Skip to playerSkip to main content
  • 6 hours ago

Category

🗞
News
Transcript
00:00Musique
00:00C'était il y a 10 ans, au lendemain des attentats du 13 novembre 2015 à Paris,
00:20le nom de Molenbeek entré dans l'actualité.
00:24C'est de ce quartier de Bruxelles que venaient plusieurs des terroristes,
00:27c'est à Molenbeek que sera interpellé Salah Abdeslam, le seul survivant du commando.
00:33Sur les écrans, dans les journaux du monde entier,
00:35la commune de Molenbeek-Saint-Jean devient synonyme d'islam radical et d'exclusion sociale.
00:42Dix ans plus tard, Molenbeek tente de tourner la page,
00:45la commune la plus densément peuplée de Belgique,
00:48où cohabite près de 100 nationalités différentes,
00:51a même tenté cette année de décrocher le titre de capitale européenne de la culture en 2030.
00:56Et au-delà des déclarations d'intention, qu'est-ce qui a réellement changé à Molenbeek ?
01:01Les politiques de prévention contre la radicalisation ont-elles porté leurs fruits ?
01:06Comment les habitants, souvent stigmatisés, ont-ils vécu cette décennie sous les projecteurs ?
01:12Vier retour à Molenbeek, c'est un reportage d'Alix Le Bourdeau.
01:14La quasi-totalité des terroristes vivait ici, en Belgique, et plus précisément,
01:25à Molenbeek, épicentre de l'islamisme radical en Belgique.
01:28L'enquête se concentre sur cette commune bruxelloise de Molenbeek.
01:32Il y a dix ans, cette place est devenue le centre de l'attention médiatique du monde entier.
01:39Le 13 novembre 2015, les attentats de Paris font 130 morts et plus de 400 blessés.
01:45Parmi les assaillants terroristes, plusieurs sont originaires de Molenbeek, où ont fréquenté la commune.
01:50Lorsqu'on dit qu'un de vos enfants ou quelqu'un que vous connaissez a commis un acte horrible,
01:57c'est d'abord l'assidération, on se dit que ce n'est pas possible.
02:01Au fil des heures pourtant, ce comédien de profession travaillant à Molenbeek doit se rendre à l'évidence.
02:07D'autant qu'après les attaques, le seul survivant du commando djihadiste parvient à prendre la fuite vers la Belgique.
02:13Aujourd'hui, lorsqu'il passe devant la maison où Salah Abdeslam a vécu, Ben Hamidou a toujours une pensée pour les victimes.
02:20Personne n'est préparé à ce type d'acte immonde et innommable à cette tragédie.
02:30Personne ne se doutait que des terroristes partaient de Molenbeek pour commettre effectivement cet acte-là à Paris.
02:40C'est là qu'on se demande, qu'on se pose la question par rapport au travail d'artiste.
02:45Quelle est la place de l'art ? Lorsqu'il y a des moments de tragédie parfois.
02:51Avant même les attentats, le comédien était engagé dans cette compagnie dont le but est de démocratiser la culture.
03:09Les spectacles ont lieu sous ce chapiteau, qui se déplace de quartier en quartier à Bruxelles.
03:13Le 18 mars 2016, lorsque Salah Abdeslam est arrêté à Molenbeek après quatre mois de cavale,
03:20les comédiens étaient en pleine représentation, à quelques minutes du lieu de l'opération policière.
03:26On a entendu des détonations et puis nous on a continué à jouer, on l'a su après qu'il s'est fait arrêter.
03:32Et donc le jour d'après, la bourgmestre à l'époque avait décidé de tout arrêter.
03:37Eh bien nous on voulait que la culture continue, que les gens puissent continuer à vivre, à espérer.
03:42Et donc on a continué à jouer.
03:44Des talents comme Ben, Molenbeek en regorge.
03:47Résultat, dix ans après les attentats, la commune s'est lancée, un défi de taille.
03:58L'objectif, c'est quoi ?
04:00C'est que Molenbeek soit capitale européenne de la culture.
04:06Est-ce qu'on mérite ce titre de capitale européenne de la culture ?
04:09Mais ça ne va pas être facile.
04:13Madame, Molenbeek c'est les meilleurs.
04:15Molenbeek c'est les meilleurs.
04:16Fatima Zibou mène ce projet audacieux tambour battant.
04:22C'est un projet qui est complètement fou.
04:25Que Molenbeek ait cette idée de devenir capitale européenne de la culture.
04:28Oui, parce qu'on sait que Molenbeek souffre d'une image assez négative à l'étranger.
04:34Beaucoup de gens connaissent Molenbeek, mais ils ne connaissent pas Molenbeek pour de bonnes raisons.
04:39Départ à pied de la place communale, direction les instances européennes pour remettre le dossier de candidature.
04:44La parade attire quelques regards curieux et des messages bienveillants d'habitants d'autres quartiers qui tranchent avec la violence de certains commentaires sur les réseaux sociaux.
04:55Je serais ravie qu'en effet les habitants de la commune puissent se sentir valorisés, qu'on puisse parler d'eux un peu d'une autre manière.
05:01Molenbeek n'apparaît que négativement dans l'actualité.
05:13Ce serait donc positif de montrer que ce sont des gens comme vous et moi.
05:18Ils n'ont pas choisi qu'il y ait autant de violence dans leur commune.
05:21Une violence à laquelle les Molenbeekois préfèrent ne pas penser aujourd'hui, alors que l'euphorie les gagne.
05:34Dans ce dossier, un plaidoyer en faveur de la commune et de ses atouts culturels.
05:39De quitter Molenbeek, traverser le canal et arriver jusqu'à la gare du Nord pour remettre cette candidature qui a été portée vraiment par les forces vives molenbekoises.
05:53En fait, on va gagner. Il n'y a pas de choix. On gagne. On a déjà gagné en fait.
05:58Pour nous, en tant qu'autorité communale, c'est aussi une revanche par rapport à cette image un peu négative de Molenbeek.
06:04Difficile cependant de faire oublier la réputation de la commune bruxelloise.
06:12Avant même les attentats de Paris, plusieurs affaires d'attaque djihadistes avaient un lien avec ce quartier populaire.
06:19Mohamed Fami conseille les autorités en matière de contre-terrorisme.
06:23Dix ans après, il estime que l'influence des réseaux salafistes et liés aux frères musulmans est encore bien réelle dans des communes comme Molenbeek ou sa voisine Scarbeek.
06:32Ces deux courants de l'islamisme essayent de recruter un maximum de musulmans d'Europe dans ces deux communes.
06:41Le travail de fond ne doit pas être fait au niveau sécuritaire. Il doit être fait au niveau socio-éducatif, par exemple.
06:47Et dans un contexte de rigueur budgétaire, on observe parfois un relâchement au niveau des politiques publiques.
06:55Autre inquiétude, les nouveaux profils de djihadistes. En deux ans, le nombre de dossiers impliquant des mineurs a doublé.
07:05Ce sont surtout des personnes auto-formées en ligne qui vont parfois naïvement, parfois consciemment diffuser sur leur propre compte Instagram, TikTok, des contenus propagandistes.
07:16Aller à la rencontre des jeunes de milieux défavorisés, c'est justement le but de cette association.
07:24Aujourd'hui, cette petite caravane mobile s'installe près de la zone des étangs noirs.
07:29Un quartier pauvre, terreau idéal pour des recruteurs islamistes.
07:33Mais ce qui occupe avant tout cette association, c'est le décrochage scolaire.
07:37En Belgique, la région de Bruxelles est la plus touchée et les chiffres sont en augmentation.
07:42Pour tenter de repérer les cas critiques, l'équipe s'appuie sur ces pancartes.
07:48L'idée, c'est vraiment d'aller questionner le public qui vient vers nous, qui va s'arrêter devant ces pancartes.
07:55Des mantras de développement personnel, des jeux vidéo pour attirer les plus jeunes et surtout un punching ball.
08:01Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix.
08:07Ouais, ouais, tu gères.
08:10Quoi, t'aimes pas l'école ?
08:11Non, attends, attends, attends, attends, ça m'intéresse.
08:13T'aimes pas l'école ?
08:14Qu'est-ce que t'aimes pas l'école ?
08:15Je sais pas, ils parlent trop et tout, j'aime pas.
08:18Sur ce punching ball, si tu regardes de près, tu peux voir qu'il a mis des indications dessus,
08:25comme sport, famille, jeux, école, police, rue.
08:32Et alors, on peut, à travers le jeu, créer du dialogue, parce que tu te rends compte, par exemple,
08:38qu'un jeune va taper très fort dans le travail, quand tu vas lui poser la question,
08:41mais tiens, pourquoi tu tapes très fort dans le travail ?
08:43Moi, l'école, j'aime pas l'école.
08:52Salut, ça va ?
08:53Les autorités locales sont les premières à soutenir la candidature de Molenbeek à la capitale européenne de la culture,
09:00un titre susceptible d'apporter des fonds à la commune, l'une des plus pauvres de Belgique.
09:05Alors, comment ça va ?
09:06Alors, ça ?
09:07Issu de la diaspora albanaise, ce natif de Molenbeek remplace la bourgmestre élue, absente depuis plusieurs mois.
09:16Le futur bourgmestre de Molenbeek.
09:18Actuel bourgmestre en fonction.
09:20Il est devenue le parti ?
09:21PS, c'est les meilleurs, après moi.
09:26À la tête de la commune jusqu'en 2012, un autre socialiste, Philippe Mouraud,
09:31avait été accusé après les attentats de Paris de clientélisme à l'égard de la communauté marocaine,
09:36très importante à Molenbeek.
09:38Des reproches rejetés par l'actuel bourgmestre.
09:41La politique qui a été menée pendant le temps où Philippe Mouraud était là, c'était une politique d'accueil,
09:47une politique qui allait au, on va dire, au cœur des problèmes socio-économiques,
09:54qui sont aujourd'hui les populations qui sont frappées de plein fouet par les différentes crises économiques.
10:01C'est toujours aussi les personnes d'origine étrangère avec la discrimination,
10:05avec des phénomènes qui, on va dire, qui font qu'il y a une population qui est fragilisée au niveau socio-économique.
10:13Mais ce n'est pas question de, on va dire, de clientélisme.
10:18Après des mois de travail, le jour du verdict est arrivé pour Fatima Zibou et son équipe.
10:29Dans quelques minutes, elle va savoir si Molenbeek a réussi son pari.
10:32La joie des uns fait la déception des autres.
10:49Mais Fatima Zibou se veut combative.
10:53Et on va continuer ? Parce que la population de Molenbeek le mérite, elle en a besoin.
11:00Et c'est pour elle qu'on va continuer à se battre, n'est-ce pas ?
11:02Oui. Et on va continuer ? D'accord ? Dans tous les cas.
11:07Mais le bourgmestre ne cache pas son dépit.
11:10Avec ce titre, s'envole la promesse d'un avenir immédiat meilleur pour la population.
11:15Cet endroit ici, ça aurait été le centre, en fait, de Molenbeek 2030.
11:21De la part des personnes du jury, c'est qu'ils voulaient, en fait, quelque chose de plus carré.
11:27Et donc, ils ont été dans une ville qui a moitié moins de monde, moins de population que Molenbeek,
11:33où les moyens financiers existent, où la population est beaucoup plus aisée.
11:39C'est un manque de vision déconcertant de la part de ce jury qui aurait pu, en fait,
11:44miser sur quelque chose qui aurait permis d'apporter des solutions dans une commune qui en a vraiment besoin.
11:52La culture, pour contrer les nombreux mécanismes de recrutement à l'œuvre à Molenbeek,
11:58de la part des réseaux islamistes, mais aussi des gangs de la drogue.
12:02C'est la même chose qui est utilisée pour le radicalisme religieux,
12:05mais c'est aussi utilisé par les réseaux criminels qui viennent recruter.
12:10Donc, pour recruter, il faut aller là où il y a une fragilité socio-économique,
12:15parce que la propension, on va dire, à être influencée est plus grande
12:20lorsqu'on a affaire à un public qui est fragilisé.
12:24Nous retrouvons Mouna, toujours en lutte contre le décrochage.
12:45Elle encadre ici un groupe de jeunes adultes inactifs,
12:47dont beaucoup préfèrent ne pas montrer leur visage.
12:54Moi, cette musique, elle me touche particulièrement parce que le suicide,
13:01j'y ai pensé à une période dans ma vie, quand j'étais beaucoup plus jeune.
13:06C'est important de comprendre que, comme on peut se soigner le corps
13:13quand on est malade, quand on ne va pas bien, il faut se soigner aussi.
13:17C'est la première fois qu'elle inclut un atelier sur la santé mentale dans ses formations.
13:26Mais les chiffres ont fini par la convaincre.
13:29Depuis 2019, le suicide représente en Belgique la première cause de décès
13:33chez les 15-45 ans.
13:35Dans ce groupe, les paroles de Stromae résonnent.
13:38Il arrive à mettre des mots sur ce que je n'arrivais pas à formuler, moi.
13:47Donc, ça m'a aidée à comprendre certaines choses,
13:51même s'il a fallu du temps pour remonter la réponse.
13:55Objectivement, le suicide, c'est peut-être la seule réponse tangible.
14:01On peut trouver l'absurdité de la vie, en vrai.
14:03Mouna en est convaincue.
14:07La santé mentale doit être au cœur des politiques de prévention,
14:10particulièrement dans des quartiers défavorisés, comme Molenbeek.
14:16Ces jeunes-là, à cette époque-là, il y a 10 ans,
14:21peut-être bien que si on leur avait donné la place, on les avait écoutés,
14:23on les avait peut-être reconnus dans ce qu'ils sont ici, chez nous.
14:28Peut-être qu'on aurait pu éviter certaines choses.
14:30Je ne dis pas qu'on aurait pu tout éviter, mais peut-être.
14:32En attendant, ils ont été vus et reconnus par un autre groupe
14:35qui n'était pas forcément bienveillant.
14:38Ils se sont fait embrigader dans quelque chose
14:40dans lequel peut-être ils ne seraient jamais allés
14:43s'il y avait eu une autre approche ici.
14:49Encadrer, accompagner et prévenir,
14:52pour ne jamais oublier l'horreur de ce qui s'est passé à Paris,
14:55il y a 10 ans.
Be the first to comment
Add your comment

Recommended