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Brûlé à 97% : il raconte son terrible accident (le plus grand brûlé au monde)
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00:00Aujourd'hui, on est avec Olivier qui a été brûlé à 87% à l'âge de 9 ans.
00:04Il a 37 ans aujourd'hui et a subi plus d'une cinquantaine d'opérations.
00:08190 anesthésies générales.
00:10Il est resté 7 ans à l'hôpital, a fait 3 mois de coma.
00:12Il a été le plus grand brûlé au monde.
00:14Et aujourd'hui, il est avec nous pour nous raconter son histoire.
00:17Olivier, enchanté.
00:19Enchanté.
00:19Merci à toi d'être ici.
00:20Merci à toi de m'avoir invité.
00:21C'est vraiment un honneur.
00:23Ça fait plusieurs semaines que je te suivais.
00:25Et du coup, je me suis dit, il faut qu'on discute.
00:27Il y a des trucs à dire.
00:28Il y a des trucs à dire.
00:28Olivier, on rentre direct dans le tas.
00:31Vas-y, envoie.
00:32Olivier, est-ce que tu peux nous raconter ton histoire alors, Olivier ?
00:35Donc moi, je m'appelle Olivier.
00:36J'ai 37 ans.
00:38J'ai eu un accident.
00:39Donc j'ai été brûlé quand j'avais 9 ans.
00:40Donc en 1994.
00:42Donc ça fait 28 ans.
00:43J'ai été brûlé sur 97% de la surface corporelle au troisième degré.
00:46Une grosse histoire.
00:47Une grosse histoire.
00:48Olivier, première question.
00:49Est-ce que tu peux raconter ton accident ?
00:50Alors comment ça s'est passé à la base ?
00:52Alors, j'étais en vacances chez mon père.
00:54Donc j'avais 9 ans.
00:55On était en camping sauvage du côté de Nîmes.
00:59Un accident tout con.
01:00Une lampe à gaz qui est combée en pleine nuit, qui a pris feu.
01:03Et donc voilà.
01:04On s'en est suivi un scénario un peu de film d'horreur.
01:07Ok.
01:07Pas d'eau.
01:08Devoir aller chez les pompiers à pied.
01:10Parce qu'on le rappelle, du coup, on est en 94.
01:12On est en 94, donc les téléphones portables, tu les oublies.
01:14Aucun moyen de joindre les pompiers.
01:16C'est ça.
01:16On était vraiment dans les bois.
01:18Perdus.
01:18Vous ne saviez pas où vous étiez exactement.
01:20On a eu pas de moyens d'étarder le feu, partir en bagnole, demander notre route à des gens
01:25qu'on a dû traumatiser au passage, quand j'y pense.
01:28Ouais.
01:28Aller toquer chez les pompiers de garde et voilà.
01:31Et toi, à ce moment-là, dans quel état tu étais alors du coup là ?
01:33Dans quel état j'étais ?
01:34Bah en fait, étonnamment, on l'expliquera plus tard, mais en fait, si tu veux, quand
01:38tu atteins un certain niveau de brûlure, notamment quand tu atteins vraiment, tu tapes
01:43dans le fond du troisième degré, la douleur en fait, elle est tellement extrême instantanément
01:46que ton système nerveux, il cède immédiatement.
01:49Donc moi, je ne me suis même pas réveillé en fait.
01:51On ne m'aurait pas réveillé en disant, il y a le feu, je dormirais encore.
01:54Donc ça veut dire que tu prenais feu en dormant ?
01:56Je brûlais, je dormais.
01:59J'avais pas chaud, je n'avais rien, on m'a secoué.
02:02Moi, j'ai marché droit devant parce que t'as quand même un boost d'adrénaline à
02:06ton insu.
02:07Mais bon, plus tu te consumes, plus tu sens qu'il ne faut pas que ça dure trop longtemps
02:10la marche.
02:11J'arrive pas trop à estimer, on va dire, qu'entre le feu qui s'est déclaré et les pompiers,
02:15je l'estime à 15-20 minutes.
02:16Tout passe très vite quand c'est comme ça.
02:18Et après, vous avez réussi à trouver une caserne ?
02:21Caserne de garde, on a toqué.
02:23Le gars m'a directement endormi pour gérer la douleur.
02:26Et là, je suis transféré à l'hôpital, pour ceux qui connaissent, à Montpellier, la
02:30Péronie, qui était spécialisée dans les grands brûlés.
02:32Donc, j'ai été mis en coma, coma artificiel dans lequel je suis resté presque trois mois.
02:35Et donc, en fait, je suis resté un mois, un mois et demi à l'hôpital de la Péronie.
02:39Sauf que le problème, c'est que t'as les brûlés classiques qui vont de 1 à 40 % de
02:45la soie corporelle.
02:46Après, on va avoir les grands brûlés qui vont être de 40 à 70, 75 %. Mais dès qu'on tape,
02:51au-delà du 80 %, il y a cinq, six centres en France qui peuvent gérer ça.
02:56Et à Montpellier, ils n'étaient clairement pas équipés.
02:58Donc, en fait, 97 %, il n'y avait pas de précédent en 94.
03:02Pour eux, ils attendaient que je claque, ce qui est tout à fait logique d'un point de
03:05vue médical.
03:06Ah oui, ils te l'ont dit clairement.
03:07Ils te l'ont fait comprendre.
03:08Ils m'ont bien dit à ma mère, ce soir, il est mort, ce soir, il est mort.
03:12Donc, ils ont dit ça pendant un mois.
03:13Waouh.
03:14Jusqu'à ce que s'organise mon transfert en hôpital militaire à Paris, où là, j'avais
03:20clairement plus de chance.
03:21À l'hôpital de Montpellier, j'avais après une chance sur un million et je passais à
03:23peu près une chance sur deux, trois cent mille quand je suis arrivé chez les militaires.
03:26Waouh.
03:27De rester en vie.
03:28Waouh.
03:29Et c'est ce qui s'est passé quand j'ai été transféré, donc en septembre
03:3294 à l'hôpital de Persie.
03:35Quand tu étais à l'hôpital, les médecins, quel type de chirurgie ils ont adopté ?
03:40Est-ce que tu connais un peu le processus médical qui a été mis en place ?
03:44Bah, le problème, quand t'as atteint ces niveaux de brûlure, c'est que déjà, bah,
03:47il y a des zones, genre notamment mes doigts, il y a des zones qui vont être nécrosées.
03:51Donc là, il faut déjà, il faut amputer, il faut nettoyer, il faut vraiment décaper
03:55le corps.
03:56L'idée pour soigner un brûlé, elle repose toujours sur la même base.
04:00Il faut recouvrir.
04:01Il faut recouvrir ton corps avec donc ce qui est ton bouclier.
04:03Ton bouclier, c'est vraiment ton organe, c'est ta peau.
04:05Sauf que quand t'es brûlé à 97%, de la matière, il n'y en a pas tellement.
04:09Mais les 3% qui sont pas brûlés de mon corps, c'est parce que j'avais mon
04:12maillot de bain quand j'ai eu mon accident.
04:14Donc j'ai toute la zone du bas-ventre, la zone du maillot de bain.
04:16Et donc à l'époque, il y avait une technique qui était assez récente, qui était la culture
04:19de peau, qui est pratiquée en France, notamment à l'hôpital Percy aujourd'hui, mais à l'époque,
04:22c'était à Boston aux Etats-Unis.
04:23Et donc ça consistait à prélever cette zone-là, envoyer les cellules aux Etats-Unis, attendre
04:2821 jours et là, ils te renvoient un mètre carré de peau.
04:31C'est pas possible de te faire greffer la peau de quelqu'un d'autre ?
04:34Alors, il y a des techniques transitoires qu'on appelle l'allogreffe ou la xénogreffe,
04:38qui permettent de te mettre une peau transitoire en attendant les 21 jours de culture de peau.
04:43Et donc on te met, ou c'est une sorte de pyjama de peau qu'on te met pour essayer d'avoir
04:47un bouclier.
04:48C'est vraiment pour éviter l'attaque des corps étrangers.
04:50Tout est une agression quand t'as plus de peau et t'es vulnérable à tous les niveaux.
04:53Et donc là, pour le coup, on te met ou de la peau d'organes ou de la peau de cochon.
04:57Parce qu'étonnamment, le cochon, biologiquement, c'est l'animal qui se rapproche le plus de l'être humain
05:02d'un point de vue d'organes.
05:03Et donc, c'est ce qu'on va te mettre en peau transitoire.
05:06C'est ce qu'ils t'ont mis toi, du coup, au début ?
05:08Alors, j'ignore si j'ai eu le droit au mort ou au cochon.
05:11Ils t'ont pas dit ça.
05:12J'ai pas posé la question.
05:13Tu voulais de la peau, c'est tout ce que tu voulais.
05:15Et au final, au bout de 21 jours, on m'a amené de quoi me couvrir.
05:18Donc, il a fallu, pour couvrir l'ensemble de mon corps, trois voyages de ma peau aux Etats-Unis.
05:23Je suis jamais allé aux Etats-Unis, mais ma peau, oui.
05:25Waouh !
05:26Ils ont pris de la peau de ton bas-ventre.
05:28Ils ont prélevé.
05:29Ils ont cultivé là-bas.
05:30Et ils t'ont renvoyé ici.
05:31C'est ça.
05:32Waouh !
05:33C'est une technologie qui date de 1989.
05:34C'est quelque chose que maintenant, en 2023, on fait en France.
05:36J'ai eu mon accident en 1994 à la culture de peau.
05:38Les premiers centres où ils testaient la culture de peau.
05:40À Lille, j'ai eu 1 cm de chaque côté aux épaules à l'époque en test de culture française.
05:45J'étais le premier à recevoir de la culture de peau au visage.
05:48Et donc, c'est pour ça aussi que c'est intéressant parce que, notamment sur la peau de mon visage,
05:51le recul le plus lointain qu'on est, en fait, c'est moi.
05:54Waouh !
05:55Ça permet de voir l'évolution et tout.
05:57Aujourd'hui, à plus de 28 ans, on ne savait pas que ça vieillirait aussi bien.
06:01Est-ce qu'on peut dire que tu es le plus grand brûlé au monde ?
06:03La question se pose.
06:04Je n'ai pas fait le tour du monde.
06:05Une chose est sûre, c'est qu'en 1994, quand j'ai eu mon accident, c'était le cas.
06:0897%, il n'y avait pas de précédent, d'où les premières dans plein de domaines au niveau de la peau.
06:14Il y a eu pas mal de congrès débrûlés de France ou de thèmes de recherche à l'époque avaient été faits.
06:18Quand je me suis réveillé du coma, première chose que j'ai vu quand j'ai ouvert les yeux dans ma chambre,
06:22c'est qu'il y avait une quarantaine de médecins qui étaient venus du monde entier
06:25pour assister à ces greffes-là et compagnie.
06:27Surtout que cet hôpital, c'était vraiment la référence mondiale à ce moment-là,
06:32donc les gens étaient venus de loin.
06:34Et 97%, c'est pas compliqué, à 100% il n'y a plus personne,
06:38donc il ne reste que 2% au-dessus de 97%.
06:40Je ne fais pas top 1 sur Fortnite, mais là j'ai fait top 1.
06:42Et après, derrière, j'ai appris qu'il y a une dizaine d'années qu'aux Etats-Unis,
06:47il y a quelqu'un qui avait été brûlé à 98%, mais après, est-ce que la personne a survécu ?
06:51C'est pas une compétition ?
06:53C'est pas une compétition, mais si je devais donner un petit classement, je suis dans le top 3, il n'y a pas de problème.
06:57J'avais vu pire, mais aucun n'avait survécu.
07:00Est-ce que tu as eu d'autres traitements aussi, peut-être ?
07:03Oui, j'ai eu une cinquantaine d'opérations en tout pour me retaper à peu près correctement.
07:07Donc ça passe par les greffes, il y a différents types de greffes selon les endroits.
07:11Il y a des retouches, un peu comme une voiture, on la remet en état.
07:15Il y a aussi le fait que la peau brûlée, on est quand même sur une peau qui est relativement artificielle
07:20et qui manque de souplesse.
07:22Ça veut dire que j'avais 9 ans.
07:24Je ne fais pas la taille que je fais aujourd'hui.
07:26Comment la peau s'étire ?
07:27Voilà, pour ceux qui ne visualisent pas, un corps brûlé, c'est un peu comme si vous avez déjà plongé dans une piscine
07:32avec des vêtements et que vous ressortez avec les vêtements mouillés que vous ne pouvez pas enlever.
07:35C'est ça, c'est un peu vivre dans des vêtements trop petits.
07:37Et c'était déjà le cas quand j'avais 9 ans.
07:39Donc imaginez avec 50 ou 60 cm de plus.
07:42Du coup, je me permets, à ma petite échelle, j'ai une petite greffe de peau au niveau du doigt et j'ai des brides.
07:47C'est une bride qui s'est formée entre deux greffes de peau qui t'empêche de tendre en fait.
07:51Totalement.
07:52Moi, j'ai des brides qui partent de là jusqu'au bout, de chaque côté.
07:55Et donc en fait, beaucoup d'opérations consistent à casser ces brides, à tenter de les casser.
08:00Avec des plasties en Z.
08:01Avec des plasties en Z qu'on pratique toujours en 2023.
08:04Même s'il y a eu d'autres techniques, la plastie en Z se fait toujours.
08:07Donc voilà, beaucoup d'opérations pour le visage, refaire les lèvres, le nez, les paupières.
08:12Encore une fois, 87%.
08:13T'avais tout perdu.
08:14Ah oui, j'étais mobifié.
08:16J'avais plus de paupières, j'avais plus de lèvres, j'avais plus rien.
08:18Même le nez, ils t'ont refait le nez ?
08:20Il a fallu tout remodeler.
08:21Le chirurgien, il se pointe avec une photo de toi, comme ça, à la juger.
08:25C'est des artistes, quoi.
08:26Du coup, tu te réveilles du coma trois mois plus tard.
08:29Donc au moment où je me réveille, je suis sauvé.
08:31Le pronostic vital, il est un peu désengagé.
08:34Toujours, je reste en réanimation.
08:36Je suis resté cinq mois et demi.
08:37Mais globalement, il se permet de dire à ma mère que c'est bon, c'est safe.
08:41Mais moi, à ce moment-là, en fait, je suis intubé, je suis branché de partout.
08:44Je ne mange pas par voie orale.
08:46C'est vraiment un hôpital militaire.
08:48Donc c'est en avance de 20 ans sur l'époque, sur les autres hôpitaux.
08:50Donc tu es dans des espèces de caissons.
08:52L'hôpital a été refait depuis.
08:54Mais l'hôpital Percy a été construit autour d'une serre tropicale
08:57pour avoir une température des chambres constamment à la température du corps.
09:01Puisque tu n'es pas capable de réguler ta température.
09:03Donc il faut que la température soit constamment à 37 degrés.
09:06Ce qui donne lieu à des moments assez compliqués qu'il m'arrive de raconter.
09:10Mais il y a les douleurs d'un côté.
09:11En fait, j'avais une anesthésie générale par jour.
09:13En tout, j'ai eu à peu près 180 anesthésies générales.
09:15Et en fait, les anesthésies générales, tu es à jeun.
09:17Moi, le problème, c'est que quand je me réveillais de l'anesthésiste,
09:19c'est déjà le moment où je devais être à jeun pour la prochaine.
09:21Donc en fait, je suis resté 5 mois sans boire une goutte d'eau
09:24dans des pièces chauffées à 38 degrés en fait.
09:26Et donc ça, c'était chaud et vraiment...
09:28Ça, c'était le plus dur, le souvenir que t'as, c'était...
09:30Ouais, la soif, ouais.
09:31Parce que j'étais hydraté en fait par les sondes et tout.
09:33Mais pas par de l'eau...
09:34Sauf qu'en fait, ton corps est hydraté, il manque pas d'hydratation.
09:36Mais par contre, la sensation sur la langue d'eau, tu l'as pas.
09:38Et ça, ouais, c'était hardcore.
09:40Pendant 5 mois, aller supplier.
09:42Ils venaient des fois la nuit, à force que je réclamais,
09:45ils me mettaient des gouttes au compte-gouttes sur la langue.
09:48Le jour où ils m'ont désintubé et que j'ai eu le droit de faire quelque chose,
09:52j'ai descendu 3 litres de flotte jusqu'à m'en faire vomir.
09:55Juste pour le principe, quoi.
09:56Waouh !
09:57Et là, du coup, t'avais quel âge à ce moment-là ?
09:58J'avais 9 ans.
09:599 ans.
10:00Toujours 9 ans.
10:01Donc, je suis resté 5 mois et demi là.
10:03Début janvier, j'ai été transféré en centre de rééducation, donc pour la convalescence.
10:06Où là, je suis resté presque 7 ans.
10:08C'est ça, il a fallu réapprendre ?
10:10Ah bah ouais, j'étais resté couché pendant des mois,
10:12donc on passe par des tables de verticalisation
10:14pour pas que le sang remonte trop vite à la tête.
10:16Donc petit à petit, au fur et à mesure des semaines, on te verticalise.
10:19Réapprendre à marcher.
10:21Mes mains, j'étais droitier de base.
10:23Il a fallu réapprendre à écrire, à manger, à s'habiller.
10:267 ans, c'est pas de trop pour se remettre bien.
10:28Bien sûr.
10:29À ce moment-là, t'avais ton bras droit,
10:31on expliquera pourquoi aujourd'hui, tu l'as plu un peu plus tard dans la vidéo YouTube.
10:34Ça, c'est récent, c'est nouvelles aventures.
10:36Voilà, c'est une nouvelle saison, ça, c'est un nouvel épisode.
10:38Donc là, tu dois réapprendre à écrire, réapprendre à marcher.
10:40Les gestes du quotidien, parce qu'en fait, aujourd'hui, même quand les gens me voient,
10:43j'ai une autonomie aujourd'hui qui est proche de 100%, même d'une main.
10:46Voilà, j'ai élevé mes enfants, je m'occupe de mes enfants au quotidien,
10:49mais des fois, les gens me demandent comment je fais pour tenir un verre et tout.
10:52C'est dur de le décrire, parce que je le fais instinctivement.
10:55Ouais.
10:56Donc, il y a des moments où j'essaie de décortiquer le mouvement pour expliquer,
10:59mais voilà, tout ça, c'est un apprentissage.
11:01T'as appris.
11:02Voilà.
11:03Quand je fais à manger, quand j'écris, quand je bricole, quand je tiens ma perceuse,
11:05quand je dois faire une soudure, quand je dois faire des choses, je le fais, en fait, c'est tout.
11:09C'est dur de décrire un mouvement qu'on fait inconsciemment.
11:11Bien sûr.
11:12T'inquiète pas, il n'y a pas de soucis, il n'y a pas de soucis.
11:14Comment agit ta famille, alors, avec cet accident-là ?
11:17Est-ce qu'ils s'en sont voulus ? Est-ce qu'aujourd'hui, ça va mieux ?
11:21Ça dépend des cas.
11:22Là, franchement, il y a deux écoles.
11:24Il y a l'école du tabou.
11:25J'ai une partie de la famille, il ne faut pas en parler.
11:27Encore aujourd'hui ?
11:28Encore aujourd'hui, parce que, de toute façon, l'acceptation, c'est un deuil,
11:31et chacun gère son deuil à sa manière.
11:34Et là, en l'occurrence, il y a des gens, le déni et le silence, c'est leur façon de gérer.
11:37Donc, c'est comme ça, il ne faut pas insister.
11:39Quand les gens ne veulent pas en parler, on n'en parle pas.
11:41Moi, ceux qui étaient vraiment dans ma proche périphérie, autour de moi,
11:45je n'aurais pas laissé tellement de choix.
11:46Il fallait en parler, il fallait que ce soit ouvert, il fallait que ce soit tout ça.
11:49Donc, les gens autour de moi ont accepté, ont avancé le truc comme ça.
11:53Pas que ce soit une fatalité, si tu veux.
11:55Oui, bien sûr.
11:56Et donc, voilà, ma mère était présente du tout en long.
11:59Mon père, qui est décédé aujourd'hui, mais à l'époque, a été brûlé en même temps que moi.
12:02À un moindre niveau, il était brûlé à beaucoup de second degrés,
12:06second degrés profonds, on expliquera après.
12:09Mais voilà, sur 70% du corps.
12:11Donc, sa convalescence a été moindre, mais il a été aussi également brûlé.
12:14Mais sinon, oui, ma mère était le pilier autour de toute mon enfance à ce niveau-là.
12:19Elle a vraiment été présente pour t'accompagner ?
12:21Bien sûr, mais ne serait-ce que pour les médecins.
12:23Enfin, moi, j'ai réussi à m'exprimer et a vraiment été assez lucide
12:27que presque six mois après mon accident.
12:30Celle qui prenait la décision ?
12:31J'ai découvert qu'il me manquait des doigts, ça faisait six mois que j'ai eu mon accident.
12:34Du coup, tu as eu l'accident à 9 ans.
12:35Quelle a été ta première réaction quand tu t'arrêtes dans un miroir pour la première fois ?
12:39D'abord, il y a eu deux choses. Il y a eu le visage et avant, il y a eu les mains.
12:42Et c'est marrant parce qu'on a des réactions de gamins qu'on ne maîtrise pas.
12:45Et c'est souvent, c'est quelque chose que j'aborde aussi quand j'explique mon accident.
12:49J'ai eu la chance d'avoir ça enfant.
12:51Et quand je dis le mot chance, j'explique, c'est que moi, j'ai vécu ça comme une évolution du corps,
12:55comme un gamin qui a de l'acné à l'adolescence.
12:57Quelqu'un qui est adulte, il a beaucoup à perdre.
12:59Potentiellement un travail, des amis, une femme, une famille, peu importe.
13:02Il a beaucoup de choses à mettre en jeu.
13:03Moi, à 9 ans, à part ma Super Nintendo, je n'ai pas grand chose à perdre.
13:07Ils m'ont dit, t'as plus de doigts.
13:08Je me rappelle, le gars, j'ai fait merde.
13:11Parce que l'été d'avant, je venais d'apprendre à claquer des doigts et je venais juste d'y arriver.
13:15Du coup, je me suis dit, ah putain, le sub, je ne pourrais plus faire.
13:19Mais bon, quand ça, c'est ta plus grosse déception, tu t'en sors pas mal quand même.
13:22Quand tu es enfant, tu ne te poses pas.
13:24Je ne me rappelle pas avoir, même le visage, je me rappelle avoir dit d'accord.
13:27Je sais qu'il y a eu des moments, des hauts et des bas.
13:29Je ne dis pas que tout a été facile.
13:30Je ne voudrais pas laisser entendre que c'était rigolo.
13:33C'était hardcore pendant 7 ans, ce n'est pas le problème.
13:36Mais globalement, j'ai vécu ça quand même comme une évolution du corps.
13:40C'était comme ça.
13:42On a parlé beaucoup des séquelles physiques.
13:44Est-ce que tu as eu des séquelles intérieures ?
13:46Les séquelles intérieures, ça passe par la respiration des gaz carboniques.
13:51Quant à un incendie, forcément, j'ai eu la chance que l'incendie soit passé en extérieur.
13:55Donc, je pense quand même que ça a joué là-dessus.
13:57Mes poumons ont été diminués, mais aujourd'hui, à l'âge que j'ai, c'est moindre que si j'avais fumé.
14:03Mais l'amplitude respiratoire, d'ailleurs, il a fallu m'opérer à un moment donné.
14:06La peau qui pouvait tirer m'empêchait d'étendre pleinement les poumons.
14:09Donc, ça, c'est des choses qu'il a fallu régler avec le temps.
14:11Ce que tu disais tout à l'heure, les petits réajustements qu'il y a eu au fur et à mesure que tu as grandi.
14:16Bien sûr.
14:17Être brûlé au troisième degré, concrètement, ça veut dire quoi ?
14:20On définit la brûlure en trois degrés parce qu'on a trois couches de peau.
14:24Donc, on a l'épiderme, c'est la couche externe, c'est ton bouclier.
14:26Voilà, ça, c'est vraiment la peau la plus dure.
14:28Donc, ça, c'est ce qui est atteint.
14:29C'est le premier degré, c'est la destruction ou l'atteinte de l'épiderme.
14:32Donc, ça va être les coups de soleil.
14:34Tu vas te passer la main sur un briquet, ce genre de choses.
14:37C'est étonnamment une des brûlures qui fait le plus mal.
14:40Parce que ce n'est pas assez profond pour qu'on inhibe ton système nerveux.
14:44C'est une alerte un petit peu.
14:45Mais par contre, tu le sens bien.
14:47Donc, j'ai souvent des gens qui me disent
14:49mais moi, je n'imagine pas la douleur que tu as eue parce que j'ai été brûlé au premier degré.
14:54Alors oui, après, il n'y a pas de comparaison.
14:56Mais dans l'instant, tu as eu beaucoup plus mal que moi.
14:58Donc, ça, c'est pour ce qui est du premier degré.
15:00C'est la première couche.
15:01Donc oui, effectivement, ça se reconstitue en général spontanément.
15:05On hydrate, on met de la crème.
15:06Ensuite, tu as le derme.
15:07Donc, le derme, c'est la couche la plus épaisse de ton corps.
15:09Il y a le système sanguin, le système nerveux.
15:11Il y a plein de choses qui passent dedans.
15:12Là, c'est le deuxième degré.
15:13Comme c'est une couche qui est épaisse, on distingue deuxième degré et deuxième degré profond.
15:16Au deuxième degré, tu commences à douiller.
15:18Mais tu commences, tu peux encore espérer une guérison spontanée.
15:21Au deuxième degré profond, il ne faut pas hésiter.
15:23Si on commence à voir des cloques et qu'on a le moindre doute, on consulte.
15:26Il n'y a pas à se poser de questions.
15:27Mais au deuxième degré profond, la chirurgie commence à être nécessaire.
15:31On commence à avoir besoin de soins.
15:32Et au troisième degré, on atteint la zone, ce qu'on appelle l'hypoderme.
15:35Ça compte dans les couches de peau, mais on est plus sur une espèce de couche un peu graisseuse.
15:39Et là, quand il y a destruction de ça, il n'y a plus aucune guérison possible.
15:43De réparation.
15:44Non, puisqu'il n'y a plus de régénération possible, puisqu'il n'y a plus de matière.
15:47C'est pour ça qu'on parle des trois degrés de brûlant.
15:49Tu m'as dit que quand tu as été brûlé, sur le moment, tu n'as pas trop senti, parce que le corps se met en alerte un petit peu.
15:55Par contre, à ton réveil, est-ce que tu as eu mal ?
15:58Alors, à mon réveil, j'étais encore sédaté pendant de longues semaines.
16:01Mais globalement, ce n'est pas pour rien, justement.
16:03Le coma artificiel, il est là pour canaliser ça.
16:06Parce qu'une greffe de peau, ne serait-ce qu'une culture de peau, ne serait-ce que sur une main.
16:10On est sur 250 agrafes, juste pour la paume de la main, pour faire tenir.
16:14Sur le dos, on est sur du 500-600 agrafes.
16:17Voilà, il y a tout un tas de douleurs.
16:19La brûlure, c'est réputé pour faire partie, on est dans le top 3 des pires douleurs.
16:25Les séances d'ablation d'agrafes qu'on segmentait en séance de 4 heures pour que ce soit gérable.
16:30Il y a eu plein de trucs comme ça, les fils, quand on m'a refait les yeux.
16:33Quand t'as refait les yeux aussi, les pupilles.
16:35Quand on m'a fait les paupières, il a fallu garder mes yeux fermés pendant une semaine pour la cicatrisation.
16:40Donc pareil, il y a une perte de repères jour-nuit, tu pètes un peu des câbles quand t'as 10 ans.
16:44C'est un peu énervé.
16:46Mes yeux n'ont pas été touchés ?
16:48Alors étonnamment, mes yeux n'ont absolument pas été touchés.
16:50Mes paupières complètement flinguées, tout ce qui est peau était flingué.
16:52Mais il y a eu un effet, bon c'est un peu dégueu, il faut visualiser.
16:55Quand j'ai mon accident, mes yeux en fait sont un petit peu révulsés.
16:58Ce qui a permis de les protéger complètement.
17:00J'ai pas perdu de vue.
17:01Souvent on me pose aussi la question sur ma bouche et mes dents.
17:04Tes dents sont d'origine aussi ?
17:05Ouais, rien.
17:06Tout est nickel.
17:07Elle est à l'épreuve du feu.
17:08C'est un mystère de la nature.
17:09Et ouais, globalement, tout au long des soins, on doit étirer ta peau.
17:12Donc les brides, comme tu disais tout à l'heure, il faut lutter contre.
17:15Donc lutter contre, c'est des postures.
17:16Donc c'est cinq kinés.
17:18Un kiné sur ta jambe droite assis pour pas qu'elle bouge, sur ta jambe gauche.
17:21Et les deux autres qui tirent les bras, on me faisait dormir dans des coquilles en plâtre
17:26qui étaient ajustées en abduction et qu'on faisait chaque semaine un peu plus loin.
17:30Pour t'étirer ?
17:31Voilà, pour m'étirer petit à petit.
17:32J'ai dormi pendant des années dans des espèces d'armure en plâtre.
17:35Est-ce que tu as été à l'école ou pas ?
17:37Alors j'étais à l'école jusqu'à mon accident.
17:39J'étais en... j'avais passé en CM.
17:40Toute la suite de ma scolarité a été faite à l'hôpital.
17:42En centre de rééducation, on avait une école sur place.
17:45La scolarité classique, non, parce que c'était interrompu par les séances de kiné,
17:50médicale et tout.
17:51Mais quand même, j'ai pu aller jusqu'à la fin de ma troisième sans problème
17:54dans le cadre de l'hôpital.
17:55T'as continué les études après par la suite ou t'as arrêté ?
17:57Non, j'ai arrêté, j'ai un peu feinté mes parents en mode
18:01ouais, faut que je me repose un peu.
18:03Et puis j'ai jamais repris quoi.
18:04L'année sabbatique, elle a... elle a glissé.
18:06T'es la bonne excuse.
18:07Voilà, elle a dérivé tout doux.
18:09Et est-ce que t'as un métier aujourd'hui toi ?
18:11J'ai continué donc d'apprendre les domaines qui m'intéressaient en autodidacte,
18:15notamment l'informatique.
18:16Il y a quelques années, je me suis mis à mon compte en dépannage informatique,
18:20mais j'ai arrêté depuis quelques années.
18:22Et maintenant, j'ai pris du temps pour moi, pour les enfants, éduquer les enfants.
18:25Et j'ai repris depuis un an donc une formation en psychologie.
18:28D'accord, ok.
18:29Tu as eu des copines dans ta vie.
18:31Du coup, comment ça se passait avec elles alors ?
18:32Normalement, c'est sûr que je n'ai pas le profil à matcher sur Tinder.
18:36Il faut d'autres stratagèmes.
18:37Ouais.
18:38Mais globalement, il faut faire passer la discussion avant le physique.
18:41Mais une fois que t'as conquis la personne avec les mots et intérieurement.
18:45Bien sûr, et ton intérieur et tout.
18:46Le reste normal.
18:48Enfin, normalement, il n'y a pas de normalement.
18:50On a le droit du tout d'avoir des standards physiques.
18:52Ça, c'est pas un problème.
18:53Mais souvent, ça suit.
18:54Ok.
18:55Voilà, c'est plus fluide.
18:56Après, les sites de rencontres, j'ai déjà essayé.
18:58Faut pas.
18:59Ouais, c'était toi.
19:00Quand t'es grand brûlé, faut pas.
19:01C'était, voilà.
19:02Tu perds ton argent, c'est tout.
19:03D'accord, ça marche.
19:04Et tu pratiques quoi comme activité aujourd'hui ?
19:06Alors, du coup, tu fais du sport, tu m'as dit.
19:08Ouais, j'ai une salle de sport chez moi.
19:09Donc...
19:10Bien.
19:11Prenez-moi de là.
19:12Bien.
19:13C'est cool, déjà.
19:14J'essaye de me tenir...
19:15De quoi ? Tu cours un petit peu ?
19:16De te tenir en forme ?
19:17En fait, si tu veux, la problématique, c'est qu'il y a deux choses.
19:19J'essaye de montrer que malgré un corps complètement saccagé,
19:22il y a moyen de faire quelque chose.
19:24Il y a moyen de rendre ça parfois beau.
19:26Oui, bien sûr.
19:27Et il y a aussi le fait que ma peau, j'en ai pas beaucoup.
19:30Elle est pas extensible.
19:31Donc, il faut que je maîtrise ma prise de poids.
19:34Bah oui, c'est vrai, on a pas parlé.
19:36Mais si t'es amené à prendre du poids ?
19:38Bah, c'est ça.
19:39Là, actuellement, je fais 86 kilos.
19:40J'en fais 88.
19:41Mais l'avantage, c'est qu'un bras, ça pèse 2 kilos.
19:44Donc, voilà.
19:45Donc, t'as fait un petit régime en coupant un bras.
19:47Voilà.
19:48Ça se fiche pour la maison.
19:49Voilà.
19:50Un petit tuto.
19:51Ne faites pas ça chez vous.
19:52Je fais 86 kilos.
19:53Mais si j'atteins les 90, ma jambe, je l'attends plus.
19:55C'est automatiquement.
19:56Il y a un effet levier.
19:57Si ça tire ici, ça réduit là.
19:59Il faut qu'elle vienne de quelque part.
20:01D'accord.
20:02Donc, tu fais attention à ton quotidien de ce que tu manges ?
20:03Non.
20:06Neige de vrai.
20:07Et justement, ne surveillant pas assez mon alimentation.
20:10Tu compenses ?
20:11Bah, je compense.
20:12J'essaie de compenser avec le sport.
20:13Et du coup, t'arrives à trouver des alternatives.
20:14Il y en existe plein.
20:15Avec un seul bras pour te renforcer.
20:17Avec des élastiques, des sangles.
20:20Avec un seul bras, encore une fois, ça fait un mois.
20:23Donc, je suis encore dans l'apprentissage.
20:25Et surtout, je compense beaucoup avec mon bras gauche.
20:28Quand je porte des sacs.
20:29Par exemple, chez moi, je porte des sacs de granules pour mon poids et compagnie.
20:33Je fais tout d'une main.
20:34Mais en fait, je vais créer vite un déséquilibre.
20:36Mon bras droit, c'était mon bras de force.
20:38Je compense maintenant à muscler mon bras gauche.
20:40Mais les exercices, par exemple les épaules,
20:42Bah, j'ai pas envie d'avoir une épaule surdéveloppée.
20:44Ou un pec développé.
20:45Et l'autre, je pourrais pas le faire en fait.
20:47J'ai fait une vidéo il y a quelques années.
20:48Avec un athlète qui s'appelle Michael Louvel.
20:50Du coup, qui était amputé aussi d'un des deux bras.
20:53Et il montrait qu'il y avait plein d'alternatives avec des élastiques.
20:55Pour se renforcer, pour se muscler.
20:57Tout en ayant une harmonie de corps.
20:59Donc voilà, on mettra un petit extrait de la vidéo YouTube là.
21:01Il avait plein de stratagèmes.
21:02Voilà, je suis en phase d'apprentissage.
21:03Donc tous les conseils sont bons après.
21:05Ouais, bien sûr.
21:06Tu mets des sortes de poignets.
21:07Avec une sorte de scratch.
21:08Pour faire des mouvements.
21:09Pour muscler les pecs, le vis-à-vis et tout.
21:11Alors ça, ouais.
21:12On a un système de poulies dans le centre de sport avec des sangles.
21:14Et pareil, les haltères.
21:15J'ai mis un système de sangles.
21:16Ouais, super.
21:17Pas d'excuses.
21:18Faire de la muscu, voilà.
21:19Voilà.
21:20Si j'en fais, tout le monde.
21:21Tout le monde peut en faire, exactement.
21:22Au niveau du regard des gens dans la rue.
21:24Quels sont les différents types de réactions auxquelles t'es confronté ?
21:27Alors, il y a un peu de tout.
21:28On va à des gens qui te regardent du coin de l'œil en se cachant derrière un poteau ou en ninja.
21:32T'as les gens qui vont frontalement te poser une question.
21:35C'est quand même beaucoup plus rare.
21:36Mais globalement, si les gens sont habitués à éventuellement...
21:39On est sur les réseaux sociaux.
21:40Si des gens peuvent être amenés à poser des questions.
21:42On a rarement le courage dans la vraie vie que derrière un écran.
21:45Et c'est très rare qu'on vienne m'aborder.
21:47Ou même qu'on ait des réactions mauvaises vis-à-vis de moi.
21:50Et là, pour le coup...
21:51Enfin, j'ai tendance...
21:52La curiosité un petit peu de la part des gens.
21:53Voilà.
21:54Dans la vie, on récolte un peu ce qu'on dégage.
21:56Et comme je ne suis pas sauvage.
21:58Les gens peuvent venir me parler sans pression.
21:59J'ai aucun tabou sur ça.
22:00J'ai jamais d'agressivité.
22:02J'ai eu, encore une fois, mon accident en 28 ans.
22:04D'accident...
22:05Je pourrais compter sur les doigts d'une main et même des miennes.
22:08Combien de fois on m'a dit des saloperies dans la rue.
22:13Donc non, non, ça, à ce niveau-là.
22:15Il y a quand même des gens qui ont osé quand même.
22:16Il y a des gens qui ont osé.
22:17Ils avaient peut-être passé une mauvaise journée.
22:19Je le prends pas perso.
22:21Mon but en étant sur les réseaux, ça reste de démocratiser l'image débrûlée.
22:27J'ai eu mon accident à une époque des années 90 où il n'y avait que la télé.
22:31Internet était quand même hyper récent.
22:34Youtube n'existait pas.
22:35On n'avait pas les réseaux sociaux.
22:37Donc en fait, quand quelqu'un me croisait dans la rue,
22:39j'étais le truc le plus hardcore qu'il avait vu probablement dans sa vie.
22:42Donc il y avait un effet où les gens étaient un peu sidérés, un peu choqués.
22:44Et ce que je comprends très bien, moi, je n'ai pas croisé tous les jours des grands brûlés, même en étant grand brûlé.
22:49Donc aujourd'hui, en 2023, les gens, ils ont vu bien pire.
22:53Et donc en fait, même quand je me balade dans la rue, il y a eu une banalisation de ça.
22:57Il faut continuer de démocratiser.
22:59C'est aussi pour ça que je m'expose sur le réseau de sous,
23:01parce que comme j'ai la chance de bien le vivre et d'être bien dans ma tête,
23:05tout en étant très grand brûlé.
23:07Je me dis que voilà, si moi, je passe par cette étape de discuter avec les gens, de m'exposer,
23:12quand il y a un gamin qui, lui, le vivra peut-être plus mal et qui n'osera pas sortir de sa chambre.
23:17Si ça peut éviter que le jour où il le fasse, il ait des regards, moi, je trouve ça vachement cool.
23:21Ce qui est génial avec ce que tu fais sur TikTok et avec des vidéos YouTube qui banalisent comme ça,
23:25ça permet aux parents qui ont des enfants qui étaient gravement brûlés aussi de relativiser
23:29et de dire qu'aujourd'hui, on peut être pleinement heureux.
23:32On n'en a pas parlé encore, mais du coup, tu as une famille ?
23:35J'ai une famille, donc je suis divorcé, mais j'ai mes deux enfants,
23:38donc j'ai en gardes alternés.
23:39Ça, ils sont gentils, les enfants, ça va ?
23:41Ils sont très gentils.
23:42Ils obéissent bien ?
23:43Ouais, ils sont bien dressés, tout à l'heure.
23:45Souvent, j'ai des parents de jeunes brûlés qui me contactent
23:48et ils ont souvent ces questions de quelqu'un qui me disait
23:51« Voilà, mon fils, il a 14 ans. Est-ce qu'il va rencontrer l'amour ? Est-ce qu'il va plaire ? »
23:54Et donc, c'est toujours un souci pour les parents
23:57que l'enfant ne passe pas à côté de moments de vie.
24:00La dernière de la vie, ça me permet de les rassurer parce que j'ai l'étiquette de parents.
24:04J'ai des enfants de 12 et 15 ans, donc on est en plein dedans.
24:07Mais en même temps, j'ai été grand brûlé et moi, ça ne m'a jamais empêché de vivre des histoires.
24:11J'ai eu mes premières histoires, mes premières relations à 16 ans comme beaucoup de gens.
24:15C'est ce que j'explique aux gens ou même aux jeunes brûlés qui sont en galère, qui me contactent.
24:19N'importe quel handicap dans la vie, on compense toujours.
24:22Il n'y a pas de souci, il y a toujours moyen.
24:25Ce sera l'humour, ce sera ta force de caractère.
24:27La confiance.
24:28La confiance en soi, parce que tu vas dégager ton caractère.
24:30Peu importe, mais tu peux totalement transcender un problème physique.
24:34Il n'y a pas de souci.
24:35Comme dit la célèbre phrase, faire de sa différence une force.
24:37Exactement.
24:38C'est ce que j'essaye de dire.
24:39Fais de ta différence un art.
24:40Est-ce que toi aujourd'hui dans ton quotidien, tu fais attention justement aux gestes du quotidien pour ne pas qu'il y ait de feu ?
24:46Alors oui, je continue d'apprendre des choses.
24:48J'essaye de faire des vidéos prévention.
24:51On peut tous améliorer nos gestes, même en termes de prévention.
24:55Mais savoir si quelqu'un prend feu, qu'est-ce qu'on fait ?
24:57Le fait qu'il ne faut absolument pas courir par exemple, courir à tiser les flammes.
25:00Il ne faut absolument pas courir, il faut se rouler par terre.
25:02Tout un tas de choses qui ne vont pas nous paraître forcément logiques, surtout dans la panique.
25:06Si on sait à peu près en amont ce qu'il faut faire, on optimise nos chances de réussir à se contrôler au moment d'une perte de contrôle, de panique, s'il y a un incident.
25:14Oui, j'essaye de faire de la prévention à ce niveau-là.
25:18Du coup, là, on remarque que tu n'as plus ton bras droit.
25:21T'es coupé où à l'avant-bras ?
25:22Au-dessus du coude.
25:23Et pour quelles raisons alors ?
25:25Ça n'a rien à voir avec...
25:26Alors, savoir sans avoir avoir.
25:28J'ai découvert ça il y a peu de temps.
25:29En fait, les grèves de peau et notamment la culture de peau, ça peut être un facteur de risque,
25:34ou du moins, c'est un facteur de surveillance pour ce qu'on appelle des carcinomes.
25:38C'est-à-dire que quand on est brûlé, on est habitué à avoir des plaies par-ci, par-là.
25:41On ne fait pas tout le temps gaffe parce qu'on a la peau qui tire, on a la peau qui craque.
25:45Et des fois, on laisse traîner.
25:46C'est ce qui m'est arrivé.
25:47J'ai eu une plaie au niveau du coude et Covid oblige, enfant oblige.
25:51J'ai laissé traîner, j'ai laissé traîner pendant deux ans.
25:53Et quand je me suis mis à consulter, là, avant les fêtes, au mois de début décembre...
25:58Il y a un mois, là.
25:59Ouais, le bras, là, il a sauté il y a un mois.
26:01Et le cancer, je l'ai appris il y a un mois et demi.
26:03Donc, ça a été un rush.
26:05Donc, t'as eu un cancer, du coup ?
26:06Donc, j'ai eu un carcinome.
26:08Donc, c'est des cellules cancéreuses.
26:09En fait, un carcinome, c'est...
26:11T'as une plaie.
26:12Et la plaie, en essayant de cicatriser, donc elle fabrique des cellules.
26:14Et en fait, n'y arrivant pas, les cellules dégénèrent.
26:17Et donc, ça crée des cellules cancéreuses.
26:18Et ça finit par faire l'effet inverse.
26:20Ça rouge, en fait.
26:21Et donc, moi, je m'en étais pas rendu compte à ce moment-là.
26:23Je pensais que la plaie était soignable.
26:25Moi, j'étais en mode, oui, bah, j'allais à l'hôpital, on va me faire une greffe.
26:27Et voilà, je...
26:28T'étais rodé, quoi. T'étais rodé là-dessus.
26:29Voilà, j'étais en mode, salut, c'est moi.
26:31Ça faisait 22 ans que j'avais pas eu d'opération.
26:33J'ai ma carte d'abonnés.
26:34Voilà, exactement.
26:35Réduction.
26:36Et sauf que ça s'est pas passé comme ça.
26:37Ils ont voulu me faire une biopsie, tout ce qui va avec.
26:40Ils m'ont décelé, donc, le carcinome.
26:42Et en fait, il était vraiment mal placé dans l'articulation du coude.
26:45Ah ouais.
26:46Et donc, à ce moment-là, ils m'ont expliqué que le...
26:48Donc ça, on était dix jours avant Noël, hein, 2022.
26:51Le choix prioritaire était l'amputation.
26:53Donc là, comment tu réagis ? Ils te disent ça, t'es là...
26:55Bah alors, moi, il m'a fallu l'après-midi à peu près pour assimiler l'info et choisir l'amputation.
27:00Au début, j'ai dit non parce que j'étais en mode, ok, mais d'une main, je vais pas pouvoir m'occuper de mes enfants.
27:06Et sauf qu'en fait, en revenant de l'hôpital, j'ai posé les choses calmement.
27:09Et en fait, ma main droite, pour ceux qui l'ont déjà vu en photo, en vidéo, elle était quand même hyper raide.
27:15Et 95% de ma mobilité, de mon autonomie repose sur ma main gauche.
27:20Donc en fait, je suis rentré chez moi, je me suis mis en mode concret, carré.
27:24Je me suis mis... Il me restait deux semaines avant de prendre une décision.
27:28Donc je me suis foutu ma main droite dans le dos et je me suis dit, tu fais tout de la main gauche.
27:31Et donc, à ce moment-là, je me suis entraîné de tout faire de la main gauche.
27:34Et donc, on en a fait un jeu.
27:36Je voulais aussi rassurer mes enfants comme ça, pour qu'ils voient que le quotidien n'allait pas changer.
27:41Bien sûr.
27:42Et moi-même, ça m'a rassuré. Je me suis dit, au moins, je suis sûr qu'il me manquera pas.
27:44Et puis même, ça faisait quelques années que je regardais les prothèses du coin de l'œil.
27:48J'avais jamais franchi le pas parce que je voulais pas passer par l'étape de diminution avant l'optimisation que m'apporterait une prothèse.
27:55Sauf que, bah, c'est pareil, le monde de la prothèse a vachement évolué.
27:58Moi, j'étais persuadé qu'après l'amputation, il faudrait que j'attende à peu près un an.
28:01Là, je me suis fait amputer il y a pile un mois et dans trois semaines, j'ai ma prothèse.
28:04Donc, les gars, ils ont pas le temps.
28:06Ils font des super prothèses, en plus, maintenant, aujourd'hui.
28:08Ils font des super prothèses, là.
28:09C'est aussi comme ça que j'ai vraiment découvert ta chaîne.
28:12Ouais.
28:13Parce que, justement, j'ai commencé à regarder ce qui se faisait en prothèse.
28:16Ah ouais.
28:17Et je suis tombé tout de suite sur ta vidéo.
28:18Ah, ok.
28:19J'ai regardé.
28:20J'ai vu que j'avais pas le budget.
28:21Mais, au final, ce qu'ils m'ont proposé, je suis retourné à l'hôpital militaire où j'étais soigné.
28:25Et quand je vois ce qu'ils m'ont proposé, en mode remboursé par la sécu, c'était déjà canon.
28:30On est sur du milieu électrique contrôlé par les muscles.
28:33C'est incroyable.
28:34C'est vraiment incroyable.
28:35Donc, j'ai hâte de pouvoir montrer ça dès que j'aurai.
28:38Ah, ça te fera des nouveaux sujets de vidéo.
28:39Bah, totalement.
28:40Et puis, je suis comme un gamin.
28:41Donc, en fait, le choix de l'amputation, ils m'ont proposé de faire de l'immunothérapie.
28:46Donc, éventuellement, sauver mon bras.
28:48En fait, ma plaie ne pouvait pas guérir parce que les cellules cancéreuses avaient désactivé localement mon système immunitaire.
28:53Donc, en fait, ça pouvait pas guérir.
28:55L'immunothérapie, ça consiste à booster d'un coup pour réactiver ton système immunitaire.
28:59C'était pas forcément pris en charge pour un carcinome, potentiellement extrêmement cher.
29:03C'était potentiellement avoir des effets secondaires alors que j'étais en forme.
29:07Je fais du sport, je fais du vélo.
29:08Je voulais pas sauver mon bras, mais peut-être atténuer ma santé à côté.
29:13Le choix logique, en fait, c'était l'amputation.
29:15Aujourd'hui, si on me disait, t'as pas de prothèses, c'est pas grave.
29:18Je fais tout d'une main.
29:19Mais c'est le petit bonus, quoi. C'est le jouet.
29:21Bien sûr.
29:22La récompense, quoi. T'as débloqué un truc.
29:24Ouais, c'est mon trophée, quoi.
29:26T'as des tatouages ? Qu'est-ce qu'ils signifient, tes tatouages ?
29:28J'en ai beaucoup. J'allais dire une dizaine, mais non, il y en a deux qui sont partis avec le bras.
29:32D'accord.
29:33Celui-là, c'est quoi, celui-là ?
29:34Alors, ça, c'est un symbole à Conan, le film.
29:37Oui ?
29:38Voilà, référence des années 90.
29:39Esprit Conan.
29:40De vainqueur, de combattant.
29:42Voilà, on avance.
29:43La vie est un combat et on y va, quoi.
29:45Je ne savais pas si on pouvait tatouer sur une peau grand brûlé.
29:49Visiblement, si.
29:50J'ai testé.
29:51Quand j'ai vu que ça marchait, j'ai dit, allez, les gars, on se lâche.
29:54Est-ce qu'aujourd'hui, t'as encore des douleurs ?
29:57Oui et non.
29:58Je pense que si on mettait quelqu'un de main dans ma peau, il aurait mal.
30:01Mais c'est des douleurs du quotidien, ça va être m'étirer.
30:04Ça va attirer par moments, effectivement, beaucoup.
30:07Je vais devoir gérer des plaies par-ci, par-là.
30:09Mais c'est pas...
30:10On est loin des douleurs, des traitements de base que j'ai pu avoir il y a très longtemps.
30:14Donc non, on va être...
30:15J'ai plus catégorisé ça dans l'inconfort que dans la douleur.
30:18Et quand bien même ce serait de la douleur, en fait, j'y suis tellement habitué.
30:21J'ai pas besoin d'anti-douleur et j'y suis largement habitué pour que ça n'handicapé pas mon quotidien.
30:27Ok, ouais, tu prends plus d'anti-douleurs aujourd'hui.
30:29Ah non, j'en reprends pas.
30:30J'en reprends pas du tout.
30:31Comment tu vois la suite, maintenant, de l'aventure ?
30:32Un jour après l'hôte, mon bras en est un parfait exemple.
30:35Et c'est d'ailleurs un exemple que je répète souvent.
30:38Il y a encore deux mois, je ne savais même pas que je pouvais être amputé.
30:40Donc tout peut arriver à n'importe quel moment.
30:42La vie est pleine de surprises, en bien comme en mauvais.
30:44Et même si c'est en mauvais, de toute façon, ça finira bien.
30:47Mais là, pour le coup, l'avenir, je le vois continuer de développer ce que j'essaie de faire sur les réseaux,
30:52continuer de démocratiser la brûlure et surtout de mettre l'accent, notamment sur les jeunes,
30:57sur l'aspect préventif, pédagogique, comment calculer un pourcentage de brûlure,
31:02comment calculer les degrés de brûlure, comment reconnaître les types de greffes,
31:06les différents types de greffes.
31:07J'essaye de rendre ça un peu ludique pour que ça intéresse les gens.
31:11C'est par la connaissance un peu et le savoir qu'on efface les peurs.
31:15Et que si les gens, ils sont un peu informés sur ça, même si c'est une personne sur dix mille qui passe par là,
31:19qui s'intéresse au sujet, et bien voilà, elle sera familiarisée avec le truc.
31:22Et c'est tout bénef pour tous les brûlés, je pense.
31:25Qu'est-ce que tu dirais aux personnes qui vont regarder la vidéo YouTube et qui sont eux brûlés,
31:30grands brûlés ou aux parents qui ont des enfants grands brûlés ?
31:33Qu'est-ce que tu leur dirais à toutes ces personnes-là ?
31:35Déjà, je leur dirais force à vous.
31:37Et puis, ça dépend tellement de la personnalité de chacun.
31:41Mais globalement, si vous avez des difficultés, il n'y a pas besoin d'être concerné pour mal le vivre.
31:46Moi, j'ai des gens de ma famille qui l'ont bien plus mal vécu que moi-même.
31:49Au contraire, nous, on a presque une chance, c'est qu'on est à la tête dans le guidon.
31:52Moi, ce n'est pas une question, en fait, de savoir si je veux avancer ou pas.
31:55En fait, il faut avancer, quoi.
31:56Donc, je ne vous pose pas la question tous les matins.
31:58L'entourage, souvent, et même d'un point de vue prise en charge à l'hôpital et compagnie,
32:03il est souvent relayé à côté.
32:04Et du coup, des fois, la prise en charge, même moralement ou psychologiquement des familles,
32:09elle est un peu négligée.
32:10Là, vous avez le droit, même en tant que parent, de ne pas aller bien.
32:13Il y a plein d'associations, il y a plein de... voilà, on peut en parler.
32:15Et c'est pareil pour les gens qui sont concernés.
32:17Ne restez pas enfermés chez vous s'il y a des problèmes avec le regard des gens,
32:21ou quoi qu'est-ce.
32:23Ce n'est pas facile.
32:24C'est comme tout, en fait.
32:25C'est un apprentissage et un pas après l'autre.
32:28Parlez-en.
32:29J'ai beaucoup de...
32:30Depuis que je suis plus actif sur les réseaux, de gens comme ça qui viennent me parler
32:34et qui me disent comment tu fais toi, je sors, en fait.
32:37Il n'y a pas de recette magique.
32:38Venez, on sortira ensemble.
32:40Mais voilà, il ne faut pas tomber dans l'enfermement.
32:42Ton compte TikTok et Instagram, il s'appelle ?
32:44Alors moi, c'est Captain Icarus, mais Olivier Ferrand, qui est mon nom, on me trouve également.
32:49Très, très bien.
32:50Allez le suivre, les liens sont dans la description.
32:51Merci pour tout, en tout cas.
32:52Merci.
32:53Merci.
32:54Trop cool.
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