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Spring 1939. After 1,000 days of fighting and more than 400,000 deaths, the war ended with Madrid taken by the Francoists and the Republic defeated. The post-war period was characterised by repression of the losing side and deep divisions often split families right down the middle.
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AprendizadoTranscrição
00:00Um putz como detonador.
00:13Um estado que se fonde.
00:16Uma revolução.
00:19E, muito rápido, uma guerra total que a derrubado a Espanha,
00:25terrorizado a população e dividido até o coração das famílias.
00:30O que a gente sabe da guerra de Espanha tia muito um nome, um slogan, uma imagem.
00:47O que a gente sabe menos, é que essa guerra, como uma cruzada contra a República,
00:53foi continuada muito depois da vitória de Franco.
01:00A gente sabe que a gente sabe que a guerra,
01:06uma guerra de Espanha,
01:06a gente sabe que se f
01:24Depois 1000 dias de combate, 400 mil mortos,
01:28dont a moitié são dos civis.
01:30As armas se testem, mas a paixão não vem por tanto.
01:35Vincu, reduiu a uma vida de paria,
01:38os republicanos têm a suportado
01:39a ironia de a chão em vogue esta semana.
01:42A qual os palavras proclamam,
01:44não passa a rád, eles não passarão.
01:46E bem, tampa para eles, dizem os franquistas.
01:48Nós estamos passados, pois Madrid é tomado.
01:54O 19 dezembro, Franco faz o triunfo
02:00em uma capital à moitié destruída.
02:15O longo da Castellana,
02:17a grande avenida de Madrid,
02:19não vemos mais os partisans de Franco.
02:21As pessoas saíram na rua, no balcão,
02:28eles saluam, felicitam.
02:30Há plein de imagens de tudo isso,
02:32do povo ravi de césar a vitória dos nacionalistas.
02:37E alguns se lembram ainda com muita alegria,
02:40com muita admiração e nostalgia,
02:43a época em que nós vamos vencer os inimigos de Espanha.
02:46Franco era um sabo.
02:52Franco era um sabo.
02:52Franco era um sabo.
02:52Franco era um sabo e um mistico.
02:54Ele a ressuscitado l'Espagne,
02:56porque ela era morta.
02:58E ele conseguiu...
02:59E ele conseguiu a governar com bom sens,
03:02com justiça,
03:03para fazer um país unido, grande e livre.
03:08Um país que Deus quiser,
03:11como dizem em Espanha.
03:11O campo, em Espanha!
03:16A propaganda presenta o que é isso como unanime,
03:20mas ela mal a realidade de um país profundamente traumatizado
03:23e mais nunca dividido.
03:26Aos vencadores, os honneiros e todos os direitos.
03:29Aos vencidos, a humilidade e o desarroi.
03:33A joia de viver do tempo da república,
03:44ela disparu para todos.
03:47A divisa da juventude,
03:49a euforia da jovens,
03:51a admiração dos filhos para os filhos dos filhos,
03:53que havia tant feito por os direitos dos cidadãos,
03:58tudo isso foi anéante por o franquismo.
04:00Se donnant todos os atributos de um monarque,
04:07Franco se instale
04:08em uma das antigas residências dos reis de Espanha.
04:11Uma maneira de legitimar seu poder
04:13e de afirmer sua autoridade.
04:15No palácio do El Pardo,
04:17como em outro tempo em seu quartel general,
04:20o presidente do Estado Espanhol,
04:21caudillo victorioso da nossa guerra e da nossa paz,
04:24se consagre à a tarea de regir e governar nosso povo.
04:27Contrairement à sa promessa,
04:33Franco poursuit sa croisade
04:34contra os repúblicos.
04:36A répression prend des accents d'épuration.
04:43En 1939,
04:45Franco promulgue la loi
04:47des responsabilidades politiques.
04:50E l'un des articles
04:51stipule qu'est considéré
04:52comme criminel
04:53quiconque s'est manifesté
04:55en faveur de la république.
04:56C'était une question
05:00de survie
05:02pour le régime
05:03que d'exercer
05:04une certaine répression.
05:07Sans cela,
05:08tous ses ennemis féroces,
05:10ses assassins impitoyables,
05:12terribles,
05:13auraient recommencé.
05:14Quels médecins
05:20ayant opéré
05:21un patient d'un cancer
05:22laisseraient
05:23de nouvelles tumeurs
05:24se développer.
05:26Aucun médecin
05:26ne ferait ça.
05:28Franco et les siens
05:29connaissaient bien
05:30leurs adversaires.
05:31A l'époque,
05:42ils pouvaient attraper
05:43quelqu'un
05:43et lui appliquer
05:44la loi de fuite.
05:45Vous savez
05:46ce qu'est la loi de fuite ?
05:48C'était pour justifier
05:50les assassinats
05:51parce que tuer son prochain
05:52est interdit
05:53par la loi chrétienne.
05:54Alors,
05:55ils disaient
05:55que le gars
05:56s'était enfui
05:57ou évadé
05:58et il lui tirait
05:59dans le dos.
05:59Même nous,
06:02les enfants,
06:03nous avons souffert
06:04de la violence
06:05que ce régime
06:05avait instaurée.
06:13Érigée en l'un
06:14des bras armés
06:14du régime,
06:16la phalange
06:16acquiert
06:17une nouvelle légitimité.
06:19Ses exactions
06:20se poursuivent
06:21en toute légalité.
06:25Dans les petits villages,
06:27les quartiers,
06:28les copropriétés,
06:30il y avait
06:30un mouchard.
06:32Une personne
06:33qui était
06:33accréditée
06:34par la phalange,
06:36ils étaient investis
06:37dans une mission
06:37de contrôler
06:38que tout marchait
06:39un peu dans l'ordre
06:40et que s'il y avait
06:41un désordre,
06:43mettons,
06:43dans une copropriété
06:44des gens
06:45qui se réunissaient
06:46ou autre,
06:46tac,
06:47ils passaient
06:48l'information
06:48à la phalange
06:49et à la police.
06:50Mon père,
06:51il était condamné
06:51à mort.
06:52Donc,
06:53ce mouchard,
06:55il s'est rendu compte
06:55que ma mère
06:56était enceinte.
06:56Et il s'est dit
06:57s'il est enceinte
06:58parce que le mari
06:59est par là.
07:00Donc,
07:00il communique
07:01l'info
07:01à la police
07:02et il l'amène
07:03à la caserne
07:03pour l'interroger.
07:05Là,
07:05il attache
07:06un poteau.
07:07Le sergent
07:08qu'il a questionné
07:09s'enlève
07:10le ceinturon,
07:12lui coince
07:12le cou
07:13au poteau
07:14et au-dessus
07:16de sa tête
07:16à 50 cm,
07:18un bidon d'eau
07:19percé
07:20d'un petit trou
07:21et toute la nuit,
07:23une goutte
07:23sur le crâne.
07:26Quand on la détache
07:27le matin
07:27pour l'interroger,
07:29ça n'est pas
07:29louéter.
07:29La maman,
07:31elle,
07:32savait très bien
07:32qu'on allait l'arrêter.
07:34Elle est amenée
07:35à la Puerta del Sol.
07:37La Puerta del Sol,
07:38pour moi,
07:38c'était le centre
07:39de la Terre.
07:40Et quand j'ai découvert
07:41que dans les souterrains
07:42de la Puerta del Sol,
07:43il y avait
07:44des scènes de torture
07:45qu'on emmenait là
07:46les prisonniers
07:46et que c'est là
07:47que ma mère s'est retrouvée,
07:48ça a été un choc,
07:50un choc
07:51parmi tant d'autres
07:51qui m'ont anéanti.
07:57La peur,
07:58on l'a installée en nous.
07:59Cette peur,
08:02elle se manifestait
08:03dans les conversations
08:04familiales.
08:05Chez moi,
08:06on utilisait un mot
08:07en basque,
08:08isho,
08:09silence.
08:11La phalange avait droit
08:14de vie et de mort
08:15sur tout le monde.
08:17C'est donc elle
08:18qui se charge
08:18d'assassiner,
08:19d'arrêter,
08:20de piller,
08:21de violer,
08:22de commettre
08:23toutes sortes de crimes
08:24en toute impunité.
08:29Généralement,
08:36les cadavres
08:37étaient laissés
08:37exprès
08:38dans les fossés
08:38pour que les gens
08:39les voient
08:40et qu'ils retiennent
08:41la leçon.
08:41La phalange est donc
08:56l'organisation
08:57qui se réjouit
08:58de la victoire
08:58de Franco,
08:59ce qui revient
09:00à se réjouir
09:00de l'assassinat
09:01de mon grand-père
09:02et de milliers
09:03d'autres personnes.
09:04Mais c'est faux,
09:10c'est une légende noire.
09:12Ce qu'il y a eu,
09:13ce sont des règlements
09:14de comptes
09:14entre les deux camps
09:15et qui n'étaient pas
09:16du fait du gouvernement
09:17mais de personnes
09:18dont les Rouges
09:19avaient massacré
09:20la famille
09:20alors quand ils ont
09:21gagné la guerre,
09:23ils ont tué les Rouges
09:24qui avaient massacré
09:24les leurs,
09:25c'est tout.
09:29Sur 30 000 condamnations
09:30à mort,
09:31seules 15 000
09:31ont été exécutées.
09:32S'il y avait eu
09:34extermination,
09:35je suppose que
09:36les 2 ou 3 millions
09:37d'anarchistes,
09:38de socialistes
09:38et de communistes
09:39que comptait alors
09:40l'Espagne
09:40auraient dû disparaître
09:42et ça n'a pas été le cas.
09:46Pourtant,
09:47durant les premières
09:48années du régime,
09:50entre 150 000
09:51et 200 000 personnes
09:52ont disparu.
09:54Enterrées à la va-vite
09:55au bord des routes
09:56ou entassées
09:57dans des fosses communes,
09:59leurs proches
09:59mettront parfois
10:00des décennies
10:01avant de retrouver
10:02leur dépouille.
10:03Comme à Amor et Bieta,
10:05au Pays Basque,
10:06où aujourd'hui encore,
10:08familles de victimes
10:09et scientifiques
10:09ont entrepris
10:11d'exhumer
10:11un ancien charnier.
10:15Dans ma famille,
10:17il y a des vainqueurs
10:18et il y a des vaincus.
10:21Alors,
10:22j'estime avoir le droit,
10:23même si chez nous
10:24il n'y a pas de disparus,
10:25de savoir ce qui s'est passé
10:26pour les autres.
10:27En 2000,
10:29j'ai commencé à participer
10:31à ces fouilles
10:31en tant que médecin légiste.
10:34Nous avons trouvé
10:35tout type de sépultures.
10:38Certains corps ont été jetés
10:39dans des puits de mine,
10:42d'autres ont été enterrés
10:43dans la montagne,
10:44à 5 mètres de profondeur,
10:45les uns sur les autres,
10:46entravés,
10:48parfois à face contre terre,
10:50toutes les variantes imaginables.
10:51Pour alimenter la répression,
11:04les archives de Salamanque,
11:05réunies dans plusieurs
11:06institutions religieuses,
11:07sont mises à contribution.
11:09Des millions de documents
11:10et photographies saisis
11:12par les franquistes
11:12durant la guerre civile
11:14concernant les institutions
11:15de la République,
11:17les loges maçonniques,
11:18le monde de la culture
11:19et les organisations
11:20politiques et syndicales
11:21permettent à la dictature
11:22de condamner tous ceux
11:23qu'elle qualifie
11:24d'ennemis de l'Espagne.
11:30Ici, on trouve l'affiche
11:31de l'un des frères
11:32de mon grand-père.
11:34Ma famille maternelle
11:35avait ouvertement
11:36soutenu la République.
11:38Mon grand-père était
11:38l'instituteur
11:39d'un petit village près d'ici.
11:42Toute personne
11:43ayant participé
11:44à un quelconque mouvement,
11:46à une quelconque organisation
11:47ouvrière, syndicale
11:49ou politique,
11:50était susceptible
11:51d'être traduit en justice.
11:53C'est l'origine
11:54de toute la monstruosité
11:57qui nous entoure.
11:58Plus de 3 millions de fiches.
12:013 millions de fiches
12:02où sont répertoriés
12:04non seulement
12:04ceux qui étaient considérés
12:06comme les ennemis du régime,
12:07c'est-à-dire
12:07les organisations républicaines,
12:10les francs-maçons,
12:11mais aussi des pasteurs protestants,
12:14des membres de la Ligue
12:15des droits de l'homme,
12:16des espérantistes,
12:20autrement dit,
12:20tous ceux suspectés
12:22d'une pensée dissidente.
12:27Les archives sont pleines de documents.
12:31Parce que l'un des avantages
12:37des régimes autoritaires
12:38est qu'ils donnent lieu
12:39à une paperasse
12:40très abondante,
12:42puisque personne
12:43ne se risque à agir
12:44sans en avoir reçu l'ordre.
12:49Parmi ces registres
12:50figure le dossier
12:51de Nicolas Sanchez-Albornoz.
12:54Arrêté pour des graffitis
12:55antifranquistes,
12:56il est condamné
12:57à 8 ans de travaux forcés.
12:58À notre arrivée,
13:03on a vu des barraquements.
13:05On était plus
13:06d'une centaine là-dedans.
13:11C'était un de ces camps
13:12pas très grands,
13:14mais pas un camp
13:14d'extermination.
13:18En fait,
13:18c'était un camp
13:19de concentration
13:20au rabais.
13:23À partir de 1940,
13:25plus de 240 000 détenus
13:27s'entassent
13:28dans les 180 camps
13:29de concentration
13:30mis en place
13:31sur le territoire.
13:33Ils sont tellement nombreux,
13:34ces soi-disant
13:35ennemis de l'Espagne,
13:36que d'autres lieux
13:37de détention
13:38sont ouverts
13:39dans des arènes,
13:40des stades
13:41ou des terrains vagues.
13:42Les camps de concentration
13:49espagnols ont surgi
13:50parce qu'on ne pouvait pas
13:51garder des milliers
13:52et des milliers
13:53de prisonniers politiques
13:54en prison.
13:57Les geôles étaient pleines.
13:59Alors,
13:59on a créé ces camps
14:00comme celui
14:01où est allé
14:01mon grand-père
14:02Celestino,
14:02un socialiste notoire.
14:03Lors d'une visite
14:09au camp de Miranda
14:09des Hébreaux
14:10où croupissent
14:11des milliers
14:12de prisonniers,
14:13Himmler,
14:14le chef de l'ASS
14:15et de la police
14:16du Troisième Reich,
14:17fait remarquer
14:18à ses amis espagnols
14:19qu'il est absurde
14:20de ne pas utiliser
14:21cette main-d'œuvre
14:22pour la réalisation
14:23de grands travaux.
14:27Aussitôt dit,
14:28aussitôt fait.
14:28Barrages,
14:30canaux d'irrigation,
14:31voies de chemin de fer,
14:33Franco reconstruit
14:34l'Espagne
14:35grâce au travail forcé
14:36des prisonniers politiques.
14:56L'un de ces chantiers
14:57lui tient particulièrement
14:58à cœur.
15:12Pour le plus grand
15:13de ces grands travaux,
15:14un mausolée
15:15à la gloire
15:15des victimes nationalistes
15:16de la guerre civile,
15:18Franco va mobiliser
15:19jusqu'à 20 000 prisonniers
15:21durant les 20 années
15:22de sa construction.
15:27Sur le chantier,
15:41il y avait
15:41trois groupes
15:42de prisonniers.
15:45Le premier était affecté
15:47au creusement
15:47de la crypte.
15:48Le second s'occupait
15:55du terrassement
15:56des accès au site,
15:57de la route
15:59et tout ça.
16:05Et le troisième
16:08était dédié
16:09à la construction
16:10du monastère.
16:10Bien sûr qu'il y a eu
16:14des morts,
16:15mais ce n'était pas voulu.
16:20Les gens mouraient
16:20à cause des cailloux
16:21qui leur tombaient
16:22sur la tête,
16:23parce qu'ils ne portaient
16:24que des bérets
16:25pour se protéger,
16:26pas de casques.
16:27Moi, j'ai eu
16:32de la chance.
16:36Dès mon arrivée,
16:36le chef du camp
16:37m'a dit
16:37« Tu es étudiant
16:40à ce qu'il paraît,
16:40n'est-ce pas ?
16:42Alors demain,
16:43tu passes au bureau
16:43parce que je n'ai plus
16:44de secrétaire. »
16:47En cet automne 1940,
16:56Franco reste l'obligé
16:58de l'Allemagne nazie
16:59qui l'a tant soutenue
17:00durant la guerre civile.
17:01Au lendemain de sa victoire
17:23sur la France,
17:24Hitler veut sonder l'Espagne
17:26sur un éventuel engagement
17:27dans la Seconde Guerre mondiale
17:28à ses côtés.
17:31Le 23 octobre,
17:35les deux hommes
17:36se retrouvent à Andai
17:37pour un entretien.
17:43Mais Franco temporise.
17:46Il a sa propre guerre
17:46à terminer
17:47sur son territoire
17:48contre ceux
17:49qui n'ont pas déposé
17:50les armes
17:51et refusent
17:52de s'avouer vaincus.
18:01Depuis la reddition
18:05des forces républicaines,
18:07une poignée d'hommes
18:08et de femmes
18:08ont pris le maquis
18:09pour continuer
18:10la lutte armée.
18:14Notamment en Andalousie,
18:16en Galice,
18:17dans la province de Léone
18:18et dans les Asturies.
18:19Soldats de la République déchus
18:28ou enfants de victimes
18:29de la répression,
18:31ces combattants
18:32que le régime qualifie
18:33de bandits
18:33risquent leur vie
18:34à chaque opération.
18:35Moi, j'ai pris les armes
18:43et d'autres aussi.
18:46Nous avions dans les 14 ans.
18:49Nous sommes devenus
18:50des rebelles,
18:51des militants antifranquistes
18:52de la première heure.
18:55Bien sûr, on avait peur,
18:57mais il fallait la surmonter
18:58parce que malgré la peur,
19:01il y avait un engagement
19:02et le nôtre était
19:03de faire notre possible
19:04pour créer
19:05des réseaux de solidarité.
19:09On était divisés
19:11en groupes de guérillas.
19:13On devait connaître
19:14les chemins,
19:15on devait connaître
19:16les maisons
19:16et pour chaque planque,
19:20on avait un mot de passe.
19:25Pour éviter l'extension
19:26de cette guérilla,
19:28les forces de l'ordre
19:29ont pour mission
19:29de procéder
19:30à l'éradication complète
19:32de ses membres.
19:32« Si par malchance
19:36tu tombais vivant
19:37entre les mains
19:37de la police
19:38et peu d'entre nous
19:39sont tombés,
19:40la consigne était
19:41que si tu étais blessé,
19:42tu te mettais une balle.
19:43« L'atmosphère de l'époque
19:49a créé la solidarité
19:51des villages
19:51avec nous autres
19:52et à partir de là,
19:54ça s'est étendu
19:55et organisé.
19:56A l'époque,
20:10en Andalousie,
20:11les combattants
20:12antifranquistes
20:13sont souvent appelés
20:14des « kéros »,
20:15du nom de famille
20:16des quatre frères
20:17qui font trembler
20:17les autorités.
20:19Ils deviennent
20:20si légendaires
20:21qu'un chant flamenco
20:22leur est dédié.
20:23Mes frères avaient pris
20:46le maquis.
20:47Les premiers
20:48à rejoindre
20:49la lutte armée,
20:50ce furent
20:51Pépé et Antonio.
20:53Les gens les aimaient
20:54parce qu'ils avaient
20:55un cœur d'or.
20:56Ils étaient généreux,
20:57c'est pour ça
20:58qu'on les appréciait.
21:02Certains les traitaient
21:02de bandits,
21:03mais eux se disaient
21:04maquisards.
21:07Ils essayaient
21:07de ne pas faire
21:08de victimes,
21:09mais pour se défendre,
21:10ils tiraient
21:11et parfois tuaient.
21:12Durant plusieurs années,
21:16la fratrie va mener
21:17des opérations
21:18coup de poing
21:18en exécutant
21:19au grand jour
21:20phalangistes,
21:21policiers
21:22et gardes civils.
21:25À peine sortis
21:26de l'enfance,
21:27le plus jeune
21:28de la famille
21:28Kéros
21:29est torturé
21:29pour livrer
21:30des informations
21:31sur ses aînés.
21:35Ils m'ont emmené
21:36au commissariat
21:37le même jour
21:38que mon frère Pedro.
21:39Ces gens-là
21:42n'avaient aucune pitié.
21:44Non,
21:45pas la moindre.
21:49Des coups
21:50et encore des coups
21:52et vas-y
21:52que je te cogne.
21:56Moi,
21:56je ne les voyais pas.
21:59L'hématome
22:00causé par les coups
22:01de ma traque
22:01sur la tête
22:02avait fait basculer
22:03mon cuir chevelu
22:04vers l'avant
22:04et j'avais la vue boucher.
22:09Alors,
22:11je devais faire
22:12comme ça
22:12pour voir
22:13d'où venaient les coups.
22:15Ça,
22:16ça là,
22:17c'était une éponge.
22:19Mon cuir chevelu
22:20était une éponge.
22:21C'était une éponge.
22:311941.
22:32Le pays fait face
22:33à une autre épreuve
22:34car la famine
22:36gagne région
22:36après région
22:37depuis la victoire franquiste.
22:39Près de 200 000
22:42Espagnols
22:42meurent de faim.
22:45Dans les régions
22:46longtemps restées
22:47aux mains
22:47des républicains,
22:49usines et cultures
22:50sont dévastées
22:51par les combats.
22:53Laissées à l'abandon,
22:55les terres
22:55ne produisent plus.
23:00Les châtaignes,
23:01les glands
23:02et les orties
23:02deviennent
23:04les aliments
23:04de base
23:04pour nombre
23:05d'Espagnols.
23:06On les consomme
23:08avec de la viande
23:09de chat,
23:10d'oiseaux,
23:11de rats,
23:13de lézards
23:13même.
23:19On mangeait
23:19tout ce qu'on trouvait,
23:20même les branches
23:21des arbres.
23:24Les paysans, eux,
23:25avaient toujours
23:26des patates
23:26ou autre chose,
23:27tu vois.
23:27Ce n'était pas
23:30la même faim
23:30qu'en ville
23:31où tout était rationné
23:32et il fallait
23:33la carte pour tout.
23:36Avec ça,
23:36ils te donnaient
23:37une ration de pain
23:38qui était à moitié
23:39du sable
23:39mais il fallait
23:40s'en contenter.
23:43Il n'y avait plus
23:44de boulot,
23:45donc forcément
23:46plus de bouffe.
23:48Ma mère me racontait
23:49qu'elle n'avait jamais
23:51eu aussi faim
23:52de sa vie.
23:52Elle, son frère,
23:55sa mère, son père
23:57et puis les gens
23:58du quartier,
24:00ça devait être
24:01la guerre
24:01pour trouver
24:02le moindre
24:02quignon de pain.
24:06Là, le mot
24:06faim,
24:07il faut avoir vécu
24:09pour savoir
24:09ce qu'était la faim.
24:12La seule pièce
24:13d'identité,
24:14c'était le livret
24:15de famille
24:16et en ouvrant
24:17le livret de famille,
24:18il y avait un tampon
24:19rojo, rouge.
24:22Alors là,
24:22vous y étiez,
24:23c'est fini là.
24:24On n'avait pas droit
24:25au minimum vital.
24:28Le souci de ma mère,
24:29c'était ça,
24:30nourrir,
24:30nourrir,
24:31nourrir mes enfants.
24:33Comme elle travaillait
24:34dans un hôtel,
24:35elle s'était confectionnée
24:36une poche en tissu
24:37à l'intérieur
24:38de sa robe.
24:40Et comme c'était
24:41un hôtel
24:41visité
24:42et occupé
24:43par des bourgeois,
24:45quand les plats
24:46étaient ramenés
24:46à la cuisine,
24:48il y avait des restes
24:49de gens
24:49qui n'avaient pas faim.
24:51Et les restes,
24:52ils se disputaient
24:53des employés
24:55de la cuisine.
24:56Elle les prenait
24:56et les cachait
24:57dans cette poche.
24:59Et le soir,
24:59quand elle arrivait
25:00à la maison,
25:02elle sortait ça,
25:03une petite caisse
25:04en bois,
25:04elle mettait
25:05une serviette
25:05bien propre
25:06et elle mettait
25:07et les restes qui avait.
25:09Pour assurer
25:10leur survie,
25:11les républicains
25:12sont réduits
25:13à compter
25:13sur la charité
25:14de leurs oppresseurs.
25:15Les années d'après-guerres
25:29ont été très dures
25:44parce que nous devions
25:45subvenir aux besoins
25:46de l'autre moitié
25:47de l'Espagne.
25:49Toutes les villes
25:49anciennement
25:50aux mains des communistes,
25:51il a fallu les nourrir
25:52avec les ressources
25:53de l'Espagne nationaliste.
25:56Bien sûr qu'il y a eu
25:57de la faim
25:57et du rationnement,
25:59mais pas longtemps.
25:59Jour après jour,
26:08la propagande
26:08s'attache
26:09à encenser
26:09le caudillo.
26:12Elle va jusqu'à
26:13le présenter
26:13comme un surhomme
26:15descendu sur terre
26:16pour racheter
26:17l'Espagne
26:17de son péché républicain.
26:19En Espagne,
26:25tous les partisans
26:26du régime franquiste
26:27ont toujours soutenu
26:28que Franco
26:28nous avait libérés
26:29du communisme,
26:30autrement dit
26:31du pire,
26:32du diable.
26:36La propagande nationaliste
26:40s'est chargée
26:41de nous faire croire
26:41que Franco
26:42était un bon dirigeant
26:43et qu'il avait œuvré
26:44pour le bien du pays.
26:49C'est pourquoi
26:50le régime franquiste
26:51a, je crois,
26:52duré si longtemps
26:52en Espagne.
26:56Le discours officiel
26:58stigmatise
26:58à l'envie
26:59les républicains.
27:02Réduits à l'appellation
27:03de Rojos,
27:04les Rouges,
27:05ils sont accusés
27:06de tous les maux.
27:09La guerre,
27:10la famine,
27:11mais aussi
27:11la destruction
27:12de Belchite,
27:13un gros bourg
27:14non loin de Saragosse,
27:16théâtre d'affrontement
27:17acharné,
27:18leur est imputé.
27:23Élevés au rang
27:24de village martyr,
27:26les ruines de Belchite
27:27deviennent un haut lieu
27:28de l'héroïsme militaire
27:29du camp franquiste.
27:35Les nationalistes
27:37se sont toujours défendus
27:38jusqu'au dernier.
27:40Jamais les Rouges
27:40n'ont agi de la sorte.
27:42Ils se sont jamais battus
27:43jusqu'au dernier.
27:45Ils partaient en courant
27:46dès que les choses
27:46tournaient mal.
27:48C'est la différence
27:48entre les deux camps.
27:53Franco réécrit l'histoire
27:54à son avantage.
27:55Il se fait même scénariste
27:57pour le film intitulé
27:58Rasa,
27:59la race,
27:59qui exalte le courage
28:01dont devrait faire preuve
28:02tout bon espagnol.
28:03Vous voulez vendre ?
28:04Non,
28:05non est nécessaire.
28:07Donc,
28:08date la volta.
28:09Non,
28:10le habéis de matar
28:11de frente.
28:13Comme vous voulez.
28:14Plus encore que par la propagande,
28:37c'est par l'Église
28:37que l'État franquiste
28:38va mener sa mission
28:40de régénération morale
28:41de la patrie.
28:51En prenant la tête
28:56des processions
28:57de la semaine sainte,
28:59Franco enterrine
29:00le pacte entre l'Église
29:01et l'État.
29:12De l'éducation
29:13à la conduite amoureuse,
29:14le catholicisme d'État
29:16régente tous les aspects
29:17de la vie des Espagnols.
29:18L'Église
29:29L'Église
29:30était super importante.
29:33On était sous perfusion
29:34tout le temps.
29:35À l'école,
29:35à la maison,
29:36partout.
29:37C'était incontournable.
29:38Mes parents y étaient favorables.
29:45Ce n'étaient pas
29:46des franquistes
29:46très, très fervents,
29:48mais ils avaient
29:49une ligne de conduite,
29:50une morale, oui,
29:51totalement franquiste.
29:52Ça, c'est vrai.
29:53Alors, à l'école,
30:04le matin,
30:05on rentre,
30:07à genoux la prière,
30:09et si vous avez
30:09des pantalons un peu long,
30:11retroussez les pantalons
30:12pour que vous soyez
30:13à genoux sur le carrelage,
30:15pour qu'au moins
30:15la prière vous la sentiez.
30:19Quand on est sur un trottoir
30:20et qu'en face
30:21passe un curé,
30:23il fallait qu'on traverse
30:24pour lui baiser la main.
30:27Rater la messe du dimanche,
30:29c'était un péché mortel.
30:32Et en classe,
30:32on te gavait de bondieuserie
30:33dès le plus jeune âge.
30:38Avec Franco,
30:41l'Église catholique
30:42retrouve le rôle
30:42qu'elle a eu en Espagne
30:43durant des siècles.
30:46Dans l'éducation de la jeunesse,
30:49l'inspiration des lois chrétiennes,
30:51le mariage religieux,
30:52la famille,
30:52le respect de la propriété,
30:55travailler pour gagner sa vie,
30:57les règles de bienséance,
30:58l'enseignement,
30:59les hôpitaux,
31:00la charité.
31:05Dans cette Espagne
31:06qui fait de la bigoterie
31:07une vertu cardinale,
31:09la lutte contre l'immoralité
31:11est poussée jusqu'à l'obsession,
31:13au point de conditionner
31:14la place des femmes
31:15dans la société.
31:18La femme était au service
31:21de l'homme.
31:23Elle devait être soumise,
31:24élevée pour être femme au foyer,
31:26mère de famille
31:26et la meilleure épouse du monde.
31:29Il n'y avait pas d'autre option.
31:33Et tenter de t'affranchir
31:34des normes imposées
31:35t'exposait à de nombreux problèmes.
31:37Alors que l'Espagne républicaine
31:44avait commencé à libérer les femmes
31:45de leur rôle traditionnel
31:46de mère et d'épouse,
31:48le franquisme exerce sur elle
31:50une surveillance de chaque instant.
31:52Une répression
31:54qui va perdurer des décennies.
32:00Je venais d'avoir 16 ans.
32:03C'était très très tôt le matin.
32:05Je dormais encore dans ma chambre
32:06quand soudain la lumière s'allume.
32:11C'est ma mère
32:12avec notre médecin de famille.
32:14Ils m'attrapent le bras.
32:16Je sens une aiguille ici,
32:17dans la veine.
32:19Et c'est le trou noir.
32:22Le moindre faux pas,
32:24la moindre transgression
32:25peut valoir aux jeunes filles
32:26de se retrouver en maison de correction
32:28pour les remettre dans le droit chemin.
32:32Il y a 24 heures de ma vie
32:33dont je ne sais rien.
32:36Rien.
32:38Je me suis réveillée
32:39dans une pièce inconnue
32:40à me demander où j'étais,
32:42ce que je faisais là.
32:46Et au bout d'un moment,
32:47entre une bonne sœur.
32:52Elle prend ma valise.
32:54Nous marchons dans un couloir
32:55devant une rangée de jeunes filles.
32:58Et quand j'ai vu leur visage,
33:01leur cerne,
33:03j'ai compris que j'étais
33:04dans un centre de redressement.
33:05Chaque fille portait un drame.
33:16Beaucoup venaient de villages reculés.
33:20D'autres d'orphelinats.
33:22Des enfants de prisonniers.
33:24Il y avait de tout.
33:24La mission de l'institution
33:29était de veiller à ce que ces jeunes filles
33:31qui avaient soi-disant mal tournées
33:33retrouvent leur dignité.
33:36Pour eux, nous étions
33:37soit des saintes,
33:38soit des putes.
33:39Il n'y avait pas de juste milieu,
33:40saintes ou putes.
33:41Et à l'époque,
33:42on se devait d'être une sainte.
33:45Pour bâtir la société
33:47à laquelle le régime aspire,
33:49rien ne doit subsister
33:50de l'esprit de la République.
33:51Certains idéologues
33:53affirment l'existence
33:55d'un gêne rouge,
33:57signe d'une infériorité mentale
33:58propre aux républicains.
34:01Il faut donc extirper le mal
34:02à la racine,
34:03dès le plus jeune âge,
34:05en procédant à des baptêmes de masse
34:07et en s'emparant des bébés
34:08et des femmes détenues.
34:12La crainte de ma mère,
34:14c'était d'accoucher en prison.
34:17Parce que là, c'était
34:18la politique de l'époque.
34:21On prenait les enfants
34:23des femmes républicaines
34:24et on les donnait en abandon
34:27à des familles bourgeoises
34:29pour le prix d'un appartement presque.
34:33Le produit de la vente
34:34était divisé
34:34les bonnes sœurs
34:36qui géraient la maternité,
34:39les pédiatres et les médecins
34:41qui géraient le côté médical
34:43et l'œuvre franquiste.
34:46La femme était le symbole
34:47de toute façon de la famille
34:49telle que l'idéologie franquiste
34:51et l'Église la définissaient.
34:56Donc toutes ces mères républicaines
34:58forcément n'entraient pas dans le moule.
35:00Donc il fallait les éradiquer.
35:02On ne pouvait pas toutes les fusiller.
35:03Certaines l'ont été.
35:05Mais on pouvait soustraire
35:06leurs enfants.
35:11Donc ma mère se retrouve
35:12avec Antonito,
35:13mon frère,
35:14à Saturara,
35:15une prison très très dure.
35:18Il y a des bruits
35:19qui commencent à courir.
35:20Si ton enfant tombe malade,
35:22ne va surtout pas
35:23le confier à l'infirmerie
35:24parce que tu ne le reverras pas.
35:26Donc maman,
35:26elle se méfie.
35:27Malheureusement,
35:29un jour,
35:29petit Antonito
35:30a une très très forte fièvre.
35:32Elle est obligée
35:32de le confier à l'infirmerie.
35:34Voilà,
35:34il sera guéri
35:35parce qu'on va le mettre
35:36entre les mains du Seigneur.
35:38Maman revient donc
35:38le lendemain.
35:40Une des religieuses lui dit
35:41« Écoute, désolé,
35:42mais ton enfant est décédé. »
35:44Donc c'est le choc,
35:45évidemment,
35:45pour maman.
35:46Mais elle veut quand même
35:47voir son enfant
35:48une dernière fois.
35:49Elle veut l'embrasser,
35:50elle veut l'étreindre.
35:51Et les religieuses lui disent
35:52« Ah ben non,
35:53c'est pas possible
35:53parce qu'il est déjà enterré. »
35:54Mais comment déjà enterré
35:55puisqu'il est mort dans l'art ?
35:57Oui, oui, c'est comme ça.
35:58Ne pose pas de questions.
36:00Le petit ange est au ciel maintenant.
36:02Donc voilà,
36:02c'est fini.
36:11Non,
36:13des enfants volés,
36:13il n'y en a pas eu.
36:15Personne n'a jamais été inculpé.
36:17Depuis des années
36:17que l'on nous serine avec ça,
36:19pas une seule inculpation.
36:20On n'a jamais rien prouvé.
36:22Les enquêtes menées
36:26ces dernières années
36:27prouvent pourtant bien
36:28qu'il y a eu plus de 30 000 bébés
36:30volés à leur mère républicaine
36:32durant le franquisme.
36:34Certains ont été adoptés
36:35par des familles franquistes,
36:37d'autres placés
36:38dans des orphelinats.
36:41Tous ont été élevés,
36:43soit dans l'ignorance
36:44de leur origine,
36:46soit dans le ressentiment
36:47à l'égard
36:47de leurs parents biologiques.
36:49Le 24 juin 1941,
37:03deux jours seulement
37:04après l'invasion allemande
37:05de l'Union soviétique,
37:07Franco s'affranchit
37:08de sa neutralité.
37:11Sans entrer officiellement
37:12en guerre,
37:13il envoie 45 000 Espagnols
37:14se battre sous uniforme
37:16de la Wehrmacht
37:16sur le front russe.
37:17En envoyant la division à Soule,
37:24nous rendions la monnaie
37:25de leurs pièces aux soviétiques
37:26qui avaient causé
37:27tant de dégâts en Espagne.
37:30Il y a eu tant de disparus,
37:31tant de martyrs,
37:32tant de morts
37:32à cause de l'Union soviétique.
37:35Alors qu'on leur a envoyé
37:36tous les volontaires
37:37décider à lutter
37:38contre le communisme.
37:39Cette collaboration
37:45entre l'Espagne franquiste
37:46et l'Allemagne nazie
37:48va sceller le destin
37:49de plusieurs milliers
37:50d'exilis républicains
37:51détenus dans les camps
37:52d'internement
37:53de la France de Vichy.
37:54Hitler demande
37:59« Que fait-on des Espagnols ? »
38:02Et la fameuse phrase
38:03malheureusement célèbre
38:05de Franco
38:06« Hors d'Espagne,
38:08il n'y a pas d'Espagnols. »
38:10Alors là,
38:11Hitler se frotte les mains,
38:13fait passer la gestapo
38:14dans tous les stas-là,
38:16ramasse les 10 000 espagnols
38:17et les envoie
38:19à Matausen.
38:21C'est-à-dire un camp
38:21destiné
38:22à la mort
38:24par esclavage.
38:27Il y a une pierre
38:28qui dit
38:28« Une grande partie des pierres
38:31sont tachées
38:31du sang des Espagnols. »
38:37Sur les quelques 7 000 Espagnols
38:38déportés à Matausen,
38:40plus de la moitié
38:41vont perdre la vie.
38:45S'ils se moquent bien
38:46du sort réservé
38:47à ses compatriotes
38:47dans les camps nazis,
38:49Franco se montre
38:50particulièrement vigilant
38:51à l'égard
38:52des dirigeants politiques
38:53républicains
38:54devenus clandestins
38:56dans la France occupée.
38:57Il y envoie ses agents
38:59pour les éliminer.
39:03« J'ai réellement découvert
39:04les activités
39:05de mon grand-père en France
39:06un dimanche matin
39:07dans la presse
39:08en tombant sur un article
39:10de deux pages
39:10où j'ai reconnu sa photo
39:11légendée
39:13Pedro Uracarén-Duelles
39:14qui portait un titre
39:15terrifiant.
39:17« Uraca,
39:18le chasseur de rouges. »
39:25Il avait été policier
39:26avec la mission spéciale
39:28de localiser,
39:28surveiller
39:29et capturer
39:30le maximum
39:30de hauts dignitaires
39:31de la République espagnole
39:32réfugiés en France.
39:34De plus,
39:40l'article donnait
39:40les noms
39:41de ceux
39:41qui l'avaient arrêté
39:42avec l'aide
39:42de la Gestapo
39:43et qui furent
39:44extradés en Espagne
39:45pour être exécutés.
39:51Le débarquement
39:52anglo-américain
39:53en Afrique du Nord
39:54et les premières défaites
39:56de l'Axe
39:56conduisent Franco
39:58à retourner sa veste.
40:00Le temps est venu
40:01de prendre ses distances
40:02vis-à-vis d'Hitler
40:03et de Mussolini.
40:06Courant 1943,
40:08après avoir écarté
40:08du gouvernement
40:09son beau-frère
40:10et éminence grise,
40:11Serrano-Sounière,
40:13bien connu
40:13pour ses amitiés nazies,
40:15il rappelle
40:16sa division à Soudre.
40:26À l'automne 1944,
40:29les nombreux Espagnols
40:30qui avaient participé
40:30à la libération
40:31de la France
40:32pensent pouvoir compter
40:33sur le soutien
40:34des alliés
40:34pour renverser Franco.
40:37Ils se réunissent
40:38à Toulouse,
40:39devenue la capitale
40:40de la République espagnole
40:41en exil.
40:43L'opération reconquête
40:44de l'Espagne
40:45est lancée.
40:46Bien sûr
40:50qu'il y avait
40:50de l'espoir,
40:51c'est logique.
40:52La Seconde Guerre mondiale
40:54devait mettre fin
40:54au fascisme international.
41:00Le 19 octobre 1944,
41:03plus de 6 000 combattants
41:04antifranquistes
41:05pénètrent dans leur pays
41:07par le Val d'Aran.
41:08Dans cette région pyrénéenne,
41:10ils ont prévu
41:10d'installer
41:11un gouvernement provisoire
41:12qui appellera
41:13les Espagnols
41:14à une insurrection générale.
41:15Rejoints par des maquisards,
41:18cette troupe prête
41:19à en découdre
41:20se déploie dans la vallée.
41:22Mais dès le lendemain,
41:23les Républicains
41:24trouvent face à eux
41:25une véritable armée
41:26appuyée par l'artillerie
41:27et l'aviation.
41:29Débordés par le surnombre,
41:31ils se replient
41:31dans les montagnes
41:32où repassent côté français.
41:33A aucun moment,
41:36les armées alliées
41:36stationnées en France
41:37n'ont reçu l'ordre
41:39de leur prêter main forte.
41:41Plus qu'une défaite,
41:43c'est une débâcle.
41:44Elle marque la fin
41:45de la résistance armée
41:46à Franco
41:47et anéantit tout espoir
41:49de libérer militairement
41:50l'Espagne.
41:50Les armées américaines
41:55sont arrivées
41:56à la frontière d'Andaï
41:57et ne l'ont pas franchie.
42:02Plus tard,
42:02j'ai appris
42:02que des hommes politiques
42:04et des syndicalistes
42:05avaient demandé à Roosevelt
42:07de franchir la frontière
42:08et que Roosevelt
42:10avait donné l'ordre
42:11de ne pas bouger.
42:14Le peuple espagnol
42:15a découvert
42:16que Franco
42:17resterait pour un moment
42:18puisque personne
42:20parmi les alliés,
42:22ni les Français,
42:23ni les Anglais,
42:23ni les Américains
42:24avait quelconque envie
42:28d'aller chercher Franco
42:30et de le sortir
42:30de là où il était.
42:36Franco,
42:37qui a pris soin
42:37d'abroger l'obligation
42:38du salut fasciste,
42:40ne connaît pas
42:41la même fin
42:41qu'Hitler et Mussolini
42:42et son pays
42:43est mis au banc des nations.
42:46Fin 1946,
42:48l'ONU met comme
42:49en condition
42:50à l'acceptation
42:50de l'Espagne
42:51parmi ses membres,
42:52le départ de Franco.
42:55Le 9 décembre,
42:56le Caudillo
42:57organise la riposte.
42:59Il appelle son peuple
43:00à manifester
43:01contre cette ingérence
43:02étrangère.
43:04À Madrid,
43:05plusieurs centaines
43:06de milliers
43:07de personnes
43:07envahissent les rues.
43:08de l'Espagne,
43:09où l'Espagne
43:09de l'Espagne,
43:11où l'Espagne
43:12de l'Espagne
43:13de toutes les clases
43:14et les conditions
43:15de l'Espagne,
43:15de l'Espagne,
43:15de l'Espagne,
43:15en marcher.
43:17Et pour tout
43:17le itinerario
43:18jusqu'à la plaza
43:18de la Cibérez
43:19et la calle
43:19de Alcalá,
43:20la immense
43:21riada humana,
43:22où les vétères
43:23et les cancions
43:24patriottiques,
43:25avance en oleada
43:26incontentable,
43:27pour dire au monde
43:28comment
43:29comme l'Espagne
43:29permanece en pied
43:31junto al jefe
43:32del Estado
43:32que suplo llevar
43:33a feliz término
43:34la cruzada
43:34libéradora
43:35contra el comunismo
43:36y mantener
43:37en todo instante
43:38la paz,
43:39la dignidad
43:40y la soberanía
43:41de la patria.
43:49Franco profite
43:50de ce regain
43:51de popularité
43:52pour devenir
43:53chef d'État
43:54à vie
43:54grâce à un référendum
43:56sans opposition.
43:57Vainqueur
43:59sur tous les fronts,
44:00certain de demeurer
44:01le maître de l'Espagne
44:02jusqu'à la fin
44:02de ses jours,
44:04il ne lui reste plus
44:05qu'à déclarer
44:05en 1948
44:06la fin
44:07de l'état de guerre.
44:13Et à faire oublier
44:15aux Espagnols
44:15qu'il est le premier
44:17responsable
44:17de ses années noires.
44:27Mon père ne parlait pas
44:35de la guerre civile
44:36et de politique
44:37très peu.
44:38Il voulait
44:38oublier tout ça.
44:42Et si les vainqueurs
44:43ont voulu
44:43oublier,
44:44c'est aussi
44:44pour réconcilier
44:45l'Espagne,
44:46pour éviter
44:47les tensions
44:47avec les vaincus
44:48et leurs descendants.
44:49Tout le monde
44:53voulait oublier
44:53cette époque
44:54qui fut si éprouvante
44:55pour les Espagnols.
44:57Quand j'étais adolescent,
45:00je ne comprenais pas bien
45:01pourquoi on ne devait pas
45:02parler de mon grand-père.
45:04J'ai longtemps cru
45:05qu'il avait fait
45:06quelque chose de mal
45:07et que je devais
45:08contribuer
45:09à ce que personne
45:10ne le sache.
45:12Du coup,
45:13je devenais un peu
45:13complice
45:14de ce qu'il avait fait
45:15et j'ai toujours
45:16vécu ça
45:16comme un complexe
45:17d'infériorité.
45:19Ça faisait partie
45:20de la répression
45:20justement,
45:21que les vaincus
45:22intériorisent
45:23un sentiment
45:23d'infériorité.
45:28Le symbole
45:29le plus écrasant
45:29de cette amnésie
45:30imposée à tout un peuple
45:32reste cette croix
45:33de 150 mètres de haut,
45:35plantée sur 33 833
45:37dépouilles
45:37de victimes
45:38de la guerre civile.
45:40En le 20e anniversaire
45:41de la victoire nationale,
45:42s'inaugura
45:43la grande basilique
45:44de la Santa Cruz
45:44del Valle de los Caídos.
45:46Ante la immense
45:47représentation
45:47de toda España,
45:48llega su excelencia
45:49el jefe del Estado
45:50que se dirige
45:50a la entrada
45:51de la cripta.
45:53Le 1er avril 1959,
45:56Franco inaugure
45:57enfin le monument
45:58du Valle de los Caídos.
46:00Se voulant miséricordieux,
46:02il propose
46:03d'y enterrer également
46:04les dépouilles
46:04de républicains,
46:06à condition toutefois
46:07qu'ils aient été baptisés.
46:12Ils ont demandé
46:13un relevé
46:14à tous les cimetières
46:15d'Espagne
46:15en disant
46:16« Les dépouilles
46:17de ces soldats républicains
46:18et de ces soldats nationalistes
46:20sont éligibles
46:21au Valle de los Caídos. »
46:25Alors ils les ont déterrés
46:26et les ont transférés
46:27sans même demander
46:28l'autorisation des familles.
46:33Une fois là-bas,
46:34ils ont enfermé tout ça
46:35sans droit de visite.
46:36Et aujourd'hui encore,
46:37pour nous les proches,
46:38c'est un véritable casse-tête
46:39pour récupérer
46:40les restes
46:41de nos défunts.
46:48Il faut attendre
46:49l'an 2000
46:50pour que l'Espagne
46:51accorde aux familles
46:52les moyens
46:52de rechercher
46:53les traces
46:54de leurs parents disparus
46:55et ainsi
46:56reconstituer
46:57les circonstances
46:58de leur mort.
47:04Parfois,
47:05nous avons trouvé
47:06des bouteilles
47:06entre les jambes
47:08des morts
47:08qui contenaient
47:09un bout de papier
47:10avec un nom dessus.
47:13Quelqu'un avait dû se dire
47:15que le jour
47:16où l'on retrouverait
47:16le corps,
47:18il serait utile
47:19de savoir
47:19qui c'était.
47:21Un jour,
47:22à l'aide d'une pince,
47:23j'ai sorti le papier,
47:24je l'ai lu
47:25et ça disait
47:26Andres Gangoyticoesta,
47:29matelot de Gorliz,
47:32décédé le temps,
47:33fils de X et Y,
47:34demeurant à tel endroit,
47:36le tout écrit à la main,
47:38sur le papier.
47:39Notre parlement,
47:42y compris sous la gauche,
47:43est resté 25 ans
47:44sans jamais mentionner
47:45ces crimes.
47:49Alors,
47:49qu'avons-nous fait
47:50quand nous avons ouvert
47:51les fosses ?
47:52Nous les avons montrées.
47:54Nous avons tendu
47:54un miroir
47:55pour briser
47:56le cycle du non-dit.
48:02C'est alors
48:03qu'a surgi avec force
48:04le mouvement
48:05de récupération
48:05de la mémoire historique,
48:07initié par des jeunes,
48:09des petits-enfants
48:10de disparus
48:10qui n'avaient pas
48:11connu la dictature
48:12et qui n'avaient pas peur.
48:15Et quand ils se demandaient
48:16où était leur grand-père,
48:17dans bien des villages,
48:18on leur disait
48:19« Il est enterré là. »
48:24Je me souviens
48:25d'une femme
48:25venue voir une fosse
48:26accompagnée de son petit-fils.
48:28Elle tenait
48:29à se faire photographier
48:29avec lui
48:30là où l'on avait retrouvé
48:31son père,
48:32un élu républicain
48:33et son frère.
48:39Pourquoi se faire prendre
48:40en photo là
48:41avec son petit-fils ?
48:42Eh bien,
48:44pour que celui-ci,
48:45une fois adulte,
48:46n'oublie pas
48:46que cette image
48:47a quelque chose
48:48à voir avec l'injustice
48:49dont a souffert
48:50sa grand-mère
48:51dans le passé
48:51et que c'est une partie
48:53de son histoire à lui.
48:57Mon silence est né
48:59quand ils ont tué
49:01mon grand-père
49:01et mon silence est mort
49:04quand on a exhumé
49:05ses restes.
49:08Cette métaphore
49:09s'applique
49:09à l'ensemble
49:10de la société.
49:11Une société
49:12qui est restée muette
49:13sur cette question
49:14jusqu'à ce que l'on
49:15brise ce silence.
49:18À ce moment-là,
49:19je me suis remémoré
49:20la souffrance
49:21de ma famille
49:21parce que c'est quelque chose
49:23que je porte en moi.
49:25Il y a comme une tristesse
49:26dont j'ai hérité
49:27qui fait partie
49:28de ma façon d'être.
49:30Ma grand-mère
49:32est morte en 1997,
49:3422 ans après Franco
49:35et personne
49:37dans ce pays.
49:38Personne n'a eu
49:38la décence
49:39de lui demander
49:39si elle voulait
49:40retrouver
49:41les ossements
49:41de son mari
49:42et les enterrer.
49:44Personne n'a eu
49:45la décence
49:45de lui demander
49:46si elle voulait
49:47que justice soit faite
49:48pour ce crime.
49:53Désormais,
49:54la mémoire
49:55de la guerre civile,
49:56si longtemps
49:56enfouie et niée,
49:58n'est plus interdite,
50:00mais elle embarrasse.
50:02Pour les héritiers
50:02du régime,
50:04rappeler les crimes
50:04du franquisme
50:05suffirait à rouvrir
50:07les plaies.
50:10Pourtant,
50:11la République
50:12est bien morte
50:13des suites
50:13du coup d'État
50:14de 1936
50:15et le retour
50:16à la démocratie
50:17s'est fait sans elle.
50:19Ce n'est pas là
50:20la moindre
50:21des victoires
50:22de Franco.
50:22Sous-titrage
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50:27Sous-titrage
50:57Sous-titrage
51:27Sous-titrage
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