu'une profiteuse.
09:46Quand le type est fauché,
09:47il ne l'intéresse plus
09:48et elle passe au suivant.
09:51Je réalise
09:52que je me suis conduit
09:54comme un imbécile.
09:56Je me suis fait avoir.
09:58Et ça me rend furieux.
10:00Je n'ai jamais supporté
10:01qu'on se moque de moi.
10:04Je donne ma dernière pièce de 20 cents
10:05à la fille du vestiaire.
10:08À grandes enjambées,
10:09je traverse le parking
10:10et Jessie doit courir
10:11pour rester à ma hauteur.
10:13Quand nous roulons vers la ville,
10:14Jessie proteste
10:15qu'elle n'a pas parlé
10:16de dîner avec moi
10:16puisqu'elle savait
10:17qu'elle avait un rendez-vous,
10:18qu'elle a été claire
10:19et que c'est moi
10:20qui n'ai pas voulu entendre.
10:24L'effet de l'alcool s'estompe
10:25et le souvenir
10:26d'avoir gaspillé
10:27tout cet argent
10:28pour une fille
10:29qui s'est moquée de moi
10:30me rend de plus en plus furieux.
10:36Ne joue pas l'innocente avec moi,
10:37s'il te plaît, Jessie.
10:39Tu n'es qu'une allumeuse,
10:40rien d'autre.
10:41Plus vite je serai débarrassé de toi
10:42et mieux je me porterai.
10:44Si tu veux sortir
10:45avec plutôt mythique,
10:46il va falloir
10:46que tu le remettes sur pied.
10:48Je l'ai quelque peu
10:49malmené ce soir.
10:52Enfin,
10:53je dépose Jessie
10:54devant le pavillon des filles
10:55et on se quitte
10:56sans un mot.
11:00Tout mon argent
11:01envolé en une soirée
11:03pour rien,
11:05cette garce de Jessie
11:06me le paiera.
11:08Comment ?
11:10C'est ce que vous saurez
11:11dans quelques instants.
11:11Jessie
11:22Playmate
11:23avait l'intention
11:24de sortir
11:24avec plutôt mythique,
11:26mais le riche Playboy,
11:27qui est étudiant
11:28comme moi,
11:29qu'eut une cuite
11:30aggravée
11:31par la bagarre
11:32qu'il vient d'avoir
11:32avec moi
11:33et qu'il a laissé KO.
11:35J'en profite
11:36pour le remplacer
11:37auprès de la séduisante Jessie.
11:39Après un début
11:41de soirée prometteur
11:42mais coûteux,
11:44Jessie me déclare
11:45qu'elle avait
11:45un autre rendez-vous.
11:48Je suis furieux,
11:50furieux de m'être
11:50fait avoir
11:51par cette garce de Jessie
11:52qui n'est qu'une allumeuse.
11:56Je l'ai ramenée
11:56au pavillon des filles
11:57et je la quitte
11:59sans un mot.
12:02Le cabriolet de Plutôt
12:03n'a pas bougé
12:04et la porte
12:05de sa chambre
12:06est fermée.
12:07Je présume
12:08qu'il est affalé
12:09sur son lit
12:09à côté d'une bouteille.
12:11Il n'y a personne
12:12dans le bâtiment.
12:14Avant de me séparer
12:15de son manteau
12:15en cuir,
12:16je fouille les poches
12:17et ma main
12:18rencontre un objet
12:19lourd et froid.
12:22Le briquet
12:22en or de Plutôt,
12:24celui qu'il m'a accusé
12:26de lui avoir volé.
12:28J'ai alors
12:29la vague idée
12:29de faire un scandale public
12:30en lui jetant
12:31son briquet à la tête
12:32puisqu'il m'a accusé
12:33devant tout le monde
12:34de l'avoir volé.
12:36Je glisse donc
12:37le briquet
12:38dans ma propre poche
12:39et je remets
12:40le manteau de cuir
12:41à sa place habituelle.
12:45Écoeuré
12:45et en même temps
12:47sur les nerfs,
12:48je décide
12:49d'aller respirer
12:50l'air embaumé
12:50de cette nuit printanière
12:52et je sors
12:53par la porte
12:54de derrière.
12:57Je froid,
12:59froid de colère,
13:01d'amour propre
13:01blessé
13:02et de honte.
13:04Je m'efforce
13:05de me dire
13:06que ces choses-là
13:07arrivent aux autres aussi,
13:08que personne
13:09ne se moquera de moi,
13:10que Jessie
13:11n'en parlera pas
13:12plus tôt.
13:13Mais je devine
13:14qu'elle le fera
13:15au contraire.
13:17Et je sais
13:18que je ne pourrais pas
13:18supporter
13:19que ce type
13:20me tourne en ridicule.
13:21Je n'ai jamais supporté
13:22qu'on se moque de moi.
13:26Alors,
13:26j'envisage
13:28de quitter
13:29cette faculté
13:30pour aller m'inscrire
13:31ailleurs
13:32ou on ne saura
13:33rien de moi.
13:35Il suffit
13:36que je prenne
13:36le train.
13:38Mais le hic
13:39c'est que je n'ai
13:41même plus
13:41assez d'argent
13:42pour acheter
13:42un billet.
13:46Entre le pavillon
13:47des filles
13:48et celui
13:48des garçons,
13:50il y a
13:50un immense terrain
13:51vague
13:52dont chaque bosquet,
13:53chaque banc,
13:54chaque parcelle
13:55de pelouse
13:56abrite
13:57des amoureux
13:58qui profitent
13:59de la nuit noire
14:00pour s'aimer.
14:01On a donc surnommé
14:02ce lieu
14:03de rendez-vous
14:04le jardin
14:05des délices.
14:08Ce soir,
14:09il est presque
14:10désert.
14:11Mais je distingue
14:12sur un banc
14:13et abrité
14:14de l'humidité
14:14par les branches
14:15d'un saule pleureur
14:16les silhouettes
14:18de deux filles.
14:20Je marche
14:20vers elles
14:21et malgré moi,
14:22je prête
14:24attention
14:24à leur voix.
14:26L'une d'elles
14:27a des intonations
14:29argentines
14:30que je reconnais.
14:32Je m'arrête
14:33et je tends
14:34l'oreille.
14:35Ah, Doris,
14:36si tu avais vu
14:37la tête qu'il faisait
14:38quand il a vu
14:38qu'il en était
14:39à son dernier billet
14:40de cinq dollars,
14:40on aurait dit
14:41un martien
14:41tombé sur la terre.
14:43Qu'est-ce qu'il avait
14:43l'air ridicule.
14:44Je te jure bien
14:45que si j'avais su
14:46que c'était un fauché,
14:47je ne l'aurais pas pris
14:48comme remplaçante
14:48plus tôt,
14:49même pour une heure.
14:51La méchanceté
14:52de ces propos
14:53ne m'atteint pas.
14:54Je pense même
14:55que
14:55leur bassesse
14:57me protège.
14:59Adossée
15:00à un pain,
15:01j'écoute
15:02cette petite garce.
15:04Soudain,
15:05la sonnerie
15:06du téléphone
15:07retentit
15:07dans le pavillon
15:08des filles.
15:09Doris se précipite
15:11vers sa chambre
15:11pour y répondre.
15:12Jessie restait seule,
15:15fredonne.
15:16Pourquoi belle,
15:17belle,
15:18qui a vu
15:18le loup,
15:19le loup ?
15:19Pourquoi belle,
15:20belle,
15:20a-t-elle laissé
15:21le loup
15:21approcher le loup ?
15:24Jessie a-t-elle
15:26une prémonition ?
15:28Même quand je suis
15:30juste derrière elle,
15:31elle continue
15:32à fredonner
15:33tranquillement.
15:35Alors,
15:36mes mains
15:37se serrent
15:37autour de son cou
15:38et,
15:40brutalement,
15:42plus un son
15:43ne sort
15:44de sa gorge.
15:45À présent,
15:49elle gît
15:49sur le sol
15:50parfaitement immobile
15:52et tout ce que j'éprouve
15:54c'est un intense désir
15:56de me laver les mains.
15:57Je cherche mon mouchoir
15:58dans ma poche
15:59et je sens
16:00le briquet en or
16:01de plus tôt.
16:03Encore la fatalité
16:04ou peut-être
16:05simplement
16:05la justice.
16:08J'entoure le briquet
16:09avec le mouchoir
16:10et je laisse tomber
16:12l'objet
16:12tout près
16:14de la tête
16:15de Jessie.
16:18Le destin
16:18semble toujours
16:19être avec moi.
16:21La fenêtre
16:21de la chambre
16:22de Madame Winch,
16:24la gardienne,
16:25laisse filtrer
16:26une lueur jaune.
16:27Cela signifie
16:27qu'elle est en train
16:28de passer sa chemise
16:29de nuit
16:30et qu'elle a ôté
16:31ses lunettes.
16:32Je chronomètre
16:33avec précision
16:34de façon que
16:34l'aiguille des secondes
16:36de la pendule
16:36de sa chambre
16:37se trouve exactement
16:39à l'endroit voulu.
16:41Je vous l'ai dit,
16:42je suis pauvre
16:42et je travaille
16:43à des petits boulots
16:45à droite et à gauche
16:46pour payer mes études
16:47et en échange
16:48de la gratuité
16:49de ma chambre,
16:50je rends quelques services
16:51pour le cercle.
16:52Notamment,
16:53je suis chargé
16:54de veiller
16:54à ce qu'il y ait
16:55toujours assez de bois
16:56dans le poil
16:57du pavillon
16:57de la gardienne.
16:59Je laisse tomber
17:00le panier de bûche
17:00pour attirer son attention.
17:02Elle entrebaille
17:03la porte
17:03de la salle de bain.
17:04« Ne vous inquiétez pas,
17:05Mme Winch,
17:06c'est moi, Walt.
17:07Excusez,
17:08je suis un peu en retard. »
17:10Son regard de myope
17:11s'oriente vers la pendule
17:12et elle hoche la tête.
17:14« Enze heures moins le quart,
17:16tu es à peine en retard, Walt.
17:17Merci et bonne nuit. »
17:19Ça a marché.
17:21Je monte,
17:23sans bruit,
17:24l'escalier
17:25qui mène
17:25à ma chambre.
17:27Maintenant que Mme Winch
17:28est persuadée
17:29de m'avoir vue
17:29à onze heures moins le quart,
17:31je n'ai plus
17:32à m'inquiéter.
17:33Le coup de téléphone
17:34de Doris
17:34était arrivé
17:35à onze heures moins le quart
17:36exactement.
17:38Tout a marché
17:39à la perfection.
17:41Jesse,
17:42le briquet,
17:44plutôt,
17:45ivre dans sa chambre,
17:47j'ai un alibi
17:48en béton.
17:50À peine couché,
17:52je m'endors.
17:54Une heure plus tard,
17:55la police est là.
17:57Un policier
17:57gras et blond
17:59et un autre,
18:00jeune et bronzé.
18:01Il frappe plusieurs fois
18:02et je finis
18:04par me réveiller.
18:06J'enfile une robe
18:07de chambre
18:07et j'ouvre la porte.
18:09Je réponds docilement
18:10et calmement
18:10à leurs questions.
18:12Je continue
18:12à me fier
18:13au destin.
18:14Oui,
18:15j'étais ce soir
18:16avec Jessie Plémat.
18:17Oui,
18:18je l'ai ramenée
18:19chez elle
18:19vers 10h30 environ
18:21parce qu'elle avait
18:22un autre rendez-vous
18:23après.
18:24Ah non,
18:24non,
18:25je ne savais pas
18:25avec qui.
18:26Oui,
18:27j'ai été contrarié
18:28tout d'abord
18:28mais ensuite soulagé
18:30parce qu'il ne me restait
18:30que 5 dollars en poche.
18:33Nous aurions dû rentrer
18:34de toute façon.
18:35Mais pourquoi
18:36toutes ces questions ?
18:38Jessie Plémat
18:39vient d'être étranglé,
18:41me dit le gros.
18:43C'était plutôt
18:44impressionnant
18:45à entendre.
18:47J'ai été aussi choqué
18:48que si mes propres mains
18:49ne s'étaient parfermées
18:50sur la gorge
18:51de cette petite garce.
18:52« À quelle heure
18:54êtes-vous rentré
18:55chez vous ? »
18:56me demande
18:56l'autre flic.
18:58« Eh bien,
18:58écoutez,
18:59monsieur,
18:59je suis passé
19:00déposer la provision
19:01de bois
19:01chez la gardienne.
19:02Il était 11h moins le quart.
19:04C'est elle qui me l'a dit.
19:04J'étais un peu en retard.
19:05Vous voyez-vous,
19:06elle m'a même dit
19:07que ce n'était pas grave.
19:08Oui,
19:08j'ai entendu
19:09deux voix féminines
19:11au jardin des délices
19:12quand je suis sorti
19:13prendre l'air
19:13quelques instants
19:14mais en fait,
19:15je ne leur ai pas
19:16prêté attention.
19:17J'ai juste entendu
19:18une sonnerie de téléphone
19:19et je suis passé
19:20voir la gardienne.
19:21C'est alors
19:24que le gros policier
19:25me met le briquet en or
19:26de Plutomitsic
19:27sous le nez
19:27et il me demande
19:29si ça me dit
19:29quelque chose.
19:31« Ben,
19:32non.
19:32Pourquoi ? »
19:34Il me demande
19:35si je connais quelqu'un
19:36qui possède
19:37un briquet en or.
19:39Je réfléchis
19:40un instant.
19:42« Ah,
19:43ben,
19:43oui,
19:44monsieur.
19:45Plutomitsic,
19:46il est censé
19:46en avoir un
19:47mais je ne l'ai jamais vu.
19:48Vous n'avez qu'à
19:49lui demander.
19:49Merci,
19:51mais il faudrait pour ça
19:52qu'il soit en état. »
19:54me dit laconiquement
19:55le gros flic
19:56en remettant le briquet
19:58dans sa poche.
20:00« Comment ça,
20:02monsieur le policier ?
20:03Vous voulez dire
20:03qu'il n'est pas encore
20:04dessoulé ? »
20:06« Quand je suis parti,
20:07il était complètement
20:07à chaise
20:08et tout à l'heure
20:09sa porte était toujours
20:10fermée. »
20:11« C'est à l'hôpital
20:12qu'il est votre copain.
20:13Enfin,
20:14copain,
20:15pas vraiment, hein ? »
20:17Il m'a dit ça
20:18en souriant bêtement,
20:20le gros flic.
20:21Il guette ma réaction,
20:23sans doute.
20:25« Le Tomitsic
20:25a été conduit
20:26à l'hôpital
20:27pour un lavage
20:28d'estomac.
20:29Il ne peut pas parler
20:30et il est paralysé
20:32du côté droit
20:32pour avoir bu
20:34de l'alcool frelaté.
20:35Mais il voulait absolument
20:36nous dire quelque chose.
20:38Il a donc dessiné
20:39sur le drap,
20:40avec sa main gauche,
20:42des lettres
20:43de l'alphabet
20:43jusqu'à ce que nous
20:45puissions déchiffrer.
20:46Le message
20:48était fort clair.
20:50« Walt
20:50Whitson,
20:51voler
20:52briquet ! »
20:53Et comme
20:54on a retrouvé
20:55le briquet
20:56près du cadavre
20:57de Jesse
20:57Plémat,
20:59il me semble
21:00que vous êtes
21:00mal parti,
21:01mon garçon.
21:04Mal parti ?
21:06Oui.
21:08Mais ça fait
21:08longtemps déjà
21:09que je suis mal parti.
21:10Oh,
21:11je ne suis pas
21:11le seul.
21:12Jesse,
21:13la garce,
21:14elle est morte.
21:15Plutôt,
21:16l'orgueilleux,
21:17plutôt,
21:18est paralysé
21:19à vie.
21:20Et moi,
21:22moi,
21:23j'ai pris
21:23vingt ans.
21:25Ce qui me navre
21:26vraiment,
21:26voyez-vous,
21:27c'est qu'en prison,
21:27le niveau intellectuel
21:29est tellement bas,
21:30tellement bas,
21:32qu'il me sera
21:33impossible de fonder
21:34un cercle
21:35des intellectuels.
21:37Mon Dieu,
21:39je vais bien
21:39m'ennuyer
21:40pendant vingt ans.
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