Passer au playerPasser au contenu principal
  • il y a 3 jours
Retrouvez les émissions en intégralité sur https://www.france.tv/france-2/telematin/toutes-les-videos/
Télématin reçoit le constitutionnaliste et maître de conférence en droit public Benjamin Morel pour décrypter la nouvelle nomination de Sébastien Lecornu à Matignon.

Catégorie

📺
TV
Transcription
00:00On prend les mèmes et on recommence.
00:02Coup de théâtre hier soir avec la re-nomination de Sébastien Lecornu à nouveau à Matignon.
00:08Manque d'inspiration ou continuité assumée ?
00:11Et maintenant, quelles conséquences ?
00:12On en parle avec notre invité Benjamin Morel.
00:15Bonjour.
00:16Bienvenue à vous.
00:16Vous êtes politologue, maître de conférences en droit public.
00:19Est-ce que d'abord ça vous a surpris cette annonce ?
00:22Au moment où elle est tombée, elle est tombée assez tard hier soir.
00:24Bizarrement non.
00:25Le sentiment ça a été tout ça pour ça parce qu'en fait c'était le nom qu'on avait la veille.
00:28Mais depuis on avait eu une note quand même et une invitation au chef de parti
00:32qui les conduisait à arriver ce jour-là à l'Elysée.
00:34On avait eu ces deux heures et demie de réunion.
00:36Et finalement on a attendu le nom du Premier ministre jusqu'à 22h.
00:39Et donc on s'est dit peut-être en effet le président a-t-il changé de scénario d'avis ?
00:43Et bien visiblement non.
00:45Juste peut-être, pourquoi avoir accepté la démission de Sébastien Lecornu
00:48si c'est pour le renommer cinq jours plus tard ?
00:51Alors il y a une réponse technique et une réponse politique.
00:52Dès le moment où le gouvernement partait en capilotade,
00:54où Bruno Retailleau partait etc.
00:56vous déposez la démission de votre gouvernement.
00:58Et ensuite vous pouvez être renommé derrière.
01:00Quand on parle de grand remaniement ministériel,
01:02c'est ce qui se passe d'où les gouvernements.
01:03Borne 1, Borne 1, Fillon 1, Fillon 2 etc.
01:06Donc ça c'est plutôt classique.
01:08En revanche là on a un Premier ministre qui était extrêmement affaibli.
01:12Qui n'était pas parvenu à construire de majorité pendant 26 jours.
01:15Et donc le fait de le renommer,
01:17alors que ce qui avait été contesté y compris dans les rangs de la majorité,
01:20c'était qu'il était trop proche du chef de l'État.
01:23Ça c'était quelque chose qui était tout sauf évident.
01:25Et en effet, à ce moment-là le renommer est la preuve d'un choix politique
01:29qui est possible, mais reste quand même ce matin discuté.
01:33Et beaucoup de Français d'ailleurs parmi ceux qui nous regardent
01:35ne vont sans doute pas le comprendre.
01:37Et ça ce n'est pas un commentaire politique.
01:38Il y a cinq jours, Sébastien Lecornu démissionnait.
01:41Il disait qu'il n'avait pas les moyens de mener son action.
01:43Comment expliquer cinq jours plus tard,
01:45alors que manifestement pas grand-chose n'a changé,
01:47que lui peut désormais mener cette action ?
01:50Comment on va le justifier ça ?
01:51Alors ça va être la grande question en réalité,
01:53parce que derrière il y a des pactes, des discussions, etc.
01:57pour solidifier le socle commun, qui n'a plus grand-chose d'un socle
02:00et qui est encore moins commun,
02:01pour essayer de dealer avec les socialistes un pacte de non-censure.
02:05Tout ça, entre guillemets, a été en cours hier.
02:07Et donc ça peut peut-être, potentiellement, éventuellement,
02:10avec de la chance, tenir.
02:11Ça fait beaucoup d'adverbes.
02:12Peut-être, éventuellement, potentiellement.
02:14Tout est dans l'adverbe.
02:15Et là, vous avez vu qu'il y en avait plusieurs.
02:17Donc on verra si on a encore un gouvernement la semaine prochaine.
02:19En tout cas, en effet, pour arriver à faire comprendre ça à la population
02:22et derrière, aux électeurs socialistes, LR,
02:26qui vont quand même faire pression sur leur groupe politique,
02:28ça va être un vrai sujet et un vrai enjeu.
02:30Sébastien Lecornu, il a les avantages de ses défauts, d'une certaine façon.
02:34Son avantage, c'est qu'il est proche du chef de l'État.
02:36Et que donc, il peut négocier avec lui.
02:37Le moindre soldat, il peut négocier avec lui
02:39et probablement arracher de lui-même des concessions.
02:43Là, il dit avoir carte blanche.
02:44Enfin, Emmanuel Macron dit lui donner carte blanche.
02:47Et ces concessions, elles sont nécessaires
02:48si vous voulez ramener les socialistes à bord, notamment.
02:51Le problème, c'est que c'est également un proche du chef de l'État.
02:54Parce qu'en étant un proche du chef de l'État,
02:55il apparaît comme en lien direct avec l'Élysée.
02:58Et ça, soutenir quelqu'un de très proche de l'Élysée,
03:01c'est quelque chose qu'avait exclu les LR,
03:02qu'avait exclu les socialistes
03:03et qu'on avait même exclu au sein du socle commun de la Macronie.
03:06Vous voyez des personnes comme Gabriel Attal,
03:09vous voyez des personnes comme Agnès Pagny-Runacher
03:10qui disaient, en fait, non,
03:13on ne veut pas d'un macroniste à Matignon.
03:14C'était bizarre, mais ça se comprenait dans le contexte.
03:17Finalement, c'est le premier des macronistes,
03:19celui qui avait démissionné,
03:20qui se retrouve aujourd'hui à Matignon.
03:22Et dans ces conditions, avec les réactions,
03:24notamment côté Rassemblement National,
03:26on parle de honte démocratique chez LFI,
03:28de bras d'honneur français,
03:29comment éviter la censure ?
03:32Il y a deux groupes sur lesquels ça tient.
03:34Le groupe LR et le groupe PS.
03:36Le groupe LR, il est acquis parce qu'en fait,
03:38hier, les députés LR se sont réunis,
03:40ils ont dit on participe au gouvernement.
03:41Donc ce faisant, quand vous avez des membres à vous
03:43dans le gouvernement,
03:44vous n'allez pas le faire tomber.
03:45Même si Bruno Retailleau semble désormais défavorable
03:48au fait de participer au gouvernement ?
03:50Oui, mais s'il a été défavorable,
03:52ils ont voté quasiment à l'unanimité hier
03:54pour rentrer tout de même.
03:55Donc on voit qu'il y a un jeu qui se joue
03:57entre Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez,
03:59et que cette manche-là,
04:00elle est plutôt gagnée par le camp Wauquiez.
04:01Ce qui est paradoxal parce que Laurent Wauquiez
04:03voulait sortir du gouvernement il y a une semaine.
04:04Mais si les Français nous suivent encore
04:06sur cette jeu très politicienne,
04:08que nous-mêmes, il faut être clair,
04:10nous avons parfois du mal à suivre
04:11dans les tergiversations,
04:13eh bien on en est là aujourd'hui.
04:14Le vrai groupe charnière maintenant,
04:17c'est le groupe PS.
04:18Et ce groupe socialiste,
04:19eh bien il est dans une position compliquée
04:21parce que le reste de la gauche
04:22ne veut pas entendre parler
04:23d'un gouvernement Sébastien Lecornu,
04:25parce qu'une partie de son électorat
04:27risque de se sentir quelque peu offusqué.
04:29Et donc il va falloir lui faire
04:30un gros, gros, mais très gros cadeau
04:32pour qu'il ne censure pas.
04:34Sachant que même si le groupe
04:35décide de ne pas censurer,
04:36il suffit que 23 députés socialistes,
04:39sur la petite soixantaine de députés actuels,
04:41décident de censurer pour que ça tombe.
04:42Donc il faut qu'il soit unanime.
04:43Le gros, gros cadeau,
04:44c'est suspension pure et simple
04:47de la réforme de retraite,
04:48visiblement, sinon ce sera censure.
04:50Exactement.
04:51C'est la suspension de la réforme de retraite
04:52parce que c'est très identitaire
04:54pour l'ensemble des gauches
04:54et que si les socialistes obtiennent ça,
04:56ils sont persuadés qu'au fond,
04:58tout le monde à gauche
04:59ne pourra que leur rendre grâce
05:01d'avoir arraché ça.
05:02Le problème, c'est que c'est identitaire
05:03pour d'autres groupes politiques,
05:05notamment Édouard Philippe,
05:06Horizon, qui hier a freiné les négociations.
05:08Si on a eu un Premier ministre aussi tard,
05:09c'est en partie à cause de ça.
05:11Parce qu'Édouard Philippe, pour 2027,
05:13il n'a échappé à personne
05:15qui voulait devenir président,
05:16pense construire sa candidature
05:18sur la crédibilité économique.
05:20Et donc si vous lâchez là-dessus,
05:21ça s'oppose.
05:22Un dernier mot sur Emmanuel Macron,
05:24critiqué jusque dans son propre camp.
05:27Est-ce qu'il est un homme seul désormais ?
05:30Il est un homme très affaibli, en effet.
05:32Et le président de la Ve République
05:33n'a pas autant de pouvoir
05:34qu'on peut le penser
05:35quand on regarde ça
05:36de manière un peu macro.
05:37Le président de la République,
05:38il n'a du pouvoir
05:39que quand il a une majorité.
05:40Aujourd'hui, même ceux qui naguèrent
05:42se disaient macronistes,
05:43les Renaissance,
05:44les philippistes, etc.,
05:45sont dans une position
05:46d'opposition larvée, en réalité.
05:48Édouard Philippe demande la démission.
05:50Vous avez un Gabriel Attal
05:51qui n'a cessé de dire cette semaine
05:52combien de distances
05:53le séparait du chef de l'État.
05:55Cette situation fait
05:56qu'Emmanuel Macron
05:56n'a jamais été aussi seul
05:58et qu'on n'a probablement jamais eu
06:00sous la Ve République
06:01un président aussi isolé.
06:03Merci Benjamin Morel.
06:04Merci à vous.
06:04On rappelle que vous êtes
06:05politologue,
06:06maître de conférences
06:07en droit public.
06:08Merci à vous.
06:10Merci à vous.
06:11Merci à vous.
Écris le tout premier commentaire
Ajoute ton commentaire

Recommandations