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  • il y a 1 jour
Karin Huster est responsable des activités médicales à Médecins Sans Frontières. Entre janvier 2024 et novembre 2025, elle a passé 8 mois à Gaza au total. Lors de sa dernière mission, elle a perdu deux de ses collègues dans une frappe de l'armée israélienne.

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Transcription
00:00Des frappes sur nos collègues de Médecins Sans Frontières,
00:04c'est quand même quelque chose d'unique qui n'a jamais été observé
00:08dans toutes les crises, en tout cas par moi, dans toutes les crises humanitaires d'avant.
00:13Alors en total, j'ai passé un petit peu moins de 8 mois à Gaza.
00:17Ce sont des drones en continu qui nous rendent fous,
00:20ce sont des bombardements, des tirs de roquettes.
00:23Mon réveil matin, c'est les bombardements de la marine.
00:26Ce qui est le plus dérangeant, en tout cas pour moi,
00:28c'est qu'on peut être victime directe ou indirecte d'une attaque israélienne à n'importe quel moment.
00:35En fait, ce jour-là, le 2 octobre, il était vers 7h30 du matin,
00:39on était à l'hôpital, à Déralbala, qui se trouve au centre de Gaza.
00:44Derrière, on entend un énorme boom.
00:46Quand je suis arrivée à l'hôpital, je crois que je n'étais pas prête du tout
00:49de voir mes collègues, mes amis aux urgences.
00:52Mon collègue Aboud, qui était quelqu'un avec qui je bossais beaucoup,
00:54un homme extraordinaire, là, je le retrouvais allongé par terre devant la zone rouge.
01:00Personne ne s'occupait de lui.
01:01Donc je me suis agenouillée, je suis allée le voir.
01:04Et puis je lui ai dit, mais Aboud, c'est Karine, c'est Karine.
01:07Et il me dit, Karine, je ne vois pas, je suis aveugle, je ne vois pas ma tête, ma tête, mon dos.
01:12Et c'était dur parce que je savais très bien que c'était très grave.
01:21Ce qu'il fallait pour Aboud, c'est une évacuation médicale immédiate.
01:26Le troisième jour, il est décédé.
01:28On a fait une opération d'urgence, mais c'était déjà trop tard.
01:31Des frappes sur nos collègues de Médecins Sans Frontières.
01:35C'est quand même quelque chose d'unique qui n'a jamais été observé dans toutes les crises,
01:41en tout cas par moi, dans toutes les crises humanitaires d'avant.
01:44En général, c'est un monde assez sacré.
01:47On ne touche pas aux humanitaires parce que les humanitaires, justement,
01:50ne sont là que pour faire leur travail humanitaire.
01:53C'est-à-dire qu'on fait abstraction du problème politique.
01:56On ne s'occupe que de la population qui en a besoin.
01:58Et c'est ça qu'on essaye de faire à Gaza.
02:00Et le problème, c'est qu'aujourd'hui, vu qu'on est aussi des cibles,
02:03le travail qu'on fait est gêné et il y a certainement des endroits,
02:07des moments où on ne peut pas être là parce que c'est trop risqué.
02:10Ce cessez-le-feu, c'est quand même un peu spécial.
02:13Parce qu'à J3 ou 4, il y a eu plusieurs attaques qui ont fait 140 victimes.
02:18On continue d'entendre des F-16, on continue d'entendre les obus de la marine,
02:24on continue d'entendre les tanks.
02:26Ils sont en train de détruire toutes les infrastructures,
02:28de détruire toute l'agriculture.
02:30De façon à ce que le jour où on arrête de bombarder,
02:35il ne reste que du ciment.
02:38C'est un temps qui va leur permettre de respirer un peu plus,
02:41mais pas de respirer pour être soulagés.
02:44Ils vont respirer pour recevoir une encore plus grosse claque.
02:48Maintenant, c'est l'heure de réaliser l'ampleur de la catastrophe humaine.
02:53Et ça, ça va être incroyablement difficile.
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