00:00Peut-être qu'un jour on arrivera à les faire rouler à droite les Anglais.
00:03En attendant, nous on continue de rouler à droite, alors ça fait une jolie transition avec notre invité.
00:08On va parler des Français et de leur voiture, une histoire d'amour, on peut dire ça comme ça, mais une histoire d'amour en crise.
00:15Bonjour à vous, Jean-Rémi Macchia, vous êtes journaliste automobile, vous connaissez parfaitement les comportements des conducteurs que vous décryptez depuis des dizaines d'années,
00:24enfin des dizaines d'années, des centaines d'années, des centaines d'années.
00:27Un rapport du Sénat tire la sonnette d'alarme sur l'avenir de la filière auto, il parle du plus grand suicide industriel de l'histoire française.
00:37En même temps, on n'a jamais eu autant de voitures, les Français sont 85% à avoir à minima une voiture par foyer.
00:46Comment comprendre cela ? Une histoire d'amour mais en crise.
00:49Alors c'est vrai, les sénateurs ont malheureusement raison, on est au bord de la rupture du point de vue de l'industrie automobile française.
00:55Ce n'est pas propre à l'industrie automobile française, c'est vrai pour toute l'industrie automobile européenne.
01:01D'un côté, il y a le but poursuivi d'avoir 100% en vente de voitures thermiques à l'horizon 2035.
01:09Et d'un autre côté, il y a...
01:11Pardon, de voitures électriques bien sûr, avec interdiction des voitures à moteur classique, moteur thermique.
01:16Et d'un autre côté, il y a la concurrence chinoise qui n'existait pas il y a encore une dizaine d'années ou même cinq ans,
01:21qui arrivent et qui déferlent.
01:23Pendant que nous allons vers une transition pour la voiture électrique, qu'est-ce qui se passe ?
01:29Les constructeurs sont obligés de doubler leurs efforts et leurs investissements,
01:32en investissant bien sûr sur l'électrique, qui demande très massivement, très très massivement,
01:38beaucoup de dépenses, et ils continuent à produire des voitures thermiques.
01:42En gros, ils doublent leurs investissements pour avoir deux gammes en parallèle,
01:46parce que la transition ne se fait pas d'un claquement de doigts à 100% du jour au lendemain.
01:51Donc, doublement des frais, doublement des investissements,
01:56et d'un autre côté, moins de possibilités de les rentabiliser,
01:59puisque, en raison du ralentissement des ventes en Europe et particulièrement en France,
02:05eh bien, moins de voitures sont vendues et qu'il y a la concurrence qui arrive des voitures chinoises
02:10qui grignotent autant de parts de marché qui avant étaient dévolues aux voitures européennes et françaises.
02:15Et puis, la voiture, c'est aussi, aujourd'hui, un objet de tension.
02:18Alors, les citadins s'en passent plus facilement, c'est certain,
02:21mais pour ceux qui vivent au-delà du périph' ou qui vivent en dehors des grandes villes,
02:25la voiture est une absolue nécessité, et ils sont souvent pointés du doigt, culpabilisés.
02:29Comment le vivent-ils, ça ?
02:31Alors, il n'y a aucune raison de culpabiliser les gens qui, simplement, ont besoin d'une voiture.
02:35La majorité des Français vivent dans des endroits qui ne s'appellent pas Paris-Intramuros,
02:40qui ne s'appellent pas Lyon-Intramuros ou Marseille-Intramuros,
02:43où il n'y a pas de transports en commun.
02:45Et donc, manifestement, pour se déplacer, ils ont besoin de moyens de transport individuels.
02:50Ça s'appelle la voiture dans 95% des cas.
02:53Bien sûr, on peut prendre un vélo ou une trottinette,
02:55mais si on a 30 kilomètres à faire pour se rendre à son travail,
02:58ça me semble un peu osé, un peu compliqué.
03:00Mais pourtant, ça a un coût, cette voiture.
03:02Carburant, entretien, assurance, on a le sentiment que se déplacer, ça devient un luxe.
03:06Est-ce qu'on peut encore parler de voitures populaires ?
03:09On se souvient d'Emmanuel Macron, lors d'une interview télévisée,
03:12qui avait dit qu'en France, on aime la bagnole et moi, je l'adore.
03:16Alors, on peut aimer la voiture et trouver qu'elle coûte très cher.
03:20Ce n'est pas antinomique.
03:21Effectivement, acheter une voiture revient de plus en plus cher,
03:24parce que ces dernières années, depuis 5 ans, depuis en gros la crise du Covid,
03:28les petites voitures en particulier ont énormément augmenté de prix,
03:32alors que les petites voitures économiques sont celles qui sont achetées à l'état neuf
03:36par des foyers à revenus relativement modestes.
03:39Ce sont elles qui ont eu, en pourcentage, la plus forte augmentation.
03:43Donc, effectivement, il y a l'accroissement du prix d'achat.
03:46Enfin, du point de vue des postes de dépense liés à l'utilisation, l'assurance, le carburant,
03:51la tendance est aussi à la hausse.
03:53Ce sont des postes de dépense qui ont davantage augmenté que l'inflation.
03:57Donc, effectivement, acheter, puis détenir et utiliser une voiture coûte de plus en plus cher.
04:02Est-ce qu'il y a des solutions qui existent aujourd'hui pour réduire cette inégalité d'accès à la mobilité
04:07et, au passage, relancer l'industrie automobile ?
04:10Il n'y a pas de solution magique.
04:11En claquant des doigts, on ne va pas trouver une solution miraculeuse.
04:14Les sénateurs proposent d'augmenter, par exemple, les droits de voie sur l'importation des voitures chinoises.
04:19Oui.
04:19Alors, on peut trouver des palliatifs à des comportements de vente qui sont un peu excessifs
04:25et qui sont extrêmement déloyaux par rapport aux règles que nous connaissons en Europe occidentale de concurrence.
04:33Effectivement, si les voitures chinoises sont aussi peu chères,
04:37ce n'est pas seulement parce qu'elles sont fabriquées dans des conditions économiques favorables
04:40avec une main-d'œuvre beaucoup moins chère en Chine qu'en Europe, ça c'est vrai,
04:44mais c'est aussi parce que le gouvernement chinois subventionne énormément la conception et la fabrication de ces voitures.
04:51On est un peu négatif aujourd'hui, mais il y a aussi quelques aspects positifs concernant l'automobile.
04:56Un signe, par exemple, qui montre que les Français ne sont pas tout à fait prêts de lâcher le volant.
04:59Les candidats au permis de conduire sont chaque année plus nombreux que ceux du baccalauréat.
05:03C'est donc pas tout à fait terminé, la voiture et les Français ?
05:06Oui, encore une fois, il y a des tas de gens qui, en France, ont besoin de leur voiture pour se déplacer, tout simplement.
05:11Il y a des tas de métiers dans lesquels vous n'entrez pas si vous n'avez pas un permis de conduire, et c'est logique.
05:15De plus en plus de jeunes qui conduisent, de plus en plus de personnes plus âgées,
05:18puisque les plus de 75 ans, vraiment, ne lâchent pas le volant.
05:21J'ai trouvé des statistiques là-dessus.
05:23Et puis, un grand engouement pour ces nouvelles voitures, version nostalgie.
05:28Oui, on a vu le retour de la R5, ou de la 2 chevaux, mais version 2025.
05:33Ça ressemble un petit peu à autre chose.
05:36Merci, Jean-Éric Macchia.
05:37D'avoir été avec nous ce matin, vous voulez ajouter quelque chose ?
05:40Oui, la tendance rétro, effectivement, ça se constate du point de vue des voitures
05:44qui sont des relooking de voitures anciennes, comme typiquement les Renault 4 et Renault 5.
05:49Mais il y a aussi le goût pour ce qu'on appelle les young timers,
05:51c'est-à-dire ces voitures qui ne sont pas encore complètement classiques et anciennes,
05:54qui ont entre 10 et 30 ans, et pour lesquelles il y a un véritable engouement,
05:58y compris de classes très jeunes.
06:00Il y a beaucoup de jeunes aujourd'hui, entre 18 et 35 ans,
06:04qui adorent les young timers, ces voitures de 15 à 30 ans.
06:06La voiture n'est pas morte. Vous êtes venu comment, ce matin ?
06:09Je suis venu en voiture.
06:11Le contraire m'aurait étonné.
06:12Merci, Jean-Éric Macchia.
06:13Tiens, la une du Parisien.
06:14Dans l'actu également, la voiture, elle est française, ça roule toujours.
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