- il y a 5 jours
Et si le rêve d'Europe de Valéry Giscard d'Estaing s'était accompli ?
De quelle Europe serions-nous les citoyens aujourd'hui ? L'Europe disposerait-elle d'une armée puissante, d'une constitution, d'une nouvelle solidarité ?
La carrière politique de Valéry Giscard d'Estaing a épousé, de 1945 au referendum sur la constitution européenne de 2005, le temps long et laborieux de la réalisation de l'unité européenne, toujours envisagée, rarement atteinte.
Jeune ancien combattant de la seconde guerre mondiale, il est dans les années 50 le témoin de la naissance de l'idée même d'une Europe unie. Puis, dans les années 60, il est un catalyseur d'idées jugées bizarres comme la monnaie unique, et pour 7 ans, de 1974 à 1981 un accélérateur de particules d'une Europe qui se complaisait alors dans l'immobilisme. Enfin il est, à partir de 2001, président de la Convention sur l'Avenir de l'Europe et architecte de la Constitution Européenne, texte ambitieux qui ouvre la porte au fédéralisme européen. Ce texte sera finalement balayé par le referendum de 2005.
Toute sa vie, Giscard aura poursuivi comme une obsession, son rêve européen.
De quelle Europe serions-nous les citoyens aujourd'hui ? L'Europe disposerait-elle d'une armée puissante, d'une constitution, d'une nouvelle solidarité ?
La carrière politique de Valéry Giscard d'Estaing a épousé, de 1945 au referendum sur la constitution européenne de 2005, le temps long et laborieux de la réalisation de l'unité européenne, toujours envisagée, rarement atteinte.
Jeune ancien combattant de la seconde guerre mondiale, il est dans les années 50 le témoin de la naissance de l'idée même d'une Europe unie. Puis, dans les années 60, il est un catalyseur d'idées jugées bizarres comme la monnaie unique, et pour 7 ans, de 1974 à 1981 un accélérateur de particules d'une Europe qui se complaisait alors dans l'immobilisme. Enfin il est, à partir de 2001, président de la Convention sur l'Avenir de l'Europe et architecte de la Constitution Européenne, texte ambitieux qui ouvre la porte au fédéralisme européen. Ce texte sera finalement balayé par le referendum de 2005.
Toute sa vie, Giscard aura poursuivi comme une obsession, son rêve européen.
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00:00Oui, nous pouvons rêver et faire rêver de l'Europe.
00:09Et si le rêve d'Europe unie de Valéry Giscard d'Estaing s'était accompli ?
00:15De quelle Europe serions-nous les citoyens aujourd'hui ?
00:20L'Europe disposerait-elle d'une armée puissante, d'une constitution, d'une nouvelle solidarité ?
00:27Serait-elle respectée ou crainte ?
00:29La carrière politique de Valéry Giscard d'Estaing a épousé de 1945 au référendum sur la constitution européenne de 2005
00:40le temps long, laborieux, parfois fructueux, souvent douloureux de la réalisation de l'unité européenne,
00:49toujours envisagée, rarement attente.
00:53Jeune ancien combattant, il est le témoin de la naissance de l'idée même d'une Europe unie.
00:58puis un catalyseur d'idées jugées bizarres.
01:02Il faudra mettre en place une monnaie européenne et je vous indique que c'est possible.
01:06Monsieur le Président de la République.
01:10Et pour sept ans, un accélérateur de particules d'une Europe qui se complaisait alors dans l'immobilisme.
01:16Pour finir, tel Saint-Louis sous son chêne, arbitre des élégances d'un texte ambitieux, finalement balayé.
01:28Toute sa vie, Giscard aura poursuivi comme une obsession son rêve européen.
01:33Né en 1926 en Allemagne, Valéry Giscard d'Estaing vit son adolescence à Paris, pendant l'occupation.
01:48Il était d'une famille qui était maréchaliste, notoire et d'un certain niveau en plus d'engagement.
01:54D'origine auvergnate, son père, Edmond, inspecteur des finances, a fait toute sa carrière en administrant de puissantes sociétés coloniales.
02:04Et dans les bonnes familles, quand le père avait fait quelque chose d'un peu incongru, le fils s'engageait.
02:12Après quelques faits de résistance, et alors qu'il se prépare à entrer à Polytechnique,
02:16il lâche ses études pour participer en août 1944 à la libération de Paris.
02:22Il a 18 ans.
02:23Quand on le voit autour du parcours de Valéry Giscard d'Estaing, on s'aperçoit que très jeune, il a eu le souci de ne pas passer à côté de l'histoire.
02:30Il entend le discours du général de Gaulle qui dit « la France libérée, Paris libérée par ses propres forces »
02:37et il dit « mais en fait, la guerre n'est pas finie, Hitler est toujours à Berlin, la moitié de la France est encore occupée par les Allemands ».
02:45Alors que rien ne l'obligeait à s'engager, alors qu'il a 18 ans, au lendemain de la libération de Paris,
02:52il s'engage contre le vœu de son père. Son père était furieux parce qu'il préparait l'X.
02:57Il a été un rebelle à ce moment-là.
03:00Le jeune Valéry s'engage dans l'armée de Delattre, parti à l'assaut de la frontière allemande et des restes de l'armée nazie.
03:06Sa guerre se finira à Constance.
03:09Il a pris des risques, il a participé à toute la campagne, même en 1945, jusqu'à la fin de la guerre.
03:16Et ça n'a pas été une partie de plaisir. Il a vraiment combattu.
03:21Il revient le 14 juillet 1945. Il est sur son char, Sherman, sur la place de la Bastille.
03:30Et on le voit sur la tourelle de son char.
03:32C'est toute l'armée de la nation qui défile aujourd'hui sur le sol même, où se dressait autrefois la Bastille.
03:38Et fondamentalement, son engagement européen, il est né pendant cette période de la conviction qu'il fallait tourner la page.
03:46On sort de trois guerres dramatiques pour l'Europe.
03:57L'Europe est à plat.
03:58Et des gens intelligents, des gens sensibles, c'est-à-dire qu'on ne peut pas continuer comme ça indéfiniment.
04:07C'est-à-dire que dans 15 ans, la France et l'Allemagne vont recommencer.
04:10Et donc, c'est après la guerre que le sentiment, la nécessité de surmonter ces drames de l'histoire est devenu le plus fort.
04:21Et donc, c'est imposé dans la tête des gens.
04:24C'est vraiment l'histoire qui a imposé cette idée européenne.
04:31Il y a l'idée chez lui que cette idée européenne, après la guerre, est le grand combat, finalement, de la génération qui arrive aux affaires.
04:39Son père, Edmond Giscard d'Estaing, était un personnage très traditionnaliste, de sensibilité maurassienne.
04:45Et incontestablement, après la guerre, il adhère à l'idée de l'Union européenne.
04:50Il est clair qu'Edmond Giscard d'Estaing, le père de Valéry, a adhéré au mouvement pan-européen.
04:57Le mouvement pan-européen a été fondé avant-guerre par un diplomate autrichien un peu dandy, Richard Coudeneuve-Kalergi.
05:05L'idée iconoclaste de Coudeneuve, faire l'Union de l'Europe.
05:09Richard Coudeneuve-Kalergi a compris, à l'issue de la guerre désastreuse pour toute l'Europe, qu'il fallait que l'Europe se ressaisisse.
05:17Et il a eu cette idée géniale, révolutionnaire, de produire un projet européen d'union, s'appuyant sur une entente franco-allemande, dans une perspective politique, d'union politique et de défense.
05:35Coudeneuve-Kalergi sentait la nécessité pour l'Europe qu'il souhaitait, pour la pan-Europe qu'il voulait, d'avoir un leader.
05:45Quelqu'un qui puisse inspirer le grand public, donc le leader en l'occurrence qui s'imposait, c'était Churchill.
05:52Rejeté dans l'opposition à la fin de la guerre, Churchill est fasciné par le projet pan-européen de Coudeneuve-Kalergi.
06:01Il décide alors de lui apporter un soutien spectaculaire.
06:04Je vais maintenant dire quelque chose qui va vous étonner.
06:12Le premier step dans la récréation de l'éropéenariat doit être une partnership entre France et l'Allemagne, entre les États-Unis d'Europe.
06:25Compte tenu de ce que pouvait être Giscard à ce moment-là, il était suffisamment ouvert, curieux et intelligent pour avoir évoqué les idées de Coudeneuve sur l'Europe avec son père.
06:37Tout cela milite pour faire dans sa propre culture personnelle et politique l'idée forte qu'il faut construire l'Europe en ayant certainement une influence et une reconnaissance pour ceux qui ont posé les jalons du mouvement européen.
06:55En ce début des années 50, la jeunesse européenne semble être saisie d'une fièvre fédéraliste.
07:02Le modèle des États-nations, celui qui a détruit l'Europe, est désormais obsolète.
07:06Il faut partir à l'assaut des postes frontières, faire de l'Europe un territoire indivisible.
07:13Deux hommes surfent sur cette nouvelle vague.
07:16Le ministre Robert Schumann et Jean Monnet, un haut fonctionnaire aux talents multiples.
07:20Il propose la création de la communauté européenne du charbon et de l'acier, unissant la production industrielle de la France, de l'Allemagne, de l'Italie et du Benelux.
07:32L'Europe ne se fera pas d'un coup, ni dans une construction d'ensemble.
07:39Elle se fera par des réalisations concrètes, créant d'abord une solidarité de fait.
07:45La proposition de Robert Schumann, inspirée par le plan préparé par Jean Monnet, c'est vraiment de poser une première pierre à travers cette communauté européenne du charbon et de l'acier.
07:57Mais cette communauté européenne du charbon et de l'acier, elle doit en fait permettre de créer une fédération européenne dans les années qui suivent.
08:03L'ACK devient la première organisation au monde basée sur la supranationalité.
08:10On oublie souvent, mais dans la déclaration Schumann, il est cité l'objectif de créer une fédération européenne.
08:16Nous voulons l'unification de l'Europe.
08:19Faire d'unité de l'Europe, c'est notre tâche essentielle et immédiate.
08:23Aucune autre politique n'est capable de sauver les pays européens de leur division, de nos antagonismes et de nos impuissances.
08:38Depuis 1945, depuis que la Russie de Staline a mis l'Est de l'Europe sous sa coupe, le monde est entré en guerre froide.
08:46Sous la pression des Etats-Unis, l'Europe de l'Ouest, Allemagne comprise, doit se réarmer et vite pour faire face à l'ogre russe.
08:55À partir du moment où vous avez une réalité d'une Europe dans un monde bipolaire, entre les Etats-Unis d'un côté et l'Union soviétique de l'autre,
09:07une armée européenne, c'est la souveraineté européenne qui est capable de se défendre.
09:12Alors que les premiers trains de la CECA traversent les frontières européennes sans payer de droit de douane,
09:20Jean Monnet propose alors de franchir une nouvelle étape dans l'Union.
09:23La défense européenne, c'est une proposition française, avec deux raisons.
09:29Un, bien sûr, cette idée d'organiser la défense européenne dans un contexte de guerre froide qui se cristallise.
09:37Et puis pour les Français, il y a un autre aspect qui est particulièrement important,
09:41c'est d'organiser le réarmement de l'Allemagne à l'époque.
09:44Les Français n'ont absolument pas envie que l'Allemagne reconstruise une armée qui soit hors de contrôle.
09:51Et donc finalement, la défense européenne, c'est aussi un moyen de répondre à cet enjeu,
09:55puisque ce réarmement se ferait dans le cadre d'une défense européenne.
10:00À Paris, au Quai d'Orsay, la conférence sur la formation de l'armée européenne que présidait M. Schumann a commencé ses travaux.
10:05La communauté européenne de défense soulève l'enthousiasme.
10:10Elle se voit parée de toutes les vertus.
10:13Elle serait une assurance contre un retour du nazisme et un bouclier contre le communisme.
10:17Edmond Giscard d'Estaing est à fond pour.
10:21Il y voit une source de prospérité.
10:24Qu'a donc attendu l'Europe pour se doter d'un projet aussi ambitieux ?
10:27La communauté européenne de défense, elle prévoit vraiment une armée européenne.
10:33C'est 42 divisions, donc c'est 800 000 hommes.
10:39Avec des chars, des avions.
10:41On imagine des soldats en uniforme, avec un uniforme commun,
10:46et qui vont aller se battre de manière commune pour défendre l'Europe occidentale à l'époque.
10:51Pour son commandement, on imagine un ministre de la défense européen,
10:57qui est un ministre qui est en charge de diriger finalement cette armée,
11:01et qui doit être responsable devant des institutions politiques.
11:04L'idée, c'est de construire des institutions politiques qui doivent chapeauter cette défense européenne,
11:10qui représentent à la fois les gouvernements nationaux,
11:14mais qui représentent aussi la volonté populaire, si on veut.
11:18Et donc, c'est pour ça qu'on imagine aussi tout de suite un Parlement,
11:22élu au suffrage universel,
11:23qui est chargé de contrôler les agissements de ce ministre,
11:26et de contrôler ce qui est fait de cette défense européenne.
11:29À Paris, les délégués de Fesson Réunier n'y au qu'est l'Orsay pour signer les trois nôtres du monde,
11:33qui constituent l'acte de naissance de l'armée européenne.
11:37Deux ans après la signature du traité instituant la CED,
11:41c'est la France qui va mettre en échec le projet, au moment de le faire ratifier.
11:46Par un artifice de procédure, et sans même le voter,
11:49le gouvernement français, alors dirigé par Pierre Mendès France,
11:52abandonne l'idée, son idée, d'une armée européenne.
11:56L'opposition farouche des gaullistes déjà souverainistes
12:00et des communistes alors inféodés à Moscou
12:02vont enterrer le traité à l'Assemblée nationale.
12:06Et alors que le reste du continent était partant,
12:09l'Europe a perdu, et pour longtemps, son rêve d'unité militaire.
12:14Pour le chancelier allemand Adenauer,
12:17c'est un jour noir pour l'Europe.
12:20L'échec de cette communauté européenne de défense,
12:23c'est le premier coup d'arrêt, c'est le premier non à l'Europe,
12:26le premier noir à l'Europe des Français, il y en aura d'autres.
12:29Et c'est une première crise, voire un doute presque existentiel
12:34pour les militants de l'Europe.
12:38Malgré l'échec de la CED,
12:40le jeune haut fonctionnaire Giscard d'Estaing, toujours enthousiaste,
12:43rejoint le Comité pour les États-Unis d'Europe, créé par Jean Monnet.
12:48Son Comité pour les États-Unis d'Europe,
12:49c'est un groupe qui vise à influencer le processus de la construction européenne.
12:54C'est un peu ce qu'on pourrait appeler aujourd'hui un think tank, si on veut.
12:56Son objet, c'était de maintenir vivant parmi ces hommes politiques responsables
13:03et parfois puissants dans leur pays,
13:06l'idée que l'Europe était nécessaire et indispensable.
13:09Quand il parle des États-Unis d'Europe, la référence est claire.
13:11Il imagine que cette Europe supranationale va se construire par sauts successifs
13:18parce que, finalement, on va coopérer dans un certain nombre de domaines.
13:24Ces coopérations vont peser un certain nombre de questions ou de problèmes
13:26qu'il faudra résoudre et donc il nous faudra coopérer dans d'autres domaines.
13:30Et au fur et à mesure, on va étendre le champ des coopérations
13:34et les prérogatives des institutions qui ont été créées au niveau supranational.
13:40Sorti dans la botte de l'ENA,
13:41Giscard, finalement séduit par la politique,
13:43a rejoint le cabinet du nouveau président du Conseil,
13:47le centriste Edgar Ford.
13:49La politique se rapproche de Giscard à grands pas.
13:52Lorsqu'Edgar Ford est renversé,
13:54un classique de la Quatrième République,
13:56Giscard franchit alors le Rubicon.
13:59Il va se présenter en Auvergne aux législatives de 1955.
14:03Il a parcouru tout le département
14:05dans une vieille voiture
14:08avec quelquefois des accidents.
14:10Et à l'époque, les routes n'étaient pas bien fameuses
14:14et en plus, c'était en plein hiver
14:16et l'Auvergne était à l'époque
14:18beaucoup plus rude que maintenant.
14:21Il aimait le contact des gens
14:23et il était heureux d'aller les rencontrer,
14:27discuter avec eux,
14:29essayer de les persuader de voter pour lui.
14:34Ça, il aimait beaucoup.
14:40Il venait à la suite d'un homme de 80 ans.
14:44Ça renouvelait un peu les choses.
14:48Il a 30 ans quand il entre à l'Assemblée nationale.
14:52La France est préoccupée par l'Algérie,
14:54bientôt par la crise de Suez
14:55et par la négociation d'un nouveau traité européen
14:58censé créer un marché commun
15:00entre les six pays de la CK.
15:01Il y avait un grand débat
15:04sur la ratification du traité de Rome.
15:07Dans le cadre de ce débat,
15:08il y avait deux interventions marquantes.
15:10D'une part, Pierre Madès-France pensait
15:12que, en ce qui concerne le marché commun,
15:14que l'économie française
15:15n'était pas en état de supporter
15:17l'ouverture des frontières.
15:18Et donc, le jeune Giscard lui répond,
15:21il prend vraiment le contre-pied
15:22de ce que dit Pierre Madès-France.
15:24Il dit oui, il ne nie pas
15:26que le traité de Rome
15:28peut faire courir un risque
15:31à l'économie française.
15:32Mais il dit, il a cette formule,
15:35il dit qu'il faut assumer ce risque.
15:37Je souhaite que nous poursuivions
15:39la construction d'une entité économique
15:41et plus tard politique
15:43à la dimension d'un continent.
15:46Ainsi que la vocation de notre pays
15:48à penser, à éclairer
15:50et peut-être à diriger
15:52cette construction continentale.
15:54Je suis donc favorable
15:56à la ratification de ce traité.
15:59Dans son esprit, il y a cette idée
16:00que désormais, le rôle de la France
16:02est le meilleur rôle qui s'offre à elle
16:03et de prendre la tête du combat
16:05pour l'unification de l'Europe.
16:07À Rome, le palais du Capitole
16:08dessiné par Michel-Ange
16:09et qui domine la ville éternelle
16:11a été le cadre majestueux
16:12de la rencontre des six
16:14venue mettre le point final
16:15aux négociations
16:16instituant le marché commun.
16:18Et même si dans les traités de Rome,
16:20il y a un certain nombre de dispositions
16:21qui peuvent laisser entrevoir
16:23l'émergence d'une Europe politique,
16:26l'élection en suffrage universel direct
16:28du Parlement européen
16:28est déjà prévue dans les traités de Rome.
16:31Simplement, il y a aussi
16:32beaucoup de dispositions
16:33de ces traités de Rome
16:33qui ne vont pas être mis en vigueur,
16:37qui ne vont pas être mis en œuvre.
16:39Et ce qui devait arriver arriva.
16:43La Quatrième République n'a pas survécu
16:44au coup de boutoir de la guerre d'Algérie.
16:47En mai 58,
16:49De Gaulle revient au pouvoir en sauveur.
16:51Hostile au traité de Rome,
16:53il va pourtant l'appliquer.
16:54Mais d'entrée de jeu,
16:56il va doucher les espoirs fédéralistes
16:58qu'avait fait naître le traité.
16:59J'ai déjà dit, je répète
17:01qu'à l'heure qu'il est,
17:02il ne peut pas y avoir
17:03d'autres repossibles
17:06que celles des États,
17:09en dehors naturellement
17:10des mythes, des fictions, des parades.
17:13Repéré par Michel Debré,
17:15nouveau Premier ministre,
17:16Valéry Giscard d'Estaing
17:17démarre une nouvelle vie.
17:19Il entre au gouvernement
17:20comme secrétaire d'État aux finances.
17:23Mettant un mouchoir pudique
17:24sur ses idées européennes,
17:26il accède pour la première fois
17:27au plateau de télévision
17:28J'ai apporté un graphique
17:30pour les téléspectateurs.
17:32et se lance avec énergie
17:34et pédagogie dans sa nouvelle mission.
17:36C'est la production
17:37au cours des dernières années.
17:38Maintenant, il faut la chercher,
17:40c'est au moment où cette courbe
17:41a commencé à ralentir.
17:42Apprécié par le général,
17:44il monte en grade trois ans plus tard.
17:46En 1962,
17:48il devient ministre des Finances.
17:50Un poste à la mesure de ses ambitions.
17:52Il est en charge de redresser la France.
17:55Dans les années 60,
17:56il a toujours cherché
17:57à se différencier des gaullistes.
18:01Il était un allié,
18:02mais il ne voulait pas paraître
18:04comme un subordonné.
18:06Il ne voulait pas être un appoint.
18:08Il voulait définir sa propre identité.
18:11Il la définissait de deux façons.
18:12La première, c'était
18:13en tant que ministre
18:14de l'économie et des finances
18:16et à travers l'Europe.
18:18Et ce qu'on a retenu de lui,
18:20ça a été l'Européen,
18:21qu'il a été toujours,
18:22et pour le coup,
18:24qu'il a été très tôt
18:26par rapport à l'ensemble
18:27de la classe politique.
18:29Il n'était plus que deux en liste.
18:31Et dès 23h,
18:33M. Mitterrand reconnaissait sa défaite.
18:35Ainsi, le général de Gaulle
18:36est réélu pour sept ans
18:37président de la République.
18:38Giscard ne saura jamais
18:43qui de Pompidou
18:44ou de Debré
18:45l'a congédié du gouvernement
18:46après la réélection de de Gaulle.
18:50Ce qu'il voit
18:51comme une profonde injustice
18:53va pourtant libérer ses chaînes.
18:55Oui, mais.
19:03Qui signifie
19:04le soutien de cette politique,
19:08mais accompagné
19:09de la volonté
19:10de proposer
19:11pour l'avenir
19:12un certain nombre
19:14d'orientations fondamentales.
19:17À partir de cet épisode
19:19du Oui mai,
19:20Valéry Scardestin
19:21a été considéré
19:22comme l'homme à abattre
19:23parce que d'abord,
19:24il affirmait
19:24des positions
19:25qui apparaissaient
19:26comme très autonomes
19:27vis-à-vis
19:28de la doxa gaulliste.
19:31Une vieille connaissance
19:32fédéraliste
19:33de son père Edmond,
19:35Richard Coudeneuve-Kalergi,
19:37va se rappeler
19:37au bon souvenir
19:38de Valéry Giscardestin
19:39sous la forme
19:40d'une invitation
19:41au congrès pan-européen
19:42de Vienne.
19:44Entre deux représentations
19:45à l'opéra,
19:46on va cogiter
19:47sur l'avenir de l'Europe.
19:49Giscard doit présider
19:50la commission consacrée
19:51à l'avenir de la monnaie.
19:52Les fédéralistes
19:55ou les pan-européens
19:57de l'époque
19:58étaient relativement
19:59peu nombreux
20:00comme activistes,
20:02mais avaient
20:02beaucoup d'influence.
20:04Ils jouaient un rôle
20:05et ils essayaient
20:05de jouer un rôle
20:06constructif.
20:08Ce voyage à Vienne
20:12va être l'occasion
20:14pour Giscard
20:14de lâcher
20:15une bombe fédéraliste
20:16comme une profession
20:18de foi.
20:19Nous proposons
20:19comme objectif
20:20la création
20:21d'une confédération
20:23européenne
20:24qui devrait atteindre
20:25en 1980
20:26sa pleine maturité,
20:29c'est-à-dire
20:29être compétente
20:30pour décider,
20:33pour financer
20:33et pour gérer
20:35la politique extérieure,
20:37la défense
20:38et la monnaie.
20:40C'est un engagement
20:40fort.
20:41Lui,
20:42il y voit
20:42un moyen,
20:44encore une fois,
20:44de réaliser
20:45concrètement
20:46cette unification
20:47de l'Europe
20:47auquel il aspire.
20:49C'est un objectif,
20:50c'est pas un doux rêve
20:51à l'époque
20:52et des plans
20:54de monnaie
20:54uniques
20:56ou en tout cas
20:57d'unification monétaire
20:58des monnaies européennes
20:59existent déjà.
21:00Oui,
21:00on peut le dire,
21:01c'est un objectif politique.
21:02Revenu à Paris,
21:04il continue
21:05sur sa lancée
21:06dans les réunions
21:06de son club
21:07de réflexion politique,
21:09ne rechignant plus
21:09à rêver tout haut.
21:11J'ai suggéré
21:12en ce qui me concerne
21:13la constitution
21:14d'un Sénat européen.
21:16Je considère
21:16comme nécessaire
21:17la création
21:18à bref délai
21:19d'une communauté
21:20monétaire européenne
21:21précédant la création
21:22d'une monnaie européenne.
21:24Et enfin,
21:25nous proposons
21:25aujourd'hui
21:26que soit retenu
21:27le principe
21:28d'une confédération
21:29européenne
21:30à établir
21:31pour 1980.
21:33Là,
21:33il ne s'agit pas
21:33de se différencier.
21:35C'est de l'ordre,
21:37il ne faut pas exagérer,
21:38ce n'est pas une prophétie,
21:40mais enfin,
21:41c'est une idée.
21:44Bon,
21:45qui est une idée
21:45qui correspond
21:46beaucoup à Jean Monnet
21:47quand même.
21:48Mais il s'en fait
21:50d'une certaine façon
21:50le porte-parole politique.
21:53Et c'est un choix,
21:54évidemment,
21:55c'est un choix assez fort.
21:57Il n'y aura pas
21:58de marché commun
21:59sans monnaie européenne.
22:00Et donc,
22:01si l'on veut
22:01que le marché commun
22:02se développe,
22:03ce qui est essentiel
22:03pour nous tous,
22:04je crois,
22:05il faudra mettre en place
22:06une monnaie européenne
22:07et je vous indique
22:08que c'est possible.
22:11Après cette parenthèse
22:12fédéraliste,
22:13la politique franco-française
22:14va reprendre ses droits.
22:16Georges Pompidou
22:16accède à l'Élysée
22:17et Giscard
22:18redevient ministre des Finances.
22:20Mais les temps ont changé
22:21et la France
22:22a désormais besoin
22:24de l'Europe.
22:25C'est un moment
22:26où la relation franco-franc
22:27est au plus bas.
22:28Mais il y a deux hommes
22:29dans l'ombre
22:29qui sont tous les deux
22:30ministres des Finances.
22:31L'un sous Brandt,
22:32l'autre sous Pompidou.
22:34C'est Valéry Giscard d'Estaing
22:35et Helmut Schmidt.
22:42Les deux hommes
22:42se respectent,
22:44s'admirent.
22:45Ils sont persuadés
22:46de leur propre intelligence.
22:47Ils se considèrent
22:48comme supérieurs
22:49à tout le monde.
22:50Ils pensent
22:50qu'ils sont très peu compris
22:51par les autres
22:52tellement ils sont
22:52supérieurement intelligents.
22:54Mais eux deux,
22:55voilà,
22:55ils se sont trouvés.
22:58Les échanges permanents
23:00qu'il y a eu
23:00entre Helmut Schmidt
23:01et mon père,
23:02il y a en arrière-plan.
23:04Le fait qu'ils ont été
23:05tous les deux combattants
23:06pendant cette période
23:08terrible d'affrontement
23:10entre la France
23:10et l'Allemagne.
23:13C'était vraiment ça
23:13qui incarnait
23:15dans leur discussion,
23:18qui incarnait
23:18cette idée simple.
23:20l'Europe,
23:21elle doit se faire
23:22parce qu'il faut
23:23définitivement
23:25oublier la période
23:26où l'Europe
23:27s'est déchirée
23:28et des pays majeurs
23:29comme la France
23:29et l'Allemagne
23:30se sont retrouvés
23:30opposés.
23:32Il y avait un social-démocrate,
23:34certes modéré,
23:34mais social-démocrate,
23:36et puis il y avait Giscard
23:37qui était un libéral
23:38sans doute avancé
23:39comme il se présentait
23:40lui-même,
23:41libéral avancé,
23:42mais qui s'était
23:42vraiment entendu,
23:45reconnu
23:46et avait lié
23:48vraiment des liens
23:49d'amitié.
23:53Le premier choc pétolier
23:55de 1973,
23:56il tente à ce moment-là
23:57de créer
23:58ce qu'on appelle
23:59le serpent monétaire
24:00qui n'est pas assez puissant
24:02pour résister
24:04à cette période
24:05de grands bouleversements
24:06politiques et financiers.
24:08Et les deux hommes
24:09arrivent au pouvoir suprême
24:12quasiment au même moment.
24:13Et là,
24:14c'est le moment
24:14ou jamais
24:14de faire avancer
24:16la construction communautaire,
24:17de la relancer.
24:20En 1969,
24:22Valéry Giscard d'Estaing
24:23avait hésité
24:24à se présenter
24:25à l'élection présidentielle.
24:27Mais après le décès
24:28cinq ans plus tard
24:29du président Pompidou,
24:30il n'est plus question
24:31d'hésiter.
24:33C'est une campagne
24:35inopinée
24:36et une campagne
24:37très courte.
24:39Bon,
24:40et que ce que
24:41Giscard a voulu
24:42instiller
24:45immédiatement,
24:47c'est sa
24:48modernité
24:49et sa juvénilité.
24:54Qui l'eut cru ?
24:56Giscard est populaire.
24:58Il a bâti
24:58une campagne
24:59à l'américaine
25:00et rallie
25:00une partie
25:01de la jeunesse,
25:02pourtant traditionnellement
25:03acquise à la gauche.
25:05Et je souhaite
25:06que la France
25:06contribue
25:07largement
25:08au cours
25:08des prochaines années
25:09par ses propositions,
25:11par ses initiatives,
25:12parce qu'elle sera capable
25:13d'inventer
25:14et de proposer
25:15à l'union
25:16nécessaire
25:18de l'Europe.
25:21En changeant de décennie
25:22et six ans après
25:23les bouleversements
25:24de mai 68,
25:25la France
25:26a besoin d'air.
25:27Mais elle n'ose pas encore
25:29s'offrir à la gauche.
25:30Giscard est élu
25:33avec 50,8%
25:34des voix.
25:35Il veut aller vite,
25:37réformer à tout va
25:38et retrouver au plus tôt
25:39son complice et ami
25:40Helmut Schmidt,
25:42devenu chancelier
25:42de l'Allemagne fédérale
25:4315 jours plus tôt
25:44pour faire avec lui
25:46de l'Europe
25:47son grand œuvre.
25:48Pompidou était obsédé
25:51par l'idée
25:51que les Allemands
25:53pouvaient se rapprocher
25:54excessivement
25:55des Russes.
25:58Valéry Giscard d'Estaing,
25:59dès qu'il est arrivé
26:00au pouvoir,
26:01c'est l'idée
26:02que si nous voulions
26:03effectivement
26:04retenir
26:06l'Allemagne
26:08sur la tentation,
26:09ce qu'on appelle
26:09la tentation
26:10de Rapallo,
26:11qui était un traité
26:12de convergence
26:14entre les nations
26:15perdantes
26:16de la guerre
26:17de 14-18,
26:18qui était la Russie
26:19et l'Allemagne.
26:21Valéry Giscard d'Estaing
26:22estimait que la seule façon
26:24de régler le problème,
26:26c'était de développer
26:27une intimité,
26:28une solidarité
26:29très forte
26:30avec l'Allemagne.
26:33Et Helmut Schmidt
26:34professait exactement
26:36la même doctrine.
26:37Helmut Schmidt
26:38était convaincu
26:39que le destin
26:40de l'Allemagne
26:41démocratique
26:42était inséparable
26:44du destin
26:45de l'Europe,
26:46que c'était
26:47la seule manière
26:48d'avoir une Allemagne
26:49pacifique,
26:51respectée,
26:52puissante,
26:53influente.
26:54La seule manière
26:55pour cette Allemagne
26:55était d'accepter
26:56une logique européenne
26:58qui faisait que,
26:59faisant confiance
27:00à tous ses partenaires,
27:02ses partenaires
27:03lui feraient confiance
27:04également.
27:06Une idée européenne !
27:09Élection européenne !
27:12Élection européenne !
27:15Élection européenne !
27:17Toujours là où on les attend,
27:19les fédéralistes s'invitent
27:20sous l'œil bienveillant
27:21de Jean Monnet
27:22au jour de gloire
27:23du nouveau président
27:24qui arrive tout sourire
27:25au Quai d'Orsay
27:26pour sa première
27:27grand-messe européenne.
27:28« Nous voulons
27:29un vrai
27:30comme n'est
27:31unité
27:32de
27:32en France ! »
27:33Avec Helmut Schmidt,
27:35il a concocté
27:36un diptyque inédit
27:37qui commence par le premier
27:38conseil européen
27:39de chef d'État
27:40et de gouvernement.
27:42Une transmutation inédite
27:44du languissant conseil
27:45des ministres
27:46qui n'intéressait plus personne.
27:47Valéry Giscardessin aimait bien
27:51cette idée
27:51un peu congrès de Vienne
27:53de « on est dans un salon,
27:55on est entre gens
27:56de bonne compagnie
27:57qui ont sur l'avenir
27:58de l'Europe
27:59des idées convergentes
28:01et assez éclairées
28:02et donc on prend
28:03des décisions ensemble. »
28:05« Nous avons assisté
28:06au dernier sommet européen
28:08et nous avons participé
28:10au premier conseil européen. »
28:14« C'était une anomalie
28:15pour l'Europe
28:16de voir ses chefs
28:17de gouvernement
28:18ne se rencontrer
28:19que trois fois
28:20en cinq ans. »
28:21« Le principe est clair,
28:22c'est la volonté
28:23de faire pénétrer
28:25l'Europe,
28:26les compétences communautaires
28:28dans le domaine
28:28de la politique
28:29et notamment
28:30de la grande politique. »
28:32Mais les annonces
28:32ne s'arrêtent pas là.
28:34Helmut Schmidt
28:34tient lui aussi
28:35sa nouveauté.
28:36« Donc c'est le deal
28:37tu me laisses créer
28:38Helmut,
28:39le conseil européen
28:41des chefs de l'État
28:41et de gouvernement
28:41qui se réunira
28:42deux fois par an
28:43donc régulièrement. »
28:44« Nous souhaitons
28:45déposer en 1976
28:48les modalités
28:50de l'élection
28:51de l'Assemblée européenne
28:53au suffrage universel. »
28:55« Et en échange,
28:57Helmut Schmidt
28:57obtient que le Parlement
28:58européen
28:59soit élu
28:59au suffrage universel
29:00parce que c'est
29:01une lubie allemande.
29:02Il croit en la démocratie,
29:03à l'élection
29:04au suffrage universel,
29:06des choses que les Français
29:06ont du mal à comprendre.
29:08Enfin bon,
29:08ça fait plaisir aux Allemands,
29:09allez,
29:09on va faire un peu
29:10de démocratie. »
29:11Après deux ans de mandat,
29:13les choses se gâtent
29:14pour le président.
29:16Son premier ministre,
29:17Jacques Chirac,
29:17provoque la rupture.
29:19« Je viens
29:20de remettre
29:21la démission
29:22de mon gouvernement
29:23au président
29:25de la République. »
29:27Tout avait pourtant
29:28si bien commencé
29:29entre Valéry Giscard d'Estaing
29:30et Jacques Chirac.
29:32Pendant la campagne
29:33présidentielle,
29:34Chirac avait
29:34contre toute attente
29:35soutenu Giscard.
29:37En récompense,
29:39il avait obtenu
29:39Matignon.
29:41Mais sous l'influence
29:42de ses conseillers politiques,
29:44Marie-France Garraud
29:45et Pierre Juillet,
29:46Chirac s'était mépris
29:47sur la taille
29:48de son espace politique.
29:50Chirac estimait
29:51qu'il n'avait pas de rôle
29:52et Marie-France Garraud
29:53et Pierre Juillet
29:53passaient son temps
29:54à lui dire
29:54« Vous vous faites manœuvrer
29:55comme un trompette,
29:56ça suffit. »
29:57Et puis,
29:57c'est devenu
29:58presque pathologique.
29:59Ça ne pouvait plus durer.
30:00C'est-à-dire que Chirac
30:02croyait que c'était un faible
30:03et que lui aussi,
30:05c'est lui qui finirait
30:06par prendre le dessus.
30:07Et ils se sont trompés
30:08l'un l'autre.
30:09Et donc,
30:09c'est une non-compréhension
30:11psychologique
30:12du caractère des deux.
30:15Sitôt quitté Matignon,
30:17Jacques Chirac reprend
30:18un parti gaulliste
30:19vieillissant
30:20pour en faire
30:20une machine de guerre,
30:22le RPR.
30:25L'UDR,
30:26puis devenu
30:27très vite RPR,
30:29freinait l'Europe
30:31des quatre fers.
30:32Et en particulier,
30:34ils se sont opposés
30:34autant qu'ils l'ont pu
30:36à l'élection
30:37du Parlement européen
30:38au suffrage universel direct.
30:40La création du Conseil européen,
30:42mais ça,
30:43les Chiraciens
30:43étaient d'accord,
30:44et l'élection
30:45du Parlement européen
30:47au suffrage universel,
30:48et là,
30:49c'était plutôt
30:50un chiffon rouge.
30:51Et l'appel de Cochin
30:52s'est né de cette opposition
30:54qui était farouche
30:55et que Chirac,
30:56à l'époque,
30:58enfourchait
30:58sans la moindre réticence.
31:00C'était si,
31:01à six kilomètres du Seil,
31:02que la voiture de Jacques Chirac
31:04a brusquement quitté
31:05la chaussée.
31:05Très rapidement,
31:06des dispositions
31:07ont été prises
31:08pour que Jacques Chirac
31:09soit évacué
31:10sur un hôpital parisien,
31:11l'hôpital Cochin.
31:12L'élection européenne
31:15se profilait
31:16et arrive l'accident.
31:19Bernadette faisait le guet
31:20à l'hôpital
31:21pour que les visiteurs
31:22ne viennent pas,
31:23c'est-à-dire Pierre Juillet
31:24et Marie-France Garraud,
31:25mais qui ont quand même réussi
31:26à venir dans sa chambre
31:28et lui faire signer
31:29un texte,
31:30je crois qu'il n'avait pas lu,
31:31ou lu en diagonale.
31:32La violence politique
31:35est gigantesque.
31:37Comme toujours
31:37quand il s'agit
31:38de l'abaissement de la France,
31:40le parti de l'étranger
31:41est à l'œuvre
31:42avec sa voix paisible
31:43et rassurante.
31:44Français ne l'écoutez pas,
31:46c'est l'engourdissement
31:47qui précède la paix
31:48et la mort.
31:50Et c'était là
31:51où se tonge,
31:52comme toujours,
31:53le parti de l'étranger
31:54qui est à l'œuvre
31:55et ça avait choqué,
31:57évidemment,
31:57parce que le parti de l'étranger
31:58c'était Giscard.
31:59Les grandes familles
32:00qui sont toujours
32:01contre l'intérêt de la France,
32:02et qui pensent
32:03à leur intérêt
32:04financier particulier,
32:06etc.
32:06Enfin,
32:06tout ça est sorti.
32:08Alors,
32:08le fait de quel est l'intérêt
32:09qu'elle soit élue
32:09au suffrage universel ?
32:11Et de fait,
32:12l'élection européenne
32:13a été son premier revers.
32:16La liste Chirac,
32:17ça fait 16%,
32:18alors que
32:19Madame Veil
32:20avait 27%.
32:21Voilà mon Europe.
32:23C'est une Europe
32:24de la raison.
32:25Valéry Giscard d'Estaing
32:26connaît la force
32:27des symboles.
32:28C'est un politique
32:29de la vieille école.
32:30En envoyant Simone Veil
32:31qui a été à Auschwitz,
32:34survivante d'Auschwitz,
32:35à Strasbourg,
32:36au Parlement européen,
32:38c'est qu'elle signale,
32:39qu'elle...
32:40qu'elle symbole.
32:42Et que les Allemands,
32:43ensuite,
32:43votent pour les lire
32:44à la tête du Parlement européen,
32:46ont obtenu...
32:47C'était quelque chose
32:48d'incroyable.
32:49Madame Veil,
32:51192 voix.
32:53Applaudissements
32:53Je déclare ouverte
33:08la séance soladelle
33:10du Parlement européen.
33:12Et Giscard,
33:13il a été d'une grande
33:14intelligence politique
33:15à ce moment-là.
33:16Alors Valéry ?
33:17Alors Helmut ?
33:19We get in.
33:22Valéry Giscard d'Estaing
33:23et Helmut Schmidt
33:24n'en ont pas fini
33:25avec l'Europe.
33:26Après les symboles politiques,
33:28il est désormais temps
33:28de s'attaquer à l'avenir,
33:30à l'héritage
33:31que d'autres feront fructifier.
33:33Il faut s'attaquer
33:33à la monnaie.
33:34Sous l'œil bienveillant
33:38des militants fédéralistes
33:39qui réclament depuis toujours
33:40une monnaie unique,
33:42Giscard et Schmidt
33:42savent que s'attaquer
33:43à la monnaie,
33:44c'est s'attaquer
33:45à la souveraineté des nations.
33:47Ils vont donc préparer
33:48leur système
33:49dans le plus grand secret.
33:51L'une des idées,
33:51c'était de petit à petit
33:53faire converger
33:54les monnaies
33:55à l'intérieur
33:55d'une sorte de zone
33:56de fluctuation limitée
33:58avec des interventions
33:59des banques centrales
34:00lorsque c'était nécessaire.
34:01C'est qu'il y a moins
34:03d'un dant
34:03que nous avons eu
34:04le premier échange
34:05de vue
34:06sur la mise en œuvre
34:08possible
34:09d'un système
34:10monétaire européen.
34:12Nous l'avons fait,
34:13je m'en souviens,
34:14dans le scepticisme
34:15général
34:16des commentaires.
34:18Quand ils créent
34:19le système monétaire européen,
34:20ils ne disent pas,
34:21évidemment,
34:22que ça va mener
34:22à la monnaie unique.
34:24Les résistances souverainistes
34:25sont beaucoup trop fortes.
34:26Donc il faut faire avaler
34:28l'idée de la monnaie unique
34:29mais en la dissimulant.
34:31Et ils ne le cachent pas
34:32que c'était,
34:32évidemment,
34:34une sorte de complot,
34:36non pas contre le peuple,
34:38mais au bénéfice du peuple.
34:39Et à terme,
34:40et ça, eux le savaient,
34:41mais je crois que personne
34:42ne l'avait perçu à l'époque,
34:44ça nous mènera
34:44un jour à la monnaie unique.
34:45les trois transformations
34:53qu'a apportées
34:54Valéry Giscard d'Estaing,
34:56la création du SME
34:58qui a pavé la voie
34:59à la création de l'euro,
35:01l'élection du Parlement européen
35:03au suffrage universel
35:04et l'institution du Conseil européen
35:07des chefs d'État
35:08ou de gouvernement
35:09ont été quand même
35:11les trois leviers
35:12de la seconde naissance
35:15de l'Union européenne.
35:16Et Giscard est certainement celui
35:19qui a donné
35:21le primum mobile,
35:23comme dirait Descartes,
35:24la chicnode initiale
35:25qui a fait avancer
35:26le système
35:27de façon décisive
35:29et dont les résultats
35:30ont été
35:31le marché intérieur,
35:33la monnaie unique,
35:34le traité de Maastricht
35:36et au bout du compte,
35:37la victoire
35:38sur la guerre froide.
35:39Vous aimez cette maison
35:41malgré son petit peu de pratique ?
35:43Elle n'est pas pratique,
35:44elle n'a pas beaucoup d'âme
35:45en réalité
35:46et je souhaite
35:47qu'elle en ait une.
35:48À mon avis,
35:48il ne faut pas qu'elle ait l'âme
35:49de ses propriétaires
35:49parce que ses propriétaires
35:50par nature s'en reprend.
35:585, 4, 3, 2, 1.
36:02François Mitterrand
36:03est élu président de la République.
36:09Après sa défaite
36:13du 10 mai 1981,
36:15Giscard va voir
36:16pendant presque 20 ans
36:17l'histoire s'écrire sans lui.
36:20François Mitterrand
36:21va reprendre le flambeau
36:22de la construction européenne.
36:27En faisant nommer
36:28Jacques Delors à Bruxelles,
36:30Mitterrand va placer
36:31un moine soldat
36:32qui, à force de patience,
36:33va relancer
36:34la construction communautaire.
36:37En 1986,
36:39la signature de l'acte unique
36:41représente l'avènement
36:42d'un véritable marché
36:43sans frontières
36:44à l'échelle du continent.
36:47Giscard ne peut pas
36:48ne pas en être.
36:50Alors que l'Europe
36:50prépare le traité de Maastricht,
36:53il fait la promotion
36:53de la monnaie unique
36:54avec son ami Schmitt.
36:57Et en 1989,
36:59il va même plus loin.
37:01Il prend la tête
37:01de la liste
37:02UDF-RPR
37:03pour les élections européennes.
37:05Il veut mesurer
37:06sa popularité
37:07pour un éventuel retour
37:08au premier plan national.
37:11Mais en devenant
37:11député européen,
37:13il veut aussi tester
37:14ses idées fédéralistes.
37:16Ses idées sulfureuses
37:17qui ne se développent
37:18qu'à l'ombre
37:18des bureaux sans âme
37:19de Bruxelles et de Strasbourg.
37:21Monsieur le Président,
37:23le groupe libéral,
37:24démocratique
37:25et réformateur
37:26s'associe.
37:27Quand on atterrit
37:28dans les institutions européennes,
37:30au Parlement notamment,
37:31on découvre l'ouvre-boîte.
37:34On voit comment
37:35on pourrait peut-être
37:36ouvrir la boîte
37:36du fédéralisme
37:38et d'une organisation.
37:40Alors fédéralisme,
37:41c'est un mot
37:41extraordinairement ambigu
37:43et puis c'est un mot
37:44repoussoir.
37:45C'est un mot
37:47qui fait peur.
37:48Quand il arrive
37:49au Parlement européen,
37:51Valéry Giscard d'Estaing
37:52a présidé
37:52le mouvement européen
37:53international.
37:54Il préside un mouvement
37:55explicitement fédéraliste,
37:56tout à fait,
37:57qui porte des idées
37:58fédéralistes.
38:00À la fin de l'année 1989,
38:01tout le monde découvre
38:03avec stupéfaction
38:04la chute du mur de Berlin.
38:06On sent que c'est la fin
38:07de la partition de l'Europe.
38:11Pour lui,
38:12c'est un moment constituant
38:14qui veut que les gouvernements
38:16lui reconnaissent
38:16la possibilité
38:17d'écrire une constitution,
38:18un projet de constitution.
38:21Lui-même,
38:22il participe
38:23au sein de cette commission
38:24des affaires institutionnelles
38:25pour l'écriture
38:26d'une constitution européenne.
38:28dans cette idée
38:30que l'Europe
38:31est un nouveau tournant
38:32de son histoire
38:33et compte bien participer
38:35à ce tournant européen
38:36et à ce rendez-vous
38:37de l'histoire
38:38dans les fonctions
38:39qu'il occupe
38:40au Parlement européen.
38:43Mais Giscard n'a pas
38:44oublié la France.
38:46À l'occasion
38:46de l'élection présidentielle
38:47de 1995,
38:49il croit voir
38:50une fenêtre s'ouvrir
38:51pour un éventuel retour.
38:54En 1995,
38:55il se voyait élu.
38:59Sauf qu'à l'époque,
39:01les sondages
39:01le mettaient à 7%.
39:02Les Français ne veulent plus
39:05de VGE à l'Élysée.
39:07La mort dans l'âme,
39:09il finit par apporter
39:09son soutien à Jacques Chirac,
39:11son rival de toujours,
39:12en espérant peut-être
39:13un renvoi d'ascenseur.
39:15Il a compris que son domaine,
39:18c'était l'Europe.
39:20C'était sa fidélité première.
39:22C'est là sa contribution
39:23qu'il avait apporté,
39:24une contribution essentielle
39:26à la construction
39:27de l'Union européenne.
39:28En décembre 2000,
39:31il y a la négociation
39:32du traité de Nice,
39:33qui est une catastrophe.
39:35Le traité de Nice
39:35est mal fichu,
39:37c'est un échec commun
39:38des Français et des Allemands.
39:40Jacques Chirac
39:41et Lionel Jospin,
39:42nous sommes en comitation,
39:43se tirent dans les pattes.
39:45Et Lionel Jospin
39:46et Jacques Chirac
39:46tirent dans les pattes
39:47de Schröder,
39:48qui est le chancelier allemand
39:49social-démocrate de l'époque,
39:51qui tirent dans les pattes
39:52des Français.
39:52J'avais vu
39:53que le traité de Nice
39:54était un mauvais traité.
39:56Je me suis dit,
39:57volontiers,
39:57c'est le plus mauvais
39:58des traités européens
39:59et qu'il ne changeait rien
40:01aux institutions.
40:02Il ne préparait pas du tout
40:04les énergissements.
40:05Donc je voyais
40:05que ce traité
40:07ne réglait pas le problème.
40:08Et les Allemands
40:09proposent un processus
40:10de rapprochement
40:11entre la France et l'Allemagne
40:12après l'échec
40:13du traité de Nice,
40:14qu'on a appelé
40:14le processus de Blechheim,
40:17où en gros,
40:17Schröder et Chirac
40:18se retrouvaient autour d'une table
40:19à boire des bières
40:20et à manger de la tête de veau
40:21pour essayer de se réconcilier.
40:25Et ça marche.
40:27Le traité de Nice
40:28n'a pas su régler
40:29les problèmes
40:30entraînés par un élargissement
40:31de l'Union
40:32de 15 à 28 pays.
40:34Sous le regard ébahi
40:35des militants fédéralistes,
40:37le Conseil européen
40:38va proposer une solution
40:39sans précédent.
40:40Il décide de créer
40:41une convention
40:42pour l'avenir de l'Europe,
40:43chargée d'écrire
40:44une constitution.
40:46Alors à ce moment-là,
40:47se posait en effet
40:48la question de la présidence,
40:49cette convention.
40:50Et je me suis dit,
40:51bon, moi je souhaite
40:53être président,
40:53je pense que je serai
40:55conditionnel,
40:57préférable aux autres.
40:59Elle disait,
41:00la convention est lancée
41:01et en septembre 2001,
41:04une petite phrase
41:05de Valéry Giscard d'Estaing
41:07qui dit,
41:08je n'ai pas l'intention
41:09d'être candidat
41:11à l'élection présidentielle.
41:12mais je ne l'exclus pas.
41:16Mais je ne l'exclus pas.
41:19Panique à bord
41:20de l'Élysée,
41:23Jacques Chirac se disant,
41:24mon Dieu,
41:25je vais me retrouver
41:26avec Valéry Giscard d'Estaing
41:27dans les pattes
41:27et il pourrait grappiller
41:30quelques pourcents de voix
41:31qui vont me coûter
41:33mon élection.
41:34Donc je dois m'en débarrasser.
41:36Et Chirac,
41:36à ce moment-là,
41:37va tout faire
41:37pour qu'il devienne
41:38président de la convention.
41:40C'est une vraie manœuvre politique
41:43parfaitement réussie
41:44par Valéry Giscard d'Estaing
41:45qui sait manœuvrer son Chirac.
41:48Donc j'ai été finalement désigné.
41:51L'arrivée de Giscard
41:52était vue à la fois
41:54avec un certain espoir
41:55que les choses changent
41:56et certaines questions,
42:00voire préjugées,
42:02dans la tête
42:02de pas mal de monde.
42:05Les Français
42:05ne sont pas vus
42:07comme un des moteurs
42:07de l'Europe
42:08dans la tradition communautaire.
42:10La tradition intergouvernementale
42:12des présidents
42:13de la République française,
42:14effectivement,
42:15ce n'est pas la meilleure carte de visite
42:16pour arriver à Bruxelles.
42:20Et vous êtes de quelle nationalité ?
42:23Français.
42:24Et vous ?
42:25Italien.
42:25Italien.
42:26Vous parlez
42:27entre vous
42:29latin.
42:31Donc quand Giscard arrive,
42:32c'est un petit peu ça
42:32l'état d'esprit,
42:34mais il y a aussi
42:34du respect
42:35pour sa personnalité,
42:36pour son autorité.
42:37Le monde se sentirait mieux
42:41s'il pouvait compter
42:44sur l'Europe,
42:45une Europe s'exprimant
42:46d'une seule voix
42:47pour faire entendre
42:50chaque fois
42:50que c'est nécessaire
42:51un message
42:53de tolérance
42:54et de modération,
42:56d'ouverture
42:57sur les différences
42:58et de respect
43:00des droits
43:00de l'homme.
43:01« Oui, chacun
43:03se sentirait mieux
43:04sur notre planète
43:05s'il pouvait entendre
43:07la voix forte
43:08de l'Europe. »
43:10Giscard d'Estaing,
43:11il veut apparaître
43:11comme un des
43:12pères fondateurs
43:13de l'Europe,
43:14c'est-à-dire
43:14l'idée
43:15de donner
43:16une constitution
43:17à l'Europe.
43:18Après tout,
43:18Benjamin Franklin,
43:19qui a été l'accoucheur
43:20de la constitution américaine,
43:22avait 80 ans,
43:23il a 74 ans,
43:24c'est un petit jeune
43:24à côté de Benjamin Franklin.
43:26Donc pourquoi
43:26ne serait-il pas
43:27l'un de ses pères fondateurs ?
43:29« Il a cherché,
43:30on a tous cherché
43:31d'ailleurs des précédents,
43:33parce que c'est
43:34quand même
43:35assez extraordinaire.
43:36Une réunion
43:37qui rassemble
43:38les élus
43:40et les gouvernements
43:41de 28 pays différents
43:43pour essayer
43:44de se mettre d'accord
43:45sur une règle
43:46de vie commune,
43:47un règlement
43:47de copropriété.
43:48On marche
43:49en terre inconnue.
43:52Quels sont
43:52les grands exemples ?
43:54Et tout naturellement,
43:55on en vient
43:55à la convention
43:56de Philadelphie. »
43:58En 1787,
44:00les 13 États
44:00qui constituent
44:01les jeunes États-Unis
44:02se réunissent
44:03à Philadelphie
44:03pour donner
44:04une constitution
44:05à un État
44:05désormais fédéral.
44:08Ce texte fondateur
44:09de la démocratie américaine,
44:11écrit sous l'égide
44:12de l'humaniste
44:12Benjamin Franklin,
44:14est toujours
44:14en vigueur aujourd'hui.
44:16« La feuille de route
44:17de la convention
44:19qui n'est faite
44:20que de points
44:20d'interrogation.
44:22Donc,
44:23carte blanche,
44:24en fait.
44:25Allez-y. »
44:26« Ah bon,
44:26j'ai du premier en plus.
44:28Alors,
44:30là,
44:31vous venez là,
44:32Jean-Luc.
44:33Ah oui,
44:34j'ai levé. »
44:35« Le souvenir
44:36que j'en garde,
44:37c'est la capacité
44:38à mener à bien
44:41une discussion collective
44:43de cette ampleur
44:45avec ce nombre
44:46de participants
44:47et ce nombre
44:48de sujets.
44:49Sa capacité intellectuelle
44:51à faire vivre
44:53ensemble
44:53toute cette équipe.
44:55parce que mettre
44:56d'accord
44:57des futurs membres
44:58et des anciens membres,
45:00mettre d'accord
45:00des gouvernements
45:01de droite,
45:01de gauche,
45:03du centre,
45:03mettre d'accord
45:04des fédéralistes,
45:06des mous,
45:07des souverainistes,
45:08etc.,
45:09c'est quand même pas
45:10donné à tout le monde.
45:12Et il va mener
45:13sa barque
45:13de main de maître.
45:15Il avait cette espèce
45:16de tortue chinoise
45:17en céramique
45:18ou porcelaine,
45:19je ne sais pas.
45:19Il avait apporté
45:27comme symbole
45:28de la convention
45:29la tortue
45:29qui avance lentement
45:31mais sûrement.
45:33Mais c'est une tortue dragon,
45:35c'est-à-dire qu'au moment
45:36où elle doit saisir
45:37le texte,
45:38ça devient un dragon
45:39et elle devient
45:40extrêmement puissante.
45:41Donc,
45:42patience et puissance.
45:44Au départ,
45:45il voulait,
45:47à l'exemple
45:47de la Constitution américaine,
45:48faire un texte
45:50court
45:51avec des phrases
45:52simples et courtes.
45:54Avec comme objectif
45:55que cette Constitution
45:56soit compréhensible
45:57par n'importe quel citoyen.
45:59Il vous appartient
46:00aujourd'hui
46:00de vous prononcer
46:02sur ce projet.
46:03Comme c'était
46:03un petit texte,
46:05c'était quelque chose
46:05de valeur constitutionnelle,
46:07symboliquement,
46:08ça pouvait lancer
46:09un mouvement.
46:10Ce texte
46:12constitue
46:13le fondement
46:14du futur traité
46:15instituant
46:17la Constitution
46:18européenne.
46:20Exactement comme
46:21il l'avait fait
46:21avec le système
46:23monétaire européen.
46:24C'est-à-dire,
46:25il plantait
46:26une petite graine.
46:28C'est Napoléon,
46:28d'ailleurs,
46:29qui avait dit
46:29une Constitution
46:30doit être courte
46:31et obscure.
46:33Et après,
46:33on l'interprète,
46:34la vie change.
46:35On part de quelque chose
46:36qui, quand même,
46:37ressemble beaucoup
46:37à une confédération,
46:38mais un jour,
46:39à partir de ce texte,
46:40ça donnera une fédération.
46:41C'était pas mal vu.
46:42La vraie nature
46:45du projet européen,
46:47c'est d'être
46:48une union d'État,
46:49parce que l'État existe.
46:51À mon avis,
46:51ils ne disparaîtront pas.
46:52D'ailleurs,
46:52je ne crois pas
46:53que ce soit un objectif
46:54de les faire disparaître.
46:59Et en même temps,
47:00il a des compétences
47:00qu'ils ne peuvent plus exercer.
47:02Et ça appelle
47:03un schéma
47:04dans lequel
47:04c'est une union d'État,
47:07mais qui attribue
47:07des compétences
47:08à l'Union,
47:09et l'Union les exerce
47:10sur le mode fédéral.
47:13Oui, moi,
47:14j'accepte le mode fédéral.
47:16Et je me suis dit
47:16qu'on arrivera
47:17inévitablement à ça,
47:18parce qu'il n'y a pas
47:19d'autre solution.
47:24Pour Aléry Giscard d'Esta,
47:25ça a été un moment
47:26important de sa vie,
47:28dans lequel il a vu aussi
47:30une forme d'aboutissement.
47:33Je peux imaginer
47:34ce que représentait
47:35pour la génération
47:36de l'après-guerre,
47:36qui avait connu
47:37la division de l'Europe en deux,
47:38qui avait vu
47:40la construction
47:41pas à pas
47:43des communautés européennes,
47:46le passage
47:47qui marquait
47:48l'établissement
47:50des valeurs européennes
47:51sur l'ensemble
47:51du continent
47:52et qui permettait
47:54d'ouvrir la voie
47:55à une affirmation
47:57plus forte
47:57de l'Europe
47:58dans le monde.
47:59Le 29 mai,
48:00ou bien on vote
48:01pour l'Europe libérale,
48:02c'est ce que veut faire
48:03M. Sarkozy,
48:03ou bien on vote
48:04pour l'Europe sociale,
48:06à ce moment-là,
48:06il faut dire non
48:07à cette constitution.
48:09Une fois signé
48:10le traité établissant
48:11la constitution européenne,
48:13le président Chirac
48:14doit maintenant
48:15le faire ratifier.
48:17Deux choix s'offrent à lui.
48:18Un vote au Parlement
48:19ou un référendum.
48:22Poussé par le parti socialiste,
48:24il va choisir
48:24la voie référendaire.
48:27Les partisans
48:28du oui au traité,
48:29l'UMP Nicolas Sarkozy
48:30et le socialiste
48:31François Hollande
48:32en tête,
48:33vont devoir combattre
48:34une coalition hétéroclite
48:36du nom.
48:38C'est l'histoire
48:39d'abord d'une communication
48:41lamentable
48:43du côté des partisans
48:44de la constitution européenne.
48:46On a vendu ça
48:47de façon manichéenne
48:48à l'opinion publique
48:49en disant
48:50il y a avant,
48:51avant c'est les ténèbres,
48:52après il y a la constitution européenne
48:54et c'était de la blague.
48:55Et d'autre part,
48:56d'une communication
48:57extrêmement efficace
48:59de la part de leurs adversaires.
49:00Nous portons un nom
49:05de solidarité
49:06contre ceux
49:06qui veulent nous mettre
49:07aux enchères.
49:08D'un côté,
49:09la gauche
49:09qui combat une Europe libérale
49:11qui existe déjà
49:12et voudrait la voir changer.
49:15Et de l'autre côté,
49:17les souverainistes
49:17qui combattent
49:18le fédéralisme européen rampant
49:20dont la constitution
49:21serait le symbole.
49:22Que la constitution
49:23sauvegarde le modèle social
49:25européen,
49:26c'est faux.
49:27Et puis le président
49:28y allait,
49:29Jacques Chirac,
49:31il y allait à reculons.
49:33Il y allait
49:33parce qu'on ne pouvait pas
49:35faire autrement.
49:36Ce qui démontre
49:37à quel point
49:37il n'en était pas partisan,
49:38c'est que quand il essayait
49:39de faire campagne pour elle,
49:40c'était une catastrophe.
49:42Je suis toujours un peu étonné
49:44de voir que
49:46s'exprime chez nous
49:48un sentiment de peur.
49:51C'est un sentiment,
49:53je ne vous le gâche pas,
49:54que je comprends mal.
49:56Alors que les sondages
49:57donnent le nom
49:58largement gagnant,
49:59Giscard y croit encore.
50:02Et on va se terminer
50:03dans la zone
50:04un peu que j'espérais,
50:06c'est-à-dire 52-53%
50:08de oui.
50:10Valéry Giscard d'Estaing
50:11est dans cette affaire
50:12ce que Hegel appelle
50:14un héros tragique de l'histoire.
50:17Il porte effectivement
50:19une ambition européenne
50:21qu'il avait mise sur les rails
50:2230 ans plus tôt en réalité.
50:24mais ça, c'est le VGE.
50:26Il s'identifie très fortement
50:29à son œuvre,
50:30il se l'approprie
50:31et il s'est senti
50:33très profondément
50:34mis en cause.
50:35Voici maintenant
50:35notre estimation
50:36ipsos
50:37des résultats
50:38de ce référendum.
50:41Les Français
50:41rejettent
50:43la Constitution européenne.
50:44Le non
50:44l'emporte largement
50:4555%
50:47contre 45%
50:49pour le oui.
50:50Les conversations
50:51que j'ai eues avec lui
50:52après
50:52étaient quand même
50:54placées sous le signe
50:55de la désillusion.
50:57Il était
50:57très profondément
51:00désabusé
51:01sur la capacité
51:02de faire avancer
51:04l'Union européenne.
51:05Mais le crépuscule
51:06de Valéry Giscard d'Estaing
51:08en fait
51:08ça n'est pas
51:1081
51:11c'est
51:13le traité européen.
51:16C'est pas simplement
51:17un rêve
51:18qui s'éloigne
51:19c'est un rôle
51:20auquel il tenait beaucoup
51:23qui disparaît
51:24et puis c'est sa grande idée
51:26qui est rejetée finalement.
51:28Quand je dis
51:29sa grande idée
51:29c'est ce qu'il a
51:31le plus animé
51:32politiquement
51:33pendant sa vie
51:34et qui tombe en miette
51:37et qui tombe en miette
51:38à cause de la France.
51:47Si nous échouions
51:49à faire rêver
51:50de l'Europe
51:51aucun de nous
51:53même les plus grands
51:55n'aurait un poids suffisant
51:57vis-à-vis des géants
51:58du monde.
52:01Nous resterions alors
52:02chacun face à nous-mêmes
52:04dans une interrogation
52:07morose
52:08sur les causes
52:09de notre déclin
52:10et de notre situation
52:12de dominé.
52:15On nous reproche souvent
52:17notamment parmi les jeunes
52:19de ne pas faire rêver
52:21de l'Europe
52:22de nous contenter
52:24de bâtir
52:25une structure
52:26compliquée
52:27opaque
52:28Et bien
52:31rêvons d'Europe.
52:33...
52:43...
52:45...
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