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Insultes racistes, agressions...: le témoignage de Thays, victime de harcèlement scolaire
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il y a 9 minutes
Thays, un élève harcelé, et sa maman, ont accepté de témoigner. Ils racontent cette épreuve et ses conséquences qui auraient pu virer au drame pour la famille.
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00:00
Thaïs a été insulté, brimé, frappé à cause de sa couleur de peau.
00:05
Il a failli en finir avec la vie.
00:08
Lui-même, d'ailleurs, il s'en est émevé sur les réseaux sociaux.
00:12
Bonjour, je m'appelle Thaïs.
00:14
J'ai 10 ans, je voudrais vous lire un texte que j'ai écrit avec ma maman.
00:19
Depuis hier, je suis triste.
00:20
Depuis plusieurs semaines, j'entends quelqu'un me dire
00:23
« Bamboula », « Sale Noir » ou encore que j'ai été adoptée.
00:26
Et hier, il m'a planté un compas dans le bras.
00:31
J'ai déjà vécu une situation identique qui a été jusqu'à une tentative d'étranglement dans le car,
00:36
après des insultes et des menaces.
00:39
Vivre cela à 9 ans, c'est dur.
00:41
Je m'appelle Thaïs, j'ai 11 ans.
00:43
Je suis un sale singe, un sale noir qu'on a bousculé et insulté jusqu'au 14 octobre
00:48
où trois individus m'ont frappé.
00:51
Ils m'ont jeté toutes mes affaires scolaires dans les toilettes.
00:54
J'ai été le dire au CPE, mais le CPE n'a rien fait, ni le collège.
00:59
Ils n'ont eu aucune sanction et hier, en prenant mon bus, il est arrivé et m'a bousculé,
01:05
m'a donné un coup de sac, j'ai réussi à m'attraper.
01:08
Ma mère m'a emmenée aux urgences et a porté plainte aujourd'hui.
01:12
J'espère que cela ne m'arrivera plus.
01:14
Merci de m'avoir écoutée.
01:15
– Bonjour Thaïs, merci d'être avec nous.
01:19
– Bonjour.
01:20
– À votre côté, à votre mère.
01:23
– Thaïs, vous avez aujourd'hui 15 ans.
01:26
L'effet que vous avez dénoncé, c'était lorsque vous aviez 10, 11 ans ?
01:32
– Oui, c'est ça, c'est quand j'étais scolarisé en sixième.
01:36
– Et aujourd'hui, comment ça va, justement ?
01:42
Aujourd'hui, ça va beaucoup mieux, parce que j'ai pu reprendre, là en septembre,
01:48
une scolarité normale au lycée.
01:50
Je suis fait des amis, je suis très vite intégré, et puis ça se passe très bien.
01:58
– Et vous avez le courage, ce soir, de témoigner en direct sur BFMTV.
02:01
Pourquoi vous voulez revenir sur ce que vous avez subi, on l'a bien compris,
02:06
un harcèlement fait d'injures racistes, de coups également,
02:10
qui vous a rendu particulièrement triste, à tel point qu'à un moment donné,
02:15
vous avez même eu des envies de suicide, vous avez d'ailleurs fait une tentative de suicide.
02:19
Pourquoi ce soir, revenir sur ces épreuves ?
02:24
– Parce que j'en ai longuement réfléchi, et j'aimerais partager mon histoire,
02:30
et puis montrer que je ne suis pas seul, que je ne suis pas le seul à avoir été harcelé.
02:35
Et je sais qu'aujourd'hui encore, malheureusement, il y a toujours des enfants harcelés,
02:41
et j'aimerais leur dire et leur montrer qu'on peut s'en sortir,
02:45
que ça ne nous détruit pas pour toujours, et que surtout, il faut en parler,
02:49
il ne faut pas rester seul dans son coin, car ce n'est pas comme ça que ça va se régler.
02:54
– Élodie Pruveau, votre maman, est avec vous, là.
02:58
Bonsoir Madame Pruveau, merci vous aussi d'être en direct avec nous sur BFMTV.
03:01
– Que sont devenus les harceleurs de Thaïs déjà ?
03:07
– Écoutez, les harceleurs, eux, sont restés au sein de l'établissement.
03:13
Nous avons fait deux dépôts de plaintes qui ont été classés sans suite,
03:17
parce que mineurs de moins de 13 ans, donc pas de responsabilité pénale.
03:23
Et de ce fait, eux sont restés au sein de l'établissement,
03:27
et Thaïs, pour sa sécurité et surtout, on va dire, le côté psychologique,
03:32
lui a dû quitter l'établissement et faire 4 ans de scolarité à la maison avec le CNED.
03:38
– Oui, vous avez été obligé de sortir votre enfant du collège.
03:41
Pourquoi ? Parce que les responsables de l'établissement ne vous soutenaient pas ?
03:46
– Écoutez, c'est les responsables de l'établissement, la justice,
03:54
l'inspection académique où nous nous sommes déplacés avec un dossier quand même assez conséquent,
04:00
parce qu'il y avait dedans des témoignages, les certificats médicaux,
04:05
les dépôts de plaintes, et on n'a même pas été reçus.
04:08
Nous n'avons même pas eu un rendez-vous pour évoquer la situation de Thaïs.
04:11
J'ai été reçue par le maire de la ville de ce collège qui m'a dit que lui, à son niveau,
04:17
ne pouvait rien faire, mais il aurait peut-être pu tenter au niveau du département et tout.
04:22
On s'est retrouvés vraiment seuls et démunis par rapport à la situation.
04:28
Et malheureusement, la seule solution que j'ai vue, c'était de déscolariser Thaïs.
04:34
Et ce n'est pas normal, en fait, de devoir déscolariser un enfant, c'est la double peine.
04:39
C'est qu'en fait, il n'est même pas reconnu en tant que victime.
04:41
Et qu'en plus, il doit fuir sa scolarité, une vie sociale avec des jeunes de son âge.
04:48
Je trouve qu'encore à l'heure d'aujourd'hui, ça existe et ça ne devrait plus exister.
04:53
Thaïs, sur les images, quand vous avez 10-11 ans, on vous voit notamment avec le bras bandé.
05:00
C'est-à-dire, que vous est-il arrivé régulièrement ?
05:02
On vous frappait ? Ça a été vraiment coup et blessure ?
05:06
C'était assez souvent, c'était beaucoup dans les couloirs, aux intercours.
05:15
On me donnait des claques dans la tête, on me touchait mes cheveux en disant que c'était de la moquette,
05:18
parce que c'était doux.
05:21
On m'insultait et il y a un jour où ils sont venus à 3 pendant la pause du midi.
05:27
Et ils m'ont violellement attrapé le bras.
05:30
Ils me l'ont tiré.
05:32
Et c'est à ce moment-là que j'ai eu...
05:33
C'était quoi ?
05:34
La coiffe des rotateurs touchée.
05:37
Voilà, c'est la coiffe de rotateurs qui a été touchée.
05:40
Après, ils ont été prendre mes affaires et ils ont été les mettre dans les toilettes.
05:44
Et il y a une surveillante qui a tout vu, mais qui n'est même pas venue intervenir.
05:47
Elle est restée là à regarder la scène.
05:50
Dès que ça s'est fini, ils sont partis.
05:52
La surveillante est venue.
05:55
Elle m'a dit d'aller ramasser mes affaires dans les toilettes.
05:59
Du coup, c'est ce que j'ai fait.
06:00
Et j'ai continué la journée en ayant mal au bras, sans même voir personne.
06:05
Et c'est...
06:06
Oui.
06:07
Pourquoi vous?
06:09
Pourquoi vous étiez pris pour cible?
06:13
Ben, c'est par rapport à ma couleur de peau.
06:17
C'est...
06:19
On vous l'a fait comprendre.
06:21
Il y a eu des insultes racistes.
06:22
Oui, voilà, c'est ça.
06:24
Oui, voilà ça.
06:25
Il y a eu beaucoup d'insultes racistes.
06:27
Des insultes également concernant votre mère?
06:32
Oui.
06:33
On avait dit que ma mère...
06:35
Enfin, comment dire, que j'ai été adoptée parce que ma mère était blanche.
06:39
On a dit que ma mère...
06:41
Je ne sais pas si j'ai le droit de dire les insultes.
06:43
Allez-y, oui.
06:45
Pour qu'on comprenne bien.
06:46
Tu dis la première lettre.
06:47
Ben, on m'a dit que ma mère, c'était une pute.
06:52
Parce qu'elle sortait avec un noir et qu'elle avait eu un enfant noir alors qu'elle était blanche.
07:00
Vous avez même été étranglé dans un bus scolaire.
07:03
Oui, c'est ça.
07:06
C'était la fin des cours.
07:08
Je suis parti dans mon bus pour rentrer à la maison.
07:12
Et il y a un des élèves qui est venu.
07:14
Et il m'a étranglé.
07:16
Heureusement, il y avait une amie qui était là et qui a prévenu un adulte.
07:19
Parce que sinon, je ne sais pas, qu'est-ce qui aurait pu m'arriver si elle n'avait pas été là.
07:23
Mais on a affaire à des mineurs, Elodie Pruveau, vous le disiez vous-même.
07:26
C'est-à-dire que le dossier, on n'a pas donné suite.
07:29
Mais les parents, est-ce qu'il y a un moment...
07:31
Les agresseurs avaient moins de 13 ans.
07:32
Les parents des agresseurs, des harceleurs, est-ce qu'il y a un moment, ils ont été convoqués par la direction ?
07:37
Est-ce qu'on a essayé de discuter avec eux ou pas du tout ? Jamais ?
07:41
Ben, écoutez, lorsqu'il y a eu l'agression, Thaïs, la première agression, on va dire, raciste qu'il a subie,
07:52
c'est celle qui vient de vous raconter, où il a été étranglé dans le bus.
07:58
Les parents sont quand même venus jusqu'à devant notre domicile, nous dire qu'ils votaient un certain parti politique.
08:07
Et ça a été des insultes, des menaces.
08:11
Et ils ont même été jusqu'à aller à l'école pour demander à ce que Thaïs soit exclu de la classe.
08:17
Attendez, attendez, je pense que quand vous assistez à ça en tant que parent...
08:20
Attendez, Madame Pruvaux, qu'on comprenne bien, c'est-à-dire que les parents des harceleurs sont venus devant chez vous,
08:26
en fait, vous dire quoi ? On est chez nous, voilà ce que l'on vote, et vous n'êtes pas chez vous, quoi.
08:32
C'est ça qu'on vous a dit ?
08:33
C'est ça, exactement.
08:35
C'est-à-dire, en quel terme est-ce que ça vous a été dit ?
08:37
Ce à quoi j'ai répondu...
08:38
En quel terme ça vous a été dit précisément ?
08:40
Ah ben, on m'a dit clairement...
08:42
On m'a dit, nous, on vote Front National, et on ne veut pas que notre fils soit au contact de votre fils, qui est noir.
08:51
Oui, elle a décidé qu'elle ne voulait pas de noirs et d'étrangers dans son village.
08:54
Et qu'elle ne voulait pas d'étrangers dans son village.
08:57
Oui, on est dans une zone rurale, c'est ça ?
08:59
Oui, on est dans une zone rurale de l'Oise, mais quand même à proximité de grande ville.
09:09
On n'est quand même pas dans des campagnes isolées, et c'est quand même...
09:13
J'estime que même à notre époque, zone rurale ou pas, tenir ce genre de discours, ça n'a pas lieu d'exister, en fait.
09:21
Surtout que, comme je lui ai dit, mon fils a beau avoir une couleur un peu plus foncée, il en demeure pas moins français.
09:30
Justement, est-ce que cette montée, puisque vous dites que ces gens-là sont venus revendiquer le fait d'être du Rassemblement National,
09:36
donc ça vous inquiète ce que l'on voit, cette radicalisation, cette montée des voix RN ?
09:44
Écoutez, ça m'inquiète dans le sens où, effectivement, je ne comprends pas qu'on puisse vouloir évincer un enfant de la classe
09:55
parce qu'il a une couleur un peu plus pigmentée que le reste de la classe,
10:01
et qu'on ne s'intéresse même pas à l'histoire, on va dire, des origines.
10:06
Parce que certes, Thaïs est d'origine sénégalaise, mais son beau-père est d'origine martiniquaise,
10:12
et jusqu'à preuve du contraire, la Martinique, voilà, c'est les dom-toms.
10:16
Donc, ce qui est préjudiciable aussi, c'est que les gens n'ont pas de culture, n'ont pas un minimum de savoir,
10:23
et qu'ils ne s'intéressent même pas, c'est juste que vous avez une couleur un peu plus foncée,
10:27
donc automatiquement, vous n'avez pas votre place dans la société.
10:30
Je trouve que c'est quand même très très réducteur, en fait.
10:33
– Thaïs, aujourd'hui, vous êtes au lycée, c'est ça ?
10:35
– Comme c'est réducteur de dire à Thaïs.
10:37
– Oui, c'est ça.
10:40
– Donc, ça se passe bien au lycée ? Il n'y a plus de harceleurs ?
10:44
– Oui, ça se passe très...
10:45
Non, non, il n'y a plus du tout de harceleurs,
10:48
puis ce qui change entre la période, le collège-lycée,
10:52
c'est le fait qu'au collège, comme c'était comme on a dit tout à l'heure,
10:55
c'est en zone rurale, donc il n'y a pas forcément de mixité,
10:59
mais maintenant que le lycée est dans une zone plus urbaine,
11:03
il y a beaucoup plus de mixité, de diversité,
11:06
donc le jugement est beaucoup plus différent,
11:09
enfin, il n'y en a même pas du tout,
11:11
enfin, tout le monde, on vit tous ensemble, quoi,
11:14
enfin, il n'y a aucun jugement.
11:16
– Vous continuez la boxe ?
11:19
– Non, j'ai arrêté.
11:21
– Parce que vous y aviez commencé la boxe pour mieux vous défendre aussi,
11:24
et d'ailleurs, je crois qu'un jour vous vous êtes défendu,
11:27
et on vous a reproché, vous vous êtes battu, en fait,
11:30
pour vous défendre tout simplement.
11:31
– Oui, c'est ça, j'étais en pause,
11:39
et il y a un des élèves qui est venu, qui m'a insulté,
11:41
alors je lui ai donné un coup de poing pour me défendre,
11:44
et la CPE n'a même pas cherché à savoir quoi que ce soit,
11:47
elle m'a directement puni, moi,
11:49
en me disant qu'on n'avait pas à se battre au sein de l'établissement.
11:54
que tu n'avais pas à répondre par la violence.
12:00
– Merci Elodie Pruveau, et merci Thaïs Pruveau,
12:03
merci de ce témoignage.
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