- il y a 2 jours
Le traité de Versailles est probablement le traité de paix le plus décrié du siècle dernier. Dans les mois qui suivirent l'armistice du 11 novembre 1918, le président américain, Woodrow Wilson, le président du Conseil français, Georges Clémenceau et le premier ministre britannique, David Lloyd George, tentèrent de bâtir une paix durable. Cependant, les vaincus, dont les Allemands, ne seront pas invités à la table des négociations. Le traité de Versailles était-il vraiment une paix bâclée ? Portait-il déjà les germes de la Seconde Guerre mondiale ? Pour en débattre, Jean-Pierre Gratien reçoit les historiens Stéphane Audoin-Rouzeau, Marie-Bénédicte Vincent et Jean-Michel Guieu.
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00:00:00Générique
00:00:00Bienvenue à tous. Le traité de Versailles était-il vraiment une paix bâclée portant en elle les germes de la Seconde Guerre mondiale ?
00:00:24Nous allons nous poser la question aujourd'hui dans ce débat doc. Avec pour commencer le documentaire qui va suivre, le traité de Versailles, la guerre gagnée, la paix perdue ou comment, durant les mois qui suivirent l'armistice du 11 novembre 1918, l'américain Wilson, le français Clemenceau et le britannique Lloyd George ont tenté de bâtir une paix durable sur les ruines de la Grande Guerre.
00:00:48Les vaincus, à commencer par l'Allemagne, n'ayant quant à eux pas été conviés. Je vous laisse découvrir cette page d'histoire et je vous retrouverai juste après en compagnie des historiens Stéphane Audouin-Rousseau, Marie-Bénédicte-Vincent et Jean-Michel Gueux.
00:01:02Avec eux, nous débattrons du traité de paix sans doute le plus décrié du siècle dernier. Bon doc.
00:01:08Les conflits armés qui ont marqué le XXe et le début du XXIe siècle ont tous une racine, même ténue, dans les traités et la fragile paix de 1919.
00:01:30Ils sont comme les ricochets, les sous-grosseaux, les épilogues d'une histoire vieille d'un siècle.
00:01:38Pourquoi aujourd'hui le Moyen-Orient, Sarajevo, sont encore des lieux de tensions et de conflits ?
00:01:54Tout ça, ça évoque des événements et des tensions qui ont eu lieu pendant la Première Guerre mondiale.
00:02:00Lorsqu'on observe toutes les marges de l'Union européenne actuelle, on se rend compte qu'elles correspondent à toutes ces zones de fractures et de ruptures
00:02:08dans lesquelles les traités n'ont pas réussi à apporter de solutions positives à la fin de la Première Guerre mondiale.
00:02:20Sarajevo, Bosnie-Herzégovine.
00:02:22Depuis toujours, un carrefour commercial, une ville cosmopolite où les religions vivent ensemble.
00:02:27C'est la Jérusalem des Balkans, où sur moins de 500 mètres, la mosquée côtoie la synagogue, l'église orthodoxe, la cathédrale.
00:02:35C'est dans cette petite ville que tout a commencé.
00:02:37Ici, que le 28 juin 1914, un étudiant serbe de Bosnie, Gavrilo Principe,
00:02:43a sans le savoir déclenché une catastrophe planétaire en assassinant l'archiduc François Ferdinand, héritier du trône de l'Empire austro-hongrois.
00:02:50Il est 11 heures du matin, lorsqu'après un premier attentat raté, Principe se place sur le boulevard, juste au coin de la rue.
00:03:01La voiture s'arrête là. Au cours des circonstances, a voulu que François Ferdinand arrive au pied de celui qui va le tuer quelques secondes plus tard.
00:03:10Principe était un jeune nationaliste qui rêvait de la création d'une Yougoslavie unifiée.
00:03:14Pour lui, François Ferdinand, incarner l'Empire, le mal, l'occupation, tout, c'est tout simplement un acte de quelqu'un qui rêvait de la liberté et de la Yougoslavie et de la justice.
00:03:26Tirer voulait dire se libérer.
00:03:35Sarajevo a été d'une certaine façon l'événement déclencheur de la Première Guerre mondiale.
00:03:39En fait, le point de départ symbolique avec cet assassinat a eu des conséquences dans le monde entier.
00:03:44Il est le résultat d'un contexte très local et de l'émergence du nationalisme ou du début d'un sentiment national, de la lutte pour la création d'un nouvel État.
00:03:55Ce petit fait divers local a entraîné, par le jeu des alliances, l'un des plus grands conflits mondiaux.
00:04:011917.
00:04:03Après trois années de boucherie et d'assaut inutiles, les Américains entrent en guerre.
00:04:06Changeant la donne et redonnent un second souffle aux troupes alliées.
00:04:12Pour un Américain qui combat, six hommes à l'arrière en logistique, 200 000 par jour.
00:04:18L'avantage est vite repris sur des Allemands qui échouent à reprendre Paris.
00:04:21À la fin de l'été 1918, les dernières offensives allemandes sur le front français ont toutes échoué.
00:04:31Foch a déclenché sur tout le front allié une offensive générale qui repousse les Allemands vers leurs frontières, vers les frontières de la Belgique,
00:04:40en les forçant à évacuer toutes les régions qui sont occupées depuis l'automne 1914.
00:04:46À la fin de l'année 1918, l'armée allemande est exsangue.
00:04:54Tout le monde sait dans l'armée qu'on ne peut pas gagner la guerre.
00:04:57On sait que ça ne va pas bien se passer.
00:05:03Mais personne ne peut dire combien de temps le front va tenir.
00:05:09Et à partir de l'été 1918, l'espoir d'une victoire ne fonctionne plus dans la population.
00:05:16On continue parce qu'on ne peut pas faire autrement.
00:05:18Mais on a faim dans les foyers.
00:05:21On ne comprend plus cette guerre.
00:05:23On ne veut plus de cette guerre.
00:05:25Les soldats allemands se rendent par milliers et des mutineries éclatent.
00:05:30À partir de ce moment-là, les soldats vont simplement rentrer chez eux
00:05:35et personne ne va les ramener de force sur le front
00:05:37parce que le commandement ne fonctionne plus très bien.
00:05:40Et c'est dans cette ambiance que des grèves de matelots vont éclater à Wilhelmshafen et Kiel.
00:05:51Et en deux ou trois jours, ce mouvement prend tellement d'ampleur
00:05:55que 30 000 hommes, voire 40 000 hommes vont manifester dans les rues en scandant « fin à la guerre ».
00:06:02Côté alliés, c'est le moment de la bataille décisive.
00:06:05Il n'y a pas de percée au sens strict de la ligne Hindenburg,
00:06:10qui est la dernière ligne ou système de défense des Allemands.
00:06:14Il y a une pression presque arithmétique qui s'exerce sur tout le front.
00:06:20Et c'est la puissance de l'économie et de l'industrie alliées
00:06:24qui pousse l'armée allemande à reculer et à évacuer tous les territoires qu'elle occupait.
00:06:30Avec pour la première fois l'utilisation d'une arme nouvelle.
00:06:33Le couple char-avion, eh bien Pétain en fait pour la première fois l'usage
00:06:39au cours du mois de juillet 1918 pour arrêter les dernières offensives allemandes.
00:06:46En Allemagne, la situation est catastrophique.
00:06:49Les alliés ont instauré un blocus alimentaire.
00:06:52Pour les civils, c'est déjà intenable qu'on s'invite à un quotidien difficile, la faim.
00:06:57Les enfants n'ont plus rien à manger.
00:07:02Les femmes envoient des lettres à leur mari au front pour leur demander d'envoyer de quoi manger en Allemagne.
00:07:09Et c'est ce que les hommes ont fait.
00:07:13Et il est très clair que la brutalité des occupants allemands dans le nord de la France
00:07:17et les réquisitions en masse ont été à la mesure de ce qu'il manquait chez eux.
00:07:25Des grèves éclatent tous les jours.
00:07:27Dans toute l'Allemagne, les idées bolcheviques gagnent du terrain et font trembler l'Empire.
00:07:31La révolution rouge est en passe de réussir.
00:07:34Dès le début novembre, il y a cette révolution en Allemagne
00:07:36et on a bien sûr peur que ce soit le même scénario comme en Russie.
00:07:42Alors, on en avait marre de la faim et avec la faim, on en avait marre de la guerre.
00:07:49L'opinion publique allemande n'en peut plus.
00:07:52L'état-major doit se rendre à l'évidence.
00:07:54Il faut demander l'armistice.
00:07:57Hindenburg et Ludendorff, les deux têtes de l'armée allemande,
00:08:00se disent, nous sommes perdus, nous sommes en train de reculer sur le front français,
00:08:06nos arrières ne sont plus assurées,
00:08:09il faut sortir de cette guerre le plus vite possible.
00:08:13Dès octobre 1918, des pourparlers débutent avec Wilson,
00:08:17le président des Etats-Unis, qui a en tête un grand projet.
00:08:20Proposer une paix, juste, basée sur 14 points
00:08:23qui révolutionnent les futures relations internationales.
00:08:26Les Allemands y voient l'occasion d'une fin de conflit honorable.
00:08:30À partir de septembre-octobre, on parle de la paix de Wilson.
00:08:36Il donne aux démocrates allemands un tout petit peu l'espoir
00:08:40qu'ils pourraient obtenir une bonne paix
00:08:41et que le nouveau système va conduire à une bonne paix.
00:08:47Du coup, le souhait que la guerre doit finir,
00:08:50que la paix de Wilson doit advenir, va devenir très présent.
00:08:55Très vite, les Français et les Britanniques et les Italiens sont furieux
00:08:58parce qu'ils se disent « bon, on n'a pas été consultés ».
00:09:01Ils mettent leurs conditions, ils font comprendre à Wilson,
00:09:04bon, pourquoi pas la base des 14 points,
00:09:06mais il faut quand même assurer la sécurité,
00:09:08en particulier la sécurité de la France.
00:09:09C'est par radio que les Allemands prennent contact pour l'armistice.
00:09:14Les Allemands vont être autorisés, politiques et militaires réunis,
00:09:18à traverser les lignes françaises
00:09:21et à rejoindre, dans une forêt, pourquoi pourraient être à l'abri,
00:09:26les Français.
00:09:30Et cette forêt n'est pas choisie par hasard.
00:09:32Elle est située près de Sanlis,
00:09:34où le maréchal Foch a son quartier général.
00:09:39C'est à Rotonde, dans une clairière,
00:09:42près d'une intersection ferroviaire,
00:09:44que le cessez-le-feu va être signé.
00:09:45La première fois que le maréchal Foch voit les plénipotentiaires allemands,
00:09:58à Rotonde, c'est trois jours avant la signature de l'armistice,
00:10:01c'est le 8 novembre.
00:10:02Le maréchal Foch fait asseoir dans le wagon
00:10:04les plénipotentiaires allemands
00:10:06et il leur demande, Benoît Temont,
00:10:09quel est l'objet de votre visite ?
00:10:11Alors, les commissaires allemands s'embrouillent un peu
00:10:13et ils disent, écoutez, nous venons pour voir
00:10:16quelles sont les propositions.
00:10:20Et le maréchal dit,
00:10:21mais je n'ai pas de proposition à vous faire.
00:10:23Alors, ils reformulent leur question,
00:10:25quelles sont les conditions de l'armistice ?
00:10:26Ah, vous demandez l'armistice !
00:10:29Et il sort de sa poche la feuille
00:10:31et il leur dit les conditions de l'armistice.
00:10:35L'ambiance était correcte,
00:10:38sans plus, c'est-à-dire que le maréchal Foch était sec.
00:10:41On ne discute pas, vous venez demander l'armistice,
00:10:44oui ou non.
00:10:46Jusqu'à ce que les cloches chônent à 11h le 11,
00:10:49c'est un armistice qui va être secret.
00:10:52Même si les militaires considèrent ne pas avoir subi de défaite,
00:11:00ce sont des civils allemands qui concluent 4 ans de guerre
00:11:02et acceptent, presque en catimini,
00:11:05des conditions d'armistice dans des circonstances humiliantes.
00:11:08De quoi, si ce n'est pas voulu,
00:11:10se met les graines de la revanche.
00:11:11L'armistice est imposée aux Allemands
00:11:16avec des conditions militaires très dures,
00:11:20mais qui correspondent à la situation du moment.
00:11:23Des conditions très dures permettent,
00:11:25d'un point de vue français, deux choses.
00:11:28Un, si les Allemands les acceptent
00:11:30de les mettre dans une posture
00:11:32qui ne leur permet plus de reprendre la guerre.
00:11:34S'ils les refusent,
00:11:36l'assommoir arithmétique allié
00:11:39va continuer à écraser l'armée allemande.
00:11:40C'est fini.
00:11:44Dans les rues de Paris et d'ailleurs,
00:11:45les populations exultent.
00:11:47Les soldats sont soulagés d'êtres vivants.
00:11:49La Belgique et le nord de la France
00:11:50ne sont plus que des ruines.
00:11:52Des villages de l'Est sont rayés de la carte.
00:11:55Mais la victoire des Alliés
00:11:56n'est pas celle de la paix.
00:11:58Il faut reconstruire une Europe
00:11:59sur les débris de trois empires
00:12:01et régler une bonne fois pour toutes,
00:12:03croit-on, le sort de l'Allemagne.
00:12:0528 juin 1919.
00:12:11Sept mois plus tard.
00:12:13Il fait beau ce midi à Versailles.
00:12:15Un peu frais.
00:12:16Les abords du château sont noirs de monde.
00:12:18Tout au long des trois heures qui vont suivre,
00:12:20tout a été soigneusement choisi
00:12:22pour humilier à nouveau les Allemands.
00:12:24Le lieu ?
00:12:25Versailles et sa galerie des glaces,
00:12:27symbole de la diplomatie française,
00:12:29là où en 1871,
00:12:31l'Empire allemand est né.
00:12:32La date ?
00:12:34Cinq ans jour pour jour
00:12:35après l'attentat de Sarajevo,
00:12:36prétexte à la Grande Guerre.
00:12:38Les hommes,
00:12:39les gueules cassées,
00:12:40placés sur le trajet des Allemands
00:12:42avant d'aller signer.
00:12:43Il y a foule dans la galerie des glaces,
00:12:45mais les Allemands ne sont pas là.
00:12:47Ils arrivent par une porte dérobée
00:12:49à l'abri des regards.
00:12:51La délégation allemande est arrivée
00:12:52par cette porte
00:12:53qui donne dans le grand cabinet
00:12:54de Madame Victoire.
00:12:55Et à partir de cette pièce,
00:12:56elle entre donc dans le château,
00:12:58elle traverse les dernières pièces
00:12:59de l'appartement de Madame Victoire,
00:13:01traverse le grand appartement
00:13:03de la Reine
00:13:04pour déboucher
00:13:05à l'entrée de la galerie des glaces.
00:13:07Ce trajet est en fait
00:13:08un trajet pratique.
00:13:09Il fallait absolument éviter
00:13:10que la délégation allemande
00:13:11suive le même parcours
00:13:13que les délégations alliées
00:13:14qui, elles,
00:13:15entraient directement
00:13:16par la cour royale.
00:13:18Mais il est sûr
00:13:19que la délégation allemande
00:13:21devait recevoir
00:13:22l'histoire de France
00:13:23en pleine figure,
00:13:23si je puis dire,
00:13:24dans la galerie des glaces même,
00:13:25puisque c'est là
00:13:26le grand décor de Louis XIV
00:13:27qui magnifie les victoires
00:13:29de la France contre l'Allemagne.
00:13:3115 heures.
00:13:37Clemenceau,
00:13:38entouré de Lloyd George Langlais
00:13:39et l'Américain Wilson,
00:13:41prend place autour d'un bureau,
00:13:42extrait pour l'occasion
00:13:43du mobilier national.
00:13:44Alors ce bureau se trouvait
00:13:46en fait au centre quasiment
00:13:47géométrique de la galerie.
00:13:49Nous y approchons,
00:13:50voilà, nous sommes au centre.
00:13:52Il se trouvait là
00:13:52avec un fauteuil
00:13:53placé dos aux fenêtres.
00:13:56Donc la personne qui signait
00:13:57se trouvait face
00:13:58aux puissants alliés
00:13:59qui se trouvaient derrière
00:14:00cette longue table
00:14:01qui était devant les miroirs.
00:14:03Le silence se fait.
00:14:07On fait signer les Allemands
00:14:08les premiers
00:14:09pour être bien sûr.
00:14:10Les représentants
00:14:11de la République de Weimar,
00:14:13Muller et Bell,
00:14:14Pâle et Malalaise,
00:14:15ont l'air,
00:14:16selon le chroniqueur du Figaro,
00:14:18de deux ouvriers
00:14:18en dimanche.
00:14:19Le ministre des Affaires
00:14:20étrangères,
00:14:21le représentant de l'Allemagne,
00:14:22a refusé d'utiliser
00:14:23l'une des plumes
00:14:24mises à sa disposition
00:14:25puisque c'était des plumes
00:14:26qui avaient été offertes
00:14:27par des associations
00:14:28d'anciens combattants
00:14:29et donc il a utilisé
00:14:31son propre stylo plume.
00:14:32D'ailleurs,
00:14:32c'est un traité
00:14:34que personne ne voulait signer
00:14:35du côté allemand.
00:14:36Il a fallu trouver
00:14:36deux ministres,
00:14:38deux volontaires,
00:14:38si je puis dire,
00:14:39pour venir signer.
00:14:41Les Allemands ont été
00:14:42naturellement humiliés
00:14:44dès le début.
00:14:46La première humiliation,
00:14:48et on l'oublie souvent,
00:14:50c'est qu'ils ont été oubliés,
00:14:52exclus des négociations de paix.
00:14:56Quand le 18 janvier 1919,
00:14:59les discussions pour arriver
00:15:00jusqu'à Versailles
00:15:01ont été ouvertes,
00:15:03il y a 27 nations,
00:15:04mais aucune nation vaincue.
00:15:10Et ça,
00:15:11dans toute l'histoire des traités,
00:15:12ça ne s'était jamais produit.
00:15:15Les Allemands sont,
00:15:16on le sait par des témoignages,
00:15:18sont au bord des larmes.
00:15:19Et c'est un moment
00:15:19extrêmement difficile,
00:15:21extrêmement douloureux.
00:15:23Et je pense qu'ils n'ont pas
00:15:24beaucoup apprécié,
00:15:26enfin en tout cas profité,
00:15:27du cadre qui s'offrait à eux.
00:15:30Il y a aussi cette scène incroyable
00:15:32quand la délégation allemande
00:15:33a été conduite à Versailles.
00:15:35Avant,
00:15:36on les avait conduits
00:15:36dans les territoires détruits
00:15:38et ils avaient éclaté en sanglots
00:15:39en voyant ce que la guerre
00:15:41avait détruit là-bas.
00:15:42Et les Français leur ont dit
00:15:43« Ce n'est pas la guerre
00:15:45qui a détruit tout ça,
00:15:46c'est vous
00:15:47qui avez détruit tout ça. »
00:15:49Et encore aujourd'hui,
00:15:50c'est insupportable
00:15:50de penser que nous avons
00:15:51détruit tout cela.
00:15:53Mais c'est comme ça.
00:15:55Nous sommes responsables
00:15:56de tout.
00:15:59Une heure et demie plus tard,
00:16:00tout est terminé.
00:16:02Les Allemands sortent
00:16:02les premiers,
00:16:03puis c'est la couille.
00:16:04On court dans les jardins
00:16:07de Versailles
00:16:08à la suite des voitures.
00:16:09La paix est faite.
00:16:11On a retrouvé l'Alsace.
00:16:12On chante la Marseillaise.
00:16:16Mais avant la signature
00:16:18du traité de Versailles,
00:16:19pendant six mois,
00:16:20entre janvier et juin 1919,
00:16:23entre négociations,
00:16:24compromis,
00:16:25menaces,
00:16:28trois hommes ont changé
00:16:29le monde.
00:16:34Les Alliés ont peut-être
00:16:38gagné la guerre.
00:16:39Il leur faut maintenant
00:16:40réussir une paix
00:16:41qui va durer.
00:16:42Français et Anglais
00:16:43commencent à discuter
00:16:44tout de suite
00:16:45après le 11 novembre.
00:16:46Mais il faut attendre
00:16:47Wilson,
00:16:48qui débarque en Europe
00:16:49avec ses 14 points,
00:16:50comme base de discussion.
00:16:53Wilson est né
00:16:54à la moitié du 19e siècle
00:16:56dans le sud des Etats-Unis.
00:16:58Il en devient le président.
00:17:00Wilson était l'enfant
00:17:01d'un pasteur.
00:17:02Il connaissait bien sûr
00:17:03par cœur les Écritures.
00:17:04Il faisait sa prière
00:17:05tous les jours.
00:17:05Il était extrêmement croyant.
00:17:07Il voulait sauver le monde
00:17:10avec les valeurs du Christ.
00:17:13Il s'identifiait au Christ.
00:17:15Il pensait que l'Amérique
00:17:16était fille,
00:17:17était un don de Dieu.
00:17:19Wilson sait l'évangile
00:17:20selon l'Amérique.
00:17:22Avec sa grande idée,
00:17:22le droit des peuples
00:17:23à disposer d'eux-mêmes.
00:17:24Jouer les peuples
00:17:25plutôt que les gouvernements,
00:17:26les nations plutôt
00:17:27que les empires.
00:17:28Et empêcher la guerre.
00:17:30Pour vendre ses 14 points,
00:17:32il entame une tournée
00:17:32triomphale en Europe.
00:17:34Wilson est le seul président
00:17:36des Etats-Unis
00:17:36qui vient s'installer
00:17:37six mois à l'étranger.
00:17:39Il habite six mois à Paris.
00:17:40On appelle sa maison
00:17:41la Maison Blanche Temporaire.
00:17:43Quand il arrive en France,
00:17:44il n'y a jamais eu
00:17:45personne accueillie comme ça.
00:17:46En Italie,
00:17:47toutes les femmes,
00:17:48les hommes ont des cierges.
00:17:49Aucun homme d'État
00:17:50dans toute l'histoire du monde
00:17:52n'a été reçu dans le monde,
00:17:54dans les jours
00:17:55qui ont suivi l'armistice,
00:17:56comme Wilson est reçu.
00:17:57Et donc,
00:17:58ça lui monte un peu à la tête.
00:17:59Pendant six mois,
00:18:02Paris va régler
00:18:02les futures relations internationales.
00:18:04La capitale devient cosmopolite,
00:18:06mille ressortissants américains
00:18:07s'installent au crayon,
00:18:08transformés en vaisseaux de guerre.
00:18:10200 Anglais
00:18:11à l'Hôtel Majestique,
00:18:12avenue Kleber,
00:18:13les Italiens vers l'Opéra,
00:18:15on dîne,
00:18:16on va au théâtre,
00:18:17on se fréquente au café.
00:18:18Les négociations
00:18:19qui se tiennent à Paris
00:18:21rassemblent
00:18:2132 pays.
00:18:24Paris est le centre du monde.
00:18:25Paris,
00:18:26c'est non seulement
00:18:26le centre de la diplomatie mondiale
00:18:28en 19,
00:18:29mais c'est l'école
00:18:30de formation accélérée
00:18:31des grands de ce monde
00:18:32qui vont diriger
00:18:33pendant les 30 ou 40 années suivantes.
00:18:35La conférence de la paix,
00:18:36c'était le lieu
00:18:37où il fallait être
00:18:38à ce moment-là.
00:18:39La conférence qui démarre
00:18:40occupe toutes les conversations.
00:18:42Quatre nations pour négocier,
00:18:43l'Italie,
00:18:44la France,
00:18:44les États-Unis
00:18:45et la Grande-Bretagne.
00:18:46Le premier ministre anglais
00:18:48Lloyd George
00:18:48ne veut pas laisser
00:18:49trop de place à la France
00:18:50sur le nouvel échiquier.
00:18:52Il avait l'ambition
00:18:53de rester au pouvoir
00:18:53et de favoriser
00:18:55les intérêts
00:18:55de l'Empire britannique.
00:18:56Il s'en fout
00:18:57de l'humanité
00:18:58tout entière
00:18:59et c'est lui
00:18:59qui va d'ailleurs
00:19:00le mieux réussir
00:19:01dans la négociation.
00:19:03Il était incroyable.
00:19:04Il a réussi
00:19:05à obtenir
00:19:05tout ce qu'il voulait
00:19:06en faisant des manœuvres,
00:19:09en jouant Clemenceau
00:19:10contre Wilson,
00:19:11Wilson contre Clemenceau.
00:19:13Il se débrouillait.
00:19:13Pour la première fois
00:19:14dans l'histoire de l'Europe,
00:19:15on va négocier
00:19:16entre soi.
00:19:17C'est un véritable
00:19:18monologue des vainqueurs,
00:19:20des conditions
00:19:20à imposer aux vaincus.
00:19:23Le troisième homme,
00:19:24c'est Clemenceau.
00:19:2576 ans,
00:19:26ancien médecin,
00:19:27un temps journaliste,
00:19:29c'est le héros
00:19:29de la guerre côté français,
00:19:31le père la victoire,
00:19:32synonyme de poigne
00:19:33et de patriotisme.
00:19:35Dans ce jeu,
00:19:36Clemenceau
00:19:36a des adversaires.
00:19:38Il s'appelle
00:19:38Lloyd George
00:19:39et il s'appelle
00:19:40Wilson,
00:19:42à un degré moindre,
00:19:43Orlando.
00:19:44Ce qui l'intéresse,
00:19:45c'est la défense
00:19:47et la sécurité
00:19:48de la France.
00:19:49Rien d'autre
00:19:49ne comptait pour lui.
00:19:50Il est vieux,
00:19:51il a 80 ans.
00:19:52Lui,
00:19:53il ne veut pas
00:19:54que la France
00:19:54soit réenvahie
00:19:55par l'Allemagne,
00:19:56il veut la sécurité,
00:19:56etc.
00:19:57Il n'a pas eu,
00:19:58sa carrière est derrière lui.
00:20:00Mais oui,
00:20:01il y a aussi
00:20:01une bataille d'égo.
00:20:02C'est dans les bureaux
00:20:04du Quai d'Orsay
00:20:04que les discussions
00:20:05à quatre commencent.
00:20:07Il faut trouver ses marques
00:20:08face à Wilson
00:20:08qui est contre
00:20:09une sorte de club
00:20:10des puissances.
00:20:13Il veut faire participer
00:20:14tous les vainqueurs
00:20:14aux négociations,
00:20:16soutenant toujours
00:20:16et dès le début
00:20:17son idée
00:20:18de société des nations.
00:20:20Dois-je comprendre
00:20:21qu'aucune décision
00:20:22ne sera prise
00:20:23sans l'avis
00:20:24du Costa Rica
00:20:25ou du Brésil ?
00:20:26Pendant ce temps-là,
00:20:28en coulisses
00:20:28et jusque tard
00:20:29dans la nuit,
00:20:3052 commissions
00:20:31composées d'experts,
00:20:32s'affairent,
00:20:33dans celles qui s'occupent
00:20:33de retracer les frontières
00:20:34de nouveaux pays
00:20:35issus des empires des chemins.
00:20:38Il y avait des grands principes
00:20:39qui avaient été établis
00:20:40et puis après,
00:20:41le découpage précis
00:20:43se faisait par exemple
00:20:44selon des critères
00:20:45économiques,
00:20:47ethniques
00:20:47et selon des critères
00:20:49politiques.
00:20:50Tout ce qui était
00:20:50communication,
00:20:51transport,
00:20:52ressources,
00:20:53tout ça,
00:20:54c'était un équilibrage
00:20:55à trouver.
00:20:56Donc,
00:20:58nous avons examiné
00:20:58la frontière
00:20:59entre Chepani
00:21:00et Saro Spatag.
00:21:02Il va donc de soi
00:21:03que la jonction
00:21:04Miscovec-Cascao
00:21:06avec Saint-Péter-Lonzon
00:21:08devra passer par ici
00:21:10et est attribuée à...
00:21:12Les travaux
00:21:13de ces commissions
00:21:13ont permis
00:21:14la viabilité
00:21:15de nouveaux États européens
00:21:16comme la Tchécoslovaquie.
00:21:19Le traité de Versailles
00:21:21a été une des étapes
00:21:22décisives
00:21:23dans la création
00:21:23de la Tchécoslovaquie
00:21:24après la Première Guerre.
00:21:26Lorsque s'ouvre
00:21:27la Conférence de la Paix,
00:21:28la légitimité
00:21:29du nouvel État
00:21:30est déjà admise.
00:21:32Donc,
00:21:32il était assez évident
00:21:33au moment de discuter
00:21:34la mise en place
00:21:35de l'indépendance
00:21:36qu'on allait se baser
00:21:37sur les frontières historiques.
00:21:39Ces frontières
00:21:40sont toujours d'actualité.
00:21:42Ce sont celles
00:21:43que nous avons toujours
00:21:43aujourd'hui
00:21:44avec l'Allemagne,
00:21:45l'Autriche
00:21:45et la Pologne.
00:21:48Mais la Conférence de PEM
00:21:49est sous le tapis
00:21:50dès le début
00:21:50avec le tracé
00:21:51des frontières,
00:21:52une donnée essentielle
00:21:53qui sera 20 ans plus tard
00:21:54explosive.
00:21:55Les minorités.
00:21:58La région des Sudètes
00:21:59est majoritairement
00:22:00peuplée par des Allemands.
00:22:02Pour la Tchécoslovaquie,
00:22:03il y a un problème
00:22:04supplémentaire.
00:22:05C'est que tout
00:22:06le Nord-Ouest,
00:22:07l'Ouest et le Sud-Ouest
00:22:07a une population allemande.
00:22:10Et cette population allemande,
00:22:11ce n'est pas rien.
00:22:12Les Tchèques
00:22:12sont nettement majoritaires
00:22:14en Tchécoslovaquie.
00:22:15La deuxième nation
00:22:16sont les Sudètes.
00:22:17Les Slovaques
00:22:18ne viennent qu'en
00:22:18troisième position.
00:22:19Donc,
00:22:19ce n'est pas rien.
00:22:20La Tchécoslovaquie
00:22:22a fait de son mieux
00:22:23pour prendre en compte
00:22:23les besoins de chaque peuple.
00:22:25La protection des minorités
00:22:26a été exemplaire.
00:22:27Cela a été reconnu
00:22:28par tout le monde.
00:22:29Mais il y a eu
00:22:30des oppositions
00:22:31à l'avènement
00:22:31d'un État tchécoslovaque
00:22:32contre lesquels
00:22:33nous n'avons rien pu faire.
00:22:35Et ça a été
00:22:35la grande force
00:22:36du nationalisme allemand
00:22:37qui a été instrumentalisée
00:22:38par les nazis.
00:22:40Hitler s'est en effet
00:22:41servi du cas
00:22:41des Sudètes
00:22:42pour déclencher
00:22:42les prémices
00:22:43de la Seconde Guerre mondiale.
00:22:45On a tendance
00:22:46à voir
00:22:47dans le cas de Tchécoslovaquie
00:22:48un échec.
00:22:49Pourquoi ?
00:22:49Parce qu'on connaît
00:22:50la suite de l'histoire.
00:22:52La conférence de paix
00:22:53s'attaque ensuite
00:22:54à une autre brûlante question.
00:22:56Le partage
00:22:56de l'ancien empire ottoman.
00:22:58L'émir Faisal
00:22:59est à Paris
00:23:00pour discuter
00:23:00de ce que les Anglais
00:23:01lui ont plus ou moins promis.
00:23:03Une indépendance
00:23:03des peuples arabes,
00:23:05Irak,
00:23:06Syrie,
00:23:07Liban,
00:23:07Koweït,
00:23:08Palestine,
00:23:09au sein d'une fédération.
00:23:11On promet
00:23:11un État aux Kurdes.
00:23:13A la fin,
00:23:14Français et Anglais
00:23:14se partagent
00:23:15le Moyen-Orient
00:23:16en zone d'influence.
00:23:19De leur côté,
00:23:21les Italiens
00:23:21trépignent.
00:23:22Orlando
00:23:23est de toutes les discussions
00:23:24du début janvier
00:23:25en tant qu'allié.
00:23:27Victor Emmanuel Orlando
00:23:28était le président
00:23:29du Conseil.
00:23:30Il avait contribué
00:23:31de manière décisive
00:23:31à la victoire italienne.
00:23:32Orlando a essayé
00:23:34d'obtenir
00:23:35de Wilson
00:23:36ce qui était prévu
00:23:37entre Français,
00:23:39Britanniques et Italiens,
00:23:41le traité de 1915
00:23:42qui avait motivé
00:23:44l'entrée en guerre
00:23:44de l'Italie,
00:23:45à savoir
00:23:46que la Dalmatie
00:23:48serait italienne,
00:23:50que le Trentin
00:23:50serait arraché
00:23:51à l'Autriche-Hongrie
00:23:52et deviendrait italien,
00:23:53que Fium
00:23:54deviendrait italien.
00:23:56L'Italie voulait réunifier
00:23:58toutes les populations
00:23:59d'origine italienne
00:24:00qui avaient été disséminées
00:24:01à l'intérieur
00:24:02de l'Empire Austro-Hongrois.
00:24:04C'était également
00:24:05un problème économique.
00:24:06Le port de Fium
00:24:07était un port concurrent
00:24:08de Trieste.
00:24:10Sous contrôle yougoslave,
00:24:12il aurait concurrencé
00:24:13l'Italie.
00:24:14Un pied-à-terre idéal
00:24:15dans les Balkans,
00:24:16mais rien ne se passe
00:24:17comme prévu,
00:24:18Wilson refuse tout net.
00:24:20N'importe où
00:24:20les grands pouvoirs européens
00:24:22de l'Ouest
00:24:23ne devraient avoir
00:24:23un foot-hold
00:24:24dans les Balkans.
00:24:27Et au nom
00:24:27du principe de nationalité,
00:24:28Wilson a été intransigeant,
00:24:29il n'est pas question
00:24:30que la Dalmatie
00:24:31soit italienne.
00:24:33Les Français sont
00:24:33très embarrassés
00:24:34parce que l'Italie
00:24:35est leur allié,
00:24:36mais en même temps
00:24:36ils ont des liens
00:24:38avec les Serbes
00:24:40et les Croates
00:24:41qui veulent faire
00:24:41un État yougoslave.
00:24:43Et donc évidemment
00:24:43la Dalmatie
00:24:44va devenir yougoslave
00:24:45et donc les Français
00:24:46sont un peu tiraillés
00:24:47entre Italiens
00:24:48et yougoslaves
00:24:50et finalement
00:24:51font comprendre
00:24:52à Orlando
00:24:53que la Dalmatie
00:24:54va devenir yougoslave.
00:24:55A mesure que s'est révélée
00:24:58la sympathie
00:24:58et le soutien
00:24:59de Wilson
00:25:00envers le nouvel État
00:25:01yougoslave,
00:25:02la possibilité
00:25:02de trouver un accord
00:25:03s'est éloignée.
00:25:07Orlando se braque
00:25:08et se sent humilié
00:25:09par l'attitude
00:25:09des trois autres
00:25:10qui hustent aussi
00:25:11d'une arme diplomatique,
00:25:13la langue.
00:25:14Clemenceau
00:25:15a passé 5 ans
00:25:16aux États-Unis,
00:25:17quand il avait 25 ans,
00:25:17il a épousé
00:25:18l'Américaine,
00:25:19il parle un anglais
00:25:20et il écrit
00:25:21un anglais parfait.
00:25:22Donc il n'a pas
00:25:23besoin d'interprètes.
00:25:24Ils peuvent avec lui
00:25:26et Lloyd George
00:25:26se parler en anglais
00:25:28dans les négociations
00:25:30et cela marginalise
00:25:31l'italien
00:25:32qui lui ne parle
00:25:33pas l'anglais
00:25:34et pas bien le français
00:25:35non plus.
00:25:37Et Orlando,
00:25:39le pauvre,
00:25:39a été vu en train
00:25:40de pleurer
00:25:41parce qu'il n'arrivait
00:25:42pas à contenter
00:25:42une opinion publique italienne
00:25:43toujours plus nationaliste
00:25:45et convaincu
00:25:47que la contribution
00:25:48de l'Italie
00:25:48à la Grande Guerre
00:25:49avec ses 500 000 morts
00:25:51et ses 900 000 mutilés
00:25:52devait être récompensée.
00:25:54à la hauteur
00:25:55de son sacrifice.
00:25:58Orlando,
00:25:58à son retour d'Italie,
00:25:59est destitué.
00:26:00Il n'a rien obtenu.
00:26:02Tout cela a contribué
00:26:04à créer en Italie
00:26:04un contexte
00:26:05que les nationalistes
00:26:06ont exploité
00:26:07en criant
00:26:07à la victoire mutilée.
00:26:09Pour autant,
00:26:10elle ne l'était pas
00:26:11car l'Italie
00:26:11avait plus
00:26:12qu'il ne lui en fallait
00:26:13pour assurer
00:26:13la sécurité
00:26:14de ses frontières.
00:26:14la sécurité
00:26:15de ses confines.
00:26:19La conférence
00:26:20de la paix
00:26:20bat son plein.
00:26:22Les commissions
00:26:22travaillent
00:26:22dans les bureaux
00:26:23du quai d'Orsay.
00:26:24De l'autre côté
00:26:25du pont,
00:26:25place de la Concorde,
00:26:27l'hôtel de Crayon.
00:26:28Wilson a installé là
00:26:29son quartier général
00:26:30et travaille
00:26:31avec ses centaines
00:26:31de conseillers
00:26:32à la grande œuvre
00:26:32de sa vie,
00:26:33la Société des Nations.
00:26:36Dans les salons,
00:26:37on part des principes
00:26:38des 14 points
00:26:38pour élaborer
00:26:39ce pacte de la SDN.
00:26:41Pour Wilson,
00:26:42l'enjeu est clair.
00:26:43Il veut redéfinir
00:26:44un nouvel ordre mondial.
00:26:46Il arrive à Paris
00:26:46avec l'idée
00:26:47qu'il faut
00:26:48faire une paix
00:26:49entre égaux.
00:26:51Il veut une société
00:26:52des nations
00:26:53qui fasse
00:26:54que la Première Guerre mondiale
00:26:55soit la dernière
00:26:56des guerres.
00:26:57Il a une conception
00:26:58de l'Europe,
00:26:59ces Européens
00:27:00qui ont une vieille histoire,
00:27:01ils ont des idées
00:27:02un peu anciennes
00:27:04sur la paix
00:27:04et la guerre.
00:27:05C'est ce qui explique
00:27:06qu'ils sont toujours
00:27:06ces Européens
00:27:07en guerre.
00:27:09Il faut donc
00:27:09mettre une fin
00:27:10à ces guerres incessantes
00:27:12qui sont dues
00:27:12à des paix
00:27:14mal organisées
00:27:15et des paix injustes.
00:27:16Il voulait gagner
00:27:16pour les Etats-Unis
00:27:17ce rôle d'arbitre
00:27:18du monde.
00:27:19De la mi-janvier
00:27:20à la fin mars,
00:27:21on ne parle
00:27:21que de la société
00:27:23des nations.
00:27:24C'est l'idée
00:27:25de réunir
00:27:25l'ensemble des nations
00:27:27dans une institution
00:27:28comme l'ONU,
00:27:29ça précède l'ONU.
00:27:30Et l'idée
00:27:30qu'avant de déclarer
00:27:32la guerre,
00:27:33il faut annoncer
00:27:34qu'on va déclarer
00:27:34la guerre
00:27:35et entamer
00:27:36des procédures
00:27:37d'arbitrage,
00:27:38de négociations.
00:27:39Pour éviter
00:27:40ces accords secrets,
00:27:41ces alliances secrètes
00:27:42qui sont génératrices
00:27:44de guerre,
00:27:44il faut mettre
00:27:45en place
00:27:45une organisation
00:27:46qui est prête
00:27:47à assurer
00:27:48d'une façon durable
00:27:49la paix.
00:27:52Pendant la conférence
00:27:53à Paris,
00:27:54tous ceux
00:27:54qui se sont battus,
00:27:55indiens,
00:27:56indochinois,
00:27:57africains,
00:27:58demandent leur part
00:27:58d'autodétermination
00:27:59en récompense
00:28:00de services rendus
00:28:01en millions de morts
00:28:01et poursuivre
00:28:03les principes de Wilson
00:28:04sur le droit des peuples
00:28:05à disposer d'eux-mêmes.
00:28:06Un plongeur du rite
00:28:08se tente sans succès
00:28:09d'accéder à la conférence.
00:28:10Il est indochinois,
00:28:11c'est le futur Ho Chi Minh.
00:28:18Fin mars,
00:28:19Wilson finit par présenter
00:28:20sa SDN à la presse
00:28:21en en faisant le cœur
00:28:22même du futur traité
00:28:23de Versailles.
00:28:25Clemenceau
00:28:25et Lloyd George
00:28:26sont polis,
00:28:27sans plus.
00:28:28Et le congrès américain
00:28:29ne ratifiera jamais
00:28:30la SDN
00:28:31dont l'Allemagne
00:28:32sera exclue au départ.
00:28:33Le traité de Versailles
00:28:34était morné.
00:28:37C'est un traité de Versailles
00:28:38amputé
00:28:39que nous avons eu
00:28:39à gérer
00:28:40à partir du moment
00:28:41où l'Amérique
00:28:42n'a pas de présence
00:28:45dans les instances
00:28:45de la SDN.
00:28:48En parallèle
00:28:48est créé
00:28:49le Bureau international
00:28:50du travail
00:28:50qui existe toujours
00:28:51pour sécuriser
00:28:53le monde ouvrier émergent
00:28:54et lutter contre
00:28:55le chômage et la misère.
00:28:57Mais les Alliés
00:28:57jouent un jeu dangereux
00:28:58en maintenant
00:28:59un blocus alimentaire
00:29:00en Allemagne.
00:29:01Ce blocus divise
00:29:02le Conseil des quatre.
00:29:03Si les Allemands
00:29:06veulent manger
00:29:07ce qu'ils doivent faire
00:29:08c'est de travailler.
00:29:09C'est la promesse
00:29:11des Alliés
00:29:12qui est à l'abri.
00:29:13L'armistice
00:29:14permet
00:29:15la possibilité
00:29:16de envoyer
00:29:16des produits
00:29:17à l'Allemagne.
00:29:18Mais nous
00:29:18nous laissons
00:29:19de nombreux
00:29:19produits
00:29:20à Rotterdam
00:29:21quand les Allemands
00:29:22se pochent.
00:29:24Nous ne sommes
00:29:25pas seulement
00:29:25les fruits
00:29:26de la future
00:29:26hétrie
00:29:27nous sommes
00:29:27nourrissons
00:29:28une révolution.
00:29:29Cette future haine
00:29:32dont parle
00:29:33Lloyd George
00:29:33visionnaire
00:29:34et la terreur
00:29:35d'une révolution rouge
00:29:36qui pourrait gagner
00:29:36l'Allemagne
00:29:37et l'Ouest
00:29:37précipite les discussions.
00:29:40Il faut vite
00:29:40régler le sort
00:29:41de l'ancien empire allemand.
00:29:42Finalement,
00:29:52c'est en un mois
00:29:52que la conférence
00:29:53va régler la paix
00:29:54avec l'Allemagne.
00:29:55Orlando est parti
00:29:56et symboliquement,
00:29:57on quitte le quai d'Orsay
00:29:58pour l'hôtel particulier
00:29:59d'un banquier américain.
00:30:02Chacun veut tirer
00:30:03du traité de paix
00:30:04les meilleures dispositions
00:30:05pour l'avenir
00:30:06de son pays.
00:30:07Alors les conversations
00:30:08se tendent
00:30:08tant les intérêts
00:30:09sont divergents.
00:30:10Les Britanniques,
00:30:13ils veulent maintenir
00:30:15évidemment leur puissance,
00:30:17maintenir leur empire,
00:30:19cet empire
00:30:20sur lequel le soleil
00:30:21ne se couche jamais.
00:30:23Ils sont pour la fermeté
00:30:24à l'égard de l'Allemagne
00:30:25et comme les Français,
00:30:27ils veulent des réparations.
00:30:28Ils veulent une somme
00:30:30extrêmement forte
00:30:31de réparations.
00:30:33Ils sont même au départ
00:30:34plus exigeants
00:30:34que les Français.
00:30:35Ils veulent que les Allemands
00:30:36dans ces réparations
00:30:37remboursent
00:30:38les pensions de guerre.
00:30:40Les Français, eux,
00:30:41sont obsédés par leurs frontières
00:30:43et n'ont pas d'autre choix
00:30:44que d'avoir une position
00:30:45très dure.
00:30:47Clémenceau va en permanence
00:30:48négocier
00:30:49de façon à obtenir
00:30:51que Britanniques
00:30:52et Américains
00:30:53s'engagent
00:30:54à assurer
00:30:55la sécurité
00:30:55de la France.
00:30:57Il ne faut pas oublier
00:30:57que la question
00:30:58est d'abord démographique.
00:30:59La France est à 40 millions
00:31:00d'habitants
00:31:00et l'Allemagne
00:31:01est toujours à peu près
00:31:03à 65 millions d'habitants.
00:31:05Puisqu'il y a cette inégalité
00:31:06franco-allemande,
00:31:06la sécurité de la France
00:31:07passe par une réégalisation
00:31:09des chances.
00:31:10Il faut donc
00:31:11un traité extrêmement dur,
00:31:12il faut que l'Allemagne paye,
00:31:14il faut que l'Allemagne
00:31:14soit affaiblie.
00:31:15Donc cette conviction
00:31:17absolue
00:31:17que l'Allemagne
00:31:18est responsable
00:31:19de la guerre
00:31:19et que pour ça
00:31:20elle doit payer.
00:31:21Le Bosch paiera.
00:31:21Les hommes d'États français
00:31:26et britanniques
00:31:26savaient qu'il fallait
00:31:27faire payer l'Allemagne,
00:31:29eux-mêmes étant ruinés.
00:31:34Et ce qui est encore plus important,
00:31:35c'est que les populations
00:31:36demandaient une paix exemplaire.
00:31:39Elles voulaient une paix
00:31:40de vainqueurs
00:31:41où l'Allemagne
00:31:42devait être désignée
00:31:43comme seule coupable
00:31:44de la guerre.
00:31:47Et à une paix douce,
00:31:49ni Clemenceau
00:31:50ni Lloyd George
00:31:50n'auraient survécu
00:31:52politiquement.
00:31:54Les Français
00:31:54vont tout faire
00:31:56pour que la question
00:31:57militaire,
00:31:59la question de la sécurité
00:32:00soit au cœur
00:32:01des débats
00:32:02pour une raison simple
00:32:03en définitive,
00:32:04c'est que
00:32:05quelle que soit l'issue
00:32:06des traités de paix,
00:32:08la France
00:32:09continuera
00:32:10à avoir
00:32:10une frontière
00:32:11continentale
00:32:12avec l'Allemagne,
00:32:13ce qui n'est pas
00:32:13le cas de la Grande-Bretagne,
00:32:14ce qui n'est pas
00:32:15le cas de l'États-Unis.
00:32:18De son côté,
00:32:19Wilson s'accroche
00:32:19à son idée
00:32:20de paix juste.
00:32:45Il les obtient.
00:32:46Plus tard,
00:32:48Clemenceau
00:32:48peut alors
00:32:48rappeler de son bureau
00:32:49le président français
00:32:50Poincaré
00:32:51pour lui annoncer
00:32:52la nouvelle.
00:32:58Mademoiselle,
00:32:59la présidence
00:33:00de la République,
00:33:00s'il vous plaît.
00:33:03Monsieur le président,
00:33:05j'ai mes 15 ans.
00:33:06La paix est faite.
00:33:07Les clauses du traité
00:33:16s'affinent.
00:33:17On va détruire
00:33:18une partie de l'armement
00:33:19et réduire l'armée allemande
00:33:20à 100 000 hommes.
00:33:21Maintenant,
00:33:22il faut aller vite.
00:33:23Début mai,
00:33:24les Allemands sont convoqués
00:33:25à l'hôtel Triano
00:33:25à Versailles.
00:33:26Messieurs,
00:33:31ce n'est ni le temps
00:33:32ni le lieu
00:33:32de discours superflux.
00:33:34Vous avez devant vous
00:33:35les représentants
00:33:36des nations
00:33:37qui se sont unis
00:33:38pour résister
00:33:40à une guerre
00:33:40qui nous a été imposée
00:33:42pendant plus de 4 ans
00:33:43d'une façon
00:33:44tout à fait cruelle.
00:33:46Vous voulez la paix.
00:33:48Nous sommes disposés
00:33:49à vous l'accorder.
00:33:50Voici le livre
00:33:50contenant nos dispositions.
00:33:52Le traité de Versailles
00:33:54c'est 400 clauses.
00:33:55Ces 400 clauses
00:33:56sont très dures
00:33:56pour l'Allemagne.
00:33:57Elle reconnaît
00:33:58que l'Allemagne
00:33:59va être amputée
00:34:00d'une partie
00:34:00de son territoire.
00:34:01L'Allemagne
00:34:02va devoir payer
00:34:03des réparations de guerre
00:34:04puisque c'est elle
00:34:05qui est fautive
00:34:05de la guerre.
00:34:06Mais tout ça,
00:34:07ça s'est fait
00:34:08dans un contexte particulier.
00:34:11Nous connaissons
00:34:11l'intensité de la haine
00:34:13à laquelle nous sommes.
00:34:15Nous connaissons
00:34:16l'intensité
00:34:16de la haine
00:34:17à laquelle nous sommes.
00:34:17Est-ce que vous pourriez
00:34:18vous rapprocher
00:34:18du bureau, mon vieux,
00:34:19je ne vous entends pas.
00:34:20Nous connaissons
00:34:22l'intensité
00:34:23de la haine
00:34:24à laquelle nous faisons face.
00:34:27Nous avons entendu
00:34:39l'exigence passionnée
00:34:40des vainqueurs
00:34:41qui prétendent
00:34:42à la fois
00:34:42nous faire payer
00:34:43comme vaincu
00:34:43et nous punir
00:34:45comme coupable.
00:34:46Mais nous ne sommes
00:34:47pas les unies
00:34:47les responsables.
00:34:48Mais nous ne sommes
00:34:55pas les seuls coupables.
00:34:57L'impérialisme
00:34:57des Etats européens
00:34:58a empoisonné
00:34:59la situation internationale.
00:35:00Pas d'autres observations.
00:35:03La séance est levée.
00:35:06Pas de négociations.
00:35:07Quinze jours pour répondre.
00:35:09Rendez-vous début juin.
00:35:10Certes, le traité de Versailles
00:35:13est très dur
00:35:14mais il aurait été difficile
00:35:15à accepter
00:35:15pour les opinions publiques
00:35:17d'avoir un traité
00:35:18qui ne le soit pas.
00:35:20Il fallait faire payer
00:35:21l'Allemagne.
00:35:22Dès les conditions connues,
00:35:23à Berlin,
00:35:24c'est l'indignation.
00:35:26La façon dont a été traité
00:35:27la délégation allemande
00:35:28est jugée inacceptable.
00:35:29On se sent trahi
00:35:30par Wilson
00:35:30qui avait promis
00:35:31une paix digne
00:35:32et juste.
00:35:33S'il n'avait pas dit
00:35:35avec moi
00:35:36tout sera différent
00:35:37et que le résultat
00:35:38finalement n'était pas différent
00:35:39il a créé une telle illusion
00:35:40qu'il a créé
00:35:41un désir de revanche
00:35:42qui a été entretenu
00:35:44par les militaires allemands
00:35:45qui cachaient
00:35:46à leur peuple
00:35:47que c'est eux
00:35:47qui avaient demandé
00:35:48l'armistice
00:35:48et pas le pouvoir civil.
00:35:50Mais à partir du moment
00:35:51où les Alliés imposent
00:35:53à une république
00:35:54des conditions de paix
00:35:56que le peuple
00:35:57n'a pas pu négocier
00:35:58et bien
00:36:00le peuple allemand
00:36:02se sent trahi
00:36:03par la république
00:36:04de Weimar.
00:36:05Pour les Allemands
00:36:06et on les comprend
00:36:07le traité de Versailles
00:36:08est un diktat.
00:36:09C'est précisément
00:36:10parce que les vainqueurs
00:36:10n'arrivaient pas
00:36:11à se mettre d'accord
00:36:12que tous ces préliminaires
00:36:13ont été longs
00:36:15trop longs
00:36:16et qu'à un moment
00:36:16les opinions publiques
00:36:17étaient un peu là
00:36:18ce qu'il fallait
00:36:18en finir
00:36:19qu'il fallait quand même
00:36:20le signer ce traité
00:36:21et bien on l'impose
00:36:22au vaincu.
00:36:23Et du même coup
00:36:24vu de l'autre côté
00:36:25c'est l'humiliation suprême.
00:36:27L'Allemagne
00:36:27est traumatisée.
00:36:29De son point de vue
00:36:30elle n'a pas perdu la guerre
00:36:31et ne se sent pas responsable.
00:36:33Elle est sonnée
00:36:34par ses 400 clauses
00:36:35et met du temps
00:36:36à répondre.
00:36:37En juin 1919
00:36:38Wilson en a assez.
00:36:40Il veut rentrer
00:36:41aux Etats-Unis.
00:36:42Clemenceau menace
00:36:43de rompre l'armistice.
00:36:44Foch ressort déjà
00:36:45ses cartes
00:36:45d'état-major.
00:36:48Enfin
00:36:48le 28 juin
00:36:49le traité est signé
00:36:51à Versailles.
00:36:53Finalement
00:36:53les trois négociateurs
00:36:54ont obtenu
00:36:55ce qu'ils voulaient.
00:36:56Wilson a imposé
00:36:57sa SDN
00:36:57Lloyd George
00:36:58obtient la flotte
00:36:59et une partie
00:37:00des colonies allemandes
00:37:01et Clemenceau
00:37:02a sécurisé
00:37:02ses frontières.
00:37:04Mais ce que les alliés
00:37:05ont sous-estimé
00:37:06avec la mise en scène
00:37:07et le contenu
00:37:08du traité de Versailles
00:37:09c'est l'impact psychologique
00:37:10profond qu'il aura
00:37:11par la suite.
00:37:12C'est pas l'humiliation
00:37:13qui est voulue
00:37:14mais l'humiliation
00:37:16sera le résultat.
00:37:18L'humiliation
00:37:18n'est pas voulue
00:37:19ce qui est voulue
00:37:20c'est bien
00:37:21de faire comprendre
00:37:22à l'Allemagne
00:37:23qu'elle ne peut pas
00:37:24qu'elle ne doit pas
00:37:25recommencer.
00:37:26Pour autant
00:37:27était-ce un mauvais traité ?
00:37:29La paix de Versailles
00:37:32en 1919
00:37:33a été un gros dilemme
00:37:36dès le début.
00:37:40D'un côté
00:37:41il y avait
00:37:42la perspective
00:37:42de construire
00:37:43un monde meilleur
00:37:44et ça
00:37:46c'était la volonté
00:37:47de Wilson.
00:37:50Et d'un autre côté
00:37:51il y avait
00:37:52l'ambition
00:37:52des Britanniques
00:37:53et des Français
00:37:54de se partager
00:37:55le monde
00:37:55selon leurs propres
00:37:56critères.
00:37:59Le traumatisme
00:38:00vécu
00:38:01par tous
00:38:01les peuples
00:38:02européens
00:38:03est tel
00:38:03que
00:38:04le traité
00:38:05de paix
00:38:06n'est probablement
00:38:07pas un bon
00:38:08traité
00:38:09mais que c'est
00:38:10peut-être
00:38:11le moins mauvais
00:38:11traité
00:38:12qu'il était possible
00:38:13de négocier
00:38:14à ce moment-là
00:38:15dans ces conditions-là.
00:38:17Le traité
00:38:17n'était pas plus
00:38:18injuste
00:38:19que tous les autres
00:38:19traités
00:38:20qui avaient entraîné
00:38:21une victoire.
00:38:21Si les Allemands
00:38:23à l'époque
00:38:23n'avaient pas été
00:38:24aussi fous
00:38:25ils auraient dû
00:38:26comprendre
00:38:26que la paix
00:38:27de Versailles
00:38:27était une paix
00:38:28raisonnable
00:38:29mais je ne peux
00:38:30que constater
00:38:31que la guerre
00:38:31les avait rendus
00:38:33vraiment fous.
00:38:38A l'issue
00:38:39du traité
00:38:40de Versailles
00:38:40quatre autres
00:38:41traités suivront
00:38:42ils sont dits
00:38:43de la région parisienne.
00:38:46Saint-Germain-en-Laye
00:38:46qui règle
00:38:47le sort
00:38:47de l'Autriche
00:38:48le Trianon
00:38:50à Versailles
00:38:51pour la Hongrie
00:38:52Neuilly
00:38:54où la Bulgarie
00:38:55perd une partie
00:38:56de son territoire
00:38:57et l'accès
00:38:57à la mer
00:38:58et Sèvres
00:38:59qui décidera
00:39:00de l'avenir
00:39:01de l'Empire Ottoman.
00:39:04Tous ces traités
00:39:05ont profondément
00:39:06changé le visage
00:39:07de cette vieille
00:39:07Europe des empires.
00:39:09Les états
00:39:09s'organisent
00:39:10peu à peu
00:39:10et la paix
00:39:11fait doucement
00:39:11son chemin.
00:39:13Pendant près
00:39:13de dix ans
00:39:14l'Europe va devenir
00:39:15un laboratoire
00:39:15extraordinaire.
00:39:17Les traités
00:39:17s'assouplissent
00:39:18l'industrie allemande
00:39:19se redresse
00:39:19et le premier couple
00:39:20franco-allemand
00:39:21de toute l'histoire
00:39:22Aristide Briand
00:39:23et Gustav Stressmann
00:39:24remportent le prix
00:39:25Nobel de la paix
00:39:26en 1926.
00:39:27En Allemagne
00:39:28la république
00:39:29de Weimar
00:39:29grâce au capitaux
00:39:30américain
00:39:31reprend confiance.
00:39:33Le rapport
00:39:33avec les voisins
00:39:34se détend.
00:39:34On oublie presque
00:39:35Versailles
00:39:36et son diktat.
00:39:39On ferait fausse route
00:39:40en pensant que c'est
00:39:41le traité,
00:39:42son humiliation
00:39:43et ses clauses
00:39:44qui ont nourri
00:39:44le terreau
00:39:45du nazisme allemand
00:39:46et du fascisme italien
00:39:47est conduit au pire.
00:39:53Je ne pense pas
00:39:54qu'on puisse accuser
00:39:55le traité de Versailles
00:39:55d'avoir planté
00:39:56les mines
00:39:56qui ont fait exploser
00:39:58la seconde guerre mondiale.
00:40:00En 1929,
00:40:03la France et l'Allemagne
00:40:04envisageaient la mise en place
00:40:05d'une union douanière
00:40:06et l'idée de créer
00:40:07les Etats-Unis d'Europe.
00:40:10En Europe,
00:40:11il n'y avait
00:40:11aucune menace de guerre.
00:40:12Un événement
00:40:15bien plus dévastateur
00:40:16balaie cette légende
00:40:17un peu sombre.
00:40:21La crise financière
00:40:22puis économique américaine
00:40:23de 1929
00:40:24va replonger l'Europe
00:40:25encore convalescente
00:40:27et plus particulièrement
00:40:28l'Allemagne
00:40:28dans le chaos.
00:40:30C'est elle
00:40:30qui est responsable
00:40:31de la guerre
00:40:32qui menace.
00:40:33C'est elle
00:40:33qui va créer
00:40:33chômage,
00:40:34misère
00:40:35et instiller la peur.
00:40:37Peur du communisme,
00:40:38de l'autre,
00:40:39de l'insurrection
00:40:39et faire naître
00:40:41une idéologie radicale
00:40:42qui va ressusciter
00:40:43la rancœur
00:40:43et la vengeance
00:40:44d'une paix
00:40:45que l'on ne digère pas.
00:40:48En Italie,
00:40:49Mussolini se sert
00:40:50de Versailles
00:40:50mais ce n'est pas
00:40:51la raison
00:40:51de la montée
00:40:52du fascisme.
00:40:55Mussolini avait dit
00:40:56dès le début
00:40:56que le traité de Versailles
00:40:58devait être revu
00:40:59et modifié.
00:41:02A partir de 1921,
00:41:03il y a une levée
00:41:04de bouclier
00:41:04contre le parti communiste
00:41:06qui projette
00:41:07une révolution
00:41:08comme celle
00:41:08qu'a fait Lénine.
00:41:09Le fascisme
00:41:13n'a pas été soutenu
00:41:14par les grands industriels
00:41:15mais par les plus
00:41:16petits industriels
00:41:17comme il avait été soutenu
00:41:18par les grands propriétaires
00:41:19terriens
00:41:19qui avaient eu peur
00:41:20d'être expropriés
00:41:21par le parti communiste.
00:41:23C'est pour cela
00:41:24que ces petits industriels
00:41:26ont aidé
00:41:26l'arrivée du fascisme
00:41:27en favorisant
00:41:28un gouvernement
00:41:29qui promettait
00:41:29de faire respecter
00:41:30l'ordre.
00:41:31Peur du bolchevisme,
00:41:33désir exacerbé d'ordre,
00:41:35humiliation
00:41:35d'une mauvaise paix,
00:41:36le même mécanisme
00:41:37se met en place
00:41:38quelques années plus tard
00:41:39avec l'avènement
00:41:40des nazis.
00:41:43Le succès initial
00:41:44de Hitler
00:41:45dans ces années
00:41:45de crise de 1920
00:41:46intervient exactement
00:41:48au moment où les gens
00:41:49se remettent en Allemagne
00:41:49à s'intéresser
00:41:50à la première guerre mondiale
00:41:51de façon massive.
00:41:55Le traité de Versailles
00:41:56va regagner le devant
00:41:57de la Seine
00:41:57servant de prétexte
00:41:58à une propagande impeccable.
00:42:00Hitler a promis
00:42:02dès le début
00:42:03qu'il va réparer
00:42:04la paix de la honte,
00:42:05qu'il va rétablir
00:42:07l'honneur des soldats
00:42:08et va aller reconquérir
00:42:10la patrie perdue.
00:42:13Il veut faire des monuments
00:42:14pour les soldats vaincus
00:42:15et les blessés de guerre
00:42:19vont recevoir
00:42:20tous les honneurs
00:42:21qu'ils n'ont pas eus
00:42:21de la part
00:42:22de la République
00:42:22de Weimar.
00:42:24C'était ça
00:42:25la promesse d'Hitler.
00:42:27Bien sûr que Versailles
00:42:28a un lien avec Hitler.
00:42:30Bien sûr que Versailles
00:42:31a un lien avec
00:42:32la Seconde Guerre mondiale.
00:42:34Mais Versailles
00:42:36n'est pas la cause
00:42:36de la Seconde Guerre mondiale.
00:42:38Le caporal Hitler
00:42:43qui ne se sent bien
00:42:44qu'au sein de l'armée
00:42:44va faire du traité
00:42:45de Versailles
00:42:46son obsession personnelle.
00:42:48Dans sa folie,
00:42:49son but est de terminer
00:42:50cette guerre
00:42:50que les Allemands
00:42:51ont interrompu
00:42:51le 11 novembre 1918
00:42:53dans des conditions indignes.
00:42:56En piétinant méthodiquement
00:42:57les clauses du traité
00:42:58sur le réarmement
00:42:59et l'annexion des Sudètes
00:43:00et de l'Autriche,
00:43:01il déclenche,
00:43:02sur un prétexte,
00:43:03la Seconde Guerre mondiale.
00:43:08Après une drôle de guerre
00:43:11de près de neuf mois,
00:43:13la France est vaincue
00:43:14sèchement
00:43:14en moins de cinq semaines.
00:43:23C'est très clair
00:43:24que Hitler, en 1940,
00:43:26a gagné
00:43:27la Première Guerre mondiale.
00:43:29Jamais Hitler
00:43:29n'a été aussi populaire
00:43:30en Allemagne
00:43:31qu'au moment
00:43:32où il a battu la France
00:43:33en 1940.
00:43:34Le traité de Versailles
00:43:38vit ces dernières heures
00:43:39quand Pétain,
00:43:41héros de Verdun,
00:43:42demande à son tour
00:43:42l'armistice.
00:43:46Nous sommes le 22 juin 1940.
00:43:48Hitler exige
00:43:49le wagon de Rotonde.
00:43:51Dans la symbolique
00:43:52de l'armistice,
00:43:53il faut en revenir
00:43:54sur l'armistice de Rotonde
00:43:55et complètement caviarder
00:43:58ce qui s'était passé
00:43:59le 11 novembre 1918
00:44:01en faisant signer
00:44:03dans une posture
00:44:04complètement inversée
00:44:05les Français
00:44:06un armistice
00:44:07au même endroit
00:44:08dans les mêmes conditions,
00:44:09etc.
00:44:09Autant 1918 c'était secret,
00:44:29autant 1940 c'est grand tapage.
00:44:36Hitler va tout de suite
00:44:37demander à sortir
00:44:39le wagon
00:44:39de le mettre
00:44:40là où il était
00:44:41en 1918
00:44:42et il voudra
00:44:43s'asseoir
00:44:44à la place
00:44:44du maréchal Foch
00:44:45le 21 juin
00:44:46quand il fera lire
00:44:47par le général Keitel
00:44:49les conditions d'armistice.
00:44:51Ah ben Hitler
00:44:51s'est souvenu
00:44:52et il est ivre de joie
00:44:54qu'il jubile.
00:44:56C'est l'humiliation
00:44:56à l'envers.
00:44:57C'est une vengeance,
00:44:59c'est une vengeance
00:44:59de gamin,
00:45:00une vengeance
00:45:00de sale gamin
00:45:01dans des conditions
00:45:02dramatiques bien évidemment.
00:45:03Hitler va envoyer à Berlin
00:45:12pour les exposer
00:45:12dans un musée grandiose,
00:45:14le wagon,
00:45:15la dalle sacrée,
00:45:16le monument
00:45:16des Alsaciens laurent.
00:45:19Mais pas la statue
00:45:20du maréchal Foch
00:45:21qui resterait
00:45:22désespérément
00:45:23à Compiègne
00:45:24pour regarder une clairière
00:45:25complètement vide
00:45:26puisqu'il aura fait
00:45:27sauter le musée
00:45:27en juillet 1940,
00:45:29il ne restera plus rien.
00:45:30Le second conflit mondial
00:45:42s'achève en 1945
00:45:44par la capitulation
00:45:45et l'effondrement total
00:45:46du Troisième Reich.
00:45:48Avec la défaite
00:45:49de l'Allemagne,
00:45:50c'est la véritable fin
00:45:51de la guerre
00:45:51débutée en 1914.
00:45:59Pourtant,
00:45:59près de 80 ans
00:46:01après l'attentat
00:46:02de Sarajevo,
00:46:03au même endroit,
00:46:04l'histoire meurtrière
00:46:04se répète.
00:46:06Au moment des traités
00:46:07de Versailles
00:46:07et de Saint-Germain,
00:46:08les alliés,
00:46:09croyant régler le problème
00:46:10de la poudrière
00:46:11des Balkans,
00:46:12ont créé la Yougoslavie.
00:46:14Mais les dés
00:46:14sont pipés
00:46:15dès le départ.
00:46:17Dans cette première
00:46:17Yougoslavie
00:46:18entre les deux guerres,
00:46:19c'est le roi de Serbie
00:46:20qui devient roi
00:46:22des Serbes,
00:46:22croates et slovènes.
00:46:23Et en fait,
00:46:24la Yougoslavie
00:46:24a transformé
00:46:25à une grande Serbie.
00:46:27Pendant la Seconde Guerre mondiale,
00:46:29les fissures
00:46:29au sein de la Yougoslavie
00:46:30apparaissent.
00:46:31Le nationalisme croate,
00:46:33allié d'Hiklert,
00:46:34est responsable
00:46:35d'un véritable génocide.
00:46:37Mais les communistes
00:46:37résistent,
00:46:38avec à leur tête
00:46:39Tito,
00:46:40qui s'impose vite
00:46:41comme un leader charismatique.
00:46:43C'est lui
00:46:43qui va créer
00:46:44au sortir de la guerre
00:46:45la grande Yougoslavie socialiste,
00:46:47lointaine satellite
00:46:48de Moscou.
00:46:49C'est lui
00:46:50qui, grâce à sa poigne,
00:46:51a su mettre
00:46:52un couvercle
00:46:52sur les nationalismes
00:46:53de sa fédération.
00:46:54Tito avait
00:46:56une chance
00:46:57extraordinaire
00:46:58de s'imposer
00:47:00dans un territoire
00:47:01yougoslave
00:47:02où tout le monde
00:47:03est contre tout le monde.
00:47:04Couvercle
00:47:05qui a tenu jusqu'à sa mort
00:47:06en 1980
00:47:07et qui finit par sauter
00:47:09après la chute
00:47:09du communisme.
00:47:10Tout le monde nous disait
00:47:11qu'après la chute
00:47:13du communisme,
00:47:14il y aura
00:47:14des belles choses
00:47:15pour chacun,
00:47:16que finalement
00:47:17la démocratie arrive
00:47:18en Bosnie-Herzégovine.
00:47:19Premières élections
00:47:20libres démocratiques
00:47:21ont eu lieu
00:47:22en novembre 1990
00:47:24à l'aspect général.
00:47:26Les partis nationalistes
00:47:27et ultranationalistes
00:47:28gagnent presque tout.
00:47:31Le nationaliste serbe
00:47:32Milosevic
00:47:33prend le pouvoir
00:47:34dans un contexte
00:47:34de crise économique
00:47:35et sociale
00:47:36qui génère immédiatement
00:47:37des tensions identitaires
00:47:38et commandent
00:47:40en avril 1992
00:47:41depuis les collines
00:47:42de Sarajevo
00:47:43des bombardements
00:47:44meurtraillés
00:47:44sur la ville.
00:47:45Sous-titrage Société Radio-Canada
00:48:15Ce pont aussi
00:48:15pendant la dernière guerre
00:48:17en Bosnie-Herzégovine
00:48:17était un pont
00:48:18de démarcation
00:48:19de deux parties.
00:48:21D'un côté,
00:48:21c'était des serbes
00:48:22qui contrôlaient
00:48:23les collines
00:48:23et le reste.
00:48:25De ce côté-là,
00:48:25évidemment,
00:48:26c'était les habitants
00:48:26de Sarajevo.
00:48:27Je ne veux pas parler
00:48:28des serbes croates
00:48:29et bosniaques,
00:48:29je veux habiter
00:48:30des habitants
00:48:30de Sarajevo
00:48:31qui vivaient
00:48:31de ce côté-là.
00:48:38C'est la rivière
00:48:39de Miletska
00:48:39qui a divisé
00:48:40les serbes
00:48:41et le reste
00:48:42de la population
00:48:43de Sarajevo.
00:48:44Déjà,
00:48:44on a commencé
00:48:45à parler
00:48:45d'eux
00:48:46et de nous.
00:48:52Le siège
00:48:53de Sarajevo
00:48:53sera le plus long
00:48:54de toute l'histoire moderne
00:48:55et va faire
00:48:56près de 100 000 morts
00:48:57et 2 millions
00:48:58de réfugiés.
00:48:59Après presque
00:49:004 ans d'enlisement
00:49:00et un échec manifeste
00:49:02de l'Union européenne,
00:49:04les Américains,
00:49:05comme pour les deux
00:49:05guerres mondiales,
00:49:07interviennent en force
00:49:07pour faire cesser
00:49:08le conflit
00:49:08avec les accords
00:49:09de Dayton.
00:49:10Ils joueront à nouveau,
00:49:12comme l'avait rêvé
00:49:13Wilson,
00:49:14les gendarmes du monde.
00:49:17En apparence,
00:49:18la ville a été
00:49:18plus ou moins reconstruite
00:49:19et les dégâts
00:49:21matériels réparés.
00:49:22Mais les blessures
00:49:23et le traumatisme
00:49:24psychologique
00:49:25de la société
00:49:26sont bien plus considérables.
00:49:28Ça va prendre
00:49:29un certain temps
00:49:29pour les guérir
00:49:30et les surmonter.
00:49:32Certaines personnes
00:49:33en parlent
00:49:33comme si ça s'était passé
00:49:34hier et c'est encore
00:49:35très présent
00:49:35dans les conversations
00:49:36quotidiennes.
00:49:38Mais près de 25 ans
00:49:39plus tard,
00:49:40la plaine
00:49:41n'est pas refermée.
00:49:42Ce symbole
00:49:43de la ville,
00:49:44la bibliothèque,
00:49:45qui représentait
00:49:46à la fois
00:49:46le faste
00:49:46de l'Empire Austro-Hongrois
00:49:48et le multiculturalisme
00:49:49d'avant 1914
00:49:50et détruit
00:49:51pendant la guerre,
00:49:53abrite une plaque
00:49:53qui entretient
00:49:55les tensions
00:49:55intracommunautaires.
00:49:59J'appelle
00:50:00cette plaque
00:50:00la plaque de la haine.
00:50:01Je pense que
00:50:02cette plaque
00:50:03témoigne
00:50:03du mal
00:50:04de Bosnie-Herzégovine,
00:50:05témoigne
00:50:05de notre vie
00:50:06difficile d'aujourd'hui.
00:50:08Comment on peut
00:50:09construire un dialogue
00:50:10lorsque vous êtes considérés
00:50:11mais tous
00:50:12globalement
00:50:12comme criminels ?
00:50:14Comment faire des Balkans
00:50:15après le premier embrasement
00:50:16de 1914,
00:50:18une région sereine
00:50:18et apaisée ?
00:50:21Et si cela recommençait ?
00:50:23La Bosnie-Herzégovine
00:50:24aujourd'hui
00:50:25continue à être
00:50:26pays
00:50:26à plusieurs identités.
00:50:27Je ne suis pas sûr
00:50:28qu'il n'y aura pas
00:50:29de guerre
00:50:30en Bosnie-Herzégovine
00:50:30parce que
00:50:32depuis
00:50:32plus d'un quart
00:50:34de siècle,
00:50:34la Bosnie-Herzégovine
00:50:36se prépare
00:50:37pour la guerre.
00:50:38Ici,
00:50:38tout est fait
00:50:39pour que je considère
00:50:40l'autre
00:50:41comme ennemi
00:50:41et pas comme ami.
00:50:43La Bosnie-Herzégovine
00:50:44du présent,
00:50:45c'est une Bosnie-Herzégovine
00:50:46qui puise
00:50:48dans l'histoire
00:50:49des raisons
00:50:50et des prétextes
00:50:51pour les combats
00:50:52dans le futur.
00:50:53Et ça,
00:50:54c'est le siècle infernal.
00:50:56Et si l'Union européenne,
00:50:57un siècle plus tard,
00:50:58avait pu être
00:50:59l'ultime couvercle,
00:51:00la solution
00:51:00d'intégration ?
00:51:02Je ne sais pas
00:51:03si l'Union européenne
00:51:04est la solution,
00:51:06mais elle représente
00:51:06définitivement
00:51:07un espoir.
00:51:08Et c'est quelque chose
00:51:09dont les gens ici
00:51:09ont besoin
00:51:10plus que de
00:51:11toute autre chose.
00:51:13Dans le futur,
00:51:14j'espère vraiment
00:51:14vivre encore
00:51:16une trentaine,
00:51:17quarantaine d'années
00:51:18de paix.
00:51:19La première guerre mondiale
00:51:30a définitivement
00:51:30anéanti l'hégémonie
00:51:32et la puissance
00:51:32de l'Europe.
00:51:34L'Europe ne s'est pas
00:51:35remise
00:51:36de la première guerre mondiale.
00:51:37L'Europe cesse
00:51:39d'être
00:51:40la puissance
00:51:40dominante
00:51:41à l'échelle mondiale
00:51:43pour être remplacée
00:51:44par les États-Unis.
00:51:46C'est la fin
00:51:48d'une époque
00:51:49où l'Europe
00:51:49dominait le monde.
00:51:52À l'issue
00:51:53de la première
00:51:54guerre mondiale,
00:51:56tous les peuples
00:51:57européens
00:51:58appartiennent
00:52:00au camp
00:52:01des vaincus.
00:52:02Le traité
00:52:03de Versailles
00:52:04et la fragile
00:52:04paix
00:52:05qui l'accompagne
00:52:05ont été
00:52:06à la fois
00:52:06les germes
00:52:07et les boucs
00:52:07émissaires
00:52:08des conflits
00:52:08du XXe siècle.
00:52:10Il en reste
00:52:11des grands principes,
00:52:12une philosophie
00:52:13qui ont été
00:52:14recyclées
00:52:14dans les bases
00:52:15de la construction
00:52:15européenne
00:52:16d'après-guerre.
00:52:17La construction
00:52:17européenne,
00:52:18elle vaut ce qu'elle vaut
00:52:18aujourd'hui,
00:52:19elle a toutes les faiblesses
00:52:19qu'on lui connaît,
00:52:20mais c'est la seule région
00:52:21au monde
00:52:22qui a atteint
00:52:23ce point d'intégration
00:52:25s'unir ou mourir.
00:52:28Et nous pourrions créer
00:52:29peut-être une Europe
00:52:30plus visionnaire,
00:52:32plus humaine
00:52:32et plus élargie
00:52:34et qui n'aurait
00:52:34aucune exigence
00:52:35de domination.
00:52:37Alors elle pourrait
00:52:37émerger à nouveau
00:52:38et autrement
00:52:41dans ce monde.
00:52:43Une Europe
00:52:43qui se cherche
00:52:44et qui doit
00:52:45s'adapter
00:52:45aux nouveaux
00:52:46enjeux planétaires
00:52:47si elle veut
00:52:48occuper une place
00:52:48sur l'instable
00:52:49échiquier mondial.
00:52:55Il y a plus d'un siècle,
00:52:57le traité de Versailles
00:52:58ou comment,
00:52:59durant les mois
00:53:00qui suivirent
00:53:00l'armistice
00:53:01du 11 novembre
00:53:021918,
00:53:04l'américain Wilson,
00:53:05le français Clemenceau
00:53:06et le britannique
00:53:06Lloyd George
00:53:07ont cherché
00:53:08à bâtir
00:53:08une paix durable
00:53:09sur les ruines
00:53:10de la Grande Guerre.
00:53:11Les vaincus,
00:53:12à commencer par l'Allemagne
00:53:13n'ayant quant à eux
00:53:14pas été conviés
00:53:15comme vient de nous
00:53:16le rappeler à l'instant
00:53:17ce documentaire
00:53:18réalisé par Isabelle Gendre.
00:53:21Quoi qu'il en soit,
00:53:22ce traité de paix
00:53:22fut sans doute
00:53:23le plus décrié
00:53:25du siècle dernier,
00:53:26soupçonné
00:53:26d'avoir porté en lui
00:53:28l'essentiel des germes
00:53:29de la Seconde Guerre mondiale.
00:53:31Où en est-on aujourd'hui ?
00:53:33Nous allons nous poser
00:53:34la question maintenant
00:53:35avec nos invités présents
00:53:36aujourd'hui sur ce plateau
00:53:37de débat doc.
00:53:39en commençant par vous
00:53:40Stéphane Audouin-Rouzeau.
00:53:41Bienvenue à vous,
00:53:42enchanté de vous accueillir.
00:53:44Vous êtes historien,
00:53:45directeur d'études
00:53:46émérite à l'EHESS,
00:53:48l'école des hautes études
00:53:49en sciences sociales
00:53:50bien entendu,
00:53:51spécialiste de la Première Guerre mondiale.
00:53:52Vous êtes récemment
00:53:53l'auteur de
00:53:54La Grande Guerre,
00:53:54peut-elle mourir ?
00:53:56Essai sur le référent
00:53:5714-18 en France,
00:53:58un ouvrage publié
00:53:59chez Odile Jacob
00:54:00qu'on vous doit aussi
00:54:01plus en lien direct
00:54:02avec notre émission
00:54:04d'aujourd'hui,
00:54:05sortir de la Grande Guerre,
00:54:06le monde de l'après 1918.
00:54:08Co-écrit cette fois
00:54:09avec Christophe Prochasson
00:54:11et publié
00:54:12chez Talendier.
00:54:13Marie-Bénédicte Vincent
00:54:14est également avec nous,
00:54:15bienvenue.
00:54:16Vous êtes professeure
00:54:16d'histoire contemporaine
00:54:17à l'université
00:54:18de Franche-Comté
00:54:19et spécialiste
00:54:20de l'Allemagne
00:54:22du 19e
00:54:23et du 20e siècle.
00:54:24Et puis enfin avec nous,
00:54:25Jean-Michel Gueux,
00:54:27bienvenue à vous.
00:54:28Vous êtes maître
00:54:29de conférences
00:54:30à l'université
00:54:31Panthéon-Sorbonne-Paris 1
00:54:33en histoire contemporaine
00:54:34des relations internationales.
00:54:36Vous êtes un spécialiste
00:54:36de l'histoire de la paix
00:54:37du 19e
00:54:39et du 20e siècle
00:54:40et vous êtes l'auteur
00:54:41entre autres
00:54:41de Gagner la paix
00:54:431914-1929.
00:54:45C'est un ouvrage
00:54:45toujours disponible
00:54:47aux éditions
00:54:48du Seuil.
00:54:49Stéphane Audouin-Rouzeau,
00:54:50que n'a-t-on pas dit
00:54:51à propos de ce traité
00:54:53de Versailles
00:54:53dont on nous a raconté
00:54:55l'histoire
00:54:55à travers évidemment
00:54:56le documentaire
00:54:57que nous venons de voir ?
00:54:58Dictate du côté allemand,
00:55:00paix bâclée
00:55:00et un siècle plus tard,
00:55:03plus d'un siècle plus tard
00:55:04aujourd'hui,
00:55:04est-ce que les historiens
00:55:05que vous êtes d'ailleurs
00:55:06tous les trois
00:55:07portent le même regard
00:55:08aujourd'hui
00:55:09sur ce qu'a été
00:55:10ce traité de paix
00:55:11et ce qu'ont été
00:55:12ses conséquences ?
00:55:14Il me semble
00:55:14que la vision
00:55:15a évolué
00:55:16dans le sens
00:55:17de l'indulgence.
00:55:18Quand j'étais étudiant,
00:55:21vraiment le traité
00:55:22de Versailles,
00:55:22c'était vraiment
00:55:23un morceau de bravoure,
00:55:24c'était le traité discrédité,
00:55:26on n'avait pas
00:55:27de critiques
00:55:28assez dures
00:55:29à formuler,
00:55:30nos enseignants d'ailleurs.
00:55:32Et au fond,
00:55:33on reprenait
00:55:34très largement
00:55:35le regard
00:55:36extrêmement sévère
00:55:37de beaucoup
00:55:37de contemporains,
00:55:38l'économiste Keynes,
00:55:39bien sûr,
00:55:40Jacques Bainville
00:55:41et beaucoup d'autres.
00:55:43Aujourd'hui,
00:55:43évidemment,
00:55:44on se rend mieux compte
00:55:46que la suite,
00:55:47c'est-à-dire
00:55:4820 ans plus tard,
00:55:49l'éclatement
00:55:49de la Seconde Guerre mondiale
00:55:50a provoqué
00:55:52une sorte de boucle
00:55:53de rétro-évaluation
00:55:54du traité de Versailles.
00:55:57On l'a,
00:55:57évidemment,
00:55:58compte tenu
00:55:59du résultat
00:56:0020 ans plus tard
00:56:01et compte tenu
00:56:01des ambitions
00:56:02qui étaient celles
00:56:03de l'année 19,
00:56:05on constate
00:56:06un tel hiatus,
00:56:07une telle catastrophe,
00:56:08même que le traité
00:56:10s'en trouve discrédité.
00:56:11En fait,
00:56:12en historien,
00:56:13il me semble,
00:56:13je pense que mes collègues
00:56:15seront d'accord avec moi,
00:56:16il faut revenir,
00:56:17on va voir,
00:56:18mais il faut revenir
00:56:19évidemment
00:56:20au moment présent.
00:56:21qu'est-ce que les contemporains
00:56:23du conflit,
00:56:26notamment,
00:56:27effectivement,
00:56:27les trois principaux
00:56:29artisans du traité,
00:56:31après 4 ans et demi
00:56:32d'une guerre effroyable
00:56:34dont la trace,
00:56:36dont les passions,
00:56:37aurait dit Raymond Aron,
00:56:38sont encore très présentes
00:56:39en 1919,
00:56:41qu'est-ce que les contemporains
00:56:42pouvaient faire
00:56:43compte tenu
00:56:44de leurs moyens matériels,
00:56:47politiques,
00:56:47juridiques,
00:56:49moraux,
00:56:49psychologiques,
00:56:50et à ce moment-là,
00:56:51si on part
00:56:52des acteurs sociaux
00:56:53eux-mêmes
00:56:53et non pas
00:56:54d'une vision
00:56:55rétrospective
00:56:57puisqu'on connaît la suite,
00:56:59à mon avis,
00:56:59l'appréciation
00:57:00qu'on peut porter
00:57:01sur le traité de Versailles
00:57:02se fait assez différente.
00:57:05Est-ce que vous êtes
00:57:05de cet avis ?
00:57:06Est-ce que
00:57:07du côté allemand,
00:57:09puisque évidemment,
00:57:10c'est cette histoire
00:57:11que vous venez de nous porter
00:57:12aujourd'hui
00:57:12dans cet échange,
00:57:14on a la même impression
00:57:15aujourd'hui
00:57:15avec le même recul ?
00:57:17Les contemporains...
00:57:18À propos de ce fameux
00:57:19diktat,
00:57:20c'était le terme
00:57:21associé à ce traité
00:57:21du côté allemand.
00:57:22Bien sûr.
00:57:23Je pense qu'on le réinsère
00:57:25dans un contexte
00:57:26que les Allemands
00:57:27de l'époque
00:57:28qualifient d'effondrement,
00:57:29mais qui n'a pas seulement
00:57:31une connotation militaire,
00:57:32qui a aussi une connotation
00:57:33politique
00:57:34et au-delà,
00:57:35sociale,
00:57:36puisque l'Allemagne
00:57:37change de régime,
00:57:38l'Empire s'effondre,
00:57:39l'Empereur abdique,
00:57:40et donc,
00:57:41au moment où s'ouvre
00:57:42la conférence de la paix
00:57:43qu'on a bien vue
00:57:44dans le documentaire,
00:57:46l'Allemagne
00:57:46n'a pas encore
00:57:47de constitution.
00:57:47Et le traité de Versailles
00:57:49de juin 1919
00:57:51précède
00:57:52la nouvelle constitution
00:57:54qui est adoptée
00:57:54seulement en août 1919.
00:57:56Donc,
00:57:56je pense qu'on voit
00:57:57beaucoup mieux
00:57:58aujourd'hui
00:57:58cette configuration
00:57:59très chaotique
00:58:00de genèse
00:58:02d'un nouveau régime
00:58:03dans lequel
00:58:04tous les repères
00:58:04habituels,
00:58:05politiques
00:58:06et même
00:58:07de la société
00:58:08sont en train
00:58:09d'être changés.
00:58:10en réalité,
00:58:11c'est la toute nouvelle
00:58:12démocratie allemande,
00:58:13la toute nouvelle
00:58:14république de Weimar
00:58:15qui hérite de cette guerre,
00:58:17de ce traité
00:58:18suite à une guerre
00:58:19déclenchée
00:58:19par Guillaume II.
00:58:21Tout à fait.
00:58:23Alors,
00:58:23la vision de Guillaume II,
00:58:25évidemment,
00:58:26dans l'après-guerre,
00:58:29est un peu paradoxale
00:58:30parce que pour les Allemands,
00:58:31il reste,
00:58:32on pourrait dire,
00:58:33curieusement associé
00:58:34à l'empereur de la paix.
00:58:35On voit plutôt en lui,
00:58:37il a eu un rôle secondaire
00:58:39durant le conflit
00:58:39parce que l'Allemagne
00:58:40était en réalité
00:58:41dirigée par les militaires.
00:58:42On a parlé de semi-dictature militaire
00:58:44à partir d'août 1916.
00:58:46Guillaume II était en retrait
00:58:47et il a pris contact
00:58:49avec...
00:58:52Il a voulu jouer un rôle
00:58:54vers une solution pacifique.
00:58:57Il a pris contact
00:58:57avec le nonce, etc.
00:58:59Donc,
00:59:00on le voit dans l'après-guerre
00:59:01et il est célébré comme ça.
00:59:02Il n'est plus sur le trône
00:59:03comme un empereur
00:59:04de la paix.
00:59:05Donc,
00:59:05il n'y a pas ce regard accusateur
00:59:08qu'on pourrait porter sur lui
00:59:10en tant qu'empereur de l'Allemagne
00:59:13qui déclare quand même
00:59:14la guerre
00:59:14le 1er août 1914 à la Russie.
00:59:17Alors,
00:59:17j'ai lu quelque part,
00:59:18c'est une interview
00:59:19qui date un peu maintenant,
00:59:20c'était 2019
00:59:21dans l'hebdomadaire Le Point.
00:59:23Vous faites partie de ceux
00:59:23qui disent
00:59:24oui,
00:59:24ce regard a changé
00:59:25par rapport à ce traité de paix.
00:59:27Il a surtout changé
00:59:27sous l'influence
00:59:29peut-être des anglo-saxons,
00:59:30de vos confrères
00:59:31historiens anglo-saxons.
00:59:32Expliquez-nous.
00:59:33Alors,
00:59:33tout à fait.
00:59:34depuis une trentaine d'années,
00:59:36on a une vision
00:59:37qui a pas mal évolué.
00:59:39C'est-à-dire
00:59:39qu'on est parti
00:59:40effectivement au départ
00:59:41d'une idée
00:59:42d'une paix cartaginoise,
00:59:44d'une paix ratée
00:59:45qui était la responsable
00:59:46de tous les maux.
00:59:47Et puis finalement,
00:59:48grâce aussi
00:59:49à nos collègues anglophones,
00:59:50effectivement,
00:59:51il y a eu un peu
00:59:52une réappréciation
00:59:53du traité de Versailles.
00:59:55On l'a vu
00:59:56dans une manière
00:59:57finalement
00:59:57en replaçant
00:59:58dans son contexte.
00:59:59C'est-à-dire que
00:59:59les négociateurs
01:00:00de la paix
01:00:01avaient face à eux
01:00:02des défis immenses.
01:00:03Des empires qui s'effondrent,
01:00:04une révolution
01:00:05qui menaçait
01:00:06l'Europe entière.
01:00:07Donc d'énormes défis.
01:00:08Et finalement,
01:00:09l'idée,
01:00:09c'est qu'on est arrivé
01:00:10à une paix
01:00:11qui était loin d'être parfaite
01:00:12mais qui était peut-être
01:00:13le meilleur compromis possible
01:00:15étant donné
01:00:16le contexte
01:00:17dans lequel se trouvaient
01:00:18les négociateurs
01:00:19de la paix
01:00:20qui avaient donc
01:00:21à gérer
01:00:22des dossiers énormes.
01:00:24Ce qu'il faut dire aussi,
01:00:25c'est que cette paix,
01:00:26plus qu'on l'a dit,
01:00:27n'est pas une paix figée.
01:00:28C'est une paix
01:00:28largement évolutive.
01:00:31C'est-à-dire que
01:00:31c'est avec le même
01:00:32traité de Versailles
01:00:32qu'on va avoir une première phase
01:00:34dans les années 20,
01:00:35je dirais,
01:00:35de grandes tensions,
01:00:36de guerre froide,
01:00:37franco-allemands,
01:00:38etc.
01:00:38Et puis dans la seconde moitié
01:00:39des années 20,
01:00:40une période de détente.
01:00:41Mais on est toujours
01:00:42dans le même traité de Versailles
01:00:43qui évolue,
01:00:44qui est dynamique.
01:00:45Et d'ailleurs,
01:00:46Clémenceau,
01:00:47en 1919,
01:00:47avait dit aux députés français
01:00:49que ce traité
01:00:50vaudra ce que vous voudrez
01:00:51vous-même.
01:00:53Donc il y avait
01:00:54en quelque sorte
01:00:54un caractère très dynamique
01:00:55de cette paix.
01:00:56Et en gros,
01:00:57ce n'est pas parce qu'on a
01:00:59signé la paix
01:01:00en juin 1919
01:01:01que la paix était faite.
01:01:02La paix,
01:01:03au contraire de la guerre,
01:01:04où il suffit de la déclarer
01:01:05pour être dans un état de guerre,
01:01:07il ne suffit pas
01:01:07de signer la paix
01:01:08pour être dans un état de paix.
01:01:09Donc c'est une longue construction
01:01:11et il faut vraiment
01:01:12toutes les années 20
01:01:13pour arriver
01:01:14dans un processus...
01:01:15Parce que ce sont peut-être
01:01:16dans ces années 20,
01:01:17et surtout,
01:01:18vous l'avez dit,
01:01:18dans la deuxième partie
01:01:19de ces années 20,
01:01:20en France,
01:01:21c'est Aristide Briand,
01:01:21par exemple.
01:01:22Par exemple.
01:01:24Où il est vraiment
01:01:24question de pacifisme.
01:01:26Mais dans l'immédiate
01:01:27après-guerre,
01:01:27on n'en est sans doute
01:01:29pas tout à fait là.
01:01:30En tout cas,
01:01:30c'est ce que laisse entendre
01:01:31ce documentaire aussi.
01:01:32Oui, je me suis tout à fait
01:01:34d'accord avec vous.
01:01:36Cette évolution du regard
01:01:38est faite d'origine
01:01:39anglo-saxonne
01:01:40par excellence.
01:01:41Néanmoins,
01:01:41il ne faut jamais pousser
01:01:42peut-être le bouchon
01:01:43trop loin.
01:01:44Si on reprend
01:01:45le côté allemand,
01:01:46puisque l'historien
01:01:48Gerd Kromach
01:01:49était dans ce documentaire,
01:01:51j'ai tellement travaillé
01:01:52avec lui,
01:01:52j'ai tellement entendu
01:01:53mettre en garde
01:01:56ses collègues français,
01:01:57en particulier sur l'humiliation
01:01:59qu'avait représenté
01:02:00le traité
01:02:01pour les Allemands.
01:02:02D'abord,
01:02:03l'humiliation du rituel.
01:02:05Tout est fait.
01:02:05Tout est fait
01:02:06à partir du mois de mai
01:02:07et lors de la signature
01:02:09en juin
01:02:09pour humilier
01:02:11de manière,
01:02:11il faut bien lire,
01:02:12effroyable,
01:02:13les Allemands signataires
01:02:15et derrière eux,
01:02:16bien sûr,
01:02:17l'Allemagne.
01:02:20Et puis,
01:02:20il y a tout de même
01:02:20cette question essentielle,
01:02:22je trouve,
01:02:23de la responsabilité allemande
01:02:25de la guerre,
01:02:26avec évidemment
01:02:27tout ce qui est...
01:02:27Parce que ce traité
01:02:28fait porter
01:02:29l'entière responsabilité
01:02:30de cette guerre
01:02:31à l'Allemagne.
01:02:31Le fameux article 231
01:02:32qui,
01:02:34j'ai souvent entendu
01:02:35Gerd Kromach
01:02:36en parler,
01:02:37il y a qu'aucun Allemand
01:02:39pratiquement
01:02:39ne pouvait,
01:02:40même les Allemands
01:02:41les plus à gauche,
01:02:42les plus libéraux,
01:02:42les plus soucieux
01:02:43du réconciliation pacifique
01:02:46avec les alliés
01:02:49français, allemands
01:02:51et britanniques
01:02:52en particulier,
01:02:53même eux
01:02:55ne pouvaient pas
01:02:57admettre,
01:02:59on pouvait accepter
01:02:59le traité,
01:03:00mais on ne pouvait pas
01:03:00admettre
01:03:01la manière
01:03:02dont la responsabilité
01:03:04allemande
01:03:04était soulignée
01:03:05par le traité,
01:03:06y compris sur le plan
01:03:06sémantique.
01:03:07On le voit bien,
01:03:08l'Allemagne reconnaît,
01:03:09etc.
01:03:09C'est vraiment
01:03:11la dimension
01:03:14d'humiliation
01:03:14aujourd'hui
01:03:15quand on lit le traité,
01:03:17quand on ouvre
01:03:18le traité aujourd'hui
01:03:19et qu'on lit
01:03:19les articles
01:03:20sur la responsabilité
01:03:21allemande,
01:03:21on est quand même
01:03:22impressionné
01:03:23par le poids
01:03:25des haines
01:03:27de la guerre
01:03:28qui se font sentir
01:03:29dans le texte.
01:03:30Je suis évidemment
01:03:31tout à fait d'accord,
01:03:32je voudrais juste
01:03:33apporter une précision.
01:03:34Le traité a été
01:03:35transmis en français
01:03:37aux Allemands
01:03:37qui ont dû le traduire
01:03:38très vite
01:03:39en une nuit
01:03:40pour certains articles
01:03:42et l'article 231
01:03:44dans sa traduction
01:03:45allemande
01:03:45surdétermine
01:03:46la notion
01:03:47de responsabilité,
01:03:48le mot allemand
01:03:49qui est employé
01:03:50fait de l'Allemagne
01:03:51l'instigateur
01:03:53originel
01:03:54de la guerre
01:03:55ce qui est un petit peu
01:03:56différent en allemand
01:03:57et c'est cela
01:03:58que les Allemands
01:04:00récusent aussi.
01:04:01Donc il y a aussi
01:04:01ce jeu des traductions.
01:04:03Aujourd'hui,
01:04:03on fait beaucoup
01:04:03une analyse sémantique
01:04:05dans l'histoire
01:04:06des relations internationales.
01:04:07On voit le poids des mots
01:04:07et le poids
01:04:08des représentations
01:04:10associées aux termes
01:04:12et ce que les traductions
01:04:13aussi chargent
01:04:14comme nouveau sens
01:04:15et pas forcément
01:04:17souhaité au départ.
01:04:18Donc tout ça,
01:04:19c'est évidemment
01:04:19la recherche actuelle
01:04:21qui met l'accent
01:04:22sur ces éléments.
01:04:24Et sur la réception
01:04:26tout à fait consensuelle
01:04:28de rejets
01:04:29du traité de Versailles
01:04:30qui était abordé
01:04:32par Stéphane Audouin-Rousseau,
01:04:34on a dit
01:04:35que le traité de Versailles
01:04:37c'était un lieu
01:04:37de mémoire négatif
01:04:39de la nation allemande.
01:04:40Ça veut dire que
01:04:41dans ce traité,
01:04:42tous les courants politiques,
01:04:44pratiquement sans exception,
01:04:46communient
01:04:47dans le rejet,
01:04:48ce qui crée
01:04:48la nation aussi.
01:04:50Ce qui est un peu paradoxal
01:04:51parce que quand on dit
01:04:52lieu de mémoire
01:04:52on voit des choses positives.
01:04:54Et en Allemagne
01:04:54c'est un lieu de mémoire
01:04:55négatif.
01:04:56Ce qui fait qu'il ne faudrait
01:04:57pas croire que c'est
01:04:58l'extrême droite
01:04:58qui a l'apanage du rejet.
01:05:01C'est toute la société
01:05:02et tous les courants politiques
01:05:03y compris la gauche
01:05:04et la gauche sociale-démocrate
01:05:05qui rejettent
01:05:06ce traité de Versailles.
01:05:07Et on comprend mieux ainsi
01:05:09comment Hitler
01:05:09peut utiliser cet argument
01:05:11de manière très efficace
01:05:13parce qu'il n'est pas limité
01:05:14à un courant extrémiste.
01:05:15Et ce traité
01:05:16fera sauter un gouvernement
01:05:17d'ailleurs en Allemagne
01:05:18c'est juste avant
01:05:20la signature
01:05:20de juin 1919.
01:05:24On va évoquer
01:05:24le cas de Wilson
01:05:25tout à l'heure.
01:05:26Si ce traité
01:05:27est aussi dur
01:05:28c'est sans doute
01:05:29peut-être
01:05:30et vous allez nous dire
01:05:32ce que vous en pensez
01:05:33dû à la position française
01:05:34à la position
01:05:35de Georges Clemenceau
01:05:36parce que physiquement
01:05:37sur le terrain
01:05:37évidemment
01:05:38cette frontière
01:05:39entre la France
01:05:40et l'Allemagne
01:05:40est là.
01:05:41Tout le monde
01:05:42n'avait pas le même intérêt
01:05:43à avoir payé l'Allemagne
01:05:44mais ceux
01:05:45et celui
01:05:46qui voulait
01:05:46faire payer l'Allemagne
01:05:47absolument
01:05:48c'était Clemenceau
01:05:50en l'occurrence
01:05:50c'était le représentant français.
01:05:52Alors
01:05:52c'est vrai que
01:05:53pour la France
01:05:54il y a
01:05:54nécessité de faire
01:05:56payer l'Allemagne
01:05:57parce que la guerre
01:05:57a coûté horriblement cher.
01:05:59C'est-à-dire que
01:05:59notamment
01:06:00la France
01:06:01a financé la guerre
01:06:02non pas par
01:06:03l'effort d'imposition
01:06:04qui aurait reposé
01:06:05sur les français
01:06:06mais par l'emprunt
01:06:07et notamment
01:06:08l'emprunt
01:06:08auprès de nos alliés.
01:06:10Notamment
01:06:10la France
01:06:11a une énorme dette
01:06:12vis-à-vis des anglais
01:06:13et des américains
01:06:14et des états-unis.
01:06:15Exactement
01:06:16et ce qui va
01:06:16empoisonner en grande partie
01:06:18les relations internationales
01:06:19d'entre le guerre
01:06:19les français
01:06:21n'admettant pas
01:06:22qu'ils puissent
01:06:22renoncer à leur créance
01:06:24sur l'Allemagne
01:06:24puisque les américains
01:06:25ou les anglais
01:06:26ne renoncent pas
01:06:27à leur créance
01:06:28sur les français.
01:06:29Donc ça
01:06:29effectivement
01:06:29c'est quelque chose
01:06:30d'extrêmement important.
01:06:33Je voulais revenir aussi
01:06:34sur l'origine
01:06:35finalement
01:06:35de cet article
01:06:36de 131.
01:06:37C'est vrai que
01:06:37les allemands
01:06:38l'ont interprété
01:06:39comme une
01:06:39comme on avait montré
01:06:41on avait voulu montrer
01:06:42leur responsabilité morale
01:06:44leur culpabilité morale
01:06:45en réalité
01:06:46l'origine
01:06:46de cet article
01:06:48c'est plutôt
01:06:48de fonder
01:06:49les réparations
01:06:50en montrant
01:06:51la responsabilité
01:06:52juridique
01:06:53de l'Allemagne
01:06:55puisque l'Allemagne
01:06:56a détruit
01:06:58comment dirais-je
01:07:00les possessions françaises
01:07:02et bien
01:07:02il est normal
01:07:03qu'elle répare
01:07:04et donc ça
01:07:05c'est vrai que
01:07:06ça naît un peu
01:07:07autour d'une mauvaise
01:07:08compréhension
01:07:08de cet article de 131
01:07:09bon évidemment
01:07:11que dans l'esprit
01:07:12français de 1919
01:07:14très clairement
01:07:15les français voient
01:07:16les allemands
01:07:17comme les principaux
01:07:18responsables de la guerre
01:07:19mais cet article
01:07:20de 131
01:07:21était vraiment fait
01:07:21pour poser
01:07:22la responsabilité
01:07:23juridique
01:07:25de l'Allemagne
01:07:25qui permettrait
01:07:26de justifier
01:07:27les réparations
01:07:28alors les fameuses
01:07:29réparations
01:07:29c'est 132 milliards
01:07:32de marques or
01:07:33bon
01:07:34il y a
01:07:34en euros
01:07:35en 2014
01:07:37c'était évalué
01:07:39à 1420 milliards
01:07:41d'euros
01:07:41pour que ceux qui nous regardent
01:07:43représentent un petit peu
01:07:44la somme
01:07:45qui a été demandée
01:07:45en l'occurrence
01:07:46à l'Allemagne
01:07:47je crois qu'il n'y a pas
01:07:48vous avez raison bien sûr
01:07:49sur le plan juridique
01:07:50c'est aussi l'argumentaire
01:07:51de Renouvin
01:07:53évidemment
01:07:54sur le fait
01:07:55qu'il fallait
01:07:56cet article
01:07:56de 131
01:07:57pour qu'on puisse
01:07:57faire payer l'Allemagne
01:07:58sinon on manquait
01:07:59de l'outil juridique
01:08:00à cette époque
01:08:01le droit n'était pas
01:08:02exactement le même
01:08:02le droit de la responsabilité
01:08:04n'était pas le même
01:08:04qu'aujourd'hui
01:08:05il manquait l'outil juridique
01:08:06pour fonder ensuite
01:08:07les réparations
01:08:08néanmoins
01:08:09je crois qu'il y a eu
01:08:10aussi une dimension morale
01:08:11et on le voit
01:08:12en particulier
01:08:12si on fait un peu
01:08:13d'anthropologie
01:08:15de la cérémonie
01:08:16du 28 juin
01:08:17qu'est-ce que fait
01:08:19Clémenceau
01:08:20il faut faire payer
01:08:21bien sûr
01:08:22mais il faut faire payer
01:08:22moralement
01:08:23symboliquement
01:08:24il fait disposer
01:08:25juste tout près
01:08:27du bureau
01:08:27où les plénipotentiaires
01:08:29vont signer
01:08:30il fait disposer
01:08:31cinq gueules cassées
01:08:32de la grande guerre
01:08:34des gueules cassées
01:08:34dans un état
01:08:37effroyable
01:08:38tous décorés
01:08:39de la médaille militaire
01:08:41et il les fait
01:08:41placer là
01:08:42pour que quand les plénipotentiaires
01:08:45allemands arrivent
01:08:46ils passent devant eux
01:08:48et leur tournent le dos
01:08:49et ces grands blessés français
01:08:51sont là
01:08:52en reproche
01:08:53vivant
01:08:54de la guerre
01:08:54voilà
01:08:55c'est vous
01:08:55qui avez fait ça
01:08:56c'est vous
01:08:57qui avez
01:08:59ainsi
01:08:59détruit
01:09:01non pas cinq seulement
01:09:02mais en fait
01:09:02des milliers
01:09:05des centaines de milliers
01:09:06de corps
01:09:07et de visages
01:09:07et donc cette dimension morale
01:09:09visuelle
01:09:10les contemporains
01:09:11la contemporaine
01:09:12la perçoive
01:09:13la perçoive
01:09:14et donc le traité
01:09:15n'épuise pas
01:09:16en quelque sorte
01:09:17le texte du traité
01:09:18n'épuise pas le traité
01:09:19il y a tout ce qui
01:09:20il y a tout le rituel
01:09:22qui va autour
01:09:23tout ce qui est dit
01:09:25autour
01:09:25tout ce qui est montré
01:09:26tout ce qui est organisé
01:09:27et là
01:09:28l'humiliation allemande
01:09:29est évidente
01:09:30elle est évidente
01:09:31oui les études visuelles
01:09:33sur l'entre-deux-guerres
01:09:34montrent que la représentation
01:09:35des soldats en Allemagne
01:09:36est une représentation
01:09:37de soldats
01:09:38non pas
01:09:39de gueules cassées
01:09:39mais de soldats
01:09:41héroïques
01:09:41de soldats vainqueurs
01:09:43et donc
01:09:43il y a aussi
01:09:45cette représentation
01:09:46du soldat allemand
01:09:47comme non vaincu
01:09:47il faut bien dire aussi
01:09:49que les allemands
01:09:49avaient deux fronts
01:09:50et qu'en 1918
01:09:51l'Allemagne a signé
01:09:52une paix avec la Russie
01:09:53qui était la paix
01:09:54de Brest-Litovsk
01:09:55très avantageuse
01:09:57pour l'Allemagne
01:09:57l'Allemagne avait
01:09:58les possessions allemandes
01:10:00selon cette paix
01:10:00allaient jusqu'en Ukraine
01:10:02elle sort victorieuse
01:10:03sur le front
01:10:04et donc il y a
01:10:05cette représentation
01:10:06de l'armée allemande
01:10:07victorieuse
01:10:08et donc il y a ce choc frontal
01:10:09des représentations
01:10:11et notamment
01:10:12dans la manière
01:10:14dont on va ensuite
01:10:15dessiner
01:10:16peindre
01:10:17sculpter
01:10:18le soldat
01:10:19de 14-18
01:10:20le soldat mutilé
01:10:22n'est pas une représentation
01:10:24fréquente
01:10:24en Allemagne
01:10:25elle est même très rare
01:10:26il n'a pas de statut
01:10:26il n'y aura pas
01:10:28de monument
01:10:30finalement national
01:10:31aux soldats morts
01:10:33avant 1931
01:10:34ce qui dit beaucoup
01:10:35sur la manière
01:10:36dont on se représente
01:10:37les morts
01:10:38et puis
01:10:38le soldat
01:10:39les soldats
01:10:40de l'armée
01:10:41en Allemagne
01:10:41Wilson
01:10:42reçu
01:10:44avec les plus grands honneurs
01:10:46qu'il soit
01:10:46donc en décembre
01:10:471918
01:10:48à Paris
01:10:49il défile
01:10:50sur les champs-déliés
01:10:50il reste 6 mois
01:10:51et il avait en tête
01:10:52un plan
01:10:5314 points
01:10:53son fameux plan
01:10:5414 points
01:10:55qu'il présentera d'ailleurs
01:10:56au congrès américain
01:10:57au début de l'année 1918
01:10:59alors même que le conflit
01:11:00n'était pas fini
01:11:01évidemment
01:11:01est-ce que ça aurait été
01:11:02une grande désillusion
01:11:046 mois plus tard
01:11:06ce président américain
01:11:09à l'issue
01:11:10de la signature
01:11:11de ce traité de paix
01:11:11c'est vrai qu'autour
01:11:12de Wilson
01:11:13il y a des espoirs
01:11:14immenses
01:11:15c'est-à-dire que
01:11:15c'est ce qu'on voit
01:11:16dans ce film
01:11:17Wilson est accueilli
01:11:17comme une star
01:11:18à Paris
01:11:19mais aussi à Brest
01:11:21quand il arrive
01:11:22mais aussi
01:11:22en Grande-Bretagne
01:11:24à Londres
01:11:24mais aussi en Italie
01:11:25c'est-à-dire qu'en fait
01:11:26Wilson incarne
01:11:27la figure de la paix
01:11:28parce que finalement
01:11:29les
01:11:29je dirais
01:11:31ceux qui étaient aux commandes
01:11:32pendant la guerre
01:11:33à commencer par Clémenceau
01:11:34il incarne la guerre
01:11:35il n'incarne pas la paix
01:11:36et donc Wilson
01:11:37incarne la paix
01:11:38c'est le nouveau monde
01:11:39il n'incarne pas
01:11:40non plus les empires
01:11:41exactement
01:11:42et on ne sait pas
01:11:43exactement
01:11:44quelle paix veut Wilson
01:11:45il y a effectivement
01:11:46ces 14 points
01:11:46qui parviennent
01:11:47des aspects
01:11:48rassurent les français
01:11:49parce que notamment
01:11:49on y dit expressément
01:11:50qu'il s'agira
01:11:51de réintégrer
01:11:52l'Alsace
01:11:53et la Lorraine
01:11:54à l'espace français
01:11:55mais pour le reste
01:11:56Wilson parle
01:11:57d'une société de nation
01:11:58et d'ailleurs
01:11:59c'est la raison principale
01:12:00qui motive
01:12:01la venue de Wilson
01:12:02c'est qu'il veut faire
01:12:04une paix
01:12:04qui impose
01:12:05aux européens
01:12:06de nouvelles règles
01:12:08dans la diplomatie
01:12:08c'est à dire qu'il y a
01:12:09la conscience chez Wilson
01:12:10que les européens
01:12:12pratiquent la vieille diplomatie
01:12:14de chancellerie
01:12:14diplomatie secrète
01:12:16lui il veut une new diplomatie
01:12:17une nouvelle diplomatie
01:12:19qui repose notamment
01:12:20sur une diplomatie publique
01:12:22et il vient imposer
01:12:24cette idée là
01:12:24et d'ailleurs
01:12:25à la conférence de la paix
01:12:25le premier sujet
01:12:27qui est traité
01:12:27c'est la question
01:12:28de la société des nations
01:12:30et Wilson lui-même
01:12:31président des Etats-Unis
01:12:32d'Amérique
01:12:33préside la commission technique
01:12:35qui est là
01:12:36pour élaborer
01:12:37le pacte
01:12:37de la société des nations
01:12:38et ce pacte
01:12:39se trouve
01:12:39dans les premiers articles
01:12:41de tous les traités
01:12:42de paix
01:12:42qui sont signés
01:12:43en 1919-1920
01:12:45donc Wilson
01:12:46est tout à fait convaincu
01:12:47que la paix
01:12:47qui va être faite
01:12:48va être une paix
01:12:49qui ne sera pas parfaite
01:12:50et il faut un instrument
01:12:51pour achever la paix
01:12:52et c'est son idée
01:12:53et c'est ça
01:12:54qu'il veut imposer
01:12:55aux dirigeants européens
01:12:57dont il sait
01:12:58qu'ils ne sont pas
01:12:58des grands amoureux
01:12:59de la société des nations
01:13:00qu'ils ne comprennent pas vraiment
01:13:01et il veut imposer
01:13:03cette idée-là
01:13:04pour faire une paix
01:13:05qu'il espère durable
01:13:06Est-ce qu'on pourrait
01:13:07parler un pas plus loin
01:13:08c'est-à-dire non seulement
01:13:09durable
01:13:10mais si possible
01:13:10définitive
01:13:11Oui
01:13:11C'est une idée
01:13:13Parce que ça devait être
01:13:14la dernière des dernières
01:13:15C'est une idée immense
01:13:16qui a été portée
01:13:17évidemment par les opinions
01:13:19et les combattants
01:13:20évidemment
01:13:20des pays européens
01:13:23pendant la période de guerre
01:13:24et cette idée
01:13:25au fond
01:13:25de cette démocratie internationale
01:13:27au fond
01:13:27qu'est la SDN
01:13:29comme outil
01:13:30d'une paix définitive
01:13:31c'est-à-dire
01:13:31d'éradication de la guerre
01:13:33ce qui était un vieux rêve
01:13:34des pacifistes occidentaux
01:13:36depuis le 19ème siècle
01:13:37voire du 18ème siècle
01:13:39l'éradication de la guerre
01:13:41comme moyen
01:13:41de résoudre
01:13:42les contradictions
01:13:43entre les états
01:13:45c'est un projet
01:13:46immense
01:13:46évidemment
01:13:47après coup
01:13:48et compte tenu
01:13:48de la suite
01:13:49que nous connaissons
01:13:50nous nous doutons bien
01:13:51que ce projet
01:13:52n'était pas réalisable
01:13:53finalement
01:13:55le bilan Wilson
01:13:56la SDN
01:13:57ça ne sera pas acté
01:14:00par le congrès américain
01:14:01les vaincus
01:14:01de cette guerre
01:14:02ne participent pas
01:14:03par ailleurs
01:14:04le droit des peuples
01:14:05à disposer d'eux-mêmes
01:14:06une belle idée
01:14:07aussi avancée par Wilson
01:14:08idée majeure
01:14:09dans ces 14 points
01:14:11mais
01:14:11à cause de cela
01:14:12on a tout de même
01:14:13le morcellement
01:14:14de l'Europe centrale
01:14:14à l'issue de ce traité
01:14:16on a concédé
01:14:17des dérogations
01:14:18à ce principe
01:14:18à l'Europe centrale
01:14:19alors ça vaut
01:14:20pour la naissance
01:14:21de la Tchécoslovaquie
01:14:22la Hongrie
01:14:22la Bulgarie
01:14:23l'éclatement
01:14:24de cet empire
01:14:25austro-hongrois
01:14:26la Pologne
01:14:27bien entendu
01:14:27et puis il a concédé
01:14:29des dérogations
01:14:29à ce fameux principe
01:14:30et alors là
01:14:31on parle des allemands
01:14:32des sud-est
01:14:32en Tchécoslovaquie
01:14:34des Hongrois
01:14:34de Transylvanie
01:14:35en Roumanie
01:14:35du Corélor
01:14:36de Danzig
01:14:37tout cela
01:14:38ça a été évidemment
01:14:39ça fait l'objet
01:14:39ensuite
01:14:40ça fait l'objet
01:14:41d'un révisionnisme
01:14:42d'un révisionnisme
01:14:43important
01:14:44qui va être fondé
01:14:45paradoxalement
01:14:46sur les principes
01:14:46de Wilson lui-même
01:14:47c'est-à-dire que les allemands
01:14:48disent au fond
01:14:49les principes de Wilson
01:14:51si on les suit
01:14:52justifie
01:14:53une révision
01:14:54des traités de paix
01:14:55donc c'est
01:14:55une argumentation
01:14:57évidemment biaisée
01:14:58mais c'est vrai
01:14:59que le traité de Versailles
01:15:00finalement
01:15:00en transposant
01:15:03les frontières allemandes
01:15:04puisqu'il faut recréer
01:15:04la Pologne
01:15:05crée de fait
01:15:06les conditions
01:15:07de son rejet
01:15:08parce que pour les allemands
01:15:09la Pologne
01:15:11qui est ainsi recréée
01:15:13se fait au détriment
01:15:16de terres
01:15:16jugées allemandes
01:15:17l'Allemagne perd
01:15:18je crois 15%
01:15:18de sa population
01:15:19à l'issue de ce traité
01:15:20oui
01:15:21enfin 15%
01:15:22de sa superficie
01:15:2410% de sa population
01:15:24je crois
01:15:25et ça ça posera problème
01:15:26tout de même
01:15:26ça nourrit
01:15:28un révisionnisme
01:15:29transversal
01:15:30en fait
01:15:30et durable
01:15:31parce que
01:15:32ces minorités
01:15:34allemandes
01:15:35vont
01:15:37évidemment
01:15:38être considérées
01:15:39comme devant
01:15:39naturellement
01:15:40réintégrées
01:15:42dans un empire
01:15:43un Reich
01:15:43qui est bizarrement
01:15:46le nom
01:15:46que continue de porter
01:15:47la République
01:15:48et c'est vrai
01:15:49que c'est un argument
01:15:50qui va nourrir
01:15:52aussi les revendications
01:15:53hitlériennes
01:15:54au fond oui
01:15:54c'est tragique
01:15:55parce que des empires
01:15:56multinationaux
01:15:57effectivement
01:15:57assez dysfonctionnels
01:15:59sont remplacés
01:16:00par des états-nations
01:16:01dans lesquelles
01:16:02sont des minorités
01:16:04évidemment
01:16:05vont nourrir
01:16:06toutes les revendications
01:16:08irédentistes
01:16:10de l'intérieur
01:16:11ou de l'extérieur
01:16:12et donc
01:16:13finalement
01:16:13un problème
01:16:14a été remplacé
01:16:15par un autre
01:16:15plutôt plus aigu
01:16:16que le précédent
01:16:17pour prendre un exemple
01:16:18la ville de Danzig
01:16:19qui est presque
01:16:20l'origine
01:16:21de la Sonderguerre mondiale
01:16:22c'est une ville
01:16:23allemande
01:16:23en fait
01:16:24Danzig
01:16:24c'est-à-dire que
01:16:24la majorité
01:16:25de la population
01:16:26est allemande
01:16:26mais c'est une ville
01:16:27qui à la suite
01:16:28du traité de Versailles
01:16:28devient une ville libre
01:16:29puisqu'il faut que la Pologne
01:16:31y ait l'accès
01:16:31qui donnera accès
01:16:32à la mer
01:16:32à la Pologne
01:16:34et voilà
01:16:34et ça sépare
01:16:35le territoire allemand
01:16:36en deux
01:16:36donc ça crée
01:16:37de fait
01:16:38un problème
01:16:39ne serait-ce que
01:16:39matériel
01:16:40de communication
01:16:41entre les partis
01:16:42du Reich
01:16:42entre la Prusse orientale
01:16:44et puis le reste
01:16:45du Reich
01:16:46et donc
01:16:46ça nourrit forcément
01:16:47de la contestation
01:16:48On a souvent reproché
01:16:49à ce traité
01:16:49de porter en lui
01:16:51les germes du fascisme
01:16:52alors on pense à l'Italie
01:16:54évidemment
01:16:54le fascisme arrive
01:16:56en 1922
01:16:57en Italie
01:16:57et bien évidemment
01:16:58on l'a évoqué
01:16:59du nazisme en Allemagne
01:17:00au début des années 30
01:17:02là aussi
01:17:03les choses ont évolué
01:17:04y a-t-il aujourd'hui
01:17:05bel et bien
01:17:06un consensus
01:17:06pour dire
01:17:07non
01:17:07ça ne portait pas
01:17:10les germes
01:17:11du nazisme
01:17:12notamment
01:17:12en Allemagne
01:17:13est-ce que vous êtes
01:17:14d'accord avec ça
01:17:15est-ce que vous faites
01:17:16partie de ce consensus
01:17:17et ce qui vaut
01:17:18pour l'Allemagne
01:17:18vaut-il pour
01:17:19le fascisme italien
01:17:20je vous laisse répondre
01:17:21alors ce qu'il faut voir
01:17:23alors ce qu'il faut voir
01:17:23c'est les résultats
01:17:24électoraux
01:17:25du parti nazi
01:17:26tant qu'on est
01:17:27dans les années 20
01:17:28le parti national socialiste
01:17:30a des résultats
01:17:31quand même
01:17:31qui sont très faibles
01:17:31et puis
01:17:32il y a la crise
01:17:34qui se déclenche
01:17:35à l'automne 1929
01:17:37l'Allemagne
01:17:38est un des pays
01:17:39les plus rapidement touchés
01:17:40et ça crée
01:17:41massivement
01:17:43dès
01:17:43l'automne 1930
01:17:46il y a 107 députés nazis
01:17:48qui sont élus au Reichstag
01:17:49à un moment
01:17:50où Aristide Briand
01:17:51propose un projet
01:17:53dont on parle
01:17:53dans le documentaire
01:17:54d'Etats-Unis d'Europe
01:17:56autrement dit
01:17:57pour vous
01:17:58c'est clair
01:17:58c'est plutôt cette crise
01:18:00et les conséquences
01:18:01de la crise de 1929
01:18:02qui ont provoqué
01:18:04la montée du nazisme
01:18:04en Allemagne
01:18:05plutôt que ce fameux
01:18:06traité de Versailles
01:18:07exactement
01:18:07c'est-à-dire que
01:18:08ce traité de Versailles
01:18:09était en fait
01:18:10un instrument juridique
01:18:12qui pouvait être révisé
01:18:13d'ailleurs
01:18:13et sur bien des aspects
01:18:15finalement on l'a révisé
01:18:16par exemple
01:18:16si on parle
01:18:17de l'occupation
01:18:18de la Rennanie
01:18:20qui était prévue
01:18:20jusqu'en 1935
01:18:22par le jeu
01:18:22de la détente
01:18:23et des négociations
01:18:24entre les Alliés
01:18:25et les Allemands
01:18:26l'évacuation
01:18:27de la Rennanie
01:18:27est décidée
01:18:28dès 1929
01:18:28et elle est réalisée
01:18:30en 1930
01:18:31et est-ce que ce traité de Versailles
01:18:32porte aussi
01:18:33la responsabilité
01:18:34ou une partie
01:18:34de la responsabilité
01:18:35de l'arrivée
01:18:37du fascisme
01:18:38en Italie
01:18:38avec bien sûr
01:18:40Benito Mussolini
01:18:40évidemment en Italie
01:18:41il y a cette idée
01:18:41de la victoire mutilée
01:18:42qui certes
01:18:44favorise le fascisme italien
01:18:46mais ce qu'il faut penser
01:18:47c'est que l'Europe
01:18:48était possible aussi
01:18:49avec des régimes
01:18:50qui n'étaient pas
01:18:50tous démocratiques
01:18:51la société des nations
01:18:51fonctionne aussi
01:18:52avec Mussolini
01:18:54et avec des régimes
01:18:56qui ne sont pas
01:18:56tous démocratiques
01:18:57même si la paix
01:18:57a essayé de faire
01:18:58une Europe démocratique
01:18:59mais très clairement
01:19:00le fait qu'un État
01:19:01n'était pas démocratique
01:19:03n'empêche pas
01:19:03de construire
01:19:04des relations pacifiques
01:19:05ça sera le mot de la fin
01:19:06vraiment un grand merci
01:19:07à tous les trois
01:19:08d'avoir participé
01:19:09à ce débat d'hoc
01:19:09aujourd'hui
01:19:10vos réactions
01:19:10ça sera sur
01:19:11hashtag débat d'hoc
01:19:12merci aussi à Félicité Gavalda
01:19:13Victoria Bédé
01:19:14qui m'ont aidé
01:19:15comme elle a coutumé
01:19:16à préparer cette émission
01:19:17puis moi je vous donne
01:19:18rendez-vous pour un prochain débat d'hoc
01:19:19ça sera bien sûr
01:19:20avec son documentaire
01:19:21et son débat
01:19:22à très bientôt
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