- il y a 2 semaines
Caroline Darian, la fille de Gisèle Pelicot, revient sur le drame qui a secoué sa famille : pendant dix ans, son père a drogué sa mère pour la soumettre à des viols commis par des inconnus recrutés sur Internet. Cette affaire expose le scandale de la soumission chimique, une pratique où des agresseurs, généralement proches des victimes, utilisent des médicaments sur ordonnance ou en vente libre pour commettre leurs crimes. Ce phénomène, loin d'être marginal, touche des victimes aux profils variés...
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00:00Musique
00:01...
00:20Devant la cour criminelle du Vaucluse,
00:24s'est ouvert ce matin un procès jamais vu en France.
00:2751 hommes sont accusés au total, âgés de 21 à 68 ans.
00:31...
00:33Je me souviendrai toujours de ce mois de septembre 2024.
00:41Nous arrivions au tribunal en rang serré,
00:43avec mes deux frères et ma mère, Gisèle Pellicot.
00:47Gisèle Pellicot est la victime des viols de Mazan.
00:50Entre 2011 et 2020, Gisèle était droguée par son mari
00:54qui recrutait des hommes pour la violer.
00:57Je m'appelle Caroline Darian.
01:00Je suis la fille de la victime,
01:02mais aussi, et c'est encore plus lourd à porter,
01:04celle du bourreau.
01:06L'histoire de notre famille dépasse tout ce qu'on peut imaginer.
01:11Mais je ne me doutais pas qu'elle allait faire le tour du monde.
01:13...
01:14Le homme qui, pendant des années, drogou à sa femme
01:17pour que autres hommes la violeraient.
01:19Un cas qui a conmocionné.
01:21La nuit à France, et à l'étranger,
01:22beaucoup de l'Europe.
01:23Une femme qui prend le stand,
01:25testifiant aujourd'hui contre...
01:26Gisèle Pellicot, qui est cette femme de 71 ans,
01:29qui est adoptée par le mari.
01:31Je n'imaginais pas non plus que ma mère allait devenir une icône.
01:41On est toutes Gisèle !
01:43Soudain, des voix se sont levées partout en France.
01:51Nous habitons dans ce pays où un corps,
01:55le corps d'une épouse, n'est qu'un bien,
01:58qu'on offrira à d'autres hommes un cadeau de choix
02:00Gisèle Pellicot,
02:02empêche la société de fermer les yeux sur la culture du viol.
02:07Ces quatre dernières années, jusqu'au procès,
02:11je m'étais souvent sentie seule.
02:14Lanceuse d'alerte,
02:15dans une société qui refusait d'entendre l'histoire
02:17de ses victimes droguées pour être violées.
02:21Des victimes qui aujourd'hui se dressent
02:23et témoignent dans ce film à mes côtés.
02:26Combien ils étaient ? Qui c'était ?
02:28Qu'est-ce qu'ils m'ont fait ?
02:29Tout ça, je ne le saurais jamais.
02:31C'est lui qui allait me préparer mon yort.
02:35Dès que je le mangeais, il avait un goût très bizarre.
02:39La soumission chimique est le stade ultime
02:42de la domination masculine.
02:45Il est le maître et il le dit régulièrement.
02:47Je te possède.
02:49Tu es ma chose.
02:50Aujourd'hui, grâce au procès,
02:57nous vivons un moment historique.
03:04C'est l'occasion de changer les mentalités,
03:07puisque c'est ensemble,
03:08et ensemble seulement,
03:09que nous pourrons vaincre la soumission chimique.
03:12Ce procès, on l'espérait autant qu'on le redoutait.
03:31Dans quelques minutes,
03:35mes frères et moi,
03:36on va revoir notre père,
03:38et ma mère va revoir son ex-mari.
03:42Ça fait quatre ans qu'il est sorti de notre famille.
03:44Et le voilà, dans le box des accusés.
03:52Premier échange de regard.
03:55Intense.
03:57Je ressens de la honte, forcément.
04:00Et surtout de la colère devant un tel gâchis.
04:04Nos vies ont basculé.
04:06Impossible de revenir en arrière.
04:10Tout a commencé un soir d'automne, en 2020.
04:14Le lundi 2 novembre 2020,
04:25je suis en télétravail chez moi.
04:27Et à 20h25, mon téléphone va sonner.
04:29C'est ma mère.
04:30Et là, ma mère va me dire,
04:31écoute Caroline, il faut que tu sois assise,
04:33il faut que tu sois forte et courageuse,
04:34parce que...
04:35parce qu'il va falloir que je t'apprenne quelque chose de très grave.
04:48Et là, elle va me dire, écoute,
04:54j'ai passé une bonne partie de la journée au commissariat, Caroline,
04:56et j'ai appris
04:58que ton père
05:00me drogue
05:02depuis plusieurs années maintenant
05:04pour me faire violer par d'autres hommes.
05:10Ce soir-là,
05:12tout s'effondre.
05:14Tout ce qu'on pensait être
05:15solide,
05:18tout s'effondre, en fait.
05:20Tous les repères s'effondrent.
05:21Le point de départ,
05:24c'est qu'il est surpris
05:26un mois et demi avant,
05:27en train de filmer
05:28sous les jupes de trois femmes
05:29dans un supermarché de Carpentras.
05:32Il prend des bonnes prises de vue, votre téléphone.
05:34Il est en train de filmer sous votre robe.
05:36Si, si, si, vous portez plainte.
05:38Il est en train de filmer sous votre robe,
05:40le téléphone, comme ça, à l'instant.
05:42Donc, il va être interpellé
05:43par les membres de la sécurité du magasin.
05:48Vous êtes un gros dégueulasse, vous, en fait.
05:50Vous êtes un gros dégueulasse.
05:53Vous avez de la chance, je vous jure,
05:54c'est ma mère, je vous arrache la tête.
05:56Allez, police, tu me les appelles maintenant.
05:59Madame, je compte sur vous,
06:00je vous portez plainte.
06:02Et derrière, ils vont embarquer
06:03son ordinateur, son disque dur,
06:07plusieurs cartes simon,
06:09son diamescope, etc.
06:11Et en fait, pendant un mois et demi,
06:14ils vont travailler pour exhumer
06:16des vidéos de ma mère
06:18où elle est totalement inerte.
06:20où elle se fait abuser par ses hommes
06:22en présence de son mari.
06:23sur une seule affaire,
06:40on a un échantillon représentatif
06:42de la société française.
06:43Les agresseurs de ma mère,
06:49ils ont entre 23, 25, 30, 32,
06:54jusqu'à 70 ans,
06:57au moment des faits.
07:00Ils habitent pour la plupart
07:02dans le département du Vaucluse.
07:04Il y en avait un qui habitait à deux rues
07:06de chez mes parents,
07:08sur la commune de Mazan.
07:09Ils sont plutôt bien insérés
07:13dans la société.
07:15Ils ont pour la plupart un métier,
07:17parfois même des métiers à responsabilité.
07:20Ils ont une famille,
07:22parfois des enfants,
07:24des enfants bas âge.
07:25Vous leur donneriez le bon Dieu
07:36sans confession.
07:39S'il y a autant de prédateurs sexuels
07:41au profil si banal
07:42sur un petit périmètre,
07:44alors à l'échelle de la France,
07:46les victimes doivent être très nombreuses.
07:48C'est ce que je me suis dit
07:49en commençant à enquêter
07:50sur la soumission chimique.
07:52Ce sont des histoires
07:53comme celles de Zoé,
07:55des histoires d'amnésie.
08:03Alors,
08:03tu vas ouvrir grand, grand, grand
08:05la bouche,
08:06comme un hippopotame.
08:08Oh oui,
08:08t'as une belle angine.
08:10T'as un microbe dans la gorge,
08:11c'est pour ça que t'as mal à ta gorge.
08:13Tu laves un peu la tête ?
08:15Je touche ta gorge.
08:16J'ai choisi d'être médecin généraliste.
08:18Tu vas respirer très, très fort
08:19avec ta bouche.
08:20Et donc, je suis au plus près
08:22du quotidien des gens,
08:23de leur histoire de vie.
08:25Encore, encore ?
08:27Bravo.
08:29Parce que c'est le seul moyen
08:30que j'ai de mettre du sens
08:33dans cette histoire
08:34qui n'a pas de sens.
08:36Je vais prendre votre carte du taxi.
08:38Merci.
08:38C'est là.
08:58À chaque fois que je reviens ici,
09:00je me rappelle que c'est très en ponte.
09:02Le seul souvenir que j'ai de cette histoire,
09:06c'est cet endroit.
09:08Quand je me suis réveillée,
09:10j'étais en travers de la pente,
09:11contre un arbre.
09:13Je me suis toujours demandé
09:14comment il m'avait mise là.
09:17Soit je suis tombée,
09:20soit il m'a jetée
09:21et j'ai roulé.
09:25Et il m'a laissée là.
09:26où ils m'ont laissée là.
09:37J'ai 15 ans.
09:38Je suis en classe de seconde.
09:40Le 21 juin 2006,
09:42c'est la fête de la musique.
09:44Il y a des concerts partout.
09:46On assiste à un concert
09:47qui est sur la place du Donjon de New York.
09:52La place, elle est bondée.
09:56Moi, je danse,
09:59je bois un peu d'alcool.
10:01Pas en quantité monstrueuse,
10:02mais j'en bois un petit peu.
10:05Et puis, il devait être
10:06aux alentours de 23 heures
10:07et là, d'un coup,
10:08j'ai plus aucun souvenir.
10:11Aucun.
10:26Ma mère n'a jamais été rappelée
10:38par un quelconque souvenir.
10:40Jamais.
10:41Et pour la bonne et simple raison
10:42que tout était organisé
10:45pour que ça passe
10:46totalement inaperçu.
10:49Mon géniteur passait
10:50par un site de rencontre
10:51qui s'appelle coco.fr
10:53sur lequel il communiquait
10:57des photos et des vidéos
10:58de ma mère
10:58pour appâter
11:00ses acolytes.
11:03« Je cherche complice pervers
11:06pour abuser de ma femme endormie
11:07en tournante à deux chez moi. »
11:13Le protocole,
11:14c'était de se garer
11:15à proximité du domicile
11:17à quelques centaines de mètres
11:19pour arriver à pied.
11:22Attends sur le parking
11:23qu'elle soit bien endormie.
11:31Dans la majorité des cas,
11:33il les faisait se déshabiller
11:33sur le perron
11:34ou dans la cuisine
11:36avant de poursuivre
11:38dans la chambre.
11:43Il s'agissait
11:44de passer les mains
11:45sous l'eau chaude
11:46pour être sûr
11:46que les mains,
11:47si elles étaient trop froides,
11:48ne réveillent pas ma mère.
11:53Pendant les actes,
11:54lui, filmait,
11:56dirigeait
11:56les actes sexuels.
12:02On sait qu'il n'y a eu
12:03aucune rétribution financière.
12:05Jamais.
12:07Certains sont venus
12:07plusieurs fois.
12:09Certaines fois,
12:10ça a duré plus de six heures.
12:11mon père,
12:18il a drogué
12:19avec de fortes doses
12:21d'anxiolytiques
12:21et de somnifères
12:22qu'il écrasait
12:23dans son verre
12:25à son insu
12:26ou parfois
12:28dans sa nourriture.
12:31Et dans le quart d'heure
12:32qui suivait,
12:34elle perdait connaissance
12:35et elle ne sentait plus rien.
12:37d'autant que
12:40ces substances
12:41qu'on appelle
12:42les benzodiazépines
12:43ont tendance
12:44à relâcher
12:45les muscles.
12:47Donc,
12:47il n'y avait aucune séquelle
12:48des agressions sexuelles
12:50puisque par définition,
12:52tous les muscles du corps
12:53sont totalement relâchés.
12:54C'est exactement
12:55le même principe
12:56qu'une anesthésie générale.
12:59La question
13:00des substances
13:01utilisées
13:01est cruciale.
13:03Contrairement
13:03aux idées reçues,
13:04le GHB,
13:05souvent appelé
13:06la drogue du violeur,
13:07est rarement employé.
13:17Dans la grande majorité
13:19des cas,
13:19l'agresseur se fournit
13:20dans l'armoire
13:21à pharmacie familiale.
13:24somnifères,
13:26anxiolytiques,
13:29antidouleurs,
13:31antiépileptiques
13:32ou encore
13:34antiallergiques.
13:37Administrés
13:37à haute dose,
13:38ils peuvent provoquer
13:39un blackout
13:40de plusieurs heures.
13:41Je reprends conscience
14:00plusieurs heures après.
14:02Le soleil
14:03est en train
14:03de se lever.
14:04J'ai mal.
14:06J'ai mal
14:07un peu partout.
14:07je suis allongée,
14:15je suis couverte
14:16de brindilles,
14:17de feuilles mortes.
14:19Je me rends compte
14:20qu'en fait,
14:20je suis dénudée.
14:23Ma robe est relevée
14:23à peu près
14:25jusqu'à ma poitrine.
14:27Mon soutien-gorge
14:28est dégrafé.
14:29Je l'ai toujours sur moi,
14:31mais il est dégrafé,
14:31il est relevé également.
14:32et je n'ai plus de culotte.
14:36Je me souviens
14:37qu'à ce moment-là,
14:38le seul truc
14:39que j'avais dans ma tête,
14:40c'était qu'il fallait
14:41que je retrouve ma culotte.
14:44Et je fais
14:45pendant plusieurs minutes
14:46des allers-retours
14:47dans cette pente
14:48où je brasse les feuilles
14:49et en regardant
14:52autour de moi,
14:53je comprends où je suis.
14:54Je suis au jardin
14:55des plantes,
14:56à Nior,
14:56c'est à une dizaine
14:58de minutes de marche
14:59de l'endroit
15:00où j'ai mon dernier souvenir.
15:01mais à un endroit
15:02à circuler
15:03et je me sens
15:05effrayée.
15:08Là, je suis vraiment
15:09un enfant perdu
15:10sans sa culotte.
15:12C'est vraiment ça
15:13que je suis à ce moment-là.
15:19J'ai essayé
15:20de me rhabiller
15:20comme je pouvais
15:21et là,
15:23complètement,
15:23de manière automatique,
15:26je suis rentrée chez moi.
15:31quand j'arrive chez moi,
15:33je suis très soulagée
15:34de voir que tout le monde dort.
15:37Et là,
15:37mon premier réflexe,
15:38c'est d'aller sous la douche.
15:46Je me rends compte
15:46que j'ai des échymoses
15:48à l'intérieur des cuisses.
15:51J'ai des plaies
15:52sur les avant-bras,
15:53j'ai des plaies
15:54sur les coudes,
15:54j'ai des échymoses
15:57sur les côtes.
16:01Sur les échymoses
16:03de mes cuisses,
16:03j'ai un réflexe
16:04qui est de les frotter.
16:07Et je me revois
16:08très bien les frotter
16:09encore
16:10et encore
16:11et encore.
16:13J'ai tellement frotté
16:14que je me suis arrachée
16:16la peau.
16:18Je me suis douchée
16:20tellement longtemps
16:20que j'ai vidé
16:21le ballon d'eau chaude
16:22et j'ai continué
16:23à me doucher
16:24sous l'eau froide.
16:28Au bout d'un moment,
16:29j'entends tout le monde
16:30se lever.
16:32Donc je file
16:32dans ma chambre.
16:35J'entends mes parents
16:36qui gueulent
16:38parce qu'il n'y a plus
16:38d'eau chaude.
16:41Ma mère passe la tête
16:42par la porte de ma chambre
16:44et je fais semblant
16:45de dormir.
16:52Ma mère n'a pas pu voir,
16:59n'a pas pu comprendre.
17:02Vers 2015,
17:04je commence
17:05à noter
17:06que ma mère
17:09est très fatiguée.
17:12Elle va commencer
17:13à avoir des attitudes
17:14au téléphone
17:14qui vont nous inquiéter.
17:17Je vais la rappeler
17:18quelques heures plus tard
17:19et elle ne va pas
17:20se souvenir
17:20de m'avoir eu au téléphone.
17:21on se dit
17:22mais
17:23est-ce qu'elle n'est pas
17:25en train de nous faire
17:26un début d'Alzheimer ?
17:27Ma mère est une miraculée.
17:33Non seulement
17:33son cœur
17:35aurait pu lâcher
17:35à tout moment
17:36à cause des surdosages
17:38et en plus,
17:40plusieurs reprises,
17:41ma mère a frôlé
17:41l'accident de voiture
17:42qui aurait pu être mortelle.
17:51dans mes études de médecine,
18:07je n'ai quasiment pas été formée
18:09à la soumission chimique.
18:11Je me rends compte
18:11qu'en fait,
18:12je n'y connais rien.
18:13C'est une des choses
18:14à laquelle il va falloir
18:15que je pense.
18:17Face à des symptômes
18:17inhabituels,
18:18face à des pertes de mémoire,
18:19face à des troupes du sommeil.
18:27La problématique
18:28de la soumission chimique
18:30pose une difficulté,
18:32c'est-à-dire qu'on est
18:32sur quelque chose
18:33de relativement nouveau
18:34et qui nous oblige
18:35tous les professionnels
18:37à sortir
18:37de notre zone de confort.
18:40On peut facilement
18:40passer à côté
18:41d'une victime.
18:42Si on a une victime
18:42sans aucun souvenir
18:44qui me dit
18:44que j'ai sommeil
18:4520 minutes après le dîner,
18:47elle décrit un symptôme
18:48et elle se dit
18:49que ce n'est pas normal
18:50ce que je vis.
18:50On peut peut-être
18:51faire l'effort
18:51de chercher un petit peu,
18:54de creuser.
18:55C'est là où les médecins
18:56généralistes,
18:58les psychiatres de ville,
18:59on a besoin de vous
19:01véritablement.
19:03Je vous remercie beaucoup.
19:04Alors effectivement,
19:11là, on va laisser
19:11la parole à Caroline.
19:12Oui, alors moi,
19:14je suis un peu émue
19:15parce qu'en fait,
19:16c'est la première fois
19:16que je m'adresse
19:17à des professionnels
19:17de santé.
19:19Vous avez un rôle essentiel
19:20en fait dans l'accompagnement
19:21des victimes.
19:22Vous allez potentiellement
19:24sauver des personnes.
19:26Par exemple,
19:27ma mère a perdu
19:2810 kilos en 8 ans.
19:3110 kilos.
19:32Et on ne comprenait pas
19:33pourquoi.
19:34Quand elle parlait,
19:35elle avait des troubles
19:36du langage.
19:38Ma mère était suivie
19:39par des gynécologues,
19:40était suivie par des médecins
19:41généralistes,
19:42a consulté aussi
19:43des spécialistes,
19:44des neurologues.
19:45Et toutes ces personnes-là,
19:46ces spécialistes-là,
19:47n'ont jamais compris
19:49ce que traversait ma mère.
19:50Ce qui est dramatique.
19:52Voilà.
20:03Bonjour.
20:04Bonjour.
20:04Enchantée.
20:05C'est fouet.
20:06Linda a dû vous parler
20:07de moi peut-être un peu.
20:09C'est vous,
20:10la femme médecin.
20:10C'est ça,
20:11exactement.
20:11D'accord.
20:12C'est bien
20:13que vous soyez venus.
20:14Bah ouais.
20:15Et puis bon,
20:15il se trouve que ça m'est arrivé
20:16aussi par ailleurs.
20:18Ah,
20:19je n'ai pas cette info.
20:19Ouais.
20:20Et du coup,
20:20moi,
20:21c'est pour ça que votre histoire,
20:22elle m'a autant marquée.
20:24En tant que médecin aussi,
20:25parce que je me suis vraiment dit,
20:27mais moi,
20:29médecin,
20:29j'aurais eu une femme
20:30qui serait venue me voir
20:31accompagnée de son mari.
20:34Oui,
20:34parce que dans la majorité des cas,
20:35bon ça,
20:35je ne le raconte pas,
20:36mais je ne le dis pas,
20:37je ne le spécifie pas,
20:38mais à chaque fois
20:39qu'elle a été consultée,
20:40évidemment,
20:41il était présent.
20:42et que ça fait partie aussi
20:44de l'amplice psychologique
20:45utilisée dans ce genre
20:48de cas de figure.
20:49Mais en fait,
20:51en tant que médecin,
20:53c'est un peu normal
20:54qu'aujourd'hui,
20:57tant qu'il n'y aura pas
20:57un véritable dispositif
20:59de formation,
21:00on n'y arrivera pas.
21:01Parce que des cas,
21:02comme ma mère,
21:03depuis deux ans,
21:04je peux vous dire,
21:05j'en entends, moi.
21:06Ce n'est pas un cas isolé.
21:09Le combat continue.
21:10Le combat doit continuer,
21:12c'est ça.
21:13Merci en tout cas
21:14pour vous de rien
21:15et puis bon courage à vous.
21:16Oui, merci.
21:22Personne ne connaît
21:23le nombre de victimes
21:24de soumissions chimiques
21:25en France.
21:26D'autant que beaucoup
21:27ne portent jamais plainte,
21:29découragées par la honte
21:30ou empêchées par l'amnésie.
21:34Il suffit d'éplucher
21:35la presse
21:36des 30 dernières années
21:37pour se rendre compte
21:38que le phénomène
21:39est massif
21:40et même systémique.
21:43La basketteuse
21:44droguée au Temesta
21:45avait subi
21:46un viol collectif.
21:49Il drogue sa femme
21:50avec une tatin
21:50pour la voir nue.
21:53Il avait drogué
21:53sa compagne
21:54à son insu
21:54en soupaudrant
21:55sa gaufre de MDMA.
22:00Jusque-là,
22:01ces faits divers,
22:02personne n'avait eu
22:03l'idée de les relier.
22:05Le terme même
22:06de soumission chimique
22:07n'était pas répondu
22:08dans l'opinion.
22:11Il faut une prise
22:12de conscience.
22:15C'est pour ça
22:16que je crée
22:16mon association
22:17M'endort pas.
22:19Je reçois
22:19des centaines
22:20de témoignages.
22:22J'apprends que
22:22toutes les victimes
22:23ne sont pas endormies.
22:25Sous l'effet
22:25de certaines substances,
22:27elles restent conscientes
22:28mais paralysées.
22:30C'est le cauchemar éveillé
22:31qu'a vécu Reynald.
22:49J'ai tendance
22:50à mettre de l'amour
22:51dans tout ce que je fais.
22:53Tiens, regarde.
22:58Quelque part,
22:58je me guéris aussi
22:59en même temps
23:00parce que
23:01la noirceur,
23:04je l'ai vue
23:05de très près.
23:07Et voilà.
23:09Parfait.
23:11Ça a empoisonné
23:12mes nuits,
23:12ça a empoisonné
23:13mes jours.
23:15C'est une partie
23:15poison de ma vie.
23:16A l'âge de 17 ans,
23:33je connais mon attirance
23:34pour les hommes.
23:36C'est très compliqué.
23:38Je viens de la Sarthe,
23:39donc région un peu
23:41terrienne
23:43où
23:44l'homosexualité,
23:48c'est très compliqué.
23:51Donc,
23:52je me cache.
23:54Dans les années 90,
23:56le seul moyen
23:57de rencontrer
23:58des gens comme moi,
23:59oui,
24:00c'est de fréquenter
24:01les établissements gays.
24:06Et
24:06dans la boîte de nuit
24:08qu'on avait l'habitude
24:09de fréquenter
24:09avec les copains,
24:10il y a cet homme,
24:1245 ans à peu près,
24:15qui
24:15régulièrement
24:18me fait du rentre-dedans
24:19me disant
24:19que je lui plais.
24:21Et en fait,
24:22à chaque fois,
24:22je lui disais
24:23non,
24:23mais laisse tomber.
24:24Je suis marié
24:25José Perrec
24:25et je cours plus vite
24:26que toi.
24:27Jamais tu n'arriveras
24:27à me rattraper.
24:29Et un soir,
24:31on parle
24:31et puis
24:32il me dit
24:32bon allez,
24:33c'est bon,
24:34j'ai compris.
24:35Jamais j'arriverai
24:36à avoir une relation
24:38avec toi.
24:38c'est bon,
24:40je lâche l'affaire.
24:42Passe à autre chose.
24:44Soyons potes.
24:46Et il me propose
24:46un verre.
24:48Et je prends
24:48ce fameux
24:49Malibu ananas.
24:54Et au bout
24:55d'un quart d'heure,
24:57vingt minutes,
24:59mon corps devient
24:59du coton.
25:01Je ne me sens pas bien.
25:03Et cet homme me dit
25:04écoute,
25:06viens,
25:06je vais te sortir
25:07pour que tu prennes l'air.
25:08et il m'emmène
25:09chez lui.
25:11Et là,
25:11je me retrouve
25:12à poil
25:13en deux minutes.
25:25Je suis complètement
25:26enfermé dans mon corps.
25:28J'ai conscience
25:28de tout,
25:29je vois tout.
25:30Et là,
25:31j'ai le droit
25:31à une éternité.
25:40À cette violence sexuelle
25:43qui m'a fait subir.
25:45Et tu peux rien dire,
25:46tu peux rien faire
25:47parce que tu cries
25:49à l'intérieur,
25:49mais il n'y a rien
25:50qui sort.
25:52T'as juste envie
25:52que ça s'arrête.
25:53Il est le maître.
25:59Il est le maître
26:00et il le dit régulièrement.
26:02Je te possède.
26:04Tu es ma chose.
26:06Tu vois ?
26:07Je t'avais dit
26:07que je t'aurais.
26:10Et j'ai subi ça
26:11pendant des heures
26:12et des heures.
26:15Jusqu'au moment
26:16où mon corps
26:18a commencé
26:19à re-réagir.
26:21Lui dort.
26:23Il est 8h30,
26:249h du matin.
26:26Et je me suis sauvé.
26:37Trois semaines
26:38après avoir subi
26:39cette agression,
26:41il a fallu
26:42que les souvenirs
26:43s'effacent.
26:44Et le seul moyen
26:44que j'avais,
26:45c'était
26:45d'arrêter de vivre.
26:50Et
26:51j'ai pris des médicaments
26:54avec de l'alcool.
26:57J'ai vomi
26:58tripes et boyaux
26:59et
26:59c'est mon corps
27:01qui n'a pas voulu mourir.
27:09C'est le moment
27:10où tu dis
27:10mais
27:11faut que j'en parle
27:13mais à qui ?
27:15Ma mère ?
27:15Pas possible.
27:17Ma sœur ?
27:18Pas possible.
27:20Parce que
27:20moi dans ma tête,
27:21je l'avais mérité.
27:23Parce que
27:23oui,
27:24j'ai accepté ce verre.
27:27J'ai rien fait de mal
27:28mais maintenant
27:29je le sais.
27:30C'est pas moi le coupable.
27:31C'est pas moi.
27:33Moi j'étais...
27:35j'avais 17 ans,
27:36j'avais
27:36j'avais
27:36juste une envie
27:38c'était de faire la fête.
27:40Juste profiter de la vie.
27:48À aucun moment
27:49je me dis
27:49que je vais en parler
27:50à mes parents.
27:52Parce que j'ai honte,
27:54parce que c'est grave
27:55et j'ai pas envie
27:57de leur faire de peine.
28:02Et il y a
28:03à peu près un an,
28:04je me lance
28:05et je dis à ma mère
28:07ce matin-là,
28:10moi mon objectif
28:11c'était
28:11que vous me voyiez pas.
28:13Moi je suis allée
28:14me recoucher,
28:14tu m'as dit
28:15que j'avais vidé
28:16le ballon d'eau chaude.
28:17Ah oui tu vois
28:19mais ça je me souviens
28:20de ça
28:21mais moi je me souviens
28:22pas de ça.
28:23Parce que c'est
28:24hyper anodin.
28:25Tu vois.
28:26Je pense.
28:28Est-ce que c'est
28:29hyper anodin
28:30de vider le ballon
28:30d'eau chaude
28:31à 6h du matin
28:32maintenant que je repense
28:34au truc ?
28:34Peut-être pas,
28:35je sais pas.
28:36Franchement je suis pas sûre
28:37que t'aurais pu voir
28:38quelque chose en fait.
28:40Très honnêtement.
28:45Ce qui veut quand même dire
28:46que t'as dû te taper
28:47c'est tout seul.
28:52Je pense que ça m'a fait
28:53beaucoup de mal
28:54de pas parler
28:54mais je peux pas être sûre
28:57que ça se serait si bien
28:59pensé pour moi
28:59si j'avais parlé.
29:01Parce qu'en fait
29:02peut-être que j'aurais été
29:03au lycée
29:04la fille
29:05qui a été violée
29:06à la fête de la musique.
29:08Peut-être qu'on m'aurait dit
29:08que j'aurais pas dû
29:09être à 15 ans dehors
29:11et boire de l'alcool
29:12avec des amis.
29:17Et puis de toute façon
29:18dans ton cas
29:18il y a quand même
29:21le fait que l'agresseur
29:22est pas identifié.
29:23d'abord comment allez-vous ?
29:29D'abord comment allez-vous ?
29:42Je vais bien
29:43mais j'ai très peur
29:45de l'arrivée de cette étape
29:47et voilà donc...
29:50C'est normal d'avoir des angoisses
29:52tant que précisément
29:54les choses sont floues
29:55dans votre esprit
29:55vous n'avez jamais
29:57assisté à un procès.
29:58Il y a ça aussi
29:59oui c'est vrai.
30:00Bien sûr
30:00on ne sait pas comment
30:01les choses vont se dérouler.
30:03Il faut s'attendre
30:04à ce que des vidéos
30:04soient projetées.
30:07Celles de votre maman
30:07elles sont au dossier
30:11le président les a vues
30:12il a été assez clair
30:13s'il faut les montrer
30:15il le fera
30:17parce que c'est important
30:18pour les débats.
30:20vous avez l'accusé
30:21qui va vous dire
30:21c'est pas moi qu'on voit
30:23vous avez ceux qui vont dire
30:26mais moi je...
30:27en fait j'étais persuadé
30:29qu'elle simulait l'endormissement.
30:31Vraiment monsieur ?
30:33On va aller regarder les vidéos.
30:35On va les regarder ?
30:41Ouais.
30:43Donc...
30:44Ce qui est sûr
30:44c'est qu'on n'a pas
30:45à en avoir honte
30:47dans le sens où
30:48c'est pas ceux qui ont
30:49à en avoir honte
30:50c'est ceux qui les ont faites
30:51et on doit pas
30:52se faire écraser
30:53et c'est souvent
30:55le cas des victimes.
30:57Moi j'ai vu
30:58la majorité
31:00des photos
31:01issues des vidéos.
31:04C'est un vomir.
31:06Mais
31:07heureusement
31:08qu'on a
31:09pour nous
31:10dans le dossier
31:10de ma mère
31:11ces 20 000
31:11vidéographies photographies.
31:12parce que sans ça
31:14il n'y avait
31:16aucune preuve
31:17tangible et matérielle
31:18du fait que ma mère
31:19ait été droguée
31:20et violée pendant 10 ans.
31:21de ma mère
31:23Sous-titrage FR ?
31:53Mes cheveux, j'y suis attachée à ce que, déjà, quand j'étais petite, je voulais avoir des cheveux super longs.
32:06On ne m'attendait pas du tout à ce que juste des cheveux, tout simplement, révèlent autant de choses.
32:16J'ai 15 ans. Je suis au lycée en seconde.
32:23Les agressions sexuelles commencent quand j'avais 9 ans.
32:34À chaque fois que ma mère était au travail, mon père, ils ont profité.
32:39Après la séparation de mes parents, le week-end où on allait chez lui, vu que je dormais avec lui, il me faisait faire des siestes entre guillemets, du coup.
32:53Sinon, il y avait aussi les câlins du soir.
32:56Pendant les vacances, tous les jours.
32:59Avant de dormir, je prenais un yaourt aux fruits, toujours le même.
33:07Et du coup, c'est mon père qui allait me préparer mon yaourt.
33:12Et quand il revenait, il y avait la cuillère dedans, il n'y avait plus l'aupercule.
33:18Et ça se voyait que ça a été mélangé parce que, dès que je le mangeais, il avait un goût très bizarre.
33:25De ce que j'ai compris, Lillouane refusait quand même assez régulièrement.
33:43Et c'était des heures de négociation pour la faire culpabiliser.
33:48Et je pense que c'était la facilité pour lui de lui donner un médicament pour qu'elle dorme.
33:52Pour le prélèvement de cheveux, on a été dans un laboratoire spécialisé.
34:08Il ne fallait pas que Lillouane se sèche les cheveux ou se les lisse par rapport à la chaleur.
34:12Ne pas teindre les cheveux et surtout, plus de médicaments pour pouvoir trouver quelles molécules il avait pu lui donner réellement.
34:223 mois après le prélèvement des cheveux de Lillouane,
34:37J'ai appris qu'on avait trouvé de fortes concentrations d'Honormil.
34:43C'est un semifère assez puissant qu'on peut prendre assez facilement, sans ordonnance à la pharmacie en plus.
34:51Et surtout, ce qui est très choquant, c'est que c'est un médicament qui est interdit aux enfants de moins de 15 ans.
34:56Ma fille avait des cheveux longs, ce qui a fait que le laboratoire a pu revenir très longtemps en arrière, donc jusqu'à 2018.
35:11Lillouane avait 9 ans à cette période-là et les années passant, le dosage augmente très fortement jusqu'en 2021, jusqu'à la découverte.
35:21Et sur toutes les périodes où les dosages explosent, c'est des périodes où il y a des vacances scolaires.
35:29On est sur des dosages qui, pour moi, sont surréalistants.
35:33Mais on avait enfin une preuve qui accentuait les dires de Lillouane, parce que jusque-là, on n'avait que sa parole.
35:42J'ai la chance d'avoir des amis d'enfance
36:11de plus de 30 ans.
36:14On s'est rencontrés, on avait 12-13 ans.
36:20Inga, Carole et Marion, c'est ma famille de cœur.
36:23J'ai passé mon adolescence à venir chez toi, pour regarder des films dans le canapé vert avec ton père.
36:36Tu vois, je m'en souviens.
36:38Quand il t'emmenait à l'école, moi, mon père, il ne m'a jamais emmenée à l'école.
36:42Rien que ça, je me disais, oh là là, je trouvais ça chouette.
36:45Pour moi, je crois que ma première réaction, ça a été de me dire, c'est impossible.
36:50Comment tu peux envisager une seconde qu'il ait fait un truc pareil ?
36:54C'est stratosphérique, quoi.
36:56Moi, mon père, c'était mon papounet.
37:02C'était un père très attachant.
37:07Les parents, ils se sont rencontrés jeunes.
37:09Ils avaient 18 ans.
37:11Moi, j'ai toujours vu mon père très amoureux de ma maman.
37:14Et pour ma mère, Dominique, ses 50 ans de sa vie, trois enfants,
37:20on apparaissait comme la famille idéale, quoi.
37:22Durant ce procès, j'ai peur de ne pas réussir à le détester.
37:37C'est ça dont j'ai peur.
37:40Mais ce n'est pas ce qu'on le demande, Caron.
37:42On pourra dire tout ce qu'on veut.
37:44Je veux dire, voilà, c'est ton père, il t'a élevé, il a élevé tes frères.
37:49Peut-être que tu arriveras à le détester.
37:52Et si tu n'y arrives pas, ce n'est pas grave.
37:54Tu vois, c'est ce que je t'ai dit.
37:56De toute façon, tu ne peux pas maîtriser tes sentiments.
38:00Donc...
38:00Non, mais voilà, c'est un long chemin, quoi.
38:04C'est un très long chemin.
38:11Je vous aime.
38:13Moi aussi, macaro.
38:15Macaro d'amour.
38:17Je vous aime très fort.
38:17Être la fille d'un bourreau, d'un pervers sexuel, d'un prédateur sexuel, pour moi, il n'y a pas pire.
38:29Si je dois me mettre dans la tête d'un homme qui drogue une femme pour la soumettre,
38:40c'est clairement la domination totale et absolue.
38:45Là, on ne parle pas de pulsion sexuelle, on ne parle pas de besoin d'affection.
38:48Je pense qu'il y a un vrai plaisir pris au fait de prendre le pouvoir sur l'autre et de s'en servir.
38:55C'est quelqu'un qui, maintenant, avec le recul, ne supportait pas le nom.
38:59Et...
39:00Et le seul moyen qu'il avait, en fait, de ne pas entendre ce nom, c'était la drogue.
39:06Le premier jour du procès, on a tous le cœur qui bat la chamade.
39:30Il y a ma mère, il y a mes deux frères, il y a ma belle-sœur.
39:40Il y a mes amis d'enfance.
39:43On est déterminés et, surtout, on est là pour soutenir maman.
39:52Quand je revois mon père dans le box des accusés,
39:56je veux qu'il sache que, moi, il ne pourra plus jamais me manipuler.
40:00Parce que je sais qui il est et ce qu'il a fait.
40:07Et là, je me rends compte
40:09qu'on se retrouve dans un tribunal
40:12à moins d'un mètre des agresseurs de maman.
40:18Et ces individus
40:20ne sont absolument pas mal à l'aise.
40:24Ils nous toisent,
40:26ils la défient,
40:27ils la méprisent.
40:28Ma mère, elle ne baisse pas les yeux.
40:34Elle les regarde,
40:36elle ne se démonte pas.
40:39Donc, on voit bien, en fait,
40:39qu'on est en face de personnes
40:41qui, en plus, n'ont même pas intégré
40:42la gravité des faits
40:45qu'ils ont commis.
40:46Extrait des auditions.
40:54Romain, 58 ans, sans emploi.
40:57C'était sa femme,
40:59il fait ce qu'il veut avec sa femme.
41:02Patrice, 50 ans, électricien.
41:05Ce n'était pas un viol,
41:06car c'est son mari qui proposait.
41:08Christian, 52 ans,
41:11comptier.
41:13Je savais qu'elle était inconsciente
41:14et ça m'excitait.
41:17Et en plus,
41:18elle les excite.
41:20Fais-le.
41:22Bonjour à l'éducation sexuelle.
41:25Mais ça dit tout
41:26du malaise de notre société,
41:28ça dit tout.
41:28ça dit
41:29que la femme n'a pas de valeur,
41:32ça dit que
41:33c'est pour la majorité
41:36de ces mecs-là
41:37un objet sexuel.
41:38C'est une chose
41:39qu'on prend,
41:40qu'on jette
41:40pour son plaisir personnel.
41:43Sur ces deux photographies,
42:03je suis inerte.
42:05La couette relevée sur le côté
42:07avec ce grand plan
42:08sur mon postérieur.
42:11Il y a un cliché
42:12où c'est ici,
42:13dans ma maison,
42:14dans ma chambre à coucher.
42:16D'accord ?
42:17L'autre,
42:18je ne sais pas
42:19où il a été pris.
42:20Je ne sais pas
42:20où je me trouve.
42:22Est-ce qu'il y a eu
42:22attouchement ?
42:24Est-ce qu'il y a eu pire ?
42:26Qui a pris ces photos ?
42:29Ce n'est pas moi.
42:30Je ne suis même pas persuadé
42:31que ce soit des photos
42:32de ma fille.
42:34Pourquoi l'avez-vous droguée ?
42:36Pourquoi vous dites ça
42:37comme ça ?
42:38Alors qu'il n'y a pas de preuve.
42:41Est-ce que vous l'avez violée ?
42:42Caroline,
42:44je ne t'ai jamais violée,
42:45jamais droguée.
42:46C'est impossible.
42:48Je ne t'ai jamais fait ça.
42:50Tu mens.
42:55Je dois vraiment sortir
42:56de la salle
42:56parce que c'est insupportable.
42:59Il continue
43:01à camper
43:02sur ses positions
43:03parce qu'il est incapable
43:04intellectuellement
43:06et psychologiquement
43:07d'assumer les faits.
43:08Ah, super.
43:28Il faut simplifier.
43:29Aujourd'hui,
43:31un procès historique
43:32se tient en Avignon.
43:33Je pense qu'il faut
43:34qu'on simplifie ça.
43:35Sandrine,
43:38j'entends parler
43:38de son histoire
43:39par ma mère.
43:40Ma mère m'appelle
43:41ce soir-là
43:42et elle me dit
43:42« Allume la télé,
43:45il y a une députée
43:45qui parle de soumission chimique »
43:47et je tombe
43:48sur le témoignage
43:49de Sandrine Jossot.
43:50Je vais juste
43:50vous rappeler
43:51ce que j'ai vécu.
43:54Je suis allée
43:54en toute amitié
43:55fêter la réélection
43:57de ce sénateur
43:58que je connais
43:58depuis dix ans.
44:00Il était dans la cuisine,
44:01il m'a servi
44:02une coupe de champagne
44:03et je commençais
44:05à avoir
44:05au bout de quinze minutes
44:07des symptômes
44:08comme des palpitations,
44:11des sefeurs.
44:12Évidemment que ça fait écho
44:13tout de suite
44:14et surtout,
44:16je la trouve
44:18hyper courageuse
44:19parce qu'enfin,
44:22une politique,
44:24une députée
44:25à qui c'est arrivé,
44:27alors la chance
44:28qu'à Sandrine,
44:29c'est qu'il n'a pas pu
44:31aller au bout
44:32de ses intentions
44:33mais néanmoins,
44:34il l'a quand même droguée
44:35et ma mère me dit
44:36« Ah mais tu ne peux pas
44:38ne pas la contacter,
44:39il faut que vous travailliez
44:40ensemble »
44:41et notre collaboration
44:42n'est comme ça.
44:43Waouh, Caroline !
44:45Oh là là,
44:45écoute,
44:46je n'ai pas beaucoup dormi.
44:48Ça y est,
44:49j'ai pu avoir
44:50cette question
44:50au gouvernement.
44:52De toute façon,
44:53prends ton temps
44:53malgré tout
44:54parce que c'est quand même
44:55un temps de parole
44:57hyper puissant.
44:58Tout à fait.
44:58Ma mère va te regarder,
45:00moi je vais te regarder,
45:01toutes les victimes
45:02qui sont prises en charge
45:03par l'association
45:04vont te regarder
45:05parce que j'ai fait
45:05un post ce matin.
45:07Très bien,
45:08de toute façon,
45:08je vais la répéter
45:09et on va tout caler
45:10en détail.
45:11On va y arriver.
45:12Compte sur moi,
45:13Caroline.
45:14Je t'envoie plein
45:15d'ondes positives.
45:15Oui, merci.
45:17Merci,
45:17merci beaucoup,
45:18Caroline.
45:18Je t'embrasse,
45:20je t'embrasse.
45:24On va devoir répéter
45:25parce que je pute
45:26un peu sur les mots.
45:27La parole est à
45:28Mme Jossot.
45:28Merci Madame la Présidente,
45:31Monsieur le Premier Ministre,
45:32chers collègues.
45:34Pour que cesse enfin
45:35ce crime parfait
45:36qui ravage
45:38et détruit
45:39la vie
45:40de milliers
45:40de Françaises
45:41et de Français.
45:42Notre objectif,
45:44aider à identifier
45:46et détecter
45:47les cas
45:47de soumission chimique
45:48pour améliorer
45:49la prise en charge
45:50des victimes.
45:51Il est urgent
45:52d'agir.
45:53Je vous remercie.
45:54Merci beaucoup,
45:57ma chère collègue.
46:11Cette mission est un premier pas,
46:13mais ce n'est pas assez.
46:15La classe politique
46:16reste moins mobilisée
46:17que la société.
46:19Comme si la culture du viol,
46:21cette forme d'insécurité
46:22infligée par les proches
46:23était moins choquante
46:24que l'insécurité
46:25de la rue.
46:28À ce procès historique,
46:30il faut une réponse
46:31politique historique.
46:32Maintenant,
46:43je vis ma vie
46:45à peu près
46:47comme une adolescente
46:48normale.
46:50Je dis à peu près
46:50parce qu'il y a encore
46:51des séquelles,
46:52par exemple,
46:53avec les garçons.
46:54Je me méfie
46:55de chaque garçon
46:56que je vois.
46:57C'est le méchant
46:58d'un film d'horreur.
47:00Moi,
47:00ça me fait peur
47:01à chaque fois.
47:02Si on m'effleure,
47:04j'ai peur.
47:04Si on m'approche,
47:05j'ai peur.
47:07Dès que c'est un garçon,
47:08j'ai peur.
47:11Aujourd'hui,
47:1130 ans
47:12après ce viol,
47:14je me sens
47:15réparé.
47:17Allez, viens.
47:18Viens là.
47:18Allez,
47:19saute.
47:21Voilà.
47:22J'ai eu la chance,
47:23il y a 17 ans,
47:24de rencontrer
47:25celui qui va devenir
47:26mon mari.
47:27Et David,
47:28il m'a réappris
47:29à avoir confiance
47:30sans l'autre.
47:31Ça,
47:31tu le manges ?
47:32Non,
47:32c'est médicinal.
47:33Brache.
47:34Ça sert à quoi ?
47:35Pour l'eczéma.
47:36L'eczéma ?
47:36J'en ai pas,
47:37je m'en fous.
47:38Moi,
47:38oui.
47:40Ça a été mon poison
47:41de ne pas parler.
47:42Maintenant,
47:43j'en parle ouvertement
47:44parce que ça peut aider.
47:48Et puis moi,
47:48ça me permet
47:49de fermer un livre
47:49et de le remettre
47:52dans la bibliothèque
47:53et terminer.
47:54Bonjour à tous,
47:56c'est Zoé.
47:58Je suis médecin généraliste
48:00et militante féministe.
48:01Et donc moi,
48:02le sens que je mets
48:02à tout ça,
48:03c'est de militer.
48:05Militer dans mon métier,
48:07militer dans ma vie privée.
48:08Je fais du podcast,
48:09notamment.
48:10Et aujourd'hui,
48:12on va parler ensemble
48:13de soumission chimique.
48:16C'est ça pour moi,
48:18pour mes filles
48:19et pour les gens
48:20à qui ça peut arriver aussi.
48:54Justice pour Gisèle
48:56et pour Caroline !
48:58Justice pour Gisèle
48:59et pour Caroline !
49:00Justice pour Gisèle
49:02et pour Caroline !
49:03Les accusés
49:08qui comparaissent libres,
49:10eux, sont arrivés
49:11ce matin
49:11avec un sac à la main
49:13car ils savent
49:14qu'ils risquent
49:15de partir en prison
49:16à peine le verdict énoncé.
49:19s'il vous plaît !
49:19Décartez-vous,
49:25s'il vous plaît !
49:26Sous-titrage Société Radio-Canada
49:59C'est avec une profonde émotion que je m'exprime aujourd'hui devant vous.
50:20Ce procès a été une épreuve très difficile
50:22et à cet instant, je pense en premier lieu à mes trois enfants,
50:27David, Caroline et Florian.
50:30Je pense enfin aux victimes non reconnues
50:33dont les histoires demeurent souvent dans l'ombre.
50:36Je veux que vous sachiez que nous partageons le même combat.
50:41Je vous remercie.
50:42Bravo, madame.
50:43Madame Pellicot, vous êtes satisfaites des peines ?
50:45Écoutez, je respecte la cour et la décision de Duvardier.
50:50Merci, madame.
50:51Merci !
50:52On va la justice !
50:53On va la justice !
50:55On va la justice !
50:57On va la justice !
50:58Merci, Caroline !
51:02Merci, Caroline !
51:16J'avoue que je suis très, très déçue.
51:21Les peines qui ont été appliquées sont très loin du compte.
51:25Je me dis que le chemin est encore long
51:26pour les victimes de soumission chimique en France.
51:30Ainsi Gisèle, Gisèle, pour toutes celles, toutes celles
51:34qui subissent chaque jour leur violence,
51:38bien ce procès, décide à d'exposer.
51:41C'est mon père de famille, de là on change de camp.
51:45Ainsi Gisèle, Gisèle, pour toutes celles, toutes celles
51:49qui subissent chaque jour leur violence,
51:52bien ce procès, décide à d'exposer.
51:56C'est mon père de famille et leurs immondes manigances.
52:00Combien d'hommes ordinaires, eux, est protégé par leurs frères,
52:03combien d'hommes ordinaires, eux, est protégé par leurs frères,
52:07mériterait de se trouver sur le banc des accusés,
52:11mériterait de se trouver sur le banc des accusés,
52:14et face à eux vivants et fiers, toutes nos sœurs en colère,
52:18face à eux vivants et fiers, toutes nos sœurs en colère,
52:21déciderait qu'il est bien temps que là on change de camp.
52:25Déciderait qu'il est bien temps que là on change de camp.
52:28Sous-titrage Société Radio-Canada
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