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  • il y a 2 jours
Le retentissement international du procès des viols de Mazan a mis un coup de projecteur sur la soumission chimique. Ce procédé consistant à administrer une substance à une personne à son insu pour en abuser sexuellement n'est pas nouveau, mais sa récente exposition médiatique a alerté sur ce phénomène en augmentation. La réponse judiciaire est-elle à la hauteur ?

Pour en discuter, Jean-Pierre Gratien reçoit Leila Chaouachi, pharmacienne et fondatrice du Centre de Référence sur les Agressions Facilitées par les Substances (CRAFS), l'avocate Violaine de Filippis-Abate et le magistrat Denis Salas.

LCP fait la part belle à l'écriture documentaire en prime time. Ce rendez-vous offre une approche différenciée des réalités politiques, économiques, sociales ou mondiales....autant de thématiques qui invitent à prolonger le documentaire à l'occasion d'un débat animé par Jean-Pierre Gratien, en présence de parlementaires, acteurs de notre société et experts.

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Transcription
00:00:00Générique
00:00:01...
00:00:14Bienvenue à tous au menu de ce débat doc.
00:00:17Aujourd'hui, le documentaire qui va suivre
00:00:20« Soumission chimique pour que la honte change de camp »
00:00:23réalisé par Linda Bendali.
00:00:26À travers ce film, Caroline Darian, la fille de Gisèle Pellicot,
00:00:30revient notamment longuement, vous allez le voir,
00:00:32sur le drame désormais connu de tous qui a ravagé sa famille.
00:00:36Je vous laisse le découvrir et je vous retrouverai juste après
00:00:39sur ce plateau en compagnie de mes invités
00:00:42pour débattre des questions que pose désormais
00:00:44la soumission chimique dans notre société.
00:00:48Bon doc.
00:00:56...
00:00:57Devant la cour criminelle du Vaucluse,
00:01:13s'est ouvert ce matin, un procès jamais vu en France.
00:01:1651 hommes sont accusés au total âgés de 21 à 68 ans.
00:01:20Je me souviendrai toujours de ce mois de septembre 2024.
00:01:30Nous arrivions au tribunal en rang serré
00:01:32avec mes deux frères et ma mère, Gisèle Pellicot.
00:01:36Gisèle Pellicot est la victime des viols de Mazan.
00:01:39Entre 2011 et 2020, Gisèle était droguée par son mari
00:01:43qui recrutait des hommes pour la violer.
00:01:46Je m'appelle Caroline Darian.
00:01:49Je suis la fille de la victime,
00:01:51mais aussi, et c'est encore plus lourd à porter,
00:01:53celle du bourreau.
00:01:56L'histoire de notre famille dépasse tout ce qu'on peut imaginer.
00:02:00Mais je ne me doutais pas qu'elle allait faire le tour du monde.
00:02:03Je n'imaginais pas non plus que ma mère allait devenir une icône.
00:02:29« On est toutes Gisèle ! On est toutes Gisèle ! On est toutes Gisèle ! On est toutes Gisèle ! »
00:02:38Soudain, des voix se sont levées partout en France.
00:02:41« Nous habitons dans ce pays où un corps, le corps d'une épouse, n'est qu'un bien,
00:02:47qu'on offrira à d'autres hommes un cadeau de choix.
00:02:50Gisèle Pellicot empêche la société de fermer les yeux sur la culture du viol. »
00:02:57Ces quatre dernières années, jusqu'au procès, je m'étais souvent sentie seule.
00:03:03Lanceuse d'alerte, dans une société qui refusait d'entendre l'histoire de ces victimes droguées pour être violées.
00:03:10Des victimes qui aujourd'hui se dressent et témoignent dans ce film à mes côtés.
00:03:15« Combien ils étaient ? Qui c'était ? Qu'est-ce qu'ils m'ont fait ? »
00:03:19« Tout ça, je ne le saurais jamais. »
00:03:20« C'est lui qui allait me préparer mon yort. »
00:03:24« Dès que je le mangeais, il avait un goût très bizarre. »
00:03:28La soumission chimique est le stade ultime de la domination masculine.
00:03:33« Il est le maître et il le dit régulièrement. »
00:03:36« Je te possède. »
00:03:38« Tu es ma chose. »
00:03:43Aujourd'hui, grâce au procès, nous vivons un moment historique.
00:03:48C'est l'occasion de changer les mentalités.
00:03:56Puisque c'est ensemble, et ensemble seulement, que nous pourrons vaincre la soumission chimique.
00:04:01Ce procès, on l'espérait autant qu'on le redoutait.
00:04:23Dans quelques minutes, mes frères et moi, on va revoir notre père.
00:04:27Et ma mère va revoir son ex-mari.
00:04:31Ça fait quatre ans qu'il est sorti de notre famille.
00:04:35Et le voilà, dans le box des accusés.
00:04:41Premier échange de regard.
00:04:44Intense.
00:04:46Je ressens de la honte, forcément.
00:04:49Et surtout de la colère devant un tel gâchis.
00:04:53Nos vies ont basculé.
00:04:56Impossible de revenir en arrière.
00:04:57Tout a commencé un soir d'automne, en 2020.
00:05:11Le lundi 2 novembre 2020, je suis en télétravail chez moi.
00:05:16Et à 20h25, mon téléphone va sonner.
00:05:18C'est ma mère.
00:05:19Et là, ma mère va me dire, écoute Caroline, il faut que tu sois assise.
00:05:22Il faut que tu sois forte et courageuse.
00:05:23Parce qu'il va falloir que je t'apprenne quelque chose de très grave.
00:05:37Et là, elle va me dire, écoute, j'ai passé une bonne partie de la journée au commissariat, Caroline,
00:05:45et j'ai appris que ton père me drogue depuis plusieurs années maintenant
00:05:53pour me faire violer par d'autres hommes.
00:05:57Ce soir-là, tout s'effondre.
00:06:03Tout ce qu'on pensait être solide, tout s'effondre, en fait.
00:06:09Tous les repères s'effondrent.
00:06:12Le point de départ, c'est qu'il est surpris un mois et demi avant,
00:06:17en train de filmer sous les jupes de trois femmes dans un supermarché de Carpentras.
00:06:20Il prend des bonnes prises de vue, votre téléphone.
00:06:23Il est en train de filmer sous votre robe.
00:06:25Si, si, si, vous portez plainte.
00:06:27Il est en train de filmer sous votre robe, le téléphone, comme ça, à l'instant.
00:06:31Donc, il va être interpellé par les membres de la sécurité du magasin.
00:06:37Vous êtes un gros dégueulasse, vous, en fait.
00:06:39Oui, vous êtes un gros dégueulasse.
00:06:42Vous avez de la chance, je vous jure, c'est ma mère, je vous arrache la tête.
00:06:45Allez, police, tu me les appelles maintenant.
00:06:48Madame, je compte sur vous, vous portez plainte.
00:06:51Et derrière, ils vont embarquer son ordinateur, son disque dur,
00:06:56plusieurs cartes SIM, son diamescope, etc.
00:07:01Et en fait, pendant un mois et demi,
00:07:03ils vont travailler pour exhumer des vidéos de ma mère,
00:07:07où elle est totalement inerte,
00:07:10où elle se fait abuser par ses hommes en présence de son mari.
00:07:12Sur une seule affaire,
00:07:29on a un échantillon représentatif de la société française.
00:07:32Les agresseurs de ma mère,
00:07:38ils ont entre 23, 25, 30, 32,
00:07:44jusqu'à 70 ans,
00:07:46au moment des faits.
00:07:47Ils habitent pour la plupart dans le département du Vaucluse.
00:07:53Il y en avait un qui habitait à deux rues,
00:07:56de chez mes parents,
00:07:57sur la commune de Mazan.
00:07:58Ils sont plutôt bien insérés dans la société.
00:08:04Ils ont pour la plupart un métier,
00:08:06parfois même des métiers à responsabilité.
00:08:09Ils ont une famille,
00:08:11parfois des enfants,
00:08:13des enfants bas âge.
00:08:14Vous leur donneriez le bon Dieu sans confession.
00:08:28S'il y a autant de prédateurs sexuels
00:08:30au profil si banal sur un petit périmètre,
00:08:33alors à l'échelle de la France,
00:08:35les victimes doivent être très nombreuses.
00:08:37C'est ce que je me suis dit
00:08:38en commençant à enquêter sur la soumission chimique.
00:08:42Ce sont des histoires comme celle de Zoé,
00:08:43des histoires d'amnésie.
00:08:52Alors, tu vas ouvrir grand, grand, grand la bouche,
00:08:55comme un hippopotame.
00:08:57Oh oui, t'as une belle angine.
00:08:59T'as un microbe dans la gorge,
00:09:00c'est pour ça que t'as mal à ta gorge.
00:09:02Tu lèves un peu la tête ?
00:09:04Je touche ta gorge.
00:09:05J'ai choisi d'être médecin généraliste.
00:09:07Tu vas respirer très, très fort avec ta bouche.
00:09:09Et donc je suis au plus près du quotidien des gens,
00:09:13de leur histoire de vie.
00:09:13Encore, encore ?
00:09:16Bravo.
00:09:18Parce que c'est le seul moyen que j'ai
00:09:20de mettre du sens
00:09:22dans cette histoire qui n'a pas de sens.
00:09:25Je vais prendre votre carte du taxi.
00:09:27Merci.
00:09:27C'est là.
00:09:47À chaque fois que je reviens ici,
00:09:50je me rappelle que c'est très en ponte.
00:09:51Le seul souvenir que j'ai de cette histoire,
00:09:55c'est cet endroit.
00:09:58Quand je me suis réveillée,
00:09:59j'étais en travers de la pente,
00:10:00contre un arbre.
00:10:02Je me suis toujours demandé
00:10:03comment il m'avait mise là.
00:10:06Soit je suis tombée,
00:10:09soit il m'a jetée
00:10:10et j'ai roulé.
00:10:14Et il m'a laissée là.
00:10:17Ou ils m'ont laissée là.
00:10:19J'ai 15 ans.
00:10:27Je suis en classe de seconde.
00:10:29Le 21 juin 2006,
00:10:31c'est la fête de la musique.
00:10:33Il y a des concerts partout.
00:10:35On assiste à un concert
00:10:37qui est sur la place du Donjon de New York.
00:10:38La place, elle est bondée.
00:10:47Moi, je danse,
00:10:48je bois un peu d'alcool.
00:10:50Pas en quantité monstrueuse,
00:10:52mais j'en bois un petit peu.
00:10:55Et puis, il devait être
00:10:55aux alentours de 23 heures.
00:10:57Et là, d'un coup,
00:10:57je n'ai plus aucun souvenir.
00:11:01Aucun.
00:11:08Ma mère n'a jamais été
00:11:26rappelée par un quelconque souvenir.
00:11:29Jamais.
00:11:30Et pour la bonne et simple raison
00:11:31que tout était organisé
00:11:34pour que ça passe
00:11:35totalement inaperçu.
00:11:38mon géniteur passait
00:11:39par un site de rencontre
00:11:40qui s'appelle coco.fr
00:11:42sur lequel il communiquait
00:11:46des photos et des vidéos
00:11:47de ma mère
00:11:48pour appâter
00:11:49ses acolytes.
00:11:53Je cherche complice pervers
00:11:55pour abuser de ma femme endormie
00:11:56en tournant à deux chez moi.
00:12:02Le protocole, c'était de se garer
00:12:04à proximité du domicile
00:12:06à quelques centaines de mètres
00:12:08pour arriver à pied.
00:12:11Attends sur le parking
00:12:12qu'elle soit bien endormie.
00:12:20Dans la majorité des cas,
00:12:22il les faisait se déshabiller
00:12:23sur le perron
00:12:23ou dans la cuisine
00:12:25avant de poursuivre
00:12:28dans la chambre.
00:12:28Il s'agissait
00:12:33de passer les mains
00:12:34sous l'eau chaude
00:12:35pour être sûr
00:12:35que les mains,
00:12:37si elles étaient trop froides,
00:12:38ne réveillaient pas ma mère.
00:12:42Pendant les actes,
00:12:43lui, filmait,
00:12:45dirigeait
00:12:46les actes sexuels.
00:12:47On sait qu'il n'y a eu
00:12:52aucune rétribution financière.
00:12:54Jamais.
00:12:56Certains sont venus
00:12:56plusieurs fois.
00:12:58Certaines fois,
00:12:59ça a duré plus de six heures.
00:13:06Mon père,
00:13:07il a drogué
00:13:08avec de fortes doses
00:13:10d'anxélytiques et de somnifères
00:13:11qu'il écrasait
00:13:13dans son verre,
00:13:14à son insu
00:13:15ou parfois
00:13:17dans sa nourriture.
00:13:20Et dans le quart d'heure
00:13:21qui suivait,
00:13:23elle perdait connaissance
00:13:24et elle ne sentait plus rien.
00:13:28D'autant que
00:13:29ces substances
00:13:30qu'on appelle
00:13:31les benzodiazépines
00:13:32ont tendance
00:13:34à relâcher les muscles.
00:13:36Donc,
00:13:36il n'y avait aucune séquelle
00:13:37des agressions sexuelles
00:13:39puisque par définition,
00:13:40tous les muscles du corps
00:13:42sont totalement relâchés.
00:13:43C'est exactement
00:13:44le même principe
00:13:45qu'une anesthésie générale.
00:13:48La question
00:13:49des substances utilisées
00:13:50est cruciale.
00:13:52Contrairement aux idées reçues,
00:13:54le GHB,
00:13:54souvent appelé
00:13:55la drogue du violeur,
00:13:56est rarement employé.
00:14:07Dans la grande majorité
00:14:08des cas,
00:14:09l'agresseur se fournit
00:14:10dans l'armoire
00:14:10à pharmacie familiale.
00:14:13Somnifères,
00:14:15anxiolytiques,
00:14:18antidouleurs,
00:14:21antiépileptiques
00:14:22ou encore antiallergiques.
00:14:26Administrés à haute dose,
00:14:28ils peuvent provoquer
00:14:28un blackout
00:14:29de plusieurs heures.
00:14:30Je reprends conscience
00:14:49plusieurs heures après.
00:14:51Le soleil est en train
00:14:52de se lever.
00:14:54J'ai mal.
00:14:55J'ai mal un peu partout.
00:14:56Je suis allongée,
00:15:04je suis couverte
00:15:05de brindilles,
00:15:06de feuilles mortes.
00:15:08Je me rends compte
00:15:09qu'en fait,
00:15:10je suis dénudée.
00:15:12Ma robe est relevée
00:15:13à peu près jusqu'à ma poitrine.
00:15:16Mon soutien-gorge
00:15:17est dégrafé.
00:15:19Je l'ai toujours sur moi,
00:15:20mais il est dégrafé,
00:15:20il est relevé également.
00:15:21et je n'ai plus de culotte.
00:15:25Je me souviens
00:15:26qu'à ce moment-là,
00:15:27le seul truc
00:15:28que j'avais dans ma tête,
00:15:29c'était qu'il fallait
00:15:30que je retrouve ma culotte.
00:15:33Et je fais pendant
00:15:34plusieurs minutes
00:15:35des allers-retours
00:15:36dans cette pente
00:15:37où je brasse les feuilles
00:15:38et en regardant autour de moi,
00:15:42je comprends où je suis.
00:15:43Je suis au jardin des plantes,
00:15:45à Nior,
00:15:45c'est à une dizaine
00:15:48de minutes de marche
00:15:48de l'endroit
00:15:49où j'ai mon dernier souvenir.
00:15:50mais à un endroit
00:15:52à circuler
00:15:52et je me sens effrayée.
00:15:58Là, je suis vraiment
00:15:59un enfant perdu
00:16:00sans sa culotte.
00:16:02C'est vraiment ça
00:16:02que je suis à ce moment-là.
00:16:08J'ai essayé de me rhabiller
00:16:09comme je pouvais
00:16:10et là,
00:16:12complètement,
00:16:13de manière automatique,
00:16:15je suis rentrée chez moi.
00:16:20quand j'arrive chez moi,
00:16:22je suis très soulagée
00:16:23de voir que tout le monde dort.
00:16:26Et là,
00:16:26mon premier réflexe,
00:16:27c'est d'aller sous la douche.
00:16:35Je me rends compte
00:16:36que j'ai des échymoses
00:16:37à l'intérieur des cuisses.
00:16:40J'ai des plaies
00:16:41sur les avant-bras,
00:16:43j'ai des plaies
00:16:43sur les coudes,
00:16:44j'ai des échymoses
00:16:46sur les côtes.
00:16:51Sur les échymoses
00:16:52de mes cuisses,
00:16:53j'ai un réflexe
00:16:53qui est de les frotter.
00:16:56Et je me revois très bien
00:16:57les frotter
00:16:58encore
00:16:59et encore
00:17:00et encore.
00:17:01j'ai tellement frotté
00:17:03que je me suis arrachée
00:17:06la peau.
00:17:08Je me suis
00:17:08douchée tellement longtemps
00:17:10que j'ai vidé
00:17:10le ballon d'eau chaude
00:17:11et j'ai continué
00:17:13à me doucher
00:17:13sous l'eau froide.
00:17:17Au bout d'un moment,
00:17:18j'entends tout le monde
00:17:19se lever.
00:17:21Donc je file
00:17:21dans ma chambre.
00:17:24J'entends mes parents
00:17:25qui gueulent
00:17:27parce qu'il n'y a plus
00:17:27d'eau chaude.
00:17:28Ma mère passe la tête
00:17:32par la porte
00:17:33de ma chambre
00:17:33et je fais semblant
00:17:34de dormir.
00:17:46Ma mère n'a pas pu voir,
00:17:48n'a pas pu comprendre.
00:17:51Vers 2015,
00:17:54je commence
00:17:55à noter
00:17:56que ma mère
00:17:59est très fatiguée.
00:18:01Elle va commencer
00:18:02à avoir
00:18:02des attitudes
00:18:03au téléphone
00:18:04qui vont nous inquiéter.
00:18:06Je vais la rappeler
00:18:07quelques heures plus tard
00:18:08et elle ne va pas
00:18:09se souvenir
00:18:09de m'avoir eu au téléphone.
00:18:11On se dit
00:18:12mais
00:18:12est-ce qu'elle n'est pas
00:18:14en train de nous faire
00:18:15un début d'Alzheimer ?
00:18:16Ma mère est une miraculée.
00:18:22Non seulement
00:18:22son cœur
00:18:24aurait pu lâcher
00:18:24à tout moment
00:18:25à cause des surdosages
00:18:27et en plus,
00:18:29plusieurs reprises,
00:18:30ma mère a frôlé
00:18:30l'accident de voiture
00:18:31qui aurait pu être mortel.
00:18:32dans mes études de médecine,
00:18:57je n'ai quasiment pas été formée
00:18:58à la soumission chimique.
00:18:59je me rends compte
00:19:00qu'en fait,
00:19:01je n'y connais rien.
00:19:03C'est une des choses
00:19:03à laquelle il va falloir
00:19:04que je pense
00:19:05face à des symptômes
00:19:07inhabituels,
00:19:08face à des pertes de mémoire,
00:19:09face à des troubles du sommeil.
00:19:10La problématique de la soumission chimique pose une difficulté,
00:19:21c'est-à-dire qu'on est sur quelque chose
00:19:22de relativement nouveau
00:19:23et qui nous oblige tous,
00:19:25les professionnels,
00:19:26à sortir de notre zone de confort.
00:19:29On peut facilement passer
00:19:30à côté d'une victime.
00:19:31Si on a une victime
00:19:32sans aucun souvenir,
00:19:33qui me dit
00:19:34« moi j'ai sommeil
00:19:3420 minutes après le dîner »,
00:19:36elle décrit un symptôme
00:19:38et elle se dit
00:19:38« c'est pas normal ce que je vis ».
00:19:39On peut peut-être faire l'effort
00:19:40de chercher un petit peu,
00:19:43de creuser.
00:19:44Et donc c'est là
00:19:45où les médecins généralistes,
00:19:47les psychiatres de ville,
00:19:48on a besoin de vous,
00:19:50véritablement.
00:19:52Et je vous remercie beaucoup.
00:19:53Alors effectivement,
00:20:00là on va laisser la parole à Caroline.
00:20:02Oui, alors moi,
00:20:03je suis un peu émue
00:20:04parce qu'en fait,
00:20:05c'est la première fois
00:20:05que je m'adresse
00:20:06à des professionnels de santé.
00:20:08Vous avez un rôle essentiel
00:20:09en fait dans l'accompagnement
00:20:10des victimes.
00:20:12Vous allez potentiellement
00:20:13sauver des personnes.
00:20:15Par exemple,
00:20:16ma mère a perdu
00:20:1710 kilos en 8 ans.
00:20:2010 kilos.
00:20:21Et on ne comprenait pas pourquoi.
00:20:22quand elle parlait,
00:20:24elle avait des troubles du langage.
00:20:27Ma mère était suivie
00:20:28par des gynécologues,
00:20:29était suivie par des médecins généralistes,
00:20:31a consulté aussi
00:20:32des spécialistes,
00:20:33des neurologues.
00:20:34Et toutes ces personnes-là,
00:20:36ces spécialistes-là,
00:20:37n'ont jamais compris
00:20:38ce que traversait ma mère.
00:20:40Ce qui est dramatique.
00:20:41Voilà.
00:20:45Applaudissements
00:20:45Bonjour.
00:20:53Bonjour.
00:20:53Bonjour.
00:20:54Enchantée.
00:20:54C'est vous.
00:20:55Linda a dû vous parler
00:20:56de moi peut-être un peu.
00:20:58C'est vous,
00:20:59la femme médecin.
00:21:00C'est ça,
00:21:00exactement.
00:21:01D'accord.
00:21:01Exactement.
00:21:02C'est bien qu'on soyez venus.
00:21:03Ben ouais.
00:21:04Et puis bon,
00:21:04il se trouve que ça m'est arrivé
00:21:05aussi par ailleurs.
00:21:07Ah,
00:21:08je n'avais pas cette info.
00:21:09Ouais.
00:21:09Et du coup,
00:21:10moi,
00:21:10c'est pour ça que votre histoire,
00:21:11elle m'a autant marquée.
00:21:13En tant que médecin aussi,
00:21:15parce que je me suis vraiment dit,
00:21:16mais moi,
00:21:18médecin,
00:21:19j'aurais eu une femme
00:21:20qui serait venue voir
00:21:21accompagnée de son mari.
00:21:23Oui,
00:21:23parce que dans la majorité des cas,
00:21:24moi,
00:21:24ça,
00:21:25je ne le raconte pas,
00:21:26mais je ne le dis pas,
00:21:26je ne le spécifie pas,
00:21:27mais à chaque fois
00:21:28qu'elle a été consultée,
00:21:30évidemment,
00:21:30il était présent.
00:21:31Et que ça fait partie aussi
00:21:33de l'amplice psychologique
00:21:35utilisée dans ce genre
00:21:37de cas de figure.
00:21:38Mais en fait,
00:21:41en tant que médecin,
00:21:43c'est un peu normal
00:21:44qu'aujourd'hui,
00:21:46tant qu'il n'y aura pas
00:21:46un véritable dispositif
00:21:48de formation,
00:21:50on n'y arrivera pas.
00:21:51Parce que des cas,
00:21:51comme ma mère,
00:21:52depuis deux ans,
00:21:53je peux vous dire,
00:21:54j'en entends,
00:21:54moi.
00:21:55Ce n'est pas un cas isolé.
00:21:58Le combat continue.
00:22:00Le combat doit continuer,
00:22:01c'est ça.
00:22:02Merci en tout cas
00:22:03pour vous de rien
00:22:04et puis bon courage à vous.
00:22:05Oui, merci.
00:22:11Personne ne connaît
00:22:12le nombre de victimes
00:22:13de soumissions chimiques
00:22:14en France.
00:22:15D'autant que beaucoup
00:22:16ne portent jamais plainte,
00:22:18découragées par la honte
00:22:19ou empêchées par l'amnésie.
00:22:21Il suffit d'éplucher la presse
00:22:25des 30 dernières années
00:22:26pour se rendre compte
00:22:27que le phénomène est massif
00:22:29et même systémique.
00:22:32La basketteuse droguée
00:22:34au Temesta
00:22:34avait subi un viol collectif.
00:22:38Il drogue sa femme
00:22:39avec une tatin
00:22:40pour la voir nue.
00:22:42Il avait drogué
00:22:42sa compagne
00:22:43à son insu
00:22:44en soupodrant
00:22:44sa gaufre de MDMA.
00:22:49Jusque-là,
00:22:50ces faits divers,
00:22:51personne n'avait eu
00:22:52l'idée de les relier.
00:22:54Le terme même
00:22:55de soumission chimique
00:22:56n'était pas répondu
00:22:57dans l'opinion.
00:23:00Il faut une prise de conscience.
00:23:04C'est pour ça
00:23:05que je crée
00:23:05mon association
00:23:06M'endort pas.
00:23:07Je reçois
00:23:08des centaines
00:23:09de témoignages.
00:23:11J'apprends
00:23:11que toutes les victimes
00:23:12ne sont pas endormies.
00:23:14Sous l'effet
00:23:14de certaines substances,
00:23:16elles restent conscientes
00:23:17mais paralysées.
00:23:19C'est le cauchemar éveillé
00:23:20qu'a vécu Reynald.
00:23:22J'ai tendance
00:23:39à mettre de l'amour
00:23:40dans tout ce que je fais.
00:23:42Tiens, regarde.
00:23:47Quelque part,
00:23:47je me guéris aussi
00:23:48en même temps
00:23:49parce que
00:23:51la noirceur,
00:23:54je l'ai vue
00:23:54de très près.
00:23:56Et voilà.
00:23:58Parfait.
00:24:00Ça a empoisonné
00:24:01mes nuits,
00:24:01ça a empoisonné
00:24:02mes jours.
00:24:04C'est une partie
00:24:05poison de ma vie.
00:24:05à l'âge de 17 ans,
00:24:23je connais mon
00:24:23attirance pour les hommes.
00:24:25C'est très compliqué.
00:24:27Je viens de la Sarthe,
00:24:28donc région un peu
00:24:30terrienne
00:24:33
00:24:34l'homosexualité,
00:24:38c'est très compliqué.
00:24:40Donc, je me cache.
00:24:44Dans les années 90,
00:24:45le seul moyen
00:24:46de rencontrer
00:24:47des gens comme moi,
00:24:48oui,
00:24:49c'est de fréquenter
00:24:50les établissements gays.
00:24:51Et dans la boîte de nuit
00:24:57qu'on avait l'habitude
00:24:58de fréquenter
00:24:59avec les copains,
00:25:00il y a cet homme,
00:25:0145 ans à peu près,
00:25:04qui régulièrement
00:25:07me fait du rentre-dedans
00:25:08me disant
00:25:08que je lui plais.
00:25:10Et en fait,
00:25:11à chaque fois,
00:25:11je lui disais
00:25:12non, mais laisse tomber.
00:25:13Je suis marié
00:25:14José Perrec
00:25:14et je cours plus vite
00:25:15que toi.
00:25:16Jamais tu n'arriveras
00:25:16à me rattraper.
00:25:17Et un soir,
00:25:20on parle
00:25:20et puis il me dit
00:25:21bon, allez,
00:25:22c'est bon,
00:25:23j'ai compris.
00:25:24Jamais j'arriverai
00:25:25à avoir une relation
00:25:27avec toi.
00:25:29C'est bon,
00:25:29je lâche l'affaire.
00:25:31Passe à autre chose.
00:25:33Soyons potes.
00:25:35Et il me propose
00:25:36un verre.
00:25:37Et je prends
00:25:38ce fameux
00:25:38Malibu ananas.
00:25:43Et au bout
00:25:44d'un quart d'heure,
00:25:46vingt minutes,
00:25:47mon corps devient
00:25:48du coton.
00:25:50Je ne me sens pas bien.
00:25:52Et cet homme me dit
00:25:53écoute,
00:25:55viens,
00:25:55je vais te sortir
00:25:56pour que tu prennes l'air.
00:25:58Et il m'emmène chez lui.
00:26:00Et là,
00:26:00je me retrouve
00:26:01à poil
00:26:02en deux minutes.
00:26:14Je suis complètement
00:26:15enfermé dans mon corps.
00:26:16j'ai conscience de tout,
00:26:18je vois tout.
00:26:19Et là,
00:26:20j'ai le droit
00:26:20à...
00:26:22pendant une éternité.
00:26:29À cette violence sexuelle
00:26:32qui m'a fait subir.
00:26:34Et tu peux rien dire,
00:26:35tu peux rien faire
00:26:36parce que...
00:26:36tu cries à l'intérieur,
00:26:39mais il n'y a rien
00:26:39qui sort.
00:26:40t'as juste envie
00:26:42que ça s'arrête.
00:26:47Il est le maître.
00:26:48Il est le maître
00:26:49et il le dit régulièrement.
00:26:51Je te possède.
00:26:53Tu es ma chose.
00:26:55Tu vois ?
00:26:56Je t'avais dit
00:26:57que je t'aurais.
00:26:59Et j'ai subi ça
00:27:00pendant des heures
00:27:01et des heures.
00:27:02jusqu'au moment où
00:27:06mon corps a commencé
00:27:08à re-réagir.
00:27:10Lui dort.
00:27:12Il est 8h30,
00:27:139h du matin
00:27:14et je me suis sauvé.
00:27:16Trois semaines
00:27:27après avoir subi
00:27:28cette agression,
00:27:30il a fallu
00:27:31que les souvenirs
00:27:32s'effacent
00:27:33et le seul moyen
00:27:34que j'avais,
00:27:34c'était
00:27:34d'arrêter de vivre.
00:27:40Et
00:27:40j'ai pris des médicaments
00:27:43avec de l'alcool.
00:27:46J'ai vomi
00:27:47tripes et boyaux
00:27:48et
00:27:48c'est mon corps
00:27:50qui n'a pas voulu mourir.
00:27:58C'est le moment
00:27:59où tu dis
00:28:00mais
00:28:00faut que j'en parle
00:28:02mais à qui ?
00:28:04Ma mère ?
00:28:05Pas possible.
00:28:06Ma soeur ?
00:28:07Pas possible.
00:28:09Parce que
00:28:09moi dans ma tête,
00:28:11je l'avais mérité.
00:28:12Parce que
00:28:13oui,
00:28:13j'ai accepté ce verre.
00:28:16j'ai rien fait de mal
00:28:17mais maintenant je le sais.
00:28:19C'est pas moi le coupable.
00:28:20C'est pas moi.
00:28:22Moi j'étais,
00:28:24j'avais 17 ans,
00:28:25j'avais
00:28:26juste une envie
00:28:28c'était de faire la fête.
00:28:29Juste
00:28:30de profiter de la vie.
00:28:31à aucun moment
00:28:38je me dis
00:28:38que je vais en parler
00:28:39à mes parents.
00:28:41Parce que
00:28:42j'ai honte,
00:28:43parce que
00:28:44c'est grave
00:28:44et j'ai pas envie
00:28:46de leur faire de peine.
00:28:51Et
00:28:51il y a
00:28:52à peu près un an,
00:28:54je me lance
00:28:54et je dis
00:28:56à ma mère
00:28:56ce matin-là,
00:28:59moi mon objectif
00:29:00c'était
00:29:00que vous me voyiez pas.
00:29:02Moi je suis allée
00:29:03me recoucher,
00:29:03tu m'as dit
00:29:04que j'avais vidé
00:29:05le ballon d'eau chaude.
00:29:08Ah oui,
00:29:08tu vois,
00:29:08mais ça je me souviens
00:29:09de ça,
00:29:11mais moi je me souviens pas
00:29:12de ça.
00:29:12Parce que c'est
00:29:13hyper anodin.
00:29:14C'est vrai.
00:29:15Je pense.
00:29:18Est-ce que
00:29:18c'est hyper anodin
00:29:19de vider le ballon d'eau chaude
00:29:20à 6h du matin
00:29:22maintenant que je repense
00:29:23au truc ?
00:29:23Peut-être pas,
00:29:24je sais pas.
00:29:24Franchement je suis pas sûre
00:29:26que t'aurais pu voir
00:29:27quelque chose en fait.
00:29:29Très honnêtement.
00:29:34Ce qui veut quand même dire
00:29:35que t'as dû te taper
00:29:36ça toute seule.
00:29:41Je pense que ça m'a fait
00:29:42beaucoup de mal
00:29:43de pas parler,
00:29:44mais
00:29:44je peux pas être sûre
00:29:47que ça se serait
00:29:47si bien passé pour moi
00:29:48si j'avais parlé.
00:29:50Parce qu'en fait,
00:29:51peut-être que j'aurais été
00:29:52au lycée,
00:29:54la fille
00:29:54qui a été violée
00:29:55à la fête de la musique.
00:29:57Peut-être qu'on m'aurait dit
00:29:58que j'aurais pas dû
00:29:58être à 15 ans dehors
00:30:00et boire de l'alcool
00:30:01avec des amis.
00:30:06Et puis de toute façon,
00:30:07dans ton cas,
00:30:09il y a quand même
00:30:10le fait que l'agresseur
00:30:11est pas identifié.
00:30:12d'abord, comment allez-vous ?
00:30:30D'abord, comment allez-vous ?
00:30:31Je vais bien,
00:30:33mais j'ai très peur
00:30:34de l'arrivée de cette étape
00:30:37et voilà, donc...
00:30:39C'est normal d'avoir
00:30:40des angoisses
00:30:41tant que précisément
00:30:43les choses sont floues
00:30:44dans votre esprit.
00:30:45Vous avez jamais
00:30:46assisté à un procès.
00:30:47Il y a ça aussi,
00:30:48oui, c'est vrai.
00:30:49Bien sûr,
00:30:49vous savez pas comment
00:30:50les choses vont se dérouler.
00:30:51Il faut s'attendre
00:30:53à ce que des vidéos
00:30:54soient projetées.
00:30:56Celles de votre maman,
00:30:59elles sont au dossier,
00:31:00le président les a vues.
00:31:02Il a été assez clair,
00:31:03s'il faut les montrer,
00:31:05il le fera
00:31:06parce que c'est important
00:31:07pour les débats.
00:31:09Vous avez l'accusé
00:31:10qui va vous dire
00:31:11« c'est pas moi qu'on voit ».
00:31:12Vous avez ceux qui vont dire
00:31:15« mais moi,
00:31:16en fait,
00:31:16j'étais persuadé
00:31:18qu'elle simulait
00:31:18l'endormissement ».
00:31:20Vraiment, monsieur ?
00:31:21On va les regarder,
00:31:22les vidéos ?
00:31:23On va les regarder ?
00:31:26Ouais.
00:31:32Donc, ce qui est sûr,
00:31:33c'est qu'on n'a pas
00:31:35à en avoir honte,
00:31:36dans le sens où
00:31:37c'est pas ceux
00:31:38qui ont à en avoir honte,
00:31:39c'est ceux
00:31:40qui les ont faites.
00:31:41Et on doit pas
00:31:42se faire écraser,
00:31:43et c'est souvent
00:31:44le cas des victimes.
00:31:46Moi, j'ai vu
00:31:48la majorité
00:31:49des photos
00:31:50issues des vidéos.
00:31:51c'est à vomir.
00:31:56Mais heureusement
00:31:57qu'on a,
00:31:59pour nous,
00:31:59dans le dossier
00:32:00de ma mère,
00:32:00ces 20 000
00:32:00vidéographies,
00:32:01photographies.
00:32:03Parce que sans ça,
00:32:05il n'y avait
00:32:05aucune preuve
00:32:06tangible et matérielle
00:32:07du fait que ma mère
00:32:08ait été droguée
00:32:09et violée
00:32:09pendant 10 ans.
00:32:10de ma mère,
00:32:12c'est à vomir.
00:32:12Sous-titrage Société Radio-Canada
00:32:13Sous-titrage FR ?
00:32:43Mes cheveux, j'y suis attachée à ce que, déjà, quand j'étais petite, je voulais avoir des cheveux super longs.
00:32:55Je ne m'attendais pas du tout à ce que juste des cheveux, tout simplement, révèlent autant de choses.
00:33:06J'ai 15 ans. Je suis au lycée en seconde.
00:33:09Les agressions sexuelles commençaient quand j'avais 9 ans.
00:33:23À chaque fois que ma mère était au travail, mon père, ils ont profité.
00:33:28Après la séparation de mes parents, le week-end où on allait chez lui, vu que je dormais avec lui, il me faisait faire des siestes entre guillemets, du coup.
00:33:42Sinon, il y avait aussi les câlins du soir.
00:33:45Pendant les vacances, tous les jours.
00:33:49Avant de dormir, je prenais un yaourt aux fruits, toujours le même.
00:33:56Et du coup, c'est mon père qui allait me préparer mon yaourt.
00:34:01Et quand il revenait, il y avait la cuillère dedans, il n'y avait plus l'aupercule.
00:34:08Et ça se voyait que ça a été mélangé.
00:34:10Parce que, dès que je le mangeais, il avait un goût très bizarre.
00:34:27De ce que j'ai compris, Lillouane refusait quand même assez rigueillement.
00:34:32Et c'était des heures de négociation pour la faire culpabiliser.
00:34:37Et je pense que c'était la facilité pour lui de lui donner un médicament pour qu'elle dorme.
00:34:51Pour le prélèvement de cheveux, on a été dans un laboratoire spécialisé.
00:34:57Il ne fallait pas que Lillouane se sèche les cheveux ou se les lisse par rapport à la chaleur.
00:35:02Ne pas teindre les cheveux.
00:35:04Et surtout, plus de médicaments pour pouvoir trouver quelles molécules il avait pu lui donner réellement.
00:35:24Trois mois après le prélèvement des cheveux de Lillouane,
00:35:27j'ai appris qu'on avait trouvé de fortes concentrations de Donormil.
00:35:32C'est un semifère assez puissant qu'on peut prendre assez facilement, sans ordonnance à la pharmacie en plus.
00:35:40Et surtout, ce qui est très choquant, c'est que c'est un médicament qui est interdit aux enfants de moins de 15 ans.
00:35:45Ma fille avait des cheveux longs, ce qui a fait que le laboratoire a pu revenir très longtemps en arrière, donc jusqu'à 2018.
00:35:59Lillouane avait 9 ans à cette période-là, et les années passant, le dosage augmente très fortement, jusqu'en 2021, jusqu'à la découverte.
00:36:10Et sur toutes les périodes, vraiment, où les dosages explosent, c'est des périodes où il y a des vacances scolaires, en fait.
00:36:18On est sur des dosages qui, pour moi, sont surhaïssants.
00:36:21Mais on avait enfin une preuve qui accentuait les dires de Lillouane, parce que jusque-là, on n'avait que sa parole.
00:36:31J'ai la chance d'avoir des amis d'enfance
00:37:00de plus de 30 ans.
00:37:03On s'est rencontrés, on avait 12-13 ans.
00:37:09Inga, Carole et Marion, c'est ma famille de cœur.
00:37:12J'ai passé mon adolescence à venir chez toi, pour regarder des films dans le canapé vert avec ton père.
00:37:25Tu vois, je m'en souviens.
00:37:27Quand il t'emmenait à l'école, moi, mon père, il ne m'a jamais emmenée à l'école.
00:37:31Rien que ça, je me disais, oh là là, je trouvais ça chouette.
00:37:34Pour moi, je crois que ma première réaction, ça a été de me dire, c'est impossible.
00:37:39Comment tu peux envisager une seconde qu'il ait fait un truc pareil ?
00:37:43C'est stratosphérique, quoi.
00:37:45Moi, mon père, c'était mon papounet.
00:37:51C'était un père très attachant.
00:37:56Les parents, ils se sont rencontrés jeunes.
00:37:58Ils avaient 18 ans.
00:38:00Moi, j'ai toujours vu mon père très amoureux de ma maman.
00:38:03Et pour ma mère, Dominique, ses 50 ans de sa vie, trois enfants,
00:38:09on apparaissait comme la famille idéale, quoi.
00:38:11Durant ce procès, j'ai peur de ne pas réussir à le détester.
00:38:26C'est ça dont j'ai peur.
00:38:29Mais ce n'est pas ce qu'on le demande, Caron.
00:38:32On pourra dire tout ce qu'on veut.
00:38:34Je veux dire, voilà, c'est ton père, il t'a élevé, il a élevé tes frères.
00:38:38Peut-être que tu arriveras à le détester.
00:38:41Et si tu n'y arrives pas, ce n'est pas grave.
00:38:43Tu vois, c'est ce que je t'ai dit.
00:38:45De toute façon, tu ne peux pas maîtriser tes sentiments.
00:38:50Donc...
00:38:50Non, mais voilà, c'est un long chemin, quoi.
00:38:53C'est un très long chemin.
00:39:01Je vous aime.
00:39:02Non, non, si, macarons.
00:39:04Macarons d'amour.
00:39:06Je vous aime très fort.
00:39:08Être la fille d'un bourreau, d'un pervers sexuel, d'un prédateur sexuel, pour moi, il n'y a pas pire.
00:39:23Si je dois me mettre dans la tête d'un homme qui drogue une femme pour la soumettre,
00:39:29c'est clairement la domination totale et absolue.
00:39:33Là, on ne parle pas de pulsion sexuelle, on ne parle pas de besoin d'affection.
00:39:39Je pense qu'il y a un vrai plaisir pris au fait de prendre le pouvoir sur l'autre et de s'en servir.
00:39:44C'est quelqu'un qui, maintenant, avec le recul, ne supportait pas le nom.
00:39:48Et le seul moyen qu'il avait, en fait, de ne pas entendre ce nom, c'était la drogue.
00:39:56Le premier jour du procès, on a tous le cœur qui bat la chamade.
00:40:20Il y a ma mère, il y a mes deux frères, il y a ma belle-sœur.
00:40:29Il y a mes amis d'enfance.
00:40:32On est déterminés et surtout, on est là pour soutenir maman.
00:40:36Quand je revois mon père dans le box des accusés, je veux qu'il sache que moi, il ne pourra plus jamais me manipuler parce que je sais qui il est et ce qu'il a fait.
00:40:51Et là, je me rends compte qu'on se retrouve dans un tribunal à moins d'un mètre des agresseurs de maman.
00:41:07Et ces individus sont absolument pas mal à l'aise.
00:41:13Ils nous toisent, ils la défient, ils la méprisent.
00:41:20Ma mère, elle ne baisse pas les yeux.
00:41:21Elle les regarde, elles ne se démontent pas.
00:41:28Donc on voit bien qu'on est en face de personnes qui en plus n'ont même pas intégré la gravité des faits qu'ils ont commis.
00:41:41Extrait des auditions.
00:41:43Romain, 58 ans, sans emploi.
00:41:46C'était sa femme, il fait ce qu'il veut avec sa femme.
00:41:49Patrice, 50 ans, électricien.
00:41:54Ce n'était pas un viol car c'est son mari qui proposait.
00:41:59Christian, 52 ans, comptier.
00:42:01Je savais qu'elle était inconsciente et ça m'excitait.
00:42:05Et en plus, ça les excite.
00:42:09Fais-lui-le.
00:42:11Bonjour l'éducation sexuelle.
00:42:14Mais ça dit tout du malaise de notre société.
00:42:17Ça dit tout.
00:42:18Ça dit que la femme n'a pas de valeur.
00:42:22Ça dit que...
00:42:23C'est pour la majorité de ces mecs-là un objet sexuel.
00:42:27C'est une chose qu'on prend, qu'on jette.
00:42:31Pour son plaisir personnel.
00:42:32Sur ces deux photographies, je suis inerte.
00:42:53La couette relevée sur le côté,
00:42:57avec ce grand plan sur mon postérieur.
00:43:00Il y a un cliché où c'est ici, dans ma maison, dans ma chambre à coucher.
00:43:05D'accord ?
00:43:06L'autre, je ne sais pas où il a été pris.
00:43:09Je ne sais pas où je me trouve.
00:43:11Est-ce qu'il y a eu attouchement ?
00:43:13Est-ce qu'il y a eu pire ?
00:43:14Qui a pris ces photos ?
00:43:18C'est pas moi.
00:43:19Je ne suis même pas persuadé que ce soit des photos de ma fille.
00:43:23Pourquoi l'avez-vous droguée ?
00:43:25Pourquoi vous dites ça comme ça,
00:43:27alors qu'il n'y a pas de preuves ?
00:43:30Est-ce que vous l'avez violée ?
00:43:32Caroline, je ne t'ai jamais violée.
00:43:35Jamais droguée.
00:43:36C'est impossible.
00:43:37Je ne t'ai jamais fait ça.
00:43:39Tu mens !
00:43:40Je dois vraiment sortir de la salle
00:43:46parce que c'est insupportable.
00:43:49Il continue à camper sur ses positions
00:43:52parce qu'il est incapable,
00:43:54intellectuellement et psychologiquement,
00:43:57d'assumer les faits.
00:43:58Ah, super.
00:44:17Il faut simplifier.
00:44:18Aujourd'hui,
00:44:20un procès historique se tient en Avignon.
00:44:23Je pense qu'il faut qu'on simplifie ça.
00:44:24Sandrine, j'entends parler de son histoire par ma mère.
00:44:30Ma mère m'appelle ce soir-là
00:44:31et elle me dit
00:44:32« Allume la télé,
00:44:34il y a une députée qui parle de soumission chimique »
00:44:36et je tombe sur le témoignage de Sandrine Jossot.
00:44:39Je vais juste vous rappeler
00:44:40ce que j'ai vécu.
00:44:43Je suis allée en toute amitié
00:44:45fêter la réélection de ce sénateur
00:44:47que je connais depuis dix ans.
00:44:49Il était dans la cuisine,
00:44:50il m'a servi une coupe de champagne.
00:44:52Et je commençais à avoir
00:44:55au bout de quinze minutes
00:44:56des symptômes
00:44:58comme des palpitations,
00:45:00des sueurs.
00:45:01Évidemment que ça fait écho tout de suite.
00:45:04Mais surtout,
00:45:05surtout, je la trouve hyper courageuse.
00:45:11Parce qu'enfin, une politique,
00:45:13une députée
00:45:15à qui c'est arrivé,
00:45:16alors la chance qu'a Sandrine,
00:45:18c'est qu'il n'a pas pu
00:45:21aller au bout de ses intentions,
00:45:23mais néanmoins,
00:45:23il l'a quand même droguée.
00:45:25Et ma mère me dit
00:45:25« Ah, mais tu ne peux pas
00:45:27ne pas la contacter,
00:45:28il faut que vous travailliez ensemble. »
00:45:30Et notre collaboration
00:45:31n'est comme ça.
00:45:33Waouh, Caroline !
00:45:34Oh là là, écoute,
00:45:35je n'ai pas beaucoup dormi.
00:45:37Ça y est,
00:45:38j'ai pu avoir cette question
00:45:40au gouvernement.
00:45:41De toute façon,
00:45:42prends ton temps malgré tout
00:45:43parce que c'est quand même
00:45:44un temps de parole
00:45:46hyper puissant.
00:45:47Ma mère va te regarder,
00:45:49moi je vais te regarder,
00:45:51toutes les victimes
00:45:51qui sont prises en charge
00:45:52par l'association
00:45:53vont te regarder
00:45:54parce que j'ai fait
00:45:54un post ce matin.
00:45:56Très bien.
00:45:57De toute façon,
00:45:57je vais la répéter
00:45:58et on va tout caler en détail.
00:46:00On va y arriver.
00:46:02Compte sur moi, Caroline.
00:46:03Je t'envoie plein d'ondes positives.
00:46:04Je t'envoie tout mon cœur.
00:46:06Merci, merci beaucoup, Caroline.
00:46:07Un bisou, ma Sandrine.
00:46:08Je t'embrasse.
00:46:09Je t'embrasse.
00:46:13On va devoir répéter
00:46:14parce que je pute un peu
00:46:15sur les mots.
00:46:16La parole est à Madame Jossot.
00:46:18Merci Madame la Présidente,
00:46:20Monsieur le Premier Ministre,
00:46:21chers collègues.
00:46:23Pour que cesse enfin
00:46:24ce crime parfait
00:46:25qui ravage et détruit
00:46:28la vie de milliers
00:46:29de Françaises et de Français.
00:46:32Notre objectif,
00:46:33aider à identifier
00:46:35et détecter
00:46:36les cas de soumission chimique
00:46:38pour améliorer
00:46:38la prise en charge
00:46:39des victimes.
00:46:41Il est urgent d'agir.
00:46:42Je vous remercie.
00:46:43Merci beaucoup,
00:46:46ma chère collègue.
00:47:00Cette mission est un premier pas,
00:47:02mais ce n'est pas assez.
00:47:04La classe politique
00:47:05reste moins mobilisée
00:47:06que la société.
00:47:08Comme si la culture du viol,
00:47:10cette forme d'insécurité
00:47:11infligée par les proches,
00:47:12était moins choquante
00:47:14que l'insécurité de la rue.
00:47:17À ce procès historique,
00:47:19il faut une réponse politique
00:47:21historique.
00:47:21maintenant,
00:47:32je vis ma vie
00:47:34à peu près
00:47:36comme une adolescente normale.
00:47:39Je dis à peu près
00:47:40parce qu'il y a encore
00:47:40des séquelles,
00:47:41par exemple,
00:47:42avec les garçons.
00:47:44Je me méfie
00:47:44de chaque garçon
00:47:45que je vois.
00:47:47C'est le méchant
00:47:47d'un film d'horreur.
00:47:49Moi,
00:47:49ça me fait peur
00:47:50à chaque fois.
00:47:52Si on m'effleure,
00:47:53j'ai peur.
00:47:53Si on m'approche,
00:47:55j'ai peur.
00:47:57Dès que c'est un garçon,
00:47:58j'ai peur.
00:48:00Aujourd'hui,
00:48:0130 ans
00:48:01après ce viol,
00:48:03je me sens
00:48:04réparé.
00:48:06Allez, viens.
00:48:07Viens là.
00:48:07Allez, saute.
00:48:10Voilà.
00:48:10J'ai eu la chance
00:48:12il y a 17 ans
00:48:13de rencontrer
00:48:14celui qui va
00:48:15devenir mon mari.
00:48:17Et David,
00:48:17il m'a réappris
00:48:18à avoir confiance
00:48:19en l'autre.
00:48:20Ça, tu le manges ?
00:48:21Non, c'est médicinal.
00:48:23Brache.
00:48:23Ça sert à quoi ?
00:48:24Pour l'eczéma.
00:48:25L'eczéma ?
00:48:26J'en ai pas,
00:48:26je m'en fous.
00:48:27Moi, oui.
00:48:29Ça a été mon poison
00:48:30de ne pas parler.
00:48:32Maintenant,
00:48:32j'en parle ouvertement
00:48:33parce que...
00:48:34parce que ça peut aider.
00:48:37Et puis moi,
00:48:37ça me permet
00:48:38de fermer un livre.
00:48:39et de le remettre
00:48:41dans la bibliothèque
00:48:42et terminer.
00:48:44Bonjour à tous,
00:48:45c'est Zoé.
00:48:47Je suis médecin généraliste
00:48:49et militante féministe.
00:48:50Et donc moi,
00:48:51le sens que je mets
00:48:51à tout ça,
00:48:52c'est de militer.
00:48:54Militer dans mon métier,
00:48:56militer dans ma vie privée.
00:48:58Je fais du podcast,
00:48:59notamment.
00:49:00Et aujourd'hui,
00:49:01on va parler ensemble
00:49:03de soumission chimique.
00:49:05Je fais ça pour moi,
00:49:07pour mes filles
00:49:08et pour les gens
00:49:09à qui ça peut arriver aussi.
00:49:10Merci.
00:49:39Justice pour Gisèle et pour Caroline !
00:49:48Justice pour Gisèle et pour Caroline !
00:49:56Les accusés qui comparaissent libres sont arrivés ce matin
00:50:00avec un sac à la main car ils savent qu'ils risquent
00:50:03de partir en prison à peine le verdict énoncé.
00:50:09Décartez-vous s'il vous plaît !
00:50:39C'est avec une profonde émotion que je m'exprime aujourd'hui devant vous.
00:50:42Ce procès a été une épreuve très difficile,
00:50:45et à cet instant, je pense en premier lieu à mes trois enfants
00:50:48et à mes trois enfants.
00:50:50C'est avec une profonde émotion que je m'exprime aujourd'hui devant vous.
00:50:54C'est avec une profonde émotion que je m'exprime aujourd'hui devant vous.
00:51:07Ce procès a été une épreuve très difficile, et à cet instant, je pense en premier lieu à mes trois enfants,
00:51:13David, Caroline et Florian.
00:51:19Je pense enfin aux victimes non reconnues dont les histoires demeurent souvent dans l'ombre.
00:51:25Je veux que vous sachiez que nous partageons le même combat.
00:51:29Je vous remercie.
00:51:31Madame Pellicot, vous êtes satisfaites des peines ?
00:51:34Écoutez, je respecte la cour et la décision du gardien.
00:51:38Merci Madame.
00:51:39Merci !
00:51:40On va la justice !
00:51:42On va la justice !
00:51:47Merci Gisèle !
00:52:03Merci Caroline !
00:52:05J'avoue que je suis très, très déçue.
00:52:10Les peines qui ont été appliquées sont très loin du compte.
00:52:14Je me dis que le chemin est encore long
00:52:16pour les victimes de soumissions chimiques en France.
00:52:19Ainsi Gisèle, Gisèle, pour toutes celles, toutes celles
00:52:23qui subissent chaque jour leur violence,
00:52:27bien ce procès, décident à d'exposer.
00:52:31C'est mon père de famille, de là on change de camp.
00:52:34Ainsi Gisèle, Gisèle, pour toutes celles, toutes celles
00:52:38qui subissent chaque jour leur violence.
00:52:41A travers ce documentaire réalisé par Linda Bengali,
00:52:44Caroline Darian, la fille de Gisèle Pellicot,
00:52:46revient donc sur le drame désormais connu de tous
00:52:49qui a ravagé sa famille.
00:52:51Mais quelles sont les questions posées à ce jour
00:52:53par la soumission chimique dans notre société ?
00:52:57Eh bien nous allons maintenant débattre avec nos invités
00:52:59présents aujourd'hui sur ce plateau de débats d'oc.
00:53:02Léla Chawashit est tout d'abord avec nous, bienvenue à vous.
00:53:05Vous êtes pharmacienne, rapporteure depuis 2021
00:53:08de l'enquête nationale annuelle sur la soumission chimique
00:53:11et fondatrice du Centre de référence sur les agressions
00:53:15facilitées par les substances spécialisées
00:53:18dans l'accueil et l'orientation des victimes
00:53:21de soumissions chimiques.
00:53:23En face de vous, Denis Salas, bienvenue à vous.
00:53:26Vous êtes magistrat, enseignant associé à l'École nationale
00:53:28de la magistrature et auteur de ce livre,
00:53:31Le déni du viol, essai de justice narrative,
00:53:35un ouvrage disponible aux éditions Michelon.
00:53:38Puis enfin avec nous, Violaine de Philippi-Sabat,
00:53:41bienvenue à vous.
00:53:41Bonjour.
00:53:42Vous êtes avocate, militante féministe,
00:53:44chroniqueuse pour le quotidien L'Humanité
00:53:47et autrice de La résistance écarlate,
00:53:50Les femmes face au nouveau backlash,
00:53:53disponible aux éditions Payot.
00:53:54Ça vient de sortir chez Payot et donc c'est à découvrir
00:53:58en complément de ce que nous allons nous dire ensemble
00:54:01sur ce plateau, bien entendu, après ce documentaire
00:54:03qui ne parle pas uniquement d'ailleurs du procès Pellicot
00:54:06mais qui donne aussi la parole à d'autres victimes
00:54:10que Gisèle Pellicot.
00:54:12Et c'est toute la force d'ailleurs de ce documentaire
00:54:14en matière de témoignage.
00:54:16Nous venons de le voir ensemble.
00:54:18C'est un phénomène nouveau qu'on a à faire
00:54:20lorsqu'on parle de viol, de violence sexuelle,
00:54:22la soumission chimique ?
00:54:23Absolument pas. La soumission chimique, c'est vieux comme le monde.
00:54:26D'ailleurs, on le retrouve même dans nos contes de fées,
00:54:29j'ai envie de vous dire, dans la mythologie, la littérature.
00:54:32Tout le monde connaît ici le mythe de Tristan et Iseute.
00:54:34On parlera de filtres d'amour, mais en réalité,
00:54:37en 2025, on parlerait de drogue du violeur.
00:54:39Et c'est vrai dans toute la littérature,
00:54:40mais aussi dans les faits criminels
00:54:42qui sont extrêmement nombreux et qu'on connaît.
00:54:44Tout le monde connaît l'affaire Polanski, par exemple.
00:54:46Peu de gens savent qu'il s'agit potentiellement
00:54:49d'une soumission chimique infantile
00:54:51puisqu'un médicament est donné à un enfant de moins de 15 ans
00:54:55qui n'est pas en état de consentir avant de procéder à son viol.
00:54:58Donc c'est un exemple.
00:54:59On pourrait parler de l'affaire Fourniré, de l'affaire Dutroux.
00:55:01On connaît énormément de cas.
00:55:03Et au-delà de nos frontières de Jeffrey Dahmer,
00:55:05par exemple, dans les années 80.
00:55:07Donc c'est vieux comme le monde,
00:55:08y compris comme un sujet de santé publique.
00:55:11Le vrai switch actuellement,
00:55:13puisque c'est déjà dans les années 90
00:55:16que le GHB va prendre le titre de drogue du violeur.
00:55:18C'est déjà en 97 qu'on fera un premier état des lieux
00:55:21à l'agence du médicament.
00:55:23On parlera de soumission médicamenteuse.
00:55:25Et donc en fait, même en matière de santé publique,
00:55:28ça fait 20 ans, plus de 20 ans qu'on sait que c'est un sujet.
00:55:30Par contre, aujourd'hui, il est mis en urgence,
00:55:32grâce à Gisèle, grâce à Caroline
00:55:34et toutes celles qui luttent auprès d'elle
00:55:36pour que ça devienne vraiment un calendrier urgent.
00:55:39– Quelles sont les substances utilisées
00:55:41lorsqu'il est question de soumission chimique ?
00:55:43– Alors, souvent, on pense au GHB,
00:55:45c'est ce que je disais tout à l'heure,
00:55:46mais nous, dans nos données, tous les ans...
00:55:47– Le droit du violeur, c'était son appellation,
00:55:49effectivement, vous l'avez dit, dans les années 80, 90.
00:55:52– Tout à fait.
00:55:52Et en fait, le GHB est utilisé en matière criminelle.
00:55:55Je ne veux pas laisser entendre le contraire.
00:55:57En revanche, il est loin d'être le seul agent
00:55:58de soumission chimique.
00:55:59On a surtout des médicaments qui sont utilisés,
00:56:01qui sont détournés.
00:56:02D'ailleurs, au départ, on parlait de soumission médicamenteuse
00:56:04avant de parler de soumission chimique
00:56:06pour étendre le panel des substances.
00:56:07– Et on parle de quel type de médicaments ?
00:56:09– C'est souvent des médicaments sédatifs,
00:56:10donc qui vont endormir, fatiguer, fragiliser,
00:56:13des somnifères, des calmants, des antidouleurs,
00:56:16des traitements contre l'allergie
00:56:18qui peuvent avoir ce type d'effet indésirable.
00:56:19Mais ce ne sont pas que des médicaments,
00:56:21je ne veux pas laisser entendre ça.
00:56:22Vous avez aussi les drogues qui peuvent être utilisées.
00:56:24Aujourd'hui, elles sont au coude à coude avec les médicaments.
00:56:27Et là, on dépasse le sédatif,
00:56:29donc ce qui endort.
00:56:30On va avoir des stimulants, des dissociatifs.
00:56:33Concrètement, l'AMDMA, par exemple,
00:56:35qui rentre dans la composition des comprimés d'ecstasie
00:56:37et le chef de file depuis trois années consécutives
00:56:40sur les substances utilisées à cette fin.
00:56:43Là, l'objectif ne va pas être d'endormir la victime.
00:56:45Ça va être au contraire de la stimuler,
00:56:47de l'hypersensualiser, d'altérer son comportement
00:56:49pour faciliter son passage à l'acte
00:56:52ou de provoquer des hallucinations par des dissociatifs
00:56:54pour, pareil, lui faire perdre la notion de la réalité.
00:56:57Mais qu'on l'endorme, qu'on la stimule ou qu'on la dissocie,
00:57:01l'objectif est le même.
00:57:01C'est réduire au maximum ses capacités de défense
00:57:03pour faciliter son passage à l'acte criminel ou délictuel.
00:57:07Mode opératoire, pas nouveau,
00:57:08c'est ce que vous venez de nous dire.
00:57:10Néanmoins, en forte progression, dites-vous.
00:57:12Qu'est-ce qui vous fait dire ça ?
00:57:14Ce n'est pas qu'il est en forte progression,
00:57:16c'est qu'il y a une prise de conscience collective
00:57:18qui est majeure.
00:57:19En fait, on a une levée du voile
00:57:21sur une problématique vieille comme le monde
00:57:23qui, bien sûr, peut muter, changer,
00:57:26puisque, je vous disais, de nouvelles drogues
00:57:27peuvent arriver, etc.,
00:57:28mais c'est un phénomène ancien.
00:57:30Ce qui va être vraiment marquant,
00:57:32c'est d'abord la libération de la parole
00:57:33en automne 2021,
00:57:35avec le hashtag Balance Ton Bar,
00:57:36qui est un mouvement européen
00:57:37qui a démarré en Belgique,
00:57:39où là, on va avoir un projecteur
00:57:40qui est mis sur ces violences spécifiques
00:57:42dans la sphère festive.
00:57:43Mais en France, ça va avoir un écho
00:57:44tout à fait particulier,
00:57:45parce qu'on va avoir très rapidement
00:57:47la sortie du livre de Caroline Darian,
00:57:49et j'ai cessé de t'appeler Papa,
00:57:51qui va mettre le projecteur
00:57:51sur les violences intrafamiliales,
00:57:54de façon générale, conjugale et incestueuse,
00:57:55et puis après, on va avoir son mouvement
00:57:58qu'elle va lancer,
00:57:59et bien sûr, l'affaire qui va mettre en cause
00:58:01le sénateur Joël Guerriot,
00:58:02donc avec le hashtag Sénatoport
00:58:04qui va circuler.
00:58:05Donc très rapidement, en France,
00:58:06on va avoir sphère festive,
00:58:07sphère privée, sphère professionnelle,
00:58:10et le point de non-retour,
00:58:11le point culminant,
00:58:12celui du procès des viols de Mazin,
00:58:13avec la levée de ce viclo,
00:58:15où là, le tournant qui va être provoqué,
00:58:17c'est la mobilisation du corps médical,
00:58:19puisque cette femme, Gisèle,
00:58:21aura erré pendant 10 ans,
00:58:22et on le doute, en tout cas,
00:58:24que son état de santé s'altère,
00:58:27et en consultant les médecins,
00:58:29ils n'auront pas été en mesure
00:58:30de repérer cette violence
00:58:32et de pouvoir poser le bon diagnostic
00:58:33pour l'aider à s'extraire de ce danger.
00:58:37Alors, le but recherché par les agresseurs,
00:58:38sédation, plus amnésie,
00:58:41c'est ça le principe pour l'agresseur.
00:58:44Pour l'agresseur,
00:58:45la loi est même plus nette que cela,
00:58:47parce qu'il y a à la fois la violence,
00:58:49la contrainte, la menace, la surprise,
00:58:51qui sont les grands thèmes
00:58:53qui se sont dégagés de la jurisprudence
00:58:55depuis déjà pas mal d'années,
00:58:57ce n'est pas un phénomène récent,
00:58:58loin de là.
00:58:59Donc la loi est venue caractériser le viol
00:59:01selon ces quatre critères,
00:59:03et aujourd'hui, on a une vision,
00:59:05grâce au procès de Mazin en particulier,
00:59:07plus précise des choses.
00:59:09Et on voit qu'aujourd'hui,
00:59:10la loi, la législation,
00:59:12mais en même temps,
00:59:13les échos du procès,
00:59:15qui le montrent très bien,
00:59:16la démarche du juge dans le procès aussi,
00:59:18montrent qu'il y a aussi
00:59:18la sidération, l'emprise,
00:59:21toute une série de manipulations
00:59:23qui ne sont pas forcément prévues par la loi,
00:59:25qui commencent à être reconnues,
00:59:27qui voudraient être reconnues
00:59:28par tous ceux qui participent
00:59:31à l'illustration de ces faits.
00:59:33Ça met tout de même un vrai problème
00:59:35du côté des victimes,
00:59:36parce que, par exemple,
00:59:36l'amnésie provoquée par ces soumissions chimiques,
00:59:39pas de mémoire, en réalité,
00:59:40de l'agression.
00:59:41Et vis-à-vis du système judiciaire,
00:59:43derrière, on voit les conséquences
00:59:44que cela peut avoir pour une victime.
00:59:46Il y a ce cas où on voit
00:59:47un cas de jurisprudence
00:59:48qui a été manifesté
00:59:50par le défenseur des droits récemment.
00:59:52Une jeune femme est découverte
00:59:54dans la rue,
00:59:55en état d'ébriété,
00:59:56un beau matin par la police.
00:59:58Elle est arrêtée.
01:00:00Effectivement,
01:00:01elle n'a pas la mémoire
01:00:02de ce qui lui est arrivé.
01:00:03Elle est, en quelque sorte,
01:00:04amnésique et les policiers
01:00:06n'ont pas le réflexe
01:00:08de repérer,
01:00:09d'identifier,
01:00:10par intuition,
01:00:10par recoupement,
01:00:11par analyse,
01:00:12par questionnement,
01:00:13qu'elle a été victime
01:00:13de violences sexuelles,
01:00:15parce qu'elle ne s'en souvient pas.
01:00:16Du coup,
01:00:16ils la mettent en cellule
01:00:17de dégrisement
01:00:18pour, effectivement,
01:00:19considérer qu'elle est en état
01:00:21d'ivresse manifeste
01:00:22et, du coup,
01:00:24elle n'est pas en mesure
01:00:25de faire valoir ses droits
01:00:27et de faire valoir
01:00:28les faits qu'elle a subis.
01:00:29L'erreur de raisonnement
01:00:30des enquêteurs
01:00:32annule, quelque part,
01:00:34l'existence du viol
01:00:34et, du coup,
01:00:35effectivement,
01:00:36le défenseur des droits
01:00:37s'est saisi de la question
01:00:37pour reprocher,
01:00:38en quelque sorte,
01:00:39aux policiers
01:00:39sa démarche
01:00:41et l'absence d'enquête,
01:00:43l'absence d'analyse concrète
01:00:45de ce qui est arrivé
01:00:46à cette victime.
01:00:48Principalement des femmes
01:00:49concernant les victimes,
01:00:5090% ou plus
01:00:52et donc 90% ou plus
01:00:55d'agresseurs
01:00:55qui sont des hommes.
01:00:57Les faits se passent
01:00:58souvent à domicile,
01:00:59majoritairement,
01:01:00et c'est le fait
01:01:02d'un proche,
01:01:02en général,
01:01:02premier cercle.
01:01:04Voilà ce qu'on sait aussi
01:01:05sur ce type d'agression
01:01:07aujourd'hui.
01:01:07Qu'est-ce qu'on peut en dire ?
01:01:08Je pense que ça remet
01:01:09en question
01:01:10la figure du monstre.
01:01:12On l'a vu
01:01:13avec le procès
01:01:14des viols de Mazan,
01:01:15des viols sur Gisèle Pellicot.
01:01:17La société commence
01:01:18à prendre conscience
01:01:19qu'en fait,
01:01:19on encourt plus
01:01:20de risques
01:01:21d'être violés
01:01:21ou agressés
01:01:22par un proche,
01:01:23quelqu'un en qui
01:01:23on avait confiance,
01:01:25parfois quelqu'un
01:01:25avec qui on était
01:01:26ou voulait être
01:01:27en couple
01:01:27et que la rue,
01:01:30finalement,
01:01:30est certes dangereuse
01:01:32aussi,
01:01:33dans certaines circonstances,
01:01:35mais paradoxalement,
01:01:35les moins
01:01:36que le cercle proche.
01:01:37Et ça,
01:01:38c'est assez nouveau
01:01:38comme prise de conscience
01:01:40collective.
01:01:41Il y a encore
01:01:42du mal
01:01:42et beaucoup de choses
01:01:43à faire avancer
01:01:44en termes de mentalité
01:01:45là-dessus
01:01:46puisque je crois
01:01:47que ça fait peur
01:01:47à tout le monde.
01:01:48C'est-à-dire que
01:01:49ça fait peur
01:01:50à tout le monde
01:01:53puisque personne
01:01:54n'a envie de se dire
01:01:55que dans notre entourage,
01:01:56on peut connaître
01:01:56un homme qui a agressé
01:01:57ou violé.
01:01:58On a tellement minimisé
01:02:00les violences faites
01:02:00aux femmes aussi
01:02:01que même en tant que victime,
01:02:02parfois,
01:02:03quand on a été agressé
01:02:03ou violé par un proche,
01:02:05on se dit
01:02:05mais en fait,
01:02:07est-ce que vraiment
01:02:07c'est un vrai viol
01:02:09puisque ce n'était pas
01:02:10au coin d'une rue
01:02:11la nuit,
01:02:11en plus c'est quelqu'un
01:02:12pour qui on pouvait
01:02:13avoir des sentiments.
01:02:13Donc c'est vraiment
01:02:14cette figure du monstre
01:02:15qui est complètement
01:02:15en train d'évoluer,
01:02:17de changer
01:02:17et Leïla parlait
01:02:19au début
01:02:19des contes de fées.
01:02:21Je crois qu'ils ont aussi
01:02:22joué un rôle
01:02:22plus ou moins inconscient
01:02:24ou conscient là-dedans.
01:02:25C'est-à-dire qu'on met
01:02:25dans la tête
01:02:26des petites filles
01:02:26que la belle au bois dormant
01:02:28elle est réveillée
01:02:29finalement sans son consentement
01:02:31par quelqu'un
01:02:31qui l'embrasse
01:02:32et dans une version
01:02:33plus ancienne
01:02:34elle est réveillée
01:02:35parce qu'elle a accouché
01:02:37d'enfant
01:02:37et que donc
01:02:38elle a été violée
01:02:39pendant son sommeil
01:02:39et toute cette culture
01:02:42nous en dit long
01:02:43sur la réalité
01:02:44de la situation actuelle.
01:02:45Pourquoi on en est arrivé là ?
01:02:46Alors vous avez été amenée
01:02:47à défendre des victimes
01:02:49quel est le profil
01:02:50des agresseurs
01:02:51de ces victimes
01:02:54que vous avez eu
01:02:55à défendre ?
01:02:55La plupart des femmes
01:02:56que j'accompagne
01:02:57mais aussi des hommes
01:02:58pour ceux qui ont été
01:02:59violés pendant leur enfance
01:03:01ou adolescence
01:03:02puisque malheureusement
01:03:03ça arrive aussi
01:03:04à des hommes
01:03:05plus spécifiquement eux
01:03:07quand ils sont petits
01:03:08et ils sont agressés
01:03:09par d'autres hommes
01:03:09leurs agresseurs
01:03:11sont de toute catégorie
01:03:13socio-professionnelle
01:03:15et essentiellement
01:03:16des proches
01:03:17c'est-à-dire que
01:03:18dans le cercle
01:03:19on va dire
01:03:21du plus éloigné
01:03:22au plus proche
01:03:22le plus éloigné
01:03:23que j'ai
01:03:24dans les agresseurs
01:03:25qui a donc violé
01:03:26une femme que j'assiste
01:03:27c'est des hommes
01:03:28qu'elle connaissait déjà
01:03:28qu'elle avait rencontrés
01:03:29en soirée
01:03:29donc elle les connaissait
01:03:30d'une soirée précédente
01:03:31elle les connaissait quand même
01:03:32c'était pas
01:03:33au coin d'une rue
01:03:34par hasard
01:03:34entre guillemets
01:03:35et sinon
01:03:36c'est très très régulièrement
01:03:37vraiment
01:03:38l'ex-conjoint
01:03:39ou le conjoint
01:03:40parfois c'est des femmes
01:03:41aussi qui se posent
01:03:42la question de savoir
01:03:42si elles doivent quitter
01:03:43leur conjoint
01:03:44parce qu'elles ont été
01:03:45réveillées avec
01:03:46alors c'est cru
01:03:48mais par exemple
01:03:49j'ai un cas
01:03:49où elle a été réveillée
01:03:50avec plusieurs doigts
01:03:52de son conjoint
01:03:52dans le vagin
01:03:54et cette femme
01:03:56avait du mal
01:03:56à comprendre
01:03:57en quoi son corps
01:03:58était traumatisé
01:03:59pourquoi elle sursautait
01:04:00aussi la nuit
01:04:01et donc c'est un chemin
01:04:02qui prend du temps
01:04:03à conscientiser
01:04:03puisque pour elle
01:04:05elle n'était pas
01:04:06entre guillemets
01:04:06une vraie victime
01:04:07et pour son conjoint
01:04:08qui je ne sais pas
01:04:09si maintenant il l'est toujours
01:04:10d'ailleurs
01:04:10il n'était pas un agresseur
01:04:12puisqu'il était en couple
01:04:13et que donc dans sa tête
01:04:14c'était soi-disant
01:04:15finalement pas si grave
01:04:17oui vous voulez rajouter
01:04:18quelque chose
01:04:19oui sur cette question
01:04:20c'est pour aller
01:04:21dans le même sens
01:04:22c'est très important
01:04:23de déconstruire
01:04:24cette idée reçue
01:04:25selon laquelle
01:04:25je reprends le prisme
01:04:26de la soumission chimique
01:04:28plus précisément
01:04:29selon laquelle
01:04:30les victimes
01:04:30seraient des essais
01:04:32revelés
01:04:32entre guillemets
01:04:32qui laisseraient
01:04:33leur verre sans surveillance
01:04:34qui n'auraient pas respecté
01:04:35les règles élémentaires
01:04:36de prudence
01:04:36ne pas parler aux inconnus
01:04:38ne pas rentrer trop tard
01:04:39le soir
01:04:39et j'en passe
01:04:40c'est encore des choses
01:04:41qui sont très ancrées en nous
01:04:42c'est important de dire
01:04:43et de redire
01:04:44et de rappeler
01:04:44c'est sur la base
01:04:45de nos données
01:04:47la soumission chimique
01:04:48ce n'est pas une affaire
01:04:49de prudence
01:04:50c'est une affaire
01:04:51d'une confiance trahie
01:04:52on ne le répétera
01:04:53jamais assez
01:04:54les victimes
01:04:54laissent leur verre
01:04:56sous la surveillance
01:04:57d'une personne de confiance
01:04:58acceptent leur verre
01:04:59d'une personne de confiance
01:05:00ou laissent leur verre
01:05:01sans surveillance
01:05:02comme vous
01:05:02comme moi
01:05:03dans un contexte
01:05:04qui va gagner leur confiance
01:05:05j'insiste beaucoup là-dessus
01:05:07parce que quand on va
01:05:08au restaurant
01:05:08évidemment qu'on laisse
01:05:09son verre sans surveillance
01:05:10quand on va danser
01:05:11évidemment qu'on pose son verre
01:05:12parce que c'est plus pratique
01:05:13dans une soirée privée
01:05:14et ce qui n'est pas normal
01:05:15c'est qu'on vienne
01:05:16vous administrer
01:05:16une substance à votre insu
01:05:18je vous dis ça aussi
01:05:19parce que quand on parle
01:05:20des agresseurs
01:05:21c'est assez évident
01:05:22de le comprendre
01:05:22vous l'avez très justement rappelé
01:05:24quand on dit
01:05:25qu'on connaît la personne
01:05:26on connaît
01:05:27donc on est censé
01:05:27lui faire confiance
01:05:28j'aimerais quand même
01:05:29insister sur un point
01:05:30l'inconnu existe
01:05:31et l'inconnu aussi est familier
01:05:33l'inconnu ici
01:05:34a un visage extrêmement banal
01:05:35l'inconnu aussi est rassurant
01:05:37on est tous des inconnus
01:05:38les uns pour les autres
01:05:39aujourd'hui
01:05:39évidemment que je vous fais confiance
01:05:41et c'est normal
01:05:42que je vous fasse confiance
01:05:43c'est la trahir
01:05:44qui ne serait pas normale
01:05:45j'insiste là-dessus
01:05:46parce que même
01:05:46quand on parle
01:05:47de l'agresseur inconnu
01:05:48on imagine
01:05:49ce gars à capuche
01:05:50dans une ruelle sombre
01:05:51où c'est écrit sur son front
01:05:52qu'il est infréquentable
01:05:53encore une fois
01:05:54les choses seraient tellement faciles
01:05:55si c'était comme ça
01:05:56en réalité
01:05:56je fais exprès
01:05:57de multiplier les exemples
01:05:59pour ne stigmatiser personne
01:06:00donc le serveur
01:06:01qui vous sert
01:06:02le patron du bar
01:06:03que vous prenez en sympathie
01:06:04le chauffeur qui vous raccompagne
01:06:05parce que vous vouliez
01:06:06être en sécurité
01:06:06etc.
01:06:08le bergeur
01:06:08d'ailleurs dans l'affaire Pellicot
01:06:09on a affaire
01:06:10il m'a dit
01:06:10il y a une famille modèle
01:06:11sur le papier
01:06:12exactement
01:06:12vous voulez rajouter quelque chose
01:06:14tout à fait ce que je voulais
01:06:14compléter
01:06:15il y a deux affaires
01:06:16criminelles récentes
01:06:17qui vont dans le sens
01:06:18de ce que vous dites
01:06:18l'affaire Pellicot
01:06:19et l'affaire dont on parle moins
01:06:21l'affaire Le Squarneck
01:06:22à le tribunal de Vannes
01:06:23cet anesthésiste
01:06:24qui a abusé d'enfants sexuellement
01:06:26pendant leur anesthésie
01:06:27l'affaire Pellicot
01:06:28c'est très intéressant
01:06:29parce que le mari
01:06:30était insoupçonnable
01:06:31il accompagnait sa femme
01:06:33chez le médecin
01:06:34il l'invitait à se coucher
01:06:35il était
01:06:36pour les médecins
01:06:37par son entourage
01:06:38le père idéal
01:06:39en quelque sorte
01:06:40qui ne pouvait pas
01:06:41imaginer un seul instant
01:06:43qu'il puisse être
01:06:44au hauteur de ses actes criminels
01:06:45l'affaire Le Squarneck
01:06:46est très intéressante
01:06:48parce que c'est encore
01:06:48un cas de soumission chimique
01:06:49par l'anesthésie
01:06:50parce que Le Squarneck
01:06:51n'a jamais été soupçonné
01:06:53par l'entourage
01:06:54de ses collègues
01:06:55de quelque manipulation
01:06:57chimique que ce soit
01:06:58il était au contraire
01:06:59le meilleur médecin
01:07:00le meilleur chirurgien
01:07:01des cliniques
01:07:01qu'il a fréquenté
01:07:03et dans une des scènes
01:07:05à l'audience
01:07:07auxquelles j'avais assisté
01:07:08les mères
01:07:11des enfants victimes
01:07:12ont demandé
01:07:13à ce médecin
01:07:14de
01:07:15est-ce qu'il ne pouvait pas
01:07:17effectivement sortir
01:07:18de l'hôpital
01:07:18pour éviter
01:07:19des attouchements supplémentaires
01:07:20parce que les enfants
01:07:21parlaient un peu quand même
01:07:22ils disaient non
01:07:23c'est le protocole
01:07:24l'autorité du médecin
01:07:25était
01:07:26le faisait quelqu'un
01:07:27d'intouchable
01:07:27et on ne pouvait pas
01:07:28effectivement
01:07:29dire quelque chose
01:07:30de contraire
01:07:31à cette autorité
01:07:31pontificale en quelque sorte
01:07:33qui s'est mis à travers
01:07:34sa bouche
01:07:34je vais donner
01:07:35quelques chiffres
01:07:36sous votre contrôle
01:07:36en 2022
01:07:38il y avait
01:07:391229 soumissions
01:07:40et vulnérabilités
01:07:42chimiques vraisemblables
01:07:43qui ont été analysées
01:07:45par le centre de référence
01:07:46des agressions
01:07:46facilitées par les substances
01:07:48c'est votre organisme
01:07:49et puis en 2023
01:07:51127 personnes
01:07:52ont été
01:07:52bel et bien
01:07:53mises en cause
01:07:53au titre de la seule
01:07:54soumission chimique
01:07:5565 procédures
01:07:58ont été poursuivies
01:07:59et les agresseurs
01:08:01ont été
01:08:01condamnés
01:08:02en moyenne
01:08:03à une
01:08:04réclusion
01:08:05de 8,9
01:08:07mois
01:08:08de réclusion
01:08:09criminelle
01:08:10quel problème
01:08:12cela pose
01:08:12aujourd'hui
01:08:13à la justice
01:08:13le traitement
01:08:14de ces affaires
01:08:15on bute sur quoi
01:08:16essentiellement
01:08:17on bute sur plusieurs choses
01:08:18on bute sur le manque
01:08:20de budget
01:08:21et donc en fait
01:08:22en n'ayant pas les moyens
01:08:23de faire des enquêtes
01:08:24les plaintes se retrouvent
01:08:26sous une pile
01:08:27et donc en fait
01:08:28les femmes viennent
01:08:29déposer plainte
01:08:30et puis elles s'attendent
01:08:31légitimement
01:08:32à être rappelées
01:08:32assez rapidement
01:08:33par la police
01:08:34pour savoir
01:08:34ce qui va se passer
01:08:35savoir si l'homme
01:08:36accusé va être auditionné
01:08:37est-ce qu'il y aura
01:08:38une confrontation
01:08:38et comme la justice
01:08:40manque de budget
01:08:41la légère hausse
01:08:42qui a eu lieu
01:08:43ces dernières années
01:08:44ne suffit
01:08:45largement pas
01:08:46et bien en fait
01:08:48quand elles déposent plainte
01:08:49il ne se passe pas
01:08:50grand chose
01:08:51c'est à dire que
01:08:51parfois il se passe
01:08:528 mois
01:08:5210 mois
01:08:5312 mois
01:08:5418 mois
01:08:55avant qu'elles soient
01:08:56informées d'un classement
01:08:58alors qu'elles ne savent
01:08:59même pas s'il y a eu
01:09:00des actes d'investigation
01:09:01dedans
01:09:01alors parfois bien sûr
01:09:02ça se déclenche vite
01:09:03et quand c'est bien fait
01:09:03il faut aussi le souligner
01:09:05j'ai eu le cas
01:09:06dans quelques affaires
01:09:07où les enquêtes
01:09:07cette année
01:09:08se sont déclenchées
01:09:08plus vite
01:09:09que dans d'autres
01:09:10mais c'est là
01:09:11l'auterie
01:09:11et ça reste pas la norme
01:09:12c'est à dire que
01:09:13quand une femme
01:09:13est rappelée
01:09:1510 jours après son dépôt
01:09:16de plainte
01:09:16et qu'on lui dit
01:09:16bon monsieur
01:09:17un tel va être placé
01:09:18en garde à vue
01:09:19voilà comment ça va se passer
01:09:22mais des grandes guillemets
01:09:23elle a de la chance
01:09:24donc si on en est
01:09:25à ce taux de condamnation
01:09:27si faible
01:09:28c'est parce que
01:09:29la justice
01:09:29n'a pas les moyens
01:09:30de faire les enquêtes
01:09:32je vais vous donner
01:09:32un exemple très concret
01:09:33en juin dernier
01:09:34une policière
01:09:35d'Ile-de-France
01:09:36me dit
01:09:37écoutez je suis désolée
01:09:38de recevoir
01:09:39madame
01:09:40donc la plaignante
01:09:40plus de 12 mois
01:09:42après son dépôt de plainte
01:09:42mais on est débordé
01:09:44si vous m'aviez pas relancé
01:09:45le dossier serait resté
01:09:47en bas de la pile
01:09:47et elle me dit
01:09:48il faut savoir que là
01:09:48dans ce commissariat
01:09:49on est entre 4 et 5
01:09:51enquêteurs ou enquêtrices
01:09:52pour 1200 dossiers
01:09:54de violences intrafamiliales
01:09:56et j'ai eu deux gardes à vue
01:09:57de décalés
01:09:58dans deux autres commissariats
01:09:59en juin
01:09:59pour des faits d'agression sexuelle
01:10:01ou de viol
01:10:01et à ce jour
01:10:02je ne sais toujours pas
01:10:03quand est-ce que ces hommes
01:10:04vont être placés en garde à vue
01:10:05et les plaignantes
01:10:06ne le savent pas non plus
01:10:07alors même qu'elles avaient bloqué
01:10:08les créneaux
01:10:08pour se préparer
01:10:10psychologiquement
01:10:11et professionnellement
01:10:11parce qu'elles doivent banaliser
01:10:12leur journée
01:10:13à une éventuelle confrontation
01:10:14est-ce qu'on peut dire néanmoins
01:10:15qu'il y a de plus en plus
01:10:16de dépôts de plainte aujourd'hui
01:10:18et que de ce point de vue-là
01:10:20les choses s'améliorent
01:10:22un tant soit peu
01:10:23du côté des victimes
01:10:24en tout cas
01:10:24ce que justement
01:10:25je voulais préciser
01:10:26par rapport à tout à l'heure
01:10:27c'est que
01:10:27ce n'est pas une augmentation
01:10:28du phénomène
01:10:29c'est une libération de la parole
01:10:30et beaucoup plus
01:10:31que la libération de la parole
01:10:32dont vous parliez au tout début
01:10:33d'ailleurs de notre échange
01:10:33surtout exactement
01:10:34une libération de l'écoute
01:10:35parce que c'est important de dire
01:10:36que les victimes ont toujours parlé
01:10:38et que là
01:10:38elles ont parlé suffisamment fort
01:10:39et collectivement
01:10:40pour qu'on ne puisse plus
01:10:41détendre le regard
01:10:42Donc écoute par le corps médical
01:10:43d'une part
01:10:43et ensuite j'imagine
01:10:44par la police
01:10:47voire la justice
01:10:49après plus globalement
01:10:50Alors vous avez une augmentation
01:10:51des dépôts de plainte
01:10:53qui est le révélateur
01:10:54de cette libération
01:10:55de la parole
01:10:56qui n'est pas forcément
01:10:56une augmentation
01:10:57de la criminalité
01:10:58au sens proprement parlé
01:10:59mais ce qui est important
01:11:01à comprendre
01:11:01c'est que
01:11:02comment est-ce que c'est suivi
01:11:03derrière
01:11:03est-ce qu'on a justement
01:11:04vous le rappelez
01:11:05à très juste titre
01:11:05il faut que derrière
01:11:06les moyens suivent
01:11:07pour que ces dépôts de plainte
01:11:08puissent avoir une suite
01:11:10qui soit donnée
01:11:11Après comme dans
01:11:12tous les phénomènes
01:11:13de libération de la parole
01:11:14c'est quelque chose
01:11:14qu'on a observé
01:11:15au centre de référence
01:11:16sur les agressions
01:11:17facilitées par les substances
01:11:18quand il y a eu l'affaire
01:11:19enfin le procès
01:11:21des viols de Mazan
01:11:22on a eu énormément d'appels
01:11:23pour des faits anciens
01:11:24c'est quand même
01:11:25la signature
01:11:26de la libération de la parole
01:11:27on a eu énormément d'appels
01:11:28de personnes septuagénaires
01:11:30qui se sont identifiées
01:11:31reconnues dans Gisèle
01:11:32et qui ont rapporté
01:11:33des viols
01:11:35qu'avant
01:11:35elles attribuaient
01:11:36à un devoir conjugal
01:11:37ou qu'aujourd'hui
01:11:38qu'elles identifient
01:11:39comme étant un viol conjugal
01:11:40et elles ont suspecté
01:11:41ne pouvant pas le démontrer
01:11:43bien évidemment
01:11:43parfois
01:11:44les mises en cause
01:11:45étaient eux-mêmes
01:11:46enfin les auteurs
01:11:46présumés étaient décédés
01:11:48on parlait d'une veuve
01:11:49au téléphone
01:11:50et pourtant
01:11:50il y avait ce besoin
01:11:51de partager cette parole
01:11:53maintenant
01:11:53ce qui est important
01:11:54c'est que la libération
01:11:55de la parole
01:11:55c'est extrêmement précieux
01:11:56il faut pouvoir en faire
01:11:57quelque chose
01:11:58il faut que derrière
01:11:58les choses suivent
01:11:59parce que si on ajoute
01:12:00à ce grand challenge
01:12:02de s'exprimer
01:12:02sur ces violences
01:12:03la situation d'impasse
01:12:05et d'errance
01:12:05c'est inadmissible
01:12:06donc là-dessus
01:12:06il faut qu'on soit
01:12:07à la hauteur
01:12:07des enjeux
01:12:09et la hauteur des enjeux
01:12:10c'est tout de même
01:12:10comme le défendent
01:12:11beaucoup de structures
01:12:13et notamment
01:12:13la fondation des femmes
01:12:14de donner les moyens
01:12:15à l'ensemble
01:12:15des dispositifs
01:12:16qui viennent en aide
01:12:17aux victimes
01:12:18sinon c'est une parole
01:12:19trahie qu'on aura
01:12:20alors il y a quelque chose
01:12:21de très important aussi
01:12:22qui est intervenu
01:12:23à la suite d'ailleurs
01:12:24en grande partie
01:12:24de ce fameux
01:12:25procès
01:12:26de Mazan
01:12:28c'est cette notion
01:12:29de consentement
01:12:30lorsqu'il est question
01:12:31de définir le viol
01:12:32j'ai vu que
01:12:33Sandrine Jossot
01:12:34qui est une députée
01:12:35qui a elle-même
01:12:35été victime
01:12:36d'une forme
01:12:38de soumission chimique
01:12:39par un sénateur
01:12:41qui était
01:12:42Joël Guerriot
01:12:44demandait
01:12:46dans un rapport
01:12:47qu'elle a eu l'occasion
01:12:48de rédiger ensuite
01:12:49avec une de ses collègues
01:12:50sénatrices
01:12:51d'ailleurs
01:12:51sur le sujet
01:12:52s'interrogeait justement
01:12:54sur cette redéfinition
01:12:55du viol
01:12:57à travers
01:12:58cette notion
01:12:58de consentement
01:12:59ça aussi
01:12:59c'est une des conséquences
01:13:00du procès
01:13:01Gisèle Pellicot
01:13:02je crois
01:13:03absolument
01:13:04où en est-on exactement
01:13:05sur cette définition
01:13:07du viol
01:13:07en intégrant
01:13:08cette notion
01:13:09de soumission chimique
01:13:09la loi
01:13:10qui redéfinit
01:13:12le viol
01:13:13en intégrant
01:13:14la dimension
01:13:14du consentement
01:13:15mais aussi
01:13:16d'autres éléments
01:13:16le consentement
01:13:17doit être libre
01:13:18éclairé
01:13:20révocable
01:13:21ça me semble
01:13:21très important aussi
01:13:22c'est dans la loi
01:13:23maintenant
01:13:23la loi a été votée
01:13:25par l'Assemblée nationale
01:13:26a été retravaillée
01:13:28par le Sénat
01:13:29et est actuellement
01:13:30en commission
01:13:31mixte paritaire
01:13:32et devrait être
01:13:32donc sénateurs
01:13:33et députés
01:13:33pour tous ceux
01:13:34qui nous regardent
01:13:35comprennent bien
01:13:35doivent se mettre
01:13:36d'accord
01:13:36sur un texte final
01:13:37mais les choses
01:13:38sont en cours
01:13:39les choses sont en cours
01:13:40et devraient aboutir
01:13:41avec le nouveau gouvernement
01:13:42j'espère
01:13:42assez rapidement
01:13:43donc cette loi
01:13:45vient en quelque sorte
01:13:47nous mettre
01:13:47en conformité
01:13:48avec les autres
01:13:50pays européens
01:13:51qui pour beaucoup
01:13:52d'entre eux
01:13:52comme l'Espagne
01:13:53comme le Portugal
01:13:53ont accepté
01:13:54effectivement
01:13:54cette définition
01:13:55du consentement
01:13:55j'ajoute
01:13:56un autre point
01:13:57qui me semble
01:13:57très important
01:13:58sur le point central
01:14:00pour moi
01:14:00en tout cas
01:14:01c'est la question
01:14:01de la preuve
01:14:02parce que
01:14:04pour la justice
01:14:06il faut une preuve
01:14:08pour aller jusqu'au bout
01:14:09d'une procédure
01:14:10et le policier
01:14:11l'enquêteur
01:14:12quand il n'a pas
01:14:13un élément substantiel
01:14:14de preuve
01:14:15ne va pas être motivé
01:14:16ne va pas amorcer
01:14:18une démarche
01:14:19qui peut être longue
01:14:20avec une certaine réussite
01:14:21à l'arrivée
01:14:23sans qu'il n'y ait pas
01:14:24cet élément là
01:14:25et la preuve
01:14:26en matière de soumission chimique
01:14:27c'est l'expertise toxicologique
01:14:29qui est faite
01:14:30par prélèvement
01:14:31comme vous l'avez indiqué
01:14:32tout à l'heure
01:14:33parce que si on n'a pas
01:14:34cette preuve
01:14:35c'est la victime
01:14:36qui va être suspectée
01:14:37d'être en état d'ébriété
01:14:39etc.
01:14:39et être en quelque sorte
01:14:40coupable
01:14:41de ce qui lui est arrivé
01:14:42et ça ce sont des tests
01:14:42par définition
01:14:43qu'il faut faire
01:14:44très très vite
01:14:44après l'agression
01:14:45vous l'avez dit
01:14:46vous le direz mieux que moi
01:14:47mais c'est trois jours
01:14:48pour l'urine et le sang
01:14:50un peu plus longtemps
01:14:51pour les cheveux
01:14:52et d'ailleurs Sandrine Jossot
01:14:53qui évoquait son nom
01:14:54cette députée
01:14:55demande le remboursement
01:14:56de ces frais
01:14:56de tests psychologiques
01:14:57pour les femmes
01:14:59qui ne porteraient pas plainte
01:15:01de centrer l'analyse
01:15:01sur cette question
01:15:03de la preuve
01:15:03en soulignant en particulier
01:15:05que dans certaines
01:15:06structures d'accueil
01:15:08de soins
01:15:08on peut faire
01:15:09les prélèvements
01:15:10sur place
01:15:10avec un laboratoire
01:15:11et le parquet
01:15:12ensuite diligente
01:15:13une réquisition
01:15:15pour effectivement
01:15:15réaliser cette expertise
01:15:17donc on avance
01:15:18je pense
01:15:19sur ce terrain
01:15:20de la preuve
01:15:21qui pour la victime
01:15:23mais pour aussi
01:15:24la justice
01:15:24est absolument centrale
01:15:26pour avancer
01:15:26dans la procédure
01:15:27c'est aussi votre avis ?
01:15:28oui alors c'est sûr
01:15:29que la répression
01:15:30c'est important
01:15:31bien sûr
01:15:32puisqu'on est dans une société
01:15:33qui génère énormément
01:15:34de violence
01:15:35et il ne faut pas
01:15:36que ça reste impuni
01:15:37maintenant je me pose aussi
01:15:37la question de la prévention
01:15:38puisque il ne faut pas oublier
01:15:41que la justice
01:15:41a longtemps autorisé
01:15:43les violences faites aux femmes
01:15:44si on remonte
01:15:45après la révolution française
01:15:46le code napoléonien
01:15:48nous n'avions aucun droit
01:15:50dedans
01:15:50et puis c'est resté
01:15:51quand même très tardivement
01:15:52je rappellerai
01:15:53que la première mise
01:15:54en accusation
01:15:54pour viol conjugal
01:15:56validé par la Cour de cassation
01:15:57c'était 1990
01:15:581990
01:15:59c'était donc
01:16:00il y a 35 ans
01:16:01ça veut dire
01:16:02qu'aujourd'hui
01:16:02on a des jeunes hommes
01:16:03de cet âge là
01:16:05qui ont grandi
01:16:06avec des parents
01:16:07qui eux-mêmes
01:16:07ont été éduqués
01:16:08dans une société
01:16:09où le viol conjugal
01:16:10était légal
01:16:11donc en fait
01:16:12on utilise la machine judiciaire
01:16:13pour combattre quelque chose
01:16:14qu'elle a autorisé
01:16:15et je crois que
01:16:16si on prend le problème
01:16:17à la source
01:16:17il faut éduquer
01:16:18dès l'école
01:16:19sur les questions
01:16:20de vie affective
01:16:21et relationnelle
01:16:21alors réjouissons-nous
01:16:22théoriquement cette année
01:16:23c'est censé enfin
01:16:24devenir le cas
01:16:25avec la mise en place
01:16:26dès la rentrée
01:16:27des séances
01:16:28à la vie
01:16:28d'éducation
01:16:30Evars
01:16:31ça s'appelle
01:16:31les séances d'éducation
01:16:32la vie affective
01:16:32et relationnelle
01:16:33malheureusement
01:16:34il y a des enseignants
01:16:35et des enseignantes
01:16:35qui refusent de les faire
01:16:36j'ai l'exemple d'une amie
01:16:37sa fille
01:16:38est en école pré-élémentaire
01:16:40et bien elle m'a appelée
01:16:41parce qu'elle me dit
01:16:42est-ce que tu as un avis
01:16:43à me donner
01:16:43sur comment réagir
01:16:44au fait que l'institutrice
01:16:45a dit qu'elle ne dispenserait
01:16:46pas à ces séances
01:16:47parce qu'elle était contre
01:16:48alors même que c'est
01:16:49une obligation légale
01:16:50théoriquement depuis 2001
01:16:51là je voulais vous faire réagir
01:16:53sur ce que vient dire
01:16:53Denis Salas
01:16:55c'est
01:16:55c'est
01:16:55grande difficulté
01:16:57d'établir des preuves
01:16:58vous l'avez dû le constater
01:17:00avec les clientes
01:17:01que vous avez eu à défendre
01:17:02sur ces sujets
01:17:03même dans le cas
01:17:04d'un dépôt de plainte
01:17:05rapide après le viol
01:17:07qui est un dossier
01:17:08que je suis depuis maintenant
01:17:09presque deux ans
01:17:10j'ai été saisie
01:17:11pendant la procédure
01:17:13donc l'instruction
01:17:13était déjà engagée
01:17:14et en fait
01:17:15on s'est rendu compte
01:17:16que comme la juge d'instruction
01:17:17qui par ailleurs
01:17:18me paraissait très bien
01:17:19et très formée
01:17:20malheureusement
01:17:20est sous l'eau
01:17:21débordée par les dossiers
01:17:22elle a fait faire
01:17:23le prélèvement de cheveux
01:17:25assez tardivement
01:17:27alors que le dépôt de plainte
01:17:28avait eu lieu
01:17:28quelques jours
01:17:29après le viol
01:17:30donc là
01:17:30un exemple
01:17:31de dysfonctionnement judiciaire
01:17:32qui peut-être
01:17:33coûtera la preuve
01:17:34dans ce dossier
01:17:34toujours en cours
01:17:35je voulais juste
01:17:35revenir rapidement
01:17:36sur la question
01:17:37de la preuve
01:17:38parce que ça me paraît
01:17:39essentiel
01:17:40vous avez
01:17:41effectivement
01:17:42tout le challenge
01:17:43c'est que vous avez
01:17:44une course contre la montre
01:17:45qui s'enclenche
01:17:46alors c'est vrai
01:17:46pour toutes les affaires judiciaires
01:17:47a fortiori
01:17:48pour les affaires
01:17:49de soumission chimique
01:17:50les substances
01:17:51éliminent extrêmement rapidement
01:17:52dans le sang et l'urine
01:17:53et ça demande
01:17:54l'urgence
01:17:54c'est de réaliser le prélèvement
01:17:56ce qui est important
01:17:57à comprendre
01:17:57c'est ça
01:17:58c'est que ce ne sont pas
01:17:59n'importe quels analyses
01:18:00c'est pas n'importe
01:18:01quel laboratoire
01:18:02qui peut les réaliser
01:18:03on parle de sciences forensiques
01:18:04de sciences criminalistiques
01:18:05donc concrètement
01:18:06on ne sait pas
01:18:07ce qu'on vous a administré
01:18:08donc il faut rechercher
01:18:09toute substance
01:18:10qui peut altérer
01:18:11l'état de conscience
01:18:12au discernement
01:18:12on voulait
01:18:13forcément administrer
01:18:15à faible dose
01:18:16ou en tout cas
01:18:16à dose thérapeutique
01:18:17entre guillemets
01:18:18donc vous allez avoir
01:18:19des faibles concentrations
01:18:20des prélèvements
01:18:21qui sont faits à distance
01:18:21donc on va être
01:18:22en trace
01:18:23il faut être en capacité
01:18:24d'aller
01:18:25c'est encore une fois
01:18:25une science forensique
01:18:27et donc ça
01:18:27il n'y a que les laboratoires
01:18:28experts et spécialisés
01:18:29qui sont en capacité
01:18:30de le faire
01:18:30avec les machines
01:18:31qui les concernent
01:18:33ces analyses
01:18:33et donc elles sont onéreuses
01:18:34elles sont définies
01:18:36dans le code de procédure pénale
01:18:37donc c'est 1100 euros
01:18:38le sang et l'urine
01:18:391200 euros
01:18:39ce sont les chiffres
01:18:40que j'ai également
01:18:40entre 800 et 1200 euros
01:18:42exactement
01:18:43extrêmement cher
01:18:43si c'est non remboursé
01:18:44ça n'est pas forcément
01:18:45extrêmement cher
01:18:46c'est le prix de ces analyses
01:18:47en revanche
01:18:48ce qui n'est pas possible
01:18:48c'est qu'elles soient soutenues
01:18:49par les victimes
01:18:50donc le débat n'est pas
01:18:51sur le prix
01:18:52en tout cas
01:18:52c'est pas mon débat à moi
01:18:53mon débat à moi
01:18:54il est davantage sur le fait
01:18:56que ces victimes
01:18:57si elles souhaitent déposer plainte
01:18:58elles sont censées
01:19:00avoir ces analyses
01:19:01dans les faits
01:19:01on sait que c'est pas le cas
01:19:02puisqu'ils sont soumis
01:19:02au pouvoir discrétionnaire
01:19:03du magistrat
01:19:04donc même les victimes
01:19:05qui ont déposé plainte
01:19:06sont à la recherche
01:19:06de preuves privées
01:19:07à leurs frais
01:19:08et puis de l'autre côté
01:19:09vous avez celles
01:19:09qui n'ont pas déposé plainte
01:19:10et qui seront aussi
01:19:11dans cette cavale
01:19:12ce qui coûte
01:19:13je finirai juste là-dessus
01:19:14parce que c'est important
01:19:14ce qui coûte
01:19:16c'est pas les analyses
01:19:17ce qui coûte
01:19:17c'est l'errance
01:19:18et c'est le prix des violences
01:19:19Merci vraiment
01:19:19à tous les trois
01:19:21d'avoir participé
01:19:22à ce débat d'oc
01:19:22aujourd'hui
01:19:23après ce documentaire
01:19:24que nous présentions
01:19:25aujourd'hui
01:19:26dans cette émission
01:19:27pour sensibiliser
01:19:28tous et toutes
01:19:29autour de ce problème
01:19:32des violences sexuelles
01:19:33du viol
01:19:34par soumission chimique
01:19:36merci aussi
01:19:36à Félicité Gavalda
01:19:38Thibaut Brosset et Kelle
01:19:39qui m'ont aidé
01:19:39à préparer cette émission
01:19:40vos réactions
01:19:41ça sera sur
01:19:42hashtag débattoc
01:19:42nos invités
01:19:43seront là
01:19:43je l'espère en tout cas
01:19:44pour répondre
01:19:45à ce que seront
01:19:46vos réactions
01:19:47prochain débattoc
01:19:48ça sera bien sûr
01:19:48avec son documentaire
01:19:50et son débat
01:19:51à très bientôt
01:20:04Sous-titrage Société Radio-Canada
01:20:08Sous-titrage Société Radio-Canada
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