00:00C'est le moment de parler livres et histoires dans votre édition. Avec vous Axel Simon. Bonjour Axel.
00:04Bonjour Antoine.
00:05Axel, aujourd'hui le nouvel essai du politologue et historien français, franco-israélien, pardonnez-moi, Denis Charbi.
00:13Il a paru il y a quelques jours à l'occasion justement de la commémoration au début de semaine de l'assassinat du Premier ministre israélien Yitzhak Rabin.
00:22C'était il y a 30 ans Axel.
00:23Oui, le 4 novembre 1995, un assassinat qui va changer le cours de l'histoire. Celui du Premier ministre Yitzhak Rabin a-t-elle à vivre par l'un de ses concitoyens, un juif religieux extrémiste, opposé au processus de paix bien avancé.
00:38On va d'abord écouter Yitzhak Rabin. C'était le 1er novembre 1995 à Jérusalem, soit trois jours avant son assassinat.
00:46Je crois que si l'on ne résout pas la composante la plus longue et la plus complexe du conflit israélo-arabe, c'est-à-dire le conflit entre les Palestiniens et Israël, il n'y aura pas de paix véritable dans la région.
01:02Et 30 ans après, on le sait, il n'y a pas cette paix véritable dont il parlait.
01:09Et donc voilà le nouveau livre de Denis Charbi qui s'intéresse à cet événement tragique par le prisme de sa mémoire.
01:16Publié aux éditions Jean-Claude Lattès, il s'intitule « Yitzhak Rabin, la paix assassinée ? Une mémoire fragmentée ».
01:24Denis Charbi y analyse les conséquences de cette déflagration du 4 novembre 1995, cette « onde de choc » comme il dit.
01:31Denis Charbi nous dit qu'en tuant Yitzhak Rabin, l'assassin ne tue pas seulement le leader du processus en cours, il barre la route à tout processus ultérieur de paix.
01:41Igalamir, quand il abat Yitzhak Rabin, ce n'est pas une vengeance effectuée après un processus de paix accompli.
01:50C'est un calcul, un calcul politique. Il se dit, en abattant Rabin, Jaba, le leader israélien le plus crédible,
02:00misant sur l'idée que lui a battu tout successeur qu'il y aura, et il y en a eu bien sûr, n'auront pas la trempe, le charisme, la confiance qu'il inspirait aux Israéliens.
02:11Une cause comme la paix, il faut comprendre en Israël, c'est un risque, c'est un pari.
02:15Pour que ça marche, il faut que les citoyens aient le sentiment que le leader qui le fait, il sait où il va.
02:23Rabin, inspirait cette confiance-là.
02:26Une confiance, nous dit Denis Charbi à Axel, qui n'est jamais revenue depuis.
02:31Et la question que pose justement son livre, c'est celle de l'héritage de cette cause depuis 30 ans.
02:36Voilà, c'est ça que déplie Denis Charbi dans son livre.
02:39Il prend la forme d'une enquête sur 30 années de mémoire en Israël.
02:42C'est un livre très resserré, 110 pages seulement et très documenté, qui nous donne à comprendre pas à pas comment cet héritage mémoriel divise aujourd'hui.
02:50La réflexion, elle est structurée en trois parties.
02:53On a d'abord un double rappel historique, le parcours d'Itsa Krabine, et le contexte politique délétère et d'extrême violence au moment de l'assassinat.
03:01Puis vient l'analyse du traumatisme et aussi des hommages dans les jours qui ont suivi le 4 novembre 1995, et puis au fil des années.
03:09Et enfin, les contours si complexes de cet héritage, avec des pages passionnantes, notamment sur la mémoire dite officielle et sur la mémoire dans les écoles.
03:18Denis Charbi explique que c'est une mémoire qui divise politiquement et par conséquent qui peut être instrumentalisée quand elle n'est pas volontairement oubliée ou refoulée.
03:29Il explique pourquoi cette mémoire est fragmentée et divisée.
03:32C'est pas parce qu'il a été assassiné, parce que tout le monde bien sûr le condamne, ça c'est consensuel, mais c'est parce qu'il a été assassiné au nom d'un projet politique qui divise.
03:46Or il faut comprendre, six mois après, mai 1996, c'est son adversaire, Netanyahou, qui est au pouvoir.
03:55Et là, le problème qui se pose, c'est comment on commémore la mémoire d'un premier ministre qui a été assassiné au nom d'un projet politique qui divise.
04:06Et donc c'est une mémoire qui devient en quelque sorte ritualisée, un peu vidée de son sens politique, de son sens militant.
04:14On commémore Rabin, on commémore pas l'héritage d'Oslo.
04:18– Axel, on vient de l'entendre, il y a dans cette analyse des échos évidents avec l'actualité en Israël et celle du conflit israélo-palestinien.
04:26– Absolument, les résonances avec l'actualité sont nombreuses.
04:29Grâce à ces analystes d'historiens et de politologues, on a une réflexion exigeante sur 30 ans d'histoire politique et de mémoire.
04:36Et enfin, connaisseur qu'il est de la société israélienne, il l'observe et l'ausculte sous toutes ses coutures.
04:41Denis Charbi continue dans ce livre à creuser un sillon qui lui est cher depuis trois décennies,
04:48l'analyse des contradictions et des tensions au sein de la société israélienne.
04:52Cette enquête sur la mémoire d'Itsa Krabin est, pour Denis Charbi, une manière d'approcher ses oppositions et ses divisions.
04:59– Les divisions sont multiples.
05:00Les gens, une grande partie, la moitié de la population est originaire de pays d'Europe de l'Est, d'Australie, du Maroc, du Yémen, du Brésil, d'Argentine.
05:10Vous croyez que ça fait des gens uniformes ?
05:12Il y a les divisions religieuses par exemple, non seulement entre musulmans, chrétiens et juifs,
05:17mais également à l'intérieur des juifs, entre les religieux, les orthodoxes, les sionistes religieux,
05:21ceux qui sont laïcs, ceux qui sont athées.
05:23En parlant de la mémoire d'Itsa Krabin et de la division autour de cette mémoire,
05:28j'ai voulu en quelque sorte illustrer l'inanité de cette représentation d'Israël comme un bloc.
05:34Et en lisant les pages de Nisharbi, effectivement, on voit à quel point il est impossible d'avoir une perception monolithique.
05:42On peut aussi recommander la lecture de son essai précédent intitulé « Israël, l'impossible état normal ».
05:48Il met en lumière là aussi les nombreux contrastes de la société israélienne.
05:52Et on ne se quitte pas, Antoine, avant de recommander également un film pour les cinéphiles sur ce sujet.
05:57Impossible de ne pas voir le film passionnant d'Amos Gitaï intitulé « Le dernier jour » d'Itsa Krabin qui date de 2015, je crois.
06:04— Merci beaucoup, Axel, pour cet éclairage et vos recommandations sur cette mort de l'Itsa Krabin
06:10qui a changé la vie politique et plus largement géopolitique au Moyen-Orient.
06:14Encore merci, Axel.
06:15Voilà. Paris Direct, c'est fini pour aujourd'hui. Mais restez avec nous.
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