Un député peut-il faire plier l'homme le plus riche du monde? C'est en tout cas l'objectif d'Eric Bothorel... Dans son viseur: Elon Musk et son réseau social X. Député des Côtes d'Armor, il siège au groupe Ensemble pour la République.
00:00Un député peut-il faire plier l'homme le plus riche du monde ?
00:04C'est en tout cas l'objectif de mon invité dans son viseur Elon Musk et son réseau social X.
00:10Député des Côtes d'Armor, mon invité siège au groupe Ensemble pour la République.
00:28Bonjour Eric Bottorel.
00:29Bonjour Clément.
00:30Alors il y a des députés un peu rock'n'roll à l'Assemblée, en général on les repère assez vite.
00:34Mais alors vous, je ne vous aurais pas placé naturellement dans cette catégorie et pourtant je suis tombé sur une archive assez étonnante.
00:40On va la regarder ensemble.
00:41Alors expliquez-nous, qu'est-ce que c'est que ça ?
01:05Ça c'est un bon moment.
01:07C'est issu d'échanges avec des confrères qui avaient découvert que j'avais parmi d'autres passions, celle de la musique et notamment du hard rock.
01:16Et ils m'avaient dit comme ça à la député, mais tu crois qu'un groupe de rock à l'Assemblée nationale c'est possible ?
01:21Parce que j'ai cru comprendre qu'il y avait ici un bassiste.
01:22Je dis écoute, on peut en parler, mais on en parle ensemble.
01:27Et c'est comme ça que les choses se sont faites.
01:29Il avait un nom ce groupe ?
01:30Non, non, d'abord le groupe, il n'a été que l'espace à un moment, c'est un bœuf qui a été fait.
01:36Tout le monde avait répété dans son coin.
01:38Il ne faut pas croire qu'il y avait une préparation d'une tournée.
01:41On s'était mis d'accord sur un titre avec les acteurs qui sont ici.
01:44Présentez-les nous.
01:45Vous avez Adrien Quatenas à la batterie, vous avez mon ami Collègue Chalumeau à la basse,
01:52vous avez Pierre-Alain Raffan à la guitare, guitare solo.
01:56Moi j'occupe la partie rythmique derrière.
01:59Et puis vous aviez Pascal Fontenelle qui avait été candidate à l'Eurovision.
02:03C'est vrai, on l'a reçu dans l'émission Émoi et moi il y a quelques années et elle nous avait parlé de ça.
02:07Et moi je l'ai découvert à ce point-là.
02:09Et vous avez la conseillère communication de Jean-Luc Mélenchon.
02:12On avait fait quelque chose, oui déjà à l'époque c'était assez transpartisan, la musique transpartisan.
02:16Mais c'était ça ma question d'après.
02:18Est-ce que les clivages politiques peuvent tomber grâce à la musique, grâce au rock ?
02:23C'est quelque chose...
02:24Oui, possiblement d'abord et pas uniquement dans le rock.
02:28Je dois pouvoir concéder qu'ici dans cette maison,
02:31il peut m'arriver d'avoir des échanges avec des gens qui ne sont pas de mon groupe politique.
02:34Des échanges qui sont extra-professionnels ou même professionnels.
02:37On arrive à travailler ensemble si on considère qu'effectivement l'activité professionnelle,
02:41c'est l'activité parlementaire.
02:43On travaille, heureusement, dans le moment qui est le nôtre.
02:47Il ne faut pas nourrir totalement les Français.
02:49Ça, ça date un petit peu, c'était fin 2021.
02:52Oui, mais c'était hier.
02:53Est-ce que le climat politique aujourd'hui rendrait encore ça possible ?
02:57Jouer dans un groupe avec un député LFI quand on est de...
03:01Oui, je veux le croire.
03:03Je veux le croire.
03:04Il s'est passé le 7 octobre, il s'est passé des choses depuis.
03:06Oui, mais si d'aventure tout ça n'était plus jamais possible,
03:11alors nous aurions basculé définitivement dans un monde
03:14qui n'est pas l'autre monde que l'on souhaitait quand on a chanté ça.
03:17J'ai une autre question, c'est que sur les 5 députés qui sont présents dans ce groupe,
03:20vous êtes le seul à être encore aujourd'hui élu.
03:22Alors on dit que les rockeurs ne font pas de vieux os.
03:24Ils ne font pas non plus de longue carrière politique, visiblement.
03:27Oui, je ne sais pas si c'est lié au fait qu'on ait joué ensemble.
03:32En tout cas, effectivement, je fais partie des survivants de ce groupe.
03:36Alors on décrit souvent les rockeurs comme des rebelles.
03:39Il se trouve qu'en politique, vous avez justement un côté un peu rebelle.
03:42Vous n'hésitez pas à voter à contre-courant de votre famille politique.
03:45Vous l'avez fait ces dernières années à plusieurs reprises,
03:48mais sur des textes assez structurants, assez importants,
03:51sur la loi immigration, par exemple en 2023,
03:53plus récemment sur la loi Duplon.
03:55Vous avez l'âme d'un frondeur ?
03:57Non, je n'aime pas ce terme d'abord parce qu'il renvoie à une partie de l'histoire
04:00qui était la déliquescence d'un bloc, d'un groupe.
04:06Moi, plusieurs choses d'abord.
04:08Un, j'essaie de mobiliser le vote pour, le vote contre et rarement l'abstention.
04:13Je considère que la mission qui m'a été donnée par les gens qui m'ont élu,
04:16c'est de trancher les sujets.
04:17Et je trouve que le côté abstention, c'est un truc hyper confortable pour celui qui le manie.
04:22En vrai, ça ne veut pas dire grand-chose.
04:23On essaie de flatter à la fois ceux qui sont pauvres et à la fois ceux qui sont contre.
04:27Alors, on peut très bien dire en permanence qu'on n'a pas réussi à se forger une opinion,
04:30mais pour moi, quand on est élu, on doit pouvoir trancher les sujets.
04:33Alors, bien sûr, ça fait l'objet d'un arbitrage entre le verre à moitié plein et le verre à moitié vide.
04:39S'agissant de la loi sécurité globale ou anti-immigration,
04:42je considérais qu'il y avait un glissement trop favorable à la police administrative
04:46versus le pouvoir judiciaire,
04:47et j'avais tranché défavorablement pour ce texte.
04:50J'avais aussi en tête des mesures anticonstitutionnelles.
04:54Et sur la loi du plomb, je n'avais pas forcément anticipé que ça le serait,
04:58mais j'avais une des mesures dans la loi du plomb
05:00dont je pensais qu'elle était à contre-courant de ce que nous faisions
05:02et de ce que nous faisons depuis huit ans maintenant.
05:07– Ces votes, ils marquent aussi un peu vos origines politiques.
05:11Vous avez été longtemps membre du PS.
05:14Est-ce que le macronisme, aujourd'hui, il penche pas un peu trop à droite pour vous ?
05:19– Il n'aura pas échappé que je suis encore dans le groupe Renaissance.
05:21D'abord, j'ai une loyauté au président de la République
05:23que je ne démonquirai pas jusqu'à la dernière heure du mandat du président,
05:27même si ce n'est pas très populaire de le dire en ce moment.
05:29trop à droite, je ne sais pas ce que ça veut dire.
05:33En tout cas, moi, je sais où je me situe.
05:35– Je crois que même avant de vous engager au PS,
05:37vous étiez encore plus à gauche.
05:39– Ah oui, oui, après, le problème de la gauche,
05:41c'est qu'il y a toujours plus à gauche que la gauche.
05:42– Vous avez commencé où, exactement ?
05:43– À la fédération anarchiste.
05:44– Anarchiste ?
05:46– Oui, j'ai distribué le monde libertaire quand j'avais 18 ans.
05:49Oui, je pense que là, c'est très, très à gauche.
05:51– Comment on passe de la fédération anarchiste à Emmanuel Macron ?
05:55– On laisse passer les années, possiblement.
05:58En tout cas, je pense que quand on a 18 ans,
06:00moi, je fais partie de la génération Malik Ousekine,
06:03la loi de Vaquet, la sélection aux universités, on se forge.
06:05Moi, je suis issu d'une famille, mon grand-père était assez engagé
06:09politiquement à gauche, mon père était de gauche.
06:11On parlait de politique à table.
06:13Je pense que ça forge une partie de sa personnalité,
06:16de la mienne en tout cas.
06:17Et je me suis senti libre de prendre des engagements très tôt, très jeune.
06:24Évidemment, et assez naturellement,
06:25on prend des voies, des fois, beaucoup plus radicales
06:28que ce qu'on prend beaucoup plus tard.
06:30Plus tard, moi, j'ai lu, enfin, je lisais,
06:32y compris des trucs de Besancenot et Ben Saïd.
06:35Et je me souviens d'un passage d'un bouquin de Besancenot et Ben Saïd
06:37qui disait, la révolution, ça ne se décrète pas, ça se prépare.
06:40Et moi, je me suis dit, à ce moment-là,
06:42OK, il n'y en a qui la préparent,
06:43mais pendant ce temps-là, ça leur prend manifestement beaucoup de temps.
06:46Il y a des choses à régler au quotidien.
06:47Et je vais m'apaiser,
06:50ou en tout cas, je vais me...
06:52Le révolutionnaire est devenu réformiste.
06:54Je vais accepter que faire des petites choses au quotidien,
06:58ce n'est pas moins ambitieux
06:59et ce n'est pas moins efficace pour la vie des gens,
07:00pour transformer la vie des gens,
07:02que de préparer la révolution qui arrivera peut-être un jour.
07:04Alors, vous avez une liberté de vote, on en a parlé.
07:06Ça ne vous empêche pas d'être, historiquement,
07:09le tout premier député macroniste
07:11à avoir siégé à l'Assemblée nationale ?
07:13Tout cela est lié à une histoire douloureuse pour vous,
07:15la perte d'une amie-preuve, Corinne Errel.
07:17Oui, c'est la morsure du destin,
07:19pour reprendre les mots du président,
07:20qui est venu aux obsèques de Corinne.
07:23C'est marrant, vous posez la photo là,
07:24parce que je partageais des photos de Corinne encore hier
07:26avec certains de mes collègues.
07:29Et elle est décédée le 5 mai 2017,
07:31dernier jour d'une campagne.
07:34La veille de l'élection présidentielle.
07:35Oui, la veille de l'élection présidentielle.
07:37Elle était donc députée et vous étiez...
07:39Son suppléant.
07:39Son suppléant.
07:40Oui, et on fait ce dernier meeting à Pouisy
07:42sur un sujet hyper casse-gueule,
07:44agriculture, environnement,
07:46avec François Durugy, avec Olivier Alain,
07:49et au milieu d'un mot, au milieu d'une phrase,
07:50elle s'effondre.
07:52Et effectivement, elle décède ce jour-là.
07:54Et le lendemain, je me souviens,
07:56le préfet m'appelle en me disant
07:57« Voilà, vous êtes députée ».
07:58Mais j'y crois pas.
07:58J'ai dit « Mais attendez, mais je peux pas passer députée.
08:01En fait, il n'y a plus d'activité,
08:02c'est la fin, il y a l'élection présidentielle ».
08:04Je suis venu et vous avez raison de dire
08:07que je suis le premier député en marche,
08:08parce que je fais tout le parcours.
08:10Vous devez vous rattacher à un parti,
08:12et on me dit « Mais à quelle partie vous êtes ? »
08:15Je suis parti en marche, à l'époque.
08:18Et donc, je suis le premier député en marche de l'histoire.
08:21Parce que pas une gloire,
08:21parce que c'est lié, encore une fois,
08:23à un événement tragique.
08:24Et Corinne, elle manque à beaucoup de monde.
08:28Son portrait étant la permanence,
08:29j'ai gardé la même permanence.
08:31C'est exactement ce portrait que j'ai, sa permanence.
08:33On va parler un peu de votre action en tant que député.
08:36Une action qui est liée, en partie,
08:38un peu à votre passé professionnel.
08:40J'ai choisi deux images.
08:41On va les voir s'afficher.
08:43Et puis, je vous laisse les commenter.
08:45Donc, Elon Musk, d'un côté,
08:46chrono-micro de l'autre.
08:48Oui.
08:49Vous voulez qu'on commence par quoi ?
08:50On va commencer par chrono-micro ?
08:51Chrono-micro, c'est mon retour en Bretagne, en fait.
08:54Je décide de revenir en Bretagne,
08:56parce que je suis né à Paimpol.
08:57Et donc, j'ouvre un point de dépannage informatique à Saint-Bruc.
09:03On est particulier, là.
09:04C'est la mamie qui n'arrive pas à allumer son ordi.
09:07Oui, à l'époque, c'est particulier.
09:09Puis, il est toute petite entreprise.
09:10On fait déjà des hotspots pour les campings, des choses comme ça.
09:13Le Wi-Fi commence à se déployer.
09:14Donc, voilà, c'est une expérience qui marque surtout mon retour en Bretagne.
09:18Et Elon Musk, alors, dans tout ça ?
09:20Alors, Elon Musk n'a rien à voir avec la Bretagne,
09:21rien à voir avec mon parcours professionnel.
09:24Non, Elon Musk, vous le mettez là,
09:26parce que j'ai une petite actualité avec lui.
09:28Une grosse actualité.
09:29Surtout lui, qui a une actualité avec la France.
09:32Non, je n'ai rien contre lui en tant que personne.
09:37Mais je trouve qu'il se mêle beaucoup des affaires des autres
09:40et qu'il est aujourd'hui devenu tellement puissant à la tête d'un outil
09:43qu'il, de manière totalement décomplexée,
09:48fait de l'ingérence, intervient sur le déroulement des élections européennes.
09:54J'explique un peu pour les gens,
09:55parce qu'ils n'ont peut-être pas suivi toute l'histoire,
09:56mais vous, en tant que député, vous avez fait un signalement
09:58qui a déclenché l'ouverture d'une enquête préliminaire
10:01contre Elon Musk, contre X.
10:04Et tout ça, c'est l'ancien réparateur d'ordinateurs de Bretagne
10:09qui essaie de faire plier l'homme le plus riche du monde, en fait.
10:12C'est ça ?
10:13Alors, les deux sont compatibles.
10:15Depuis le réparateur informatique, ou celui qui a fait de l'IT pendant 30 ans,
10:20il est désormais législateur, et c'est ma responsabilité.
10:23D'ailleurs, quand on fait un article 40, c'est parce qu'on a une personnalité
10:26qui a autorité, qui doit effectivement signaler à la justice
10:30des comportements qui relèvent de délits ou de crimes.
10:33En l'espèce, je ne caractérise pas qu'Elon Musk a eu des comportements délictuels ou criminels,
10:38ce sera à la justice de le faire.
10:40Mais je n'ai pas frémi à l'idée que, constatant qu'il y avait des dérives
10:45depuis que Elon Musk a pris la tête d'anciennement Twitter X,
10:48il convenait de le mettre à l'épreuve des faits,
10:50des outils que nous avons en matière de régulation et de droit.
10:53Et donc vous demandez à accéder aux algorithmes d'X
10:56pour comprendre comment est-ce qu'ils recommandent tel ou tel contenu ?
10:58Oui, c'est moi-même un an que désormais la Gendarmerie nationale
11:01puisqu'on est dans une deuxième phase de l'enquête
11:04qui a été décrite durant l'été.
11:06Donc maintenant, c'est à la Gendarmerie nationale,
11:08à l'initiative du Parquet de Paris et de sa section J3,
11:11qu'il revient de qualifier les faits dont pourraient être s'épouser.
11:14Alors vous, vous êtes spécialiste des questions de cybersécurité à l'Assemblée
11:17et j'ai vu que sur votre ordinateur, il y a marqué « I love pirates ».
11:21C'est compatible ? On peut aimer les pirates informatiques
11:23et se battre pour la cybersécurité ?
11:25Vous avez des pirates gentils, vous avez des pirates qui font du bug bounty,
11:28un bug bounty, c'est comment expliquer les choses ?
11:31C'est des gens qui vont être payés pour trouver des failles
11:33dans des systèmes d'information et qui vont être rémunérés
11:35pour expliquer quelles failles ils ont trouvées pour pénétrer un certain nombre.
11:38Donc vous aimez les gentils pirates ?
11:39Plein d'œil à Yes We Hack, qui sont des gentils pirates,
11:41ce qu'on appelle des white hats ou des chapeaux blancs.
11:44On va conclure l'émission avec notre quiz.
11:47L'idée, c'est que je vais vous proposer des débuts de phrases
11:49et vous allez devoir les compléter.
11:51Quand on est originaire du goélo et non du trégor.
11:55On s'adapte.
11:57C'est une tare dans la vie.
11:58Non, pas du tout.
11:59Vous savez, pendant longtemps, on a dit...
12:02C'est deux régions, deux sous-régions, on va dire, de votre circonscription.
12:07L'est et l'ouest de la circonscription.
12:08L'ouest, c'est le trégor.
12:09L'est, c'est le goélo, c'est Paimpol d'un côté,
12:11Lagnon de l'autre côté, Péros-Guirec, les Sept-Îles, etc.
12:14Et ça ne s'était jamais produit qu'un...
12:16Qu'un député du goélo, enfin, qu'un personne,
12:18quelqu'un du goélo, soit élu dans le trégor.
12:20C'est vrai.
12:22J'ai été adopté.
12:23Écoutez, c'est probablement le compagnonnage avec Corinne qui m'a aidé.
12:26Avec mon frère, quand on discute politique ?
12:29J'en ai deux, frères.
12:31Mais quand on discute politique, ça se passe bien.
12:33Ah bon ?
12:34J'avais lu l'inverse, moi, en 2017.
12:35En tout cas, vous disiez que c'était un peu compliqué.
12:37On a eu une période compliquée tous les deux.
12:40Depuis, elle est devenue beaucoup plus simple.
12:44Enfin, entre une sortie en mer ou à moto ?
12:46Ah, c'est compliqué.
12:48Sortie en mer, c'est souvent un truc avec les copains.
12:52La sortie à moto, c'est moi et mon épouse, Françoise.
12:55Et j'aime les deux, mais ce n'est pas du tout les mêmes sensations, le même plaisir.
12:59Vous ne vous tranchez pas ?
13:00Non, je ne tranche pas, je continuerai de faire les deux.
13:02C'est le en même temps, vous savez.
13:03Merci beaucoup, Éric Bottorel, d'être venu dans La politique et moi.
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