- il y a 5 jours
En 1919, l'arrestation de Landru fait la une de la presse, son procès attire la foule et les écrivains de l'époque commencent à écrire la légende du premier tueur en série français. Plus tard, ce seront les cinéastes, la télévision et les plateformes qui contribueront à faire des serial killers de véritables héros monstrueux de la culture populaire. Les artistes qui ont mis en scène ces figures violentes, les stars du petit écran qui les ont popularisées et les familles de victimes qui assistent impuissantes à cette dérangeante starification reviennent sur les coups d'éclat de cette passion collective et morbide.
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00:00:00Dans nos contes modernes, il a remplacé l'ogre, le loup-garou et le croque-mitaine.
00:00:23Moi, je m'attends à ce tour en série parce que j'ai l'impression qu'il incarne ce qu'il y a de pire chez l'être humain.
00:00:30Et comprendre ce qu'il y a de pire, finalement, c'est se rassurer sur tout le reste.
00:00:36Je crois que leurs actes répétés sont tellement dans la démesure que ça fascine les gens.
00:00:46Les serial killers sont devenus des célébrités dans les médias, comme au cinéma.
00:00:53Quand la réalité dépasse la fiction, difficile de résister à la fascination.
00:01:09Comment imaginer qu'il ait pu faire brûler dix squelettes dans un foyer qui n'est guère plus grand qu'une gamelle de soldats ?
00:01:17Si je mets ça dans un roman, dans un film, il ne va pas me croire. Je vais être obligé de mettre en énorme. C'est une histoire vraie.
00:01:23Les tueurs en série ont ce côté ultra-mégalo. Et donc, ils vont aussi alimenter eux-mêmes leur propre histoire.
00:01:42Le fait qu'il soit un serial killer était un faux de commerce pour lui.
00:01:46Est-ce que vous comptez faire en France, M. Sobrat ? D'abord, je pense négocier pour mes contrats.
00:01:52On se demande si ce n'est pas cool d'être tué en série.
00:01:55Ça nous pose quand même un putain de problème.
00:02:06Mais à quel moment on laisse un type qui a tué ? Peut-être 20, 30 ou 40 personnes raconter sa vie.
00:02:11Il y a des gens derrière, il y a des victimes derrière.
00:02:16Il faut y penser tout le temps à ça.
00:02:19Pourquoi sommes-nous obsédés par les tueurs en série ?
00:02:24Comment sont-ils parvenus à devenir des stars de notre culture populaire ?
00:02:28Le terme de tueur en série.
00:02:58Il est apparu dans les années 60.
00:03:01Il aurait été créé par un employé du FBI qui travaillait à l'académie du FBI à Quantico.
00:03:10Un tueur en série, selon la définition du FBI qui est reprise dans le monde entier,
00:03:15c'est un meurtrier qui a commis au moins trois assassinats
00:03:19dans des périodes différentes et pas au même endroit.
00:03:23Les tueurs en série ont un modus operandi, donc un mode opératoire.
00:03:31C'est-à-dire qu'on va reconnaître leur crime via cette signature à chaque fois.
00:03:35Ça va être la position d'un corps, ça va être un détail, un vêtement.
00:03:39Il y a un engouement du public, une véritable passion pour les tueurs en série
00:03:48parce que je crois que leurs actes répétés sont tellement dans la démesure,
00:03:54tellement hors du commun que ça fascine les gens.
00:03:59En matière criminelle, le dernier à avoir crevé l'écran est un Français.
00:04:15Charles Sombrage, dit le serpent, fait un retour fracassant en décembre 2022.
00:04:21On l'a appris il y a quelques minutes, le tueur en série Charles Sombrage est sorti de prison.
00:04:31Âgé de 78 ans, il est lié à une vingtaine de meurtres dans les années 70.
00:04:35Celui qu'on surnomme le serpent et qui a inspiré une série Netflix a été libéré.
00:04:40BFM TV a rencontré Charles Sombrage.
00:04:43Moi, j'ai trouvé scandaleux la débauche de médias et de promotions
00:04:49qu'a fait le serpent à Charles Sombrage dès sa libération.
00:04:55Il fait la tournée des plateaux de télé où on lui sert la soupe,
00:04:59où c'était relativement complaisant.
00:05:02Ça m'a sidérée, je trouve ça vraiment dégueulasse
00:05:05par rapport à toutes les victimes qu'il a faites.
00:05:13L'itinéraire de Charles Sombrage avait tout pour captiver les médias.
00:05:20Son histoire débute très loin de la France.
00:05:24Il est né en 1944 à Saigon, c'est un tueur en série français
00:05:28qui a sévi en Asie du Sud-Est dans les années 70,
00:05:33au Népal, en Thaïlande, en Inde.
00:05:35Ces victimes étaient des routards, des hippies de l'époque
00:05:44qui faisaient, qui allaient à Goa,
00:05:46qui allaient avec toutes leurs économies,
00:05:48leurs sacs à dos, etc.,
00:05:50qui allaient sur les routes d'Asie.
00:05:58Sombrage rencontre deux personnes,
00:06:01un type assez barraqué d'origine indienne
00:06:03qui va l'aider, très séduisant d'ailleurs.
00:06:05Donc bon recruteur pour des jeunes filles.
00:06:08Et puis il va avoir une maîtresse.
00:06:11Et ces trois Lascars vont attirer des personnes,
00:06:17les empoisonner pour les endormir,
00:06:21les tuer et les dépouiller.
00:06:23Et pendant qu'ils sont inconscients,
00:06:25il va subtiliser leur argent, leur passeport.
00:06:27Plus tard, il va s'intéresser à des personnes
00:06:30qui sont en quête de pierres précieuses aussi dans la région.
00:06:39Rares sont les victimes du serpent
00:06:41encore capables de raconter le piège
00:06:43dans lequel elles sont tombées.
00:06:46Pendant 40 ans,
00:06:48Philippe Hanquin est resté dans l'ombre.
00:06:50Juriste international,
00:06:56collectionneur de pierres précieuses,
00:06:59il a fait cette mauvaise rencontre à Bangkok
00:07:00dans les années 70,
00:07:02dans l'espoir d'acquérir une poignée de saphirs.
00:07:06Alors en 1916, j'étais étudiant en droit,
00:07:08je venais de terminer mes études de droit.
00:07:09J'ai rencontré Charles Chauvrage
00:07:14par l'intermédiaire d'une relation.
00:07:17Il s'est présenté à nous
00:07:18vêtu d'un jean,
00:07:20d'une chemise blanche impeccablement repassée.
00:07:25Donc un garçon de très bonnes présentations.
00:07:32Le contact est établi avec Charles Chauvrage
00:07:34à notre hôtel
00:07:35et puis très rapidement,
00:07:37on rentre dans le vif du sujet.
00:07:40Il me propose de rejoindre
00:07:42dans l'après-midi son appartement
00:07:43situé donc au Canitaos,
00:07:46proche d'une rue commerçante.
00:07:49Une fois cette transaction faite,
00:07:51je prends les pierres,
00:07:52je les mets dans mon jean
00:07:53et on continue de bavarder
00:07:55de choses et d'autres et de futilité.
00:07:57Bon, je regarde ma montre
00:07:58et là je m'aperçois qu'il est 20h30.
00:08:01J'avais perdu la notion du temps
00:08:03et le temps s'était écoulé.
00:08:04Donc je me lève,
00:08:06il m'ouvre la porte
00:08:07et je m'effondre sur le pas de la porte.
00:08:11Donc je pense avoir été sévèrement drogué
00:08:13par Charles Chauvrage.
00:08:15Malgré son état,
00:08:16il parvient à s'enfuir en taxi.
00:08:19Quand il revient à lui,
00:08:21les saphirs ont disparu,
00:08:22tout comme les 20 000 francs de la transaction.
00:08:24On l'appelle le serpent
00:08:30pour sa capacité justement
00:08:32à manipuler les gens.
00:08:34Un peu comme un cobra,
00:08:35il endort ses victimes,
00:08:37il endort les enquêteurs,
00:08:38il endort la police.
00:08:41Lié à une vingtaine de meurtres crapuleux,
00:08:44le serpent se fait prendre
00:08:45à l'été 76.
00:08:46Il se fait arrêter finalement en Inde
00:08:53alors qu'il était en train,
00:08:55il venait tout juste
00:08:56de droguer un groupe de touristes.
00:08:58Donc c'est vraiment quelqu'un
00:08:59qui a eu un modus operandi,
00:09:00qui avait une manière d'agir,
00:09:02qui a été tout le temps la même,
00:09:04qui consistait à endormir
00:09:05ses victimes
00:09:07avant de les éliminer
00:09:08pour les dépouiller.
00:09:10Donc c'est vraiment le modèle
00:09:11qui est le psychopathe pour l'argent.
00:09:15Derrière les barreaux,
00:09:19Charles Sobrage
00:09:20ne va pas manquer d'occasion
00:09:22pour faire recette.
00:09:26Alors je m'appelle François Gingère
00:09:28et je suis producteur.
00:09:32Dès les années 90,
00:09:34l'histoire du céréal empoisonneur
00:09:36est convoitée par le grand
00:09:38et le petit écran.
00:09:41En 1997,
00:09:42j'ai été producteur exécutif
00:09:43d'une série pour TF1
00:09:44qui s'appelle Commissaire Moulin.
00:09:45Et j'étais très proche
00:09:46d'Yves Régnier.
00:09:47Et Yves Régnier
00:09:48voulait faire un film
00:09:49sur Charles Sobrage.
00:09:50Il était allé le rencontrer
00:09:51plusieurs fois en prison
00:09:52à Thiers,
00:09:53à l'époque où Charles
00:09:53était incarcéré en Inde.
00:09:55Comme on s'entend très bien
00:09:56et qu'on avait l'intention
00:09:57de travailler ensemble,
00:09:58Yves Régnier et moi,
00:09:59il m'a fait rencontrer Charles.
00:10:01Je ne savais pas du tout
00:10:05qui était Charles Sobrage.
00:10:06Je n'en avais jamais entendu parler
00:10:07et donc je me demandais
00:10:10pourquoi est-ce qu'il y avait
00:10:12un tel engouement autour de lui
00:10:13et on a commencé à beaucoup,
00:10:15beaucoup parler de son histoire.
00:10:16Parce que sa vie
00:10:17est absolument passionnante,
00:10:19notamment ses périodes en prison
00:10:20sont absolument incroyables,
00:10:21cinématographiquement parlant.
00:10:22Le dimanche 16 mars,
00:10:25il endort ses geôliers
00:10:26avec des friandises
00:10:27bourrées de sédatifs
00:10:28et ses vades.
00:10:34Hier soir,
00:10:34dans un restaurant
00:10:35près de Goa,
00:10:36cette détective déguisée en serveur
00:10:38capture de nouveau le serpent
00:10:40et le remet en cage.
00:10:43Pendant qu'il était en prison,
00:10:44il y a eu plusieurs livres
00:10:45qui ont été écrits sur lui,
00:10:46plusieurs documentaires,
00:10:46plusieurs reportages.
00:10:47Beaucoup de gens ont fait quand même
00:10:48malgré tout
00:10:49beaucoup d'argent sur son dos
00:10:51sans qu'il n'en touche
00:10:52le moindre centime.
00:10:52Il a juste fait,
00:10:54je pense,
00:10:54quelques interviews
00:10:54où il a dû se faire payer,
00:10:56mais ça ne représente pas grand-chose
00:10:57et ça lui a surtout permis
00:10:58quand il était en prison
00:10:59de survivre en prison.
00:11:05Personnage hors du commun,
00:11:07charmeur,
00:11:07toujours habillé avec soin.
00:11:09Ses aventures ont par ailleurs
00:11:10inspiré deux livres,
00:11:11La vie et les crimes
00:11:12de Charles Sobrage
00:11:13et La trace du serpent,
00:11:16celle d'un aventurier
00:11:17mégalomane et douteux.
00:11:20Il n'a eu aucune royaltie
00:11:21des livres,
00:11:21aucune royaltie
00:11:22des documents,
00:11:23mais oui,
00:11:25je crois qu'il partait
00:11:26assez légitimement
00:11:26du principe
00:11:27qu'il était grand temps
00:11:27que son histoire
00:11:28lui rapporte à lui
00:11:29plutôt que de rapporter aux autres.
00:11:31Après 20 ans
00:11:32passé en prison en Inde,
00:11:34Charles Sobrage
00:11:35est de retour
00:11:35sur le sol français.
00:11:37Après 10 heures
00:11:37de garde à vue en France
00:11:39et 20 ans de prison en Inde,
00:11:40Charles Sobrage est libre.
00:11:42« Est-ce que vous comptez faire
00:11:46en France ? »
00:11:47« D'abord,
00:11:47je pense
00:11:47négocier pour mes contrats. »
00:11:50Quand il est retourné
00:11:51en France une première fois
00:11:52à la fin des années 90,
00:11:53il monnayait
00:11:54toutes ses interviews
00:11:55auprès de la presse.
00:11:56Il s'est trouvé
00:11:57un très bon avocat,
00:11:58la personne de Jacques Vergès.
00:11:59Un personnage très médiatique,
00:12:06c'est quelqu'un
00:12:06qui clairement
00:12:07a envie d'être
00:12:08dans la lumière.
00:12:25À la fin des années 90,
00:12:28le fait qu'il soit
00:12:28un serial killer
00:12:29était un fonds de commerce
00:12:29pour lui.
00:12:30Moi, ce que je trouvais
00:12:31intéressant,
00:12:32c'est que j'ai tout de suite
00:12:32eu le sentiment
00:12:33que Charles était quelqu'un
00:12:34qui était bloqué
00:12:35entre ce qu'il est réellement
00:12:36et son image publique.
00:12:39Et je trouvais que psychologiquement,
00:12:40c'était très intéressant
00:12:41à raconter.
00:12:41Ça ne vous pose pas de problème
00:12:42de faire gagner de l'argent
00:12:43à Charles Sobrage
00:12:44en produisant quelque chose
00:12:46avec lui ?
00:12:46Absolument pas.
00:12:47Bien au contraire,
00:12:47j'en serais ravi.
00:12:48Et encore une fois,
00:12:49les gens qui ont fait
00:12:50de l'argent sur le dos
00:12:50de Sobrage,
00:12:50que ce soit les producteurs
00:12:52de documentaires,
00:12:53de films,
00:12:54de magazines,
00:12:54de journaux
00:12:55ou de livres,
00:12:56ça m'étonnerait
00:12:56qu'ils aient donné
00:12:57tout l'argent aux victimes.
00:12:58Et ils se sont enrichis.
00:12:59Donc voilà,
00:13:00je trouve ça totalement hypocrite.
00:13:01Mais je trouve aussi
00:13:02que c'est normal
00:13:03que celui qui fasse
00:13:04un peu d'argent
00:13:04si jamais il y a
00:13:05de l'argent à gagner.
00:13:06Je n'ai aucun état d'âme
00:13:07par rapport à ça.
00:13:08Ni moi d'en gagner,
00:13:10ni de lui en faire gagner.
00:13:10On avait signé
00:13:17un contrat ensemble.
00:13:18Et oui,
00:13:18les choses se présentaient
00:13:19plutôt bien
00:13:20pour en faire
00:13:20un film passionnant.
00:13:21On en était,
00:13:22on avait commencé
00:13:23l'écriture du scénario.
00:13:24Et pourquoi ça a capoté ?
00:13:26Ça a capoté entre autres
00:13:28parce qu'il est parti au Népal
00:13:29et qu'il s'est retrouvé
00:13:30en prison.
00:13:32Accusé du meurtre
00:13:33de deux routards
00:13:34depuis les années 70,
00:13:36Sobrage est arrêté
00:13:37en 2003 au Népal.
00:13:40À nouveau,
00:13:4120 ans de prison.
00:13:44Pendant son incarcération,
00:13:47une série va faire de lui
00:13:48une star mondiale.
00:13:51T'as la belle vie ici
00:13:52grâce à moi.
00:13:56J'ai pas été gentil avec toi ?
00:13:58Alors tu comprends
00:14:00pourquoi j'ai du mal
00:14:01à accepter que
00:14:01tu veuilles t'en aller d'un coup ?
00:14:10Même s'il déteste
00:14:12la série Netflix,
00:14:13la série Netflix a remis
00:14:14un énorme focus
00:14:15sur Charles.
00:14:17Et oui,
00:14:17il est très, très sollicité.
00:14:22Il est médiatisé
00:14:23depuis 50 ans,
00:14:25donc ça fait partie
00:14:26de sa vie.
00:14:27Et au fond de lui-même,
00:14:30ça lui donne
00:14:30une certaine existence.
00:14:33Le fait d'être
00:14:37un personnage médiatisé
00:14:38est très important pour lui.
00:14:40Je pense même
00:14:40que c'est le cœur
00:14:40de son problème
00:14:42ou de son histoire.
00:14:43Ce besoin d'être,
00:14:44d'exister
00:14:45et d'être vu
00:14:46et d'être médiatisé.
00:14:47C'est un individu
00:14:52qui est tellement
00:14:53auto-centré,
00:14:54qui est tellement
00:14:54dans un besoin narcissique
00:14:56de se construire
00:14:57en permanence
00:14:58sur la provocation,
00:15:00etc.
00:15:01que vous ne pouvez pas
00:15:02vous empêcher
00:15:02de vous dire
00:15:03que pour un tueur en série,
00:15:03quand il passe à la télé,
00:15:05c'est à nouveau
00:15:05un moyen,
00:15:07non pas de tuer
00:15:08cette fois-ci,
00:15:08mais de provoquer,
00:15:10de se satisfaire,
00:15:11lui,
00:15:11dans sa déconstruction,
00:15:13dans ses déviances.
00:15:17La raison pour laquelle
00:15:19je sors de mon silence
00:15:20c'est la libération
00:15:22de Charles Chobrage
00:15:23le 26 décembre dernier
00:15:24par les autorités
00:15:24népalaises.
00:15:26Et donc,
00:15:26je ne comprends pas
00:15:27qu'on puisse au jour
00:15:28d'aujourd'hui
00:15:28être fasciné par le personnage
00:15:30et qu'on lui donne
00:15:32tant d'importance
00:15:32alors que c'est vraiment
00:15:33une petite crapule.
00:15:36Donc vous n'avez jamais tué ?
00:15:37Non, je ne l'ai jamais tué.
00:15:39J'ai trouvé l'attitude
00:15:41de Chobrage
00:15:42sur les plateaux
00:15:43qui prétend
00:15:43qu'il n'a jamais tué personne
00:15:45et que ce sont des rumeurs.
00:15:47Donc c'est assez insupportable.
00:15:48Ça l'est pour moi
00:15:50mais ça l'est certainement
00:15:51encore plus
00:15:51pour la famille des victimes.
00:15:55Je suis journaliste
00:15:56donc je suis pour
00:15:56la liberté d'expression.
00:15:58Je suis pour donner
00:15:59la parole
00:15:59à plein de gens
00:16:00y compris parfois
00:16:01aux criminels.
00:16:03Mais d'une certaine façon
00:16:05il faut prendre des gants
00:16:07il faut faire attention
00:16:08il faut penser que derrière
00:16:09il y a du sang
00:16:11il y a de la douleur
00:16:12il y a de la souffrance
00:16:13pour tout le monde
00:16:13il y a des morts.
00:16:15Bientôt on fera un selfie
00:16:16avec un serial killer.
00:16:17et c'est ça
00:16:17notre société
00:16:19pousse
00:16:19on va dire
00:16:20la starification
00:16:21de tout et n'importe quoi
00:16:24et la consommation
00:16:25parce qu'un moment
00:16:25un serial killer
00:16:25devient un produit de consommation
00:16:27c'est ça qui peut être dérangeant
00:16:28je trouve
00:16:28mais ça raconte
00:16:30quelque chose
00:16:30d'une époque là aussi.
00:16:31en France
00:16:45la curiosité
00:16:47pour les tueurs en série
00:16:48commence au début
00:16:48du 20ème siècle
00:16:49en 1921
00:16:53toute la presse
00:16:55s'empare de l'histoire
00:16:56d'un criminel
00:16:57multirécidiviste
00:16:58il faut remettre ça
00:17:02dans le contexte
00:17:03on est à l'époque
00:17:03où il n'y a peut-être
00:17:04pas internet
00:17:05mais vous avez un nombre
00:17:05de quotidiens par jour
00:17:07incroyable
00:17:07avec les journaux du matin
00:17:08les journaux du midi
00:17:09les journaux du soir
00:17:10ça va vite l'actualité
00:17:11les postes radio
00:17:12qui commencent à doucement
00:17:13émerger un peu partout
00:17:14donc on en parle
00:17:16il y a une espèce
00:17:16de bouillonnement
00:17:17il y a un côté feuilleton
00:17:23quand l'histoire se lance
00:17:24donc c'est vraiment
00:17:25une aubaine
00:17:25ça fait acheter du journal
00:17:26ça fait vendre du papier
00:17:27et donc il y a une narration
00:17:29assez hallucinante
00:17:31avec chaque jour
00:17:32des rebondissements
00:17:33et c'est de là
00:17:33que naît la fascination
00:17:34pour les criminels
00:17:35les serial killers
00:17:36c'est vraiment
00:17:36quand la presse
00:17:37a un sou
00:17:38qu'on appelait
00:17:39la presse à un sou
00:17:39c'est démocratisé en France
00:17:41Au centre de l'attention
00:17:44Henri désirait Landru
00:17:46un petit homme
00:17:48d'une cinquantaine d'années
00:17:49accusé d'avoir tué
00:17:51pas moins de dix femmes
00:17:52Landru c'est un escroc
00:17:56on l'appelle
00:17:57le barbe bleue de Gambay
00:17:59dans les Yvelines
00:18:00là où il habite
00:18:00et qui va se mettre
00:18:02pendant la première guerre mondiale
00:18:04à recruter ses victimes
00:18:05des veuves de guerre
00:18:06ou des femmes seules
00:18:08par petites annonces matrimoniales
00:18:11et qui les dépouillent
00:18:12et qui les tuent
00:18:12ça va être son modus operandi
00:18:17c'est comme ça
00:18:18qu'il va travailler
00:18:18pendant la guerre
00:18:20en épousant
00:18:21en passant des annonces
00:18:22pour recruter des femmes
00:18:23en leur faisant croire
00:18:24qu'il est amoureux d'elles
00:18:25qu'elles vivent
00:18:26une histoire d'amour unique
00:18:27alors qu'en réalité
00:18:28il a plusieurs pseudonymes
00:18:30plusieurs faux noms
00:18:31Landru est le tueur
00:18:36de la première guerre mondiale
00:18:37qui est précisément
00:18:37le moment
00:18:38où les femmes
00:18:39sont laissées seules
00:18:41à l'arrière
00:18:42tandis que 3 millions d'hommes
00:18:44en France
00:18:44sont mobilisés
00:18:45pour aller au front
00:18:45donc il y a pour lui
00:18:48un effet d'aubaine
00:18:49un effet d'opportunité
00:18:50ancien juge d'instruction
00:18:57Gilbert Thiel
00:18:59s'est passionné
00:19:00pour Landru
00:19:00et sa mécanique mortelle
00:19:02Landru
00:19:07c'était un homme galant
00:19:09il achetait
00:19:10les billets de train
00:19:10de ses futures victimes
00:19:12simplement
00:19:12il prenait
00:19:13un aller-retour
00:19:14pour lui
00:19:15et un aller simple
00:19:16pour sa pouquette
00:19:17et donc
00:19:19celle-ci
00:19:20ne revenait jamais
00:19:21et cette simple mention
00:19:23établit
00:19:23la large préméditation
00:19:25des crimes
00:19:26qui ont été commis
00:19:27il va les amener
00:19:33dans sa résidence secondaire
00:19:35la maison de Gambay
00:19:37dans cette petite localité
00:19:38située un peu
00:19:39à la sortie
00:19:40du village
00:19:41alors
00:19:42c'est une
00:19:43rue de villa
00:19:44dans toute la
00:19:46splendeur du terme
00:19:47entourée
00:19:48d'un petit muret
00:19:49et il y a quand même
00:19:503000 m2
00:19:52de propriétés autour
00:19:53ce qui va compliquer
00:19:54un peu
00:19:54les fouilles
00:19:55et les recherches
00:19:57de la police
00:19:57cette maison
00:20:03elle intrigue
00:20:04quand même
00:20:05le voisinage
00:20:06parce que les volets
00:20:07sont toujours
00:20:07fermés
00:20:08on voit Landru
00:20:10arriver
00:20:11avec des femmes
00:20:13mais repartir
00:20:14toujours seule
00:20:14c'est jamais
00:20:15la même femme
00:20:16vous connaissez
00:20:16les médisances
00:20:17des villages
00:20:18et les conclusions
00:20:19qui peuvent
00:20:20en être tirées
00:20:21il sortait également
00:20:27de la cheminée
00:20:29une fumée
00:20:30noirâtre
00:20:30pestilentielle
00:20:32il a trouvé
00:20:37une technique
00:20:37assez efficace
00:20:39pour éliminer
00:20:39les corps
00:20:40déjà à l'époque
00:20:41il les place
00:20:43dans son four
00:20:44et les fait
00:20:45réduire en cendres
00:20:46bien que les notes
00:20:48de Landru
00:20:48nous révèlent
00:20:49qu'en deux ans
00:20:50il a acheté
00:20:51792
00:20:52ciamettos
00:20:53comment imaginer
00:20:54qu'il ait pu faire
00:20:55brûler
00:20:5510 squelettes
00:20:57dans un foyer
00:20:58qui n'est guère
00:20:58plus grand
00:20:59qu'une gamelle
00:20:59de soldats
00:21:00il faudra d'ailleurs
00:21:06toute la sagacité
00:21:07d'un inspecteur
00:21:08pour démontrer
00:21:10que c'est bien
00:21:10dans ce four là
00:21:11qu'on pouvait faire
00:21:13disparaître
00:21:13entièrement
00:21:14une personne
00:21:15et il le fera
00:21:16en le testant
00:21:16en prenant
00:21:17un mouton entier
00:21:17et en regardant
00:21:18jusqu'à quel point
00:21:19on peut en arriver
00:21:20à réduire
00:21:21les eaux
00:21:21ensemble
00:21:23ce procès
00:21:30c'est l'endroit
00:21:31où il faut être vu
00:21:32Maurice Chevalier
00:21:34vient aux audiences
00:21:35Rému
00:21:37vient
00:21:38Kipling
00:21:39tout le monde est là
00:21:43le public parisien
00:21:44est là
00:21:45c'est vraiment
00:21:45le spectacle
00:21:47et Landru
00:21:48donc est entré
00:21:49dans la légende populaire
00:21:50dans la culture populaire
00:21:51il devient
00:21:52une espèce
00:21:52une espèce
00:21:54de célébrité
00:21:56il y a un gros impact
00:22:04médiatique
00:22:05et on va donc
00:22:07chercher
00:22:07des chroniqueurs
00:22:09et des chroniqueuses
00:22:10judiciaires
00:22:11qui peuvent attirer
00:22:12le public
00:22:12et parmi elles
00:22:13Colette
00:22:13qui va suivre
00:22:14ce procès
00:22:15du début
00:22:16à la fin
00:22:17voici Landru
00:22:21celui qui attire
00:22:22il retient
00:22:22tous les regards
00:22:23lui
00:22:24100 fois
00:22:24photographié
00:22:25caricaturé
00:22:26reconnu de tous
00:22:27et différent
00:22:28pourtant
00:22:28de ce qu'on connaît
00:22:29de lui
00:22:29je cherche encore
00:22:31sous les traits
00:22:31de cette tête régulière
00:22:32le monstre
00:22:33et ne l'y trouve pas
00:22:35a-t-il tué
00:22:36n'a-t-il pas tué
00:22:37nous ne sommes pas
00:22:38près de le savoir
00:22:39ça sonne juste
00:22:41ça sonne très vrai
00:22:44c'est le portrait
00:22:46de ce qu'est le tueur
00:22:48en série
00:22:48de ce qui fait
00:22:49qu'il nous fascine
00:22:49encore aujourd'hui
00:22:50c'est à dire
00:22:50on connaît ses crimes
00:22:52ils sont exposés
00:22:53c'est factuel
00:22:54on ne peut pas les nier
00:22:55et pour autant
00:22:55l'individu
00:22:56qu'on enfance de nous
00:22:57reste très humain
00:22:58avec ses particularités
00:22:59d'être humain
00:23:00ses failles
00:23:01ses fragilités
00:23:02c'était le premier
00:23:07grand tueur
00:23:08en série français
00:23:09qui a été médiatisé
00:23:10comme ça
00:23:10il a fait la lune
00:23:11des journaux
00:23:12pendant des mois
00:23:13des mois
00:23:13et donc les gens
00:23:14commençaient à dire
00:23:15mais en fait
00:23:15c'est à dire
00:23:16que n'importe qui
00:23:17peut être un tueur
00:23:17en série
00:23:17même s'il n'y avait
00:23:18pas ce terme là
00:23:19à l'époque
00:23:19en tout cas un ogre
00:23:20un prédateur
00:23:21et je pense que
00:23:23ça a fasciné la France
00:23:25et c'est devenu
00:23:25un peu notre mythe
00:23:26français à nous
00:23:27Landru va devenir
00:23:34une espèce de figure
00:23:36de héros du mal
00:23:37en France
00:23:38tout le monde
00:23:39est fasciné
00:23:40par ce tueur
00:23:40qui a une certaine
00:23:41éloquence
00:23:42et une certaine
00:23:42élégance aussi
00:23:43c'est quelqu'un
00:23:47qui présente bien
00:23:49qui est calme
00:23:50qui n'est pas
00:23:51un énervé
00:23:52c'était un homme
00:23:54intelligent
00:23:55et rusé
00:23:57et en même temps
00:23:59on le verra
00:24:00au moment
00:24:01du procès d'assises
00:24:02quelqu'un qui a le sens
00:24:04de la répartie
00:24:05et beaucoup d'humour
00:24:06pendant le procès
00:24:07Landru va tour à tour
00:24:09se montrer goguenard
00:24:10railleur spirituel
00:24:11autant que cynique
00:24:12sur un effet d'audience
00:24:13alors que son avocat
00:24:14feint de quitter la tribune
00:24:16Landru prend son chapeau
00:24:18se lève et dit
00:24:18moi je m'en irai bien aussi
00:24:20Landru c'est intéressant
00:24:28chez lui
00:24:29c'est qu'il était
00:24:29pas con
00:24:30c'est un personnage
00:24:31qui avait de l'esprit
00:24:31qui avait de l'humour
00:24:32et du coup
00:24:33à un moment
00:24:34il devient
00:24:34oui là
00:24:35le vrai poil à gratter
00:24:37cynique
00:24:38de la société
00:24:40c'est à dire
00:24:40qu'avec ce principe simple
00:24:42vous êtes gentil
00:24:42le gouvernement
00:24:43de me condamner
00:24:44alors que vous tuez
00:24:45vous envoyez des français
00:24:46à la guerre
00:24:47moi je n'ai tué
00:24:48que quelques veuves
00:24:49je veux dire
00:24:50c'est un moment
00:24:51qui est le plus assassin
00:24:53de nous deux
00:24:53malgré sa grande popularité
00:24:56à 52 ans
00:24:58Landru
00:24:59est condamné à mort
00:25:00il tire sa révérence
00:25:03le 25 février 1922
00:25:05sur la guillotine
00:25:07sa notoriété
00:25:08pourtant
00:25:09ne faiblit pas
00:25:10en 1947
00:25:14Charlie Chaplin
00:25:15s'en inspire
00:25:16dans une comédie
00:25:17mettant en scène
00:25:18un tueur en série
00:25:19de bourgeoise
00:25:20monsieur Verdoux
00:25:21en France
00:25:44Claude Chabrol
00:25:44et Françoise Sagan
00:25:45revisite son histoire
00:25:47en 1963
00:25:48avec un tout jeune
00:25:50Charles Denner
00:25:50métamorphosé
00:25:51en Landru
00:25:51ainsi c'est vous Landru
00:25:57oui monsieur
00:25:59pour vous servir
00:26:01je crois que c'est le genre
00:26:06de sujet
00:26:07qu'on peut se permettre
00:26:08de traiter un peu
00:26:09à la rigolade
00:26:10parce que
00:26:11enfin à la rigolade
00:26:12parce que
00:26:14c'est un personnage
00:26:16qui a toujours
00:26:17amuser les gens
00:26:18quand on regarde
00:26:24Landru
00:26:25il y a quelque chose
00:26:26qui est à la fois
00:26:26du vaudeville
00:26:27de la comédie
00:26:28et en même temps
00:26:29quelque chose
00:26:29d'assez sinistre
00:26:30et de terrible
00:26:31c'est ce mélange là
00:26:33qui fait que
00:26:34l'affaire Landru
00:26:36devient une espèce
00:26:38de modèle
00:26:39pour l'attractivité
00:26:42des crimes français
00:26:42les tueurs en série
00:26:47se fascinent tellement
00:26:49que évidemment
00:26:50les artistes
00:26:51de toutes les époques
00:26:53se sont servis
00:26:54des grands crimes
00:26:54des grands procès
00:26:55qui les ont suivis
00:26:56pour inventer des histoires
00:26:58faire des chansons
00:26:59tourner des films
00:27:01et dans ce registre
00:27:03en 1960
00:27:04l'un des maîtres du suspense
00:27:06offre au cinéma
00:27:07la scène de meurtre
00:27:08la plus célèbre
00:27:10de son histoire
00:27:11Good afternoon
00:27:12In this house
00:27:14the most dire
00:27:16horrible events
00:27:17took place
00:27:18Let's go inside
00:27:21The murderer
00:27:22you see
00:27:23crept in here
00:27:25very slowly
00:27:27of course
00:27:27the shower was on
00:27:28there was
00:27:28no sound
00:27:30and
00:27:32psychose
00:27:44c'est un truc
00:27:45majeur
00:27:46c'est un des plus
00:27:48grands films
00:27:49d'horreur
00:27:51du cinéma
00:27:51quand on prend une douche
00:27:56dans un hôtel
00:27:57après avoir vu
00:27:58psychose
00:27:59on se sent plus jamais
00:28:00en sécurité
00:28:02et on aimerait vraiment
00:28:03vérifier qu'il n'y a pas
00:28:04quelqu'un qui nous regarde
00:28:05quelque part
00:28:06derrière le miroir
00:28:07le choc a quand même
00:28:12révolutionné beaucoup de choses
00:28:13la fameuse scène de douche
00:28:14qu'il a fait je ne sais pas
00:28:14combien de fois
00:28:15pour que l'actrice soit
00:28:16limite traumatisée
00:28:17au moment où on la voit
00:28:17on pourrait discuter des méthodes
00:28:19mais je pense que c'est quelqu'un
00:28:21qui à ce moment là se dit
00:28:21je veux montrer à l'image
00:28:23ce qu'est la violence
00:28:24ce qu'est
00:28:25cette perversion là
00:28:2760 ans après sa sortie
00:28:30le film fait toujours
00:28:32l'objet d'un culte
00:28:33ces reliques
00:28:34ont même leur place
00:28:35dans les musées
00:28:36un matin
00:28:37on est au milieu
00:28:39des années 60
00:28:40Henri Langlois
00:28:40qui dirigeait
00:28:42la cinémathèque
00:28:43qui reçoit un paquet
00:28:44il n'y a rien écrit dessus
00:28:45il ouvre le paquet
00:28:49c'est la tête de Mrs. Bates
00:28:50que lui a envoyé
00:28:51Alfred Hitchcock
00:28:51pour son musée
00:28:52Mrs. Bates
00:28:54la tête
00:29:08depuis
00:29:10trône en bonne place
00:29:12dans le musée du cinéma
00:29:13de la cinémathèque française
00:29:14c'est un plan inoubliable
00:29:18c'est devenu une icône
00:29:20on est à la fin des années 50
00:29:24Hollywood est en crise
00:29:26il y a moins de monde
00:29:27dans les salles
00:29:27il y a un public jeune
00:29:29en fait
00:29:29qui va au cinéma
00:29:30qui ne se retrouve pas
00:29:31dans les films
00:29:32des vétérans
00:29:33du cinéma classique hollywoodien
00:29:34et ce public jeune
00:29:35fait un triomphe
00:29:36aux petites séries B
00:29:37d'épouvante
00:29:38et ça c'est un intrigue Hitchcock
00:29:41il s'est dit
00:29:41mais quand même
00:29:42moi aussi je pourrais réaliser
00:29:44un film à succès
00:29:44avec peu d'argent
00:29:46et je pourrais faire mieux
00:29:47que les autres
00:29:48d'ailleurs il avait raison
00:29:49Hitchcock trouve l'inspiration
00:29:52dans un fait d'hiver morbide
00:29:54qui a traumatisé l'Amérique
00:29:55des années 50
00:29:56la vie bien réelle
00:30:00d'un fermier du Midwest américain
00:30:02appelé Ed Gein
00:30:04Ed Gein c'est le mythe fondateur
00:30:08en fait
00:30:09de plusieurs grands films
00:30:10de cinéma
00:30:11il habite aux Etats-Unis
00:30:13il est dans un petit village
00:30:14dans le Wisconsin
00:30:15pour le restituer
00:30:22c'est quand même
00:30:22un type qui vivait
00:30:23dans une ferme immonde
00:30:25mais vraiment immonde
00:30:26je crois que les enquêteurs
00:30:27le premier jour
00:30:27où ils ont débarqué
00:30:28ils ne pouvaient quasiment
00:30:28pas pousser la porte
00:30:29tellement il y avait
00:30:30des trucs partout
00:30:30c'est un type très proche
00:30:34de sa maman
00:30:35qui était morte
00:30:35et qui ne voulait pas quitter
00:30:37à la mort de sa mère
00:30:42il vrille totalement
00:30:43il va faire des incantations
00:30:44sur sa tombe
00:30:45il essaye de la faire revivre
00:30:47de n'importe quelle manière
00:30:49Ed Gein
00:30:52il est l'archétype
00:30:53du tueur en série
00:30:54parce qu'il y a la mère
00:30:55et ça pour un psychanalyste
00:30:56c'est du pain béni
00:30:58j'ai perdu ma mère
00:31:02alors je vais la reconstituer
00:31:04avec de la chair humaine
00:31:05que je vais aller chercher
00:31:06dans les cimetières
00:31:07et puis finalement
00:31:11je vais me mettre
00:31:11à tuer aussi des femmes
00:31:13vivantes
00:31:15c'est quand même un type
00:31:20qui se servait
00:31:20de la peau de ses victimes
00:31:21pour construire des objets
00:31:22c'est-à-dire que les enquêteurs
00:31:27à un moment étaient chez lui
00:31:28ils se tournent
00:31:29et ils voient une lampe
00:31:30et ils se disent
00:31:30mais la bajour est étrange
00:31:31la bajour a été faite
00:31:32en peau humaine
00:31:33d'une des victimes des Gaines
00:31:35et encore une fois
00:31:35on en revient
00:31:36au mythe de l'enfant
00:31:37de l'ogre
00:31:38Ed Gaines
00:31:43c'est le pire du pire
00:31:44il va inspirer
00:31:45trois grands films
00:31:47Psychose d'Hitchcock
00:31:49Massacre à la tronçonneuse
00:31:51et Le silence des agneaux
00:31:52aucun scénariste
00:31:54de fiction
00:31:55ne peut inventer
00:31:56autant de choses
00:31:58ce sont des histoires
00:31:59extraordinaires
00:32:00dont le cinéma
00:32:01s'empare
00:32:02avec raison
00:32:03pour la culture populaire
00:32:07américaine
00:32:08c'est un personnage important
00:32:09parce que
00:32:09c'est le premier
00:32:11tueur en série moderne
00:32:12ses motivations
00:32:13sa manière de procéder
00:32:16a nourri
00:32:17une littérature
00:32:19et un cinéma
00:32:19pendant des années
00:32:21en fait
00:32:21Hitchcock
00:32:26ce qui lui a plu
00:32:26c'est la mère
00:32:27c'est le rapport à la mère
00:32:28ça c'est sûr
00:32:29le personnage de mère
00:32:30dans les films d'Hitchcock
00:32:31sont toujours des personnages
00:32:33extrêmement inquiétants
00:32:34et là
00:32:35c'est presque
00:32:36trop beau pour lui
00:32:37Hitchcock a marqué
00:32:42un tournant
00:32:42à la mesure
00:32:43où il s'intéresse
00:32:43à la psychologie du tueur
00:32:45c'est en titre
00:32:45psychose
00:32:46c'est à dire que là
00:32:47on n'est plus
00:32:47dans juste
00:32:49la narration
00:32:50de quelque chose
00:32:51d'horrifique
00:32:52on est vraiment
00:32:53chez le tueur
00:32:54on essaye de rentrer
00:32:54dans sa tête
00:32:55on essaye vraiment
00:32:56de comprendre
00:32:56un mode de fonctionnement
00:32:57Norman Bates
00:33:02est inspiré
00:33:03directement
00:33:03d'Edgen
00:33:04dans la mesure
00:33:05où c'est
00:33:06un homme
00:33:06timide
00:33:08bien sous tout rapport
00:33:09très gentil
00:33:10qui vit avec sa mère
00:33:12dans un hôtel
00:33:12et
00:33:13derrière cette image
00:33:15d'ange
00:33:16assujetti
00:33:18à sa mère
00:33:18il se cache
00:33:19un tueur
00:33:20jusqu'à la fin
00:33:23on éprouve
00:33:23une forme
00:33:24de sympathie
00:33:25pour ce jeune homme
00:33:26qui finalement
00:33:27aime beaucoup sa maman
00:33:29et qui veut la protéger
00:33:30alors qu'en fait
00:33:32c'est lui qui commet
00:33:33les meurtres
00:33:34les plus graphiquement
00:33:35atroces
00:33:36qu'il soit
00:33:37c'est vraiment
00:33:37un film
00:33:39qui va bouleverser
00:33:41les conventions
00:33:42de l'épouvante
00:33:43ou de la terreur
00:33:43cinématographique
00:33:44maintenant je voudrais
00:33:45savoir pourquoi
00:33:46il y a cette
00:33:47unanimité
00:33:48autour de votre film
00:33:50de tous ces publics
00:33:51parce que
00:33:53tout le monde
00:33:54attend
00:33:56la peur
00:33:57pour le président
00:33:58psychose
00:34:03est un film
00:34:03qui va inaugurer
00:34:05une nouvelle manière
00:34:06de montrer le crime
00:34:07au cinéma
00:34:07c'est
00:34:12l'embryon
00:34:14le point de départ
00:34:15d'un cinéma
00:34:16plus cru
00:34:18plus dur
00:34:19plus réaliste
00:34:20sur la représentation
00:34:21du crime
00:34:22entre fascination
00:34:27et répulsion
00:34:27la figure du tueur
00:34:29en série
00:34:30hante Hollywood
00:34:31dans les années 90
00:34:35elle connaît
00:34:36son âge d'or
00:34:37dans l'histoire
00:34:39des tueurs en série
00:34:40au cinéma
00:34:41il y a un tournant
00:34:42c'est le silence
00:34:42des agneaux
00:34:43hopkins
00:34:45hopkins
00:34:46dans le rôle
00:34:47du tueur
00:34:48anthropophage
00:34:49il est le film
00:34:54qui fait du personnage
00:34:55principal
00:34:56non pas le policier
00:34:58qui fait la traque
00:34:59mais le tueur
00:35:00en série
00:35:01qui aide
00:35:02le policier
00:35:03en l'occurrence
00:35:04la policière
00:35:05à progresser
00:35:07dans ses recherches
00:35:08on se souvient tous
00:35:13de l'entrée
00:35:14de Clarice Starling
00:35:14dans le couloir
00:35:15de la prison
00:35:16au moment
00:35:17elle va rencontrer
00:35:18pour la première fois
00:35:19Hannibal Lecter
00:35:20avec un Anthony Hopkins
00:35:21qui est plus effrayant
00:35:22que jamais
00:35:23Hannibal Lecter
00:35:39a marqué
00:35:40le monde entier
00:35:41mais parce qu'il est
00:35:42cette figure
00:35:43heureusement
00:35:43qui n'existe pas
00:35:44du tueur
00:35:45du tueur en série
00:35:46à la fois
00:35:47génial
00:35:48parce qu'il est brillantissime
00:35:50et en même temps
00:35:51hyper attachant
00:35:52parce qu'il est tellement
00:35:53brillant
00:35:53tellement malin
00:35:54tellement intelligent
00:35:55qu'on l'aime bien
00:35:56c'est horrible
00:35:57en fait
00:35:58d'en arriver à ce stade là
00:35:59c'est le tueur
00:36:08intellectuel
00:36:09le tueur
00:36:09qui est dans le cerveau
00:36:10des gens
00:36:10le tueur artiste
00:36:12c'est vrai
00:36:14que cette sophistication
00:36:15du personnage
00:36:16ça a souvent été
00:36:17travaillé aussi
00:36:18dans les films
00:36:19de serial killer
00:36:20on l'a vu
00:36:25chez Fincher
00:36:26aussi
00:36:27avec un film
00:36:28comme Seven
00:36:28il y a quand même
00:36:29ce côté
00:36:30de fascination
00:36:32encore une fois
00:36:33avec ce tueur
00:36:35qui est joué
00:36:35par Kevin Spacey
00:36:36qui lui
00:36:37se met en scène
00:36:38littéralement
00:36:39avec ces crimes
00:36:41qui tournent autour
00:36:41des sept péchés capitaux
00:36:43c'est un nouveau stéréotype
00:36:49qui apparaît
00:36:50c'est à dire
00:36:50que c'est plus
00:36:50le tueur malade
00:36:52de Hitchcock
00:36:54des années 60
00:36:54c'est le tueur
00:36:57psychopathe
00:36:57mais qui ne se devine pas
00:36:58c'est celui
00:37:00qui sait séduire
00:37:01c'est une autre version
00:37:02de Landru
00:37:02sans la barbe
00:37:04si vous prenez
00:37:08aujourd'hui
00:37:08tous les séries
00:37:10et les films
00:37:10qui parlent
00:37:10de tueur en série
00:37:11ils se sont tous
00:37:12construits
00:37:13sur ce terreau là
00:37:14donc les années 90
00:37:16c'est vraiment
00:37:17la construction
00:37:17du mythe
00:37:19du tueur en série
00:37:20dans la culture populaire
00:37:22ce qui est plus problématique
00:37:24c'est qu'on continue
00:37:25de penser
00:37:25la plupart des gens
00:37:25pensent encore
00:37:26que les tueurs en série
00:37:26sont des génies
00:37:27du crime
00:37:28machiavélique
00:37:29pervers
00:37:30qui ont des salles
00:37:30de torture
00:37:31etc
00:37:31heureusement
00:37:32la plupart des tueurs en série
00:37:34ne sont pas comme ça
00:37:35alors qu'Hollywood glorifie
00:37:44ces génies du mal
00:37:45à la même époque
00:37:47les serial killers
00:37:48sont tournés en dérision
00:37:49par le cinéma européen
00:37:511992
00:37:56dans les salles
00:37:58un film déjoue
00:38:00tous les clichés du genre
00:38:01alors c'est arrivé près de chez vous
00:38:06ça raconte l'histoire
00:38:07d'une équipe
00:38:07d'un film
00:38:08qui tourne un reportage
00:38:10sur un serial killer
00:38:12sur un tueur en série
00:38:13à la petite semaine
00:38:14qui tue des personnes
00:38:16de classe moyenne
00:38:17parce qu'il sait
00:38:18qu'en faisant ça
00:38:18il ne sera pas inquiété
00:38:19je suis bien
00:38:21surtout là
00:38:22avec tout le monde
00:38:24et on m'appelle mamie
00:38:25et mamie trombe
00:38:27elle s'est déjà fait trompe
00:38:28elle est mamie trombe
00:38:29ce faux documentaire
00:38:37est produit
00:38:38réalisé et joué
00:38:40par trois copains
00:38:40tout juste sortis
00:38:42de l'école de cinéma
00:38:43Rémi Bellevaux
00:38:44Benoît Paulvord
00:38:46et André Bonzel
00:38:48mon rôle comme acteur
00:38:51moi on ne me voit jamais
00:38:52puisque je suis derrière
00:38:53la caméra
00:38:53je faisais le film
00:38:55le seul moment
00:38:56où on me voit
00:38:56c'est au moment du viol
00:38:57en fait
00:38:58puisque tout le monde
00:38:58passe sur la dame
00:39:02qu'en fait
00:39:04à un moment aussi
00:39:04je donne la caméra
00:39:06à Rémi
00:39:06et je viole
00:39:07à mon tour
00:39:09le personnage de Ben
00:39:18comme serial killer
00:39:19c'est le serial killer
00:39:20à la belge
00:39:21à la bonne franquette
00:39:23il a un côté
00:39:25tout à fait normal
00:39:25tout à fait commun
00:39:26ce qui fait
00:39:27qu'il est d'autant plus
00:39:29flippant
00:39:30quand il passe
00:39:31dans son délire
00:39:32est-ce que ça pourrait être
00:39:33notre voisin de palier
00:39:35carrément
00:39:35les saïgos
00:39:41un veilleur de nuit noire
00:39:43ça si c'est pas
00:39:44un coup dans le dos
00:39:44c'est dégoûtant
00:39:45juste pour qu'on ne le voit pas
00:39:46tu te rends compte Rémi
00:39:47jusqu'où ils vont
00:39:48mais ils se permettent tout
00:39:50pauvre gosse
00:39:52un enfant du soleil
00:39:53tu te rends compte
00:39:54ce gosse a été élevé
00:39:55sous les bas au bas
00:39:56si ça tombe
00:39:56et maintenant il est ici
00:39:57sur les chantiers
00:39:58quelle heure
00:39:58ça me dégoûte
00:39:59il a tous les défauts du monde
00:40:04on lui a donné
00:40:04tous les défauts du monde
00:40:05il est raciste
00:40:07il est homophobe
00:40:08c'est un crétin fini
00:40:10qui ne veut pas d'ennuis
00:40:11qui a des idées sur tout
00:40:13il a des idées sur l'architecture
00:40:17bien sûr
00:40:18sur l'esthétisme
00:40:19parce que c'est quand même
00:40:19un esthète
00:40:20c'est un poète
00:40:20on disait
00:40:21les nazis
00:40:22faisaient pousser des roses
00:40:23écouter First Wengler
00:40:25c'est un peu ça
00:40:26il a ce côté savoureux
00:40:28délicieux
00:40:29il peut parler
00:40:30esthétisme
00:40:31gaudi
00:40:32et tout
00:40:32et c'est quand même
00:40:33un monstre
00:40:34regarde
00:40:37qu'est-ce qui te saute
00:40:38la première fois que tu vois ça
00:40:39c'est les briques rouges
00:40:40le rouge c'est la couleur du sang
00:40:42le rouge c'est la couleur des indiens
00:40:43c'est la couleur de la violence
00:40:45alors que le fléau
00:40:47de notre société
00:40:48et tout le monde s'accorde à le dire
00:40:49est la violence
00:40:50ils vont te foutre des briques rouges
00:40:52mais le rouge c'est aussi la couleur du vin
00:40:53mon vieux
00:40:53Ben est sympathique
00:40:57et en partie sympathique
00:40:58parce qu'on ne voulait pas
00:40:59sinon on serait un regardable
00:41:01donc on voulait qu'il y ait justement
00:41:02cette espèce de séduction
00:41:04de la part du spectateur
00:41:06pour son personnage
00:41:08un peu comme l'équipe au départ
00:41:09est séduite par lui
00:41:10par son bagout
00:41:11par son enthousiasme
00:41:13et en fait
00:41:14plus on y va
00:41:15c'est horrible
00:41:16il y a le meurtre de l'enfant
00:41:17le viol
00:41:18et ainsi de suite
00:41:19et on ne peut plus supporter
00:41:21ça devient insupportable
00:41:22Ma génération
00:41:27on s'est pris
00:41:29cette arrivée près de chez vous
00:41:30en pleine tête
00:41:30c'est la banalisation du crime
00:41:32à travers l'humour
00:41:32et c'est la force du film
00:41:34de ces comédiens
00:41:35c'est de vous faire trouver
00:41:37le pire
00:41:38non pas acceptable
00:41:40mais plutôt drôle
00:41:42il faut y aller
00:41:43pour arriver à faire ça
00:41:44dans un film
00:41:45beaucoup de films ont essayé
00:41:46la plupart sont grotesques
00:41:47celui-ci a l'équilibre parfait
00:41:49c'est de la dentelle
00:41:50à tous les niveaux
00:41:51dans l'interprétation
00:41:52dans l'écriture
00:41:53pour vous raconter
00:41:54quelque chose d'abonnable
00:41:55André, Rémi
00:41:56on ne vous rappelle rien ça
00:41:57le vieux fusil
00:41:59je l'ai pleuré
00:42:01bon film ça
00:42:02Franco
00:42:04viens ici
00:42:05on ne pensait pas
00:42:06qu'il serait autant distribué
00:42:07qu'il serait autant vu
00:42:08donc on ne se posait
00:42:10pas de questions
00:42:11très existentielles
00:42:13sur la morale
00:42:15s'il y avait une dénonciation
00:42:18ce serait la dénonciation
00:42:19vraiment de l'indécence
00:42:20et de l'obscénité
00:42:23de certains médias
00:42:24qui va toujours plus loin
00:42:25qui manipule
00:42:27c'est un film
00:42:32qui critique
00:42:33le journalisme
00:42:35notamment
00:42:36avec cette équipe
00:42:37audiovisuelle
00:42:39qui le suit pas à pas
00:42:40qui suit le tueur
00:42:41et puis qui
00:42:42finit par lui rendre
00:42:43des services
00:42:44et s'impliquer dans les crimes
00:42:45sans réfléchir
00:42:46dix secondes
00:42:47à la ligne jaune
00:42:49à ne pas franchir
00:42:50justement
00:42:50et voilà
00:42:52donc c'est burlesque
00:42:53et c'est critique
00:42:54c'est bien vu quoi
00:42:55bien vu
00:42:57car dans la réalité
00:42:58la télévision américaine
00:42:59est allée très loin
00:43:00dès la fin des années 70
00:43:08des journalistes
00:43:09ont tendu leur micro
00:43:10à des tueurs condamnés
00:43:12jusque dans leur prison
00:43:13des interviews choques
00:43:39qui captivent
00:43:40le grand public
00:43:41au point de transformer
00:43:47l'un de ces criminels
00:43:48en pop star
00:43:49son nom
00:43:52Charles Manson
00:43:53Charles Manson
00:43:56c'est un personnage
00:43:57médiatique avant tout
00:43:57en fait
00:43:58d'ailleurs se pose la question
00:43:59est-il un tueur en série
00:44:00Manson techniquement
00:44:01n'a pas tué lui-même
00:44:03il a ordonné
00:44:04il a mis dans un état d'esprit
00:44:06une communauté
00:44:06pour les pousser
00:44:07à tuer
00:44:08c'est une espèce de gourou maléfique
00:44:12qui drive toute une communauté
00:44:15de hippies à l'époque
00:44:17à Los Angeles
00:44:18et qui va en fait manipuler
00:44:20téléguider des jeunes filles
00:44:22de sa secte
00:44:23pour tuer
00:44:24dites-moi
00:44:26vous avez connu
00:44:28je crois
00:44:28Manson
00:44:29quel genre d'homme était-ce ?
00:44:30très démonique aussi
00:44:33intelligent et démoniaque
00:44:35il veut que
00:44:38toutes les femmes
00:44:39soient esclaves
00:44:40sont des esclaves
00:44:42oui
00:44:42esclaves
00:44:43Charles Manson
00:44:44c'est un petit délinquant
00:44:46qui
00:44:46à un moment donné
00:44:48rencontre Jésus
00:44:49si l'on peut dire
00:44:50en tout cas c'est ce qu'il prétend
00:44:52et qui va mélanger
00:44:53un petit peu
00:44:54les croyances bibliques
00:44:55avec
00:44:56un petit peu de millénarisme
00:44:58un petit peu de pensée hippie
00:44:59des années 60
00:45:00et c'est ainsi
00:45:01qu'il va pousser ses disciples
00:45:02à effectuer
00:45:03le même soir
00:45:04une série de meurtres
00:45:05qui sont censés être
00:45:06des meurtres rituels
00:45:07Charles Manson
00:45:09le fameux Satan
00:45:11Dieu ou Jésus
00:45:12de Los Angeles
00:45:12vient d'être inculpé
00:45:13de cette meurtre
00:45:145 disciples de Charles Manson
00:45:17ont aussi été inculpés
00:45:18ils ont déclaré
00:45:19que Charles Manson
00:45:20avait sur eux
00:45:20un pouvoir hypnotique
00:45:21qui les rendait
00:45:22totalement esclaves
00:45:23de ses désirs
00:45:24et dans ces meurtres
00:45:27il y a
00:45:27une femme
00:45:29Sharon Tate
00:45:29qui est la femme
00:45:30d'un cinéaste
00:45:31Roman Polanski
00:45:32qui se trouve dans sa maison
00:45:33à Cielo Drive
00:45:34c'est le criminel
00:45:43qui a tué
00:45:45des stars de cinéma
00:45:46et qui a
00:45:48fait irruption
00:45:50dans le modèle hollywoodien
00:45:51en 1969
00:45:57l'Amérique
00:45:59entend le nom de Manson
00:46:00résonner pour la première fois
00:46:02celui d'un bon à rien
00:46:10chanteur de seconde zone
00:46:12et qui cherchait
00:46:14par tous les moyens
00:46:15à ce qu'on parle de lui
00:46:16Manson
00:46:20était absolument obsédé
00:46:21par la célébrité
00:46:21son rêve le plus intense
00:46:23c'était sans doute
00:46:23celui
00:46:24de faire une carrière
00:46:25discographique
00:46:26d'être signé
00:46:28sur une maison de disques
00:46:29avec un producteur
00:46:30etc etc
00:46:31et il avait appris
00:46:33à jouer de la guitare
00:46:34et il se voyait bien
00:46:35il voyait bien
00:46:36sa reconversion
00:46:37comme musicien
00:46:39ses chansons
00:46:41à la guitare acoustique
00:46:42il avait réussi
00:46:45à s'introduire
00:46:47chez Dennis Wilson
00:46:48le batteur des Beach Boys
00:46:49et à y installer sa famille
00:46:53Dennis Wilson
00:46:54était très content
00:46:55parce que déjà
00:46:56il y avait des filles
00:46:57et tout etc
00:46:58ça offrait des opportunités
00:46:59intéressantes
00:47:01et donc
00:47:02il voulait
00:47:03faire une chanson
00:47:04dans le studio
00:47:06des Beach Boys
00:47:07sauf que ça n'a pas marché
00:47:11déjà il se ramenait
00:47:13avec sa famille
00:47:13tout entière
00:47:14donc une vingtaine
00:47:16de personnes
00:47:16en un mot
00:47:17il était ingérable
00:47:18il était ingérable
00:47:20la carrière solo
00:47:23de Manson
00:47:24ne décollera jamais
00:47:25et la spirale meurtrière
00:47:27est enclenchée
00:47:28il semblerait
00:47:30que Manson
00:47:31ait voulu se venger
00:47:32d'un milieu
00:47:34du show business
00:47:35de l'époque
00:47:36qu'il a rejeté
00:47:37en même temps
00:47:39bon
00:47:39il n'est pas devenu
00:47:40une rock star
00:47:40mais par procuration
00:47:42il est devenu
00:47:42une rock star
00:47:43quand même
00:47:43ce qui a causé
00:48:03la célébrité de Manson
00:48:04aux Etats-Unis
00:48:05dans un premier temps
00:48:06c'est la télévision
00:48:08des animateurs
00:48:10grand public
00:48:11aller l'interviewer
00:48:12le filmer
00:48:14dans sa cellule
00:48:15Manson refuses
00:48:17to sit in the chair
00:48:18provided
00:48:18he says
00:48:19he's not going
00:48:20to look up to anyone
00:48:21où Charles Manson
00:48:23faisait le clown
00:48:24en dansant
00:48:26il faisait un véritable numéro
00:48:33clairement il se met en scène
00:48:45il provoque etc
00:48:46il n'a pas grand chose
00:48:47à dire de réel
00:48:48quand vous l'écoutez
00:48:48ça sonne creux
00:48:50mais on continue
00:48:51de fasciner
00:48:51parce que le type
00:48:52est charismatique
00:48:53parce que quand il parle
00:48:54même si ce qu'il dit
00:48:54est creux
00:48:55la façon dont il le dit
00:48:57il est grandiose
00:48:58il est très très très
00:49:11très mégalo
00:49:12en fait
00:49:12comme beaucoup de chers
00:49:13en série d'ailleurs
00:49:14et en fait
00:49:15les médias
00:49:15en se rendant
00:49:16dans sa prison
00:49:17pour l'interviewer
00:49:17participent à sa mégalomanie
00:49:19rajoutent une pièce
00:49:20dans la machine
00:49:20c'est à dire que Manson
00:49:21maintenant
00:49:22c'est devenu une image
00:49:23de marque quasi
00:49:24c'est devenu tout un univers
00:49:25et c'est devenu
00:49:26une star de la pop culture
00:49:27il y a quand même
00:49:28un groupe
00:49:28qui s'appelle
00:49:29Marilyn Manson
00:49:29la collision
00:49:32entre
00:49:33tout ce qu'il y a
00:49:34de plus glamour
00:49:35Marilyn Monroe
00:49:36et ce qu'il y a
00:49:37de plus gore
00:49:37Manson
00:49:38dans l'histoire
00:49:39de la culture
00:49:40pop
00:49:41la figure du tueur
00:49:46en série
00:49:46qui est très exploitée
00:49:47aux Etats-Unis
00:49:47en fait
00:49:48elle est exploitée
00:49:48dans le monde entier
00:49:49c'est juste que les américains
00:49:50ça les obsède
00:49:51parce que ça leur parle
00:49:52c'est leur ADN
00:49:53aujourd'hui de société
00:49:54le tueur en série
00:49:55ça raconte l'amérique moderne
00:49:56ça raconte les failles
00:49:57de l'amérique moderne
00:49:58c'est pour ça qu'ils sont aussi passionnés par ça
00:50:00qu'ils font autant de films
00:50:01de bouquins de séries
00:50:02cette culture américaine
00:50:07un homme va tenter
00:50:08de l'importer en France
00:50:09dès le début des années 90
00:50:11un auteur prolifique
00:50:17longtemps médiatique
00:50:19aujourd'hui
00:50:23persona non grata
00:50:24stéphane bourgouin
00:50:2870 ans
00:50:30j'écris
00:50:31depuis le début
00:50:32des années 80
00:50:34je peux dire
00:50:37que je suis un graphoman
00:50:39en série
00:50:39sur le sujet
00:50:46en France
00:50:47je suis un pionnier
00:50:49je suis un pionnier
00:50:50puisque j'ai fait
00:50:51les tout premiers
00:50:52documentaires
00:50:54et reportages
00:50:55sur le sujet
00:50:56des tueurs en série
00:50:57j'ai beaucoup échangé
00:51:01effectivement
00:51:03avec des tueurs en série
00:51:04et des tueuses en série
00:51:06je pense que j'en ai rencontré
00:51:11en tout
00:51:12un peu plus
00:51:14d'une soixantaine
00:51:16moi ce qui m'intéresse
00:51:17c'est de savoir
00:51:18quelle a été leur enfance
00:51:20qu'est-ce qui les a poussés
00:51:22à commettre le premier crime
00:51:24à le réitérer
00:51:25par la suite
00:51:27à y prendre du plaisir
00:51:30oui
00:51:31ça c'est quelque chose
00:51:32qui me passionne
00:51:33Stéphane Bourgoin
00:51:37mérite d'importer
00:51:38le mot serial killer
00:51:39en France
00:51:40et de s'y connaître
00:51:41bien
00:51:41en serial killer américain
00:51:43et il en a fait
00:51:44un business
00:51:45avec le livre noir
00:51:46des serial killers
00:51:47qui les vendra
00:51:48à 100 000 exemplaires
00:51:50alors c'est un sujet
00:51:51un peu compliqué pour moi
00:51:52parce que c'est quelqu'un
00:51:53que je connais très bien
00:51:53moi je l'ai rencontré
00:51:54pour écrire mon premier roman
00:51:56de policier
00:51:56c'était spécial
00:51:58des tueurs en série
00:51:58donc j'ai été le rencontrer
00:52:00pour lui poser plein de questions
00:52:01il a répondu à tout
00:52:02j'ai lu ses livres
00:52:03ce qui est certain
00:52:03c'est que Stéphane Bourgoin
00:52:04a amené la culture
00:52:06du tueur en série
00:52:07en France
00:52:07et qu'il l'a incarné
00:52:09en sachant
00:52:10c'est l'un des plus grands
00:52:12spécialistes reconnus
00:52:13des tueurs en série
00:52:15bonsoir Stéphane Bourgoin
00:52:16vous êtes spécialiste
00:52:17des tueurs en série
00:52:18vous connaissez bien
00:52:19l'histoire dont on vient
00:52:20de parler
00:52:20celle de ce serial killer
00:52:22de ce tueur en série
00:52:23Stéphane Bourgoin
00:52:24c'est l'expert
00:52:24qu'on voyait tout le temps
00:52:25en plateau
00:52:25peu importe l'affaire criminelle
00:52:27il était très disponible
00:52:29merci infiniment
00:52:30Stéphane Bourgoin
00:52:31d'être venu nous voir
00:52:32merci Stéphane Bourgoin
00:52:34en tout cas
00:52:34nous avoir apporté
00:52:35toutes ces précisions
00:52:36et à l'arrivée
00:52:37en 2020
00:52:39une bande
00:52:41de fans déçus
00:52:42qui l'avaient lu
00:52:43et entendues
00:52:43pendant des années
00:52:44et des années
00:52:45ont commencé
00:52:46à s'apercevoir
00:52:47qu'il mentait
00:52:50on s'est rendu compte
00:52:55qu'en fait
00:52:56il n'avait rencontré
00:52:57que
00:52:5713 tueurs en série
00:52:59et qu'il s'était inventé
00:53:03complètement
00:53:03une vie d'expert
00:53:05et c'est ça
00:53:05qui est intéressant
00:53:06dans ce personnage là
00:53:07c'est un homme
00:53:08qui étudiait les psychopathes
00:53:09et qui était en fait
00:53:10un profond mythomène
00:53:11pourquoi j'en ai rajouté ?
00:53:14parce que je suis con
00:53:15il n'y a pas d'autre mot
00:53:18j'ai un peu extrapolé
00:53:22mon rôle
00:53:23en affirmant
00:53:26que j'avais suivi
00:53:28des formations
00:53:28au sein du FBI
00:53:30etc
00:53:31tout ça
00:53:32c'est des mensonges
00:53:33que je reconnais
00:53:36que je regrette
00:53:37ce statut d'expert
00:53:40Stéphane Bourgoin
00:53:41l'avait acquis
00:53:42grâce à un coup médiatique
00:53:43en 91
00:53:47il est le premier français
00:53:49à interviewer
00:53:50des tueurs en série
00:53:51made in USA
00:53:52on a tourné
00:53:57en Floride
00:53:59et en Californie
00:54:01l'idée c'était
00:54:02de creuser
00:54:03la psychologie
00:54:04des tueurs en série
00:54:06on avait décidé
00:54:07qu'il y en aurait
00:54:08trois
00:54:09Otis Stuhl
00:54:10Gérard Schaeffer
00:54:12et Ed Kemper
00:54:13Ed Kemper
00:54:17c'est un entretien
00:54:18que je craignais
00:54:19beaucoup au départ
00:54:20parce que le personnage
00:54:22est impressionnant
00:54:23plus de 2 mètres 10
00:54:25150 kilos
00:54:28un quotient intellectuel
00:54:31de 145
00:54:33Gérard Schaeffer
00:54:53me terrorise
00:54:54parce qu'il exude
00:54:55de son personnage
00:54:57une aura maléfique
00:54:59que tu es accusé
00:55:01d'après
00:55:01je suis accusé
00:55:04d'avoir
00:55:04d'être accusé
00:55:06d'avoir
00:55:06de tuer
00:55:0734 femmes
00:55:08mais personne
00:55:09a réussi
00:55:10d'avoir
00:55:1034 noms
00:55:11de juridiction
00:55:13ou autre chose
00:55:14c'est une
00:55:15fausse
00:55:15accusation
00:55:16Otis Toul est un tueur cannibale et nécrophile qui tue avec un partenaire.
00:55:25Parmi les rituels, c'était de dévorer un certain nombre de leurs victimes.
00:55:31Comment vous vous sentez quand vous tueillez des gens ?
00:55:34Vous vous sentez comme un rush, un rush qui va dans votre tête, c'est pourquoi vous vous sentez.
00:55:44On m'avait conseillé, pour gagner sa confiance, de le faire rire.
00:55:51Il m'avait envoyé sa recette de sauce barbecue avec laquelle il accompagnait ses repas de chair humaine.
00:56:02Alors j'ai commencé l'entretien, j'ai décidé de le démarrer en disant
00:56:06Otis, je te remercie de m'avoir envoyé ta recette de sauce cannibale.
00:56:13À ce moment-là, j'ai gagné sa confiance.
00:56:30Et effectivement, l'entretien se déroule extrêmement bien.
00:56:35J'ai fait un portrait de Stéphane Bourgouin en 2000 pour Libération.
00:56:42Et il m'avait montré les rushs où il est avec Otis Toul, qui est quand même un cannibale.
00:56:48Mais j'ai dit, mais Stéphane, mais comment tu peux te comporter comme ça avec ce genre de meurtrier ?
00:56:53Et avec un autre, il pose en photo, il est là, il enlace Schaeffer.
00:56:57Et là, il me dit, écoute Patricia, excuse-moi, mais tu sais, si tu n'as pas de l'empathie pour ces tueurs en série, ils ne te parleront pas.
00:57:07Mais j'ai dit, mais attends, il y a des limites quand même.
00:57:09Là, tu blagues avec eux sur des crimes, c'est vraiment dégueulasse.
00:57:14Grâce à ce tournage, Stéphane Bourgouin devient le pape des serial killers dans les médias.
00:57:22Pendant deux décennies, il passe ses exploits en boucle.
00:57:26Et là, il éclate de rire.
00:57:28Et vous voyez, à partir de maintenant, il accepte de me parler en toute confiance.
00:57:34Face à lui, j'ai réellement eu l'impression d'une aura maléfique, de quelque chose qui n'appartient qu'à un roman ou un film fantastique.
00:57:43Stéphane Bourgouin, avec tous ses ouvrages et toutes ses analyses, en fait, il a participé, selon moi, au sensationnalisme du crime.
00:57:51Il avait tendance à donner énormément de détails sur le crime.
00:57:54Il a fini par tuer sa mère, par lui broyer son larynx dans un vide ordures.
00:58:00C'était très bourré d'hémoglobine, en fait, et de détails sordides.
00:58:04Et donc, c'est ça qui est problématique avec son approche très américaine, en fait, des tueurs en série et du crime en général.
00:58:10Je pense que les médias l'ont pas mal poussé dans cette direction-là, que peut-être son tort a été d'y répondre favorablement, de se mettre un peu en scène lui-même.
00:58:18Mais j'ai du mal à lui reprocher. Non, ça, je crois pas que ce soit juste.
00:58:21Accusé de cultiver le macabre, l'expert s'est trouvé une bonne excuse.
00:58:28Ce qui m'attire vers le côté obscur de la vie, c'est d'abord un événement personnel qui est arrivé dans mon existence.
00:58:36C'est une amie très proche qui a été victime d'un tueur en série.
00:58:39Typiquement, Stéphane Bourgoin, il raconte que sa vocation d'expert en criminologie est née de l'assassinat de sa conjointe à Los Angeles.
00:58:47Et en fait, ça, c'est complètement faux. Il l'a reconnu lui-même.
00:58:50À la base, il n'avait probablement pas besoin pour exister parce qu'il était en effet probablement un des seuls à connaître les tueurs en série et le sujet.
00:58:55Moi, je pense que c'est un mensonge qu'il a juste dépassé et qu'il s'est enfermé dans ce mensonge et dans le personnage que ça a dû l'amener à construire.
00:59:02J'ai découvert le corps de cette amie baignant dans le sang qui était mutilée, assassinée.
00:59:12Certains membres avaient été coupés.
00:59:14J'ai affirmé et j'ai menti à ce sujet que c'était une compagne à moi qui avait été assassinée.
00:59:24J'ai inventé son identité, Eileen.
00:59:28Pardon de vous couper, mais à l'origine, personne ne vous a demandé de raconter cette histoire.
00:59:33Pourquoi l'avoir racontée ?
00:59:35Tout simplement parce que sinon, je ne voyais pas de moyens d'expliquer pourquoi je me serais intéressé à ce phénomène
00:59:47qui est quand même malgré tout très spécifique et très particulier.
00:59:52Ce premier mensonge, il vise à quoi ?
00:59:55En fait, il habille une fascination malsaine pour les serial killers avec une invention plus ou moins romanesque.
01:00:03Et donc, il a construit une romance pour camoufler des bas instincts, un truc sale.
01:00:13Pourquoi est-ce qu'il a menti au départ ? Pourquoi est-ce qu'il a dû justifier qu'il était fasciné par les tueurs en série ?
01:00:19Probablement parce que dans la société moderne, on a un regard parfois un peu dur avec ceux qui, je ne parle pas que pour moi,
01:00:25mais qui s'intéressent à même l'abject, parce qu'on peut parler d'abject pour les tueurs en série.
01:00:30Et ça se comprend. Comment est-ce qu'on peut envisager que quelqu'un soit épanoui en passant 8 à 10 heures par jour plongé dans ce qu'il y a de pire chez l'être humain ?
01:00:41C'est un moyen de se rassurer finalement sur les êtres humains qui nous entourent.
01:00:44Tout simplement, on a peur du noir.
01:00:46Vous mettez un coup de lumière, un coup d'interrupteur dans une pièce où il n'y avait rien.
01:00:50Finalement, vous dire, maintenant, j'ai eu tort de me faire peur avec pas grand-chose.
01:00:53C'est la même chose, on a du mal à les cerner, mettre un coup de lumière dedans pour les comprendre, c'est se rassurer.
01:01:11Longtemps, la France s'est crue à l'abri des serial killers, purs produits de la culture américaine.
01:01:18Mais en 1995, les certitudes s'écroulent.
01:01:23Un tueur en série sévit au cœur de Paris depuis plusieurs mois et la fascination collective franchit un nouveau cap.
01:01:34Le soir, ils partaient en chasse dans le quartier de la Bastille ou dans Paris et ils suivaient des jeunes femmes.
01:01:39Ils les suivaient jusque chez elles.
01:01:41Ils s'engouffraient derrière elles par la porte d'entrée et ils les braquaient avec un couteau.
01:01:48Ils s'introduisaient chez elles et là, ils les attachaient, ils les violaient.
01:01:51Et ils leur trangeaient la gorge.
01:01:53C'est l'époque où en France, la police criminelle ne dit pas serial killer, ne dit pas tueur en série.
01:02:10Le mot lui-même vient des Etats-Unis et les enquêteurs de brigades criminelles et de police judiciaire détestent tout ça.
01:02:20En gros, c'est les Américains.
01:02:21Nous, ça, c'est pas pareil chez nous.
01:02:23Il faut tout un premier temps avant que, finalement, la police judiciaire se décide à admettre qu'elle est effectivement face à un tueur en série en activité.
01:02:40Et c'est pour ça, d'ailleurs, qu'ils vont l'appeler SK1, serial killer 1.
01:02:43Le juge Gilbert Thiel se voit confier l'instruction de ce dossier hors normes.
01:02:54C'est à lui de mener l'enquête.
01:02:57On sait, à ce moment-là, qu'il y a un tueur en série qu'il nous faut impérativement identifier.
01:03:04On a son ADN, mais l'ADN ne vous donne pas de nom.
01:03:07Donc, la traque commence.
01:03:09Le début d'une médiatisation inédite.
01:03:16Une chasse à l'homme de grande envergure a été lancée depuis hier.
01:03:19Le cœur en série recherché dans la capitale fait l'objet d'une enquête de plus en plus précise de la part de la police.
01:03:24La police parisienne n'exclut pas que le meurtre d'une jeune femme découverte égorgée chez elle dimanche soit liée à d'autres meurtres similaires.
01:03:31La télé française se met à faire ce que les Américains faisaient déjà un petit peu.
01:03:34Dans les journaux, dans la presse écrite, la radio, on en parle, on en parle.
01:03:37Et en fait, on a presque l'impression de suivre la traque en temps réel.
01:03:42À ce moment-là, les médias s'emparent le tueur de la Bastille, le tueur en série de l'Est parisien, etc.
01:03:49Toutes les jeunes femmes, toutes les jeunes parisiennes de l'époque s'en souviennent.
01:03:53Parce qu'il ne faut pas rentrer seule chez soi le soir.
01:03:56Il faut se faire accompagner.
01:03:58Donc moi, j'ai toujours appris, et j'ai appris à ma fille, à tirer la porte tout de suite dès que je rentrais chez moi.
01:04:04Donc il y a vraiment une psychose dans Paris.
01:04:07On recherche à l'intérieur des prisons, à l'intérieur des hôpitaux psychiatriques.
01:04:16Et on finira par rechercher dans les laboratoires d'expertise privée ou publique
01:04:22qui font de la génétique moléculaire à des fins judiciaires.
01:04:25Et c'est comme ça qu'on va finir par trouver l'identité de Guy-Georges le 24 mars 1998.
01:04:40Le portrait de l'identité judiciaire tape dans l'œil d'un photoreporter, Yann Morvan.
01:04:49Guy-Georges, il le connaît. Il l'a fréquenté et même photographié.
01:04:55La presse va s'arracher ses clichés, comme pour une célébrité sous les flashs des paparazzi.
01:05:03Waouh ! Je me dis, c'est incroyable ! Et je me souviens des photos que j'avais faites.
01:05:07Et donc là, je retourne dans mes diapos, et je regarde, j'arrive à monter à ce qu'on appelait à l'époque un people Guy-Georges.
01:05:13C'est-à-dire la vie d'un tueur en série où il habitait, puisque je suis dans sa chambre, etc.
01:05:18Et donc j'appelle Paris Match, et je leur dis, écoutez les gars, j'ai Guy-Georges.
01:05:24Est-ce que ça vous intéresse ? Donc je vais à Paris Match, et ils font huit pages.
01:05:28Dans la foulée, Guy-Georges, ma vie avec Guy-Georges.
01:05:34Ces photos, il les a prises par hasard quatre ans auparavant, lors d'un reportage dans un squat parisien.
01:05:45Guy-Georges, dans le squat, on l'appelle Joe, et c'est le gardien du squat.
01:05:50Il deal du shit, et puis quand il y a un problème, parce qu'il y a toujours des problèmes des gens qui rentrent dans les squats pour voler.
01:05:57Et Joe est là pour maintenir l'ordre, on va dire.
01:06:02Et moi, je travaille avec des très très lourds groupes électrogènes pour faire mes photos, et j'ai besoin d'un assistant.
01:06:11Donc je lui dis, écoute, est-ce que tu veux bosser avec moi pour Match, on va faire des sujets ensemble.
01:06:17Et il me dit, il n'y a pas de problème.
01:06:18Donc on fait plusieurs sujets pour Paris Match, et donc il est avec moi pendant, ouais, pendant trois, quatre mois.
01:06:25Guy-Georges m'intéressait parce qu'il était étrange, il ne parlait pas, tout le monde le respectait.
01:06:35Et je me disais, ce type-là, il y a quelque chose.
01:06:39Discret, Guy-Georges fuit l'objectif.
01:06:42Mais Yann Morvan parvient à lui voler une dizaine de clichés intimes.
01:06:45On allait déjeuner ensemble, il y a une photo où on le voit avec un cornet de frites, c'est moi qui lui ai offert.
01:06:55J'arrive à me retrouver dans des situations incroyables, dont celle-ci avec Guy-Georges, d'ailleurs, que je n'ai pas pensé, que je n'ai pas prévu, mais qui arrivent.
01:07:06Elles valaient cher, ces photos ?
01:07:08Oui, je les ai vendues à un bon prix, oui, à l'époque, oui, oui.
01:07:11Avoir comme assistant le tueur en série Guy-Georges, oui, c'est assez exceptionnel, oui.
01:07:23Ça, ça fait partie des photos dont je ne suis pas fier, parce que pour moi, c'est un accident d'avoir photographié un tueur en série.
01:07:33Ce n'est pas mon boulot, ça ne m'intéresse absolument pas.
01:07:35Je ne m'en vente pas, j'aurais bien aimé faire autre chose, mais ça s'est passé comme ça.
01:07:41Difficile de se l'avouer, entre fascination et répulsion, ce genre de scoop séduit un large public.
01:07:52Parfois, quand on est enfant, on a envie de regarder ce qui est interdit, mais on sait bien que c'est interdit et on sait bien que c'est dégueulasse.
01:08:03Eh bien, c'est exactement ça ce qui se produit quand on découvre les tueurs en série français, que ce soit Guy-Georges, que ce soit Fourniret, que ce soit Émile Louis.
01:08:13On se rend compte du sort digne de ces gens-là.
01:08:15En février 2000, une toute nouvelle émission tente de décrypter ces criminels.
01:08:26Un tournant culturel.
01:08:27Le tueur de l'Est parisien, l'assassin violeur de Caroline Dickinson, celui d'Angélique Dumès, ont laissé des empreintes.
01:08:36Ils ont en quelque sorte abandonné sur place, sur la scène du crime, leur carte d'identité génétique.
01:08:41Donc ici, on est au Bedford, qui est le bar le plus célèbre de ce qu'on appelle la rue de la Soif, à Saint-Germain-des-Prés.
01:08:52Et pendant 11 ans, je suis venu tourner ici 150 fois.
01:08:59Et sur ces chaises-là, j'ai interrogé, je ne sais pas, Dupont-Moretti, le juge-t-il.
01:09:06C'était plutôt ici un lieu où on interrogeait des acteurs professionnels.
01:09:12Comment est-ce que ça se passe lorsqu'il est dans votre cabinet pour ce premier interrogatoire ?
01:09:17Je lui ai dit, vous appelez bien Guy Georges ?
01:09:20Il me dit, oui, oui, mais qu'est-ce que j'ai fait ? Je suis innocent.
01:09:27Le concept, c'est de raconter des histoires dans le fil de l'enquête, dans le sens de l'enquête, de police, de gendarmerie.
01:09:36Évidemment, du juge d'instruction.
01:09:38Jusqu'au dénouement, rien n'est raconté qu'il n'a pas été jugé.
01:09:43Rien n'est raconté qu'il n'y a pas de vérité judiciaire.
01:09:49En 90 minutes, disons, faites entrer l'accusé, redéroule toute une affaire de A à Z.
01:09:55Donc, avec le maximum de protagonistes de cette affaire, qu'ils soient témoins, victimes, enquêteurs, magistrats, avocats.
01:10:04Et je trouve qu'on a quand même tout.
01:10:06C'est tellement précurseur et c'est tellement une mine d'informations sur le crime en France,
01:10:11que quand on travaille dans le fil d'hiver, on ne peut pas s'en passer.
01:10:13Pendant 12 ans, le journaliste Christophe Ondelat abreuve la France des histoires de tueurs les plus sordides et les plus effrayantes.
01:10:25Je n'avais strictement aucune appétence pour le crime.
01:10:31Je n'étais pas à l'aise du tout, du tout avec la matière.
01:10:33Je trouvais que c'était vulgaire, je trouvais que c'était tap à l'œil, je trouvais que c'était des magots, je trouvais que...
01:10:39C'était pas dit.
01:10:40Je veux entrer là-dedans parce que je voulais montrer ma tête à la télé.
01:10:43Je peux le reconnaître aujourd'hui.
01:10:45J'ai 60 ballets, donc ça ne me gêne plus.
01:10:48Il avait 20 ans et paraît-il un sourire ravageur.
01:10:52Et pourtant, on pense qu'il a tué trois femmes en l'espace de quelques semaines.
01:10:55Mon personnage, il est journaliste, clairement.
01:11:05Mais il est aussi un peu comédien.
01:11:12En 99, quand cette série est tournée, on n'a jamais vu un journaliste en situation sur le terrain.
01:11:19Jamais.
01:11:19Cette trace de peinture, par exemple, ici, sur ce morceau de carrosserie, peut nous permettre de déterminer la couleur du véhicule qu'il a fait, mais aussi très probablement sa marque.
01:11:31Il est à la limite.
01:11:35C'est du divertissement, donc on va faire de la mise en scène, on va en jouer, on va vous surprendre, on est presque dans le truc à l'américaine.
01:11:41Et en même temps, il s'arrête toujours au moment où ça deviendrait presque trop irrespectueux ou grotesque.
01:11:45Et c'est ce ton juste qui fait que l'émission a plu, je pense, à autant de gens.
01:11:47C'est qu'on ne se sentait pas coupable de regarder une émission comme ça.
01:11:50Mais à l'époque, Dieu sait si ça nous est reproché, cette mise en scène, cette manière de me faire reluire, quoi, que les gens trouvaient indignes.
01:12:03On était juste précurseurs, puisqu'après nous, tous les journalistes se sont fait reluire, tous, et le genre en situation est devenu le genre majoritaire.
01:12:16Il y a quand même une narrativité qui est assez inédite.
01:12:20Cette présentation, cette lumière tamisée sur le présentateur, il y a une couleur éditoriale qui a marqué cette génération.
01:12:35On a des experts hommes en veste en cuir, qui se baladent dans les rues de Paris la nuit, qui vont parler de crime.
01:12:43Ça se passe dans une ambiance très tamisée à l'intérieur, avec des photos mûres.
01:12:47Enfin, il y a vraiment tout ce côté testostérone du crime.
01:12:54L'esthétique novatrice de fait entrer l'accusé, elle nous vient du cinéma, en fait, parce que les codes du criminel, ils sont posés depuis très longtemps par le cinéma.
01:13:02L'image était un peu crado, la lumière est basse.
01:13:08Quand il y a une lumière sur un bureau et les façons, je te la mets dans la gueule, tout ça, les codes étaient écrits par le cinéma.
01:13:14La recette fonctionne.
01:13:18Au fil des saisons, l'émission devient culte.
01:13:23Même dans les couloirs de prison.
01:13:24Moi, une fois, je suis allée dans la centrale pénitentiaire d'NC Saïm.
01:13:30Et à un moment donné, je suis dans un atelier où je parle aux détenus, voir ce qu'ils fabriquent.
01:13:37Et les autres détenus de l'atelier à côté viennent contre la grille et disent
01:13:40« Ah, Patricia Touranchot, Patricia Touranchot, on vous a vu dans « Faites entrer l'accusé », etc. »
01:13:46Et les mecs étaient dingues de « Faites entrer l'accusé ».
01:13:49Quand je vais en prison, je n'y vais plus beaucoup, mais ça m'arrive encore d'y aller voir un ou deux détenus.
01:13:58Je signe des autographes au parloir.
01:14:03Ce qui est amusant, c'est qu'avant, on se planquait complètement pour regarder « Faites entrer l'accusé »,
01:14:07parce que le fait divers était quelque chose de trop populaire.
01:14:10Et en fait, il y a une sorte de gentrification du crime maintenant.
01:14:14On n'a plus du tout honte.
01:14:15Et il y a vraiment une esthétisation du fait divers et du crime
01:14:18qui fait que c'est devenu maintenant un vrai objet de documentaire et de cinéma aussi.
01:14:27Les fournirés auraient violé et tué des jeunes filles en France, en Belgique,
01:14:31avec un sadisme et une méticulosité extrêmes.
01:14:35Des affaires criminelles racontées façon polar, avec tous les codes de la fiction.
01:14:39Ce genre explose et a un nom, le true crime.
01:14:43Le true crime, c'est un genre audiovisuel.
01:14:46C'est ou du documentaire, ou une série documentaire, ou une émission qui va analyser les crimes,
01:14:53enfin les criminels, les faits divers.
01:14:55Récemment, via les plateformes, c'est un genre qui cartonne absolument.
01:14:58Moi, je suis auteure et documentariste de true crime, de faits réels.
01:15:06Et les tueurs en série, ce sont des bonnes histoires.
01:15:09Parce qu'elles ont des ressorts dramatiques, des rebondissements naturels,
01:15:16avec une matière première vraie.
01:15:21Je dis, ah bon ?
01:15:22Comment vous êtes sûres que ça peut être le même type ?
01:15:24Que sur chaque scène de crime, il y a des indices qui ont été relevés ?
01:15:28On a un ADN, on est sûr que c'est le même mec.
01:15:32Je pense qu'on est fascinés par ces émissions-là.
01:15:38Parce que ça nous amène à nos limites.
01:15:41De la même manière qu'on adore faire un manège à sensations fortes,
01:15:44le fait d'hiver criminel vous amène à vous poser des questions
01:15:48que vous n'oseriez pas vous poser en temps normal.
01:15:51Et en même temps, vous le faites dans le confort agréable, du divertissement,
01:15:55de l'excuse de dire, non mais c'est une émission, c'est pas moi qui...
01:15:57En regardant une affaire en cours autour d'un tueur en série,
01:16:05c'est, je pense, une manière de se rassurer,
01:16:08de se sentir bien à l'abri chez soi, dans son salon.
01:16:11Et en même temps, on assiste à un spectacle.
01:16:12Il y a vraiment la notion de spectacle qui est très importante, je pense,
01:16:15dans le phénomène de fascination autour du tueur en série.
01:16:21Et je crois aussi que, comme le crime est extrêmement démocratique,
01:16:26en fait, qui touche l'ensemble des couches sociales, partout,
01:16:32les gens, quelque part, se disent, ah mais ça aurait pu nous arriver.
01:16:38Mais toute cette face cachée de la société, elle mérite d'être traitée.
01:16:43Et juste, il faut essayer de le traiter avec sobriété,
01:16:48avec distance, avec délicatesse aussi.
01:16:52Il y a des gens derrière, il y a des victimes derrière,
01:16:55il faut... Franchement, il faut y penser tout le temps à ça.
01:16:57Alors, je m'appelle Daïna, j'ai 55 ans.
01:17:17J'ai trois enfants, je suis grand-mère de bientôt quatre petits-enfants.
01:17:27J'ai été victime de Michel Fourniré quand j'avais 14 ans,
01:17:30donc à une époque où il ne tuait pas encore.
01:17:36Je pense que c'est essentiel que l'histoire de Michel Fourniré
01:17:38et de sa femme, du couple Fourniré, soit documentée.
01:17:41Je pense que c'est important qu'on cherche à comprendre.
01:17:47Je pense qu'il ne faut pas trop en abuser.
01:17:50Violée en 1982, Daïna Le Guénant a vécu dans sa chair
01:17:55le déclenchement de l'affaire Fourniré, au début des années 2000.
01:18:00Reconnu coupable de huit meurtres,
01:18:03celui que la presse a rebaptisé l'ogre des Ardennes
01:18:06devient une obsession médiatique déclinée en feuilletons et reportages.
01:18:11C'est un filon, en fait, c'est devenu un filon.
01:18:15Moi, je n'en pense plus grand-chose, en fait.
01:18:18Enfin, pas forcément grand-chose de bien.
01:18:20Je ne regarde pas.
01:18:22Je ne peux plus, en fait.
01:18:24Je ne regarde plus.
01:18:26J'ai essayé dernièrement.
01:18:29Je n'ai tenu même pas dix minutes.
01:18:32Dix meurtres au moins, des viols presque toujours, Isabelle.
01:18:35D'après les experts, c'est le tueur en série le plus abouti de France.
01:18:38En mars 2023, l'affaire Fourniré devient une série documentaire.
01:18:45Cinq épisodes sur une plateforme internationale
01:18:48avec un luxe de détails et de mise en scène.
01:18:52Quand on fait des reconstitutions,
01:18:54qu'on nous montre une gamine qui est ligotée dans une camionnette,
01:18:57qu'on mime une souffrance,
01:19:00qui sont-ils pour le faire ?
01:19:01Et moi, ce que je ressens, c'est de l'agression encore.
01:19:06C'est de l'agression et du non-respect.
01:19:09Déterminée à se faire respecter,
01:19:11en 2020,
01:19:13Daina interpelle les responsables d'une énième adaptation.
01:19:17Les crimes de Fourniré font l'objet d'une BD,
01:19:20sous la direction d'un certain Stéphane Bourgoin.
01:19:23L'agression de Daina y est retranscrite dans les moindres détails.
01:19:30Elle dénonce une utilisation abusive de son témoignage.
01:19:34Alors Stéphane Bourgoin, je le connaissais,
01:19:35je l'avais connu au début de l'affaire Fourniré,
01:19:38quand j'ai commencé à rencontrer des avocats.
01:19:40Alors il a eu accès à mon dossier
01:19:41parce qu'il était membre de l'association Victime en série.
01:19:44et voilà, donc il l'a utilisé,
01:19:47sans me demander mon accord,
01:19:48mais il l'a utilisé.
01:19:49Donc c'est vraiment mon dossier,
01:19:52mais représenté dans la BD sans mon accord.
01:19:55Moi ça m'a choqué d'être dessinée.
01:19:58Vraiment, ça m'a...
01:19:59Je l'ai pris comme un coup de poignard.
01:20:02Le dessin est extrêmement cruel dans cette BD.
01:20:06C'est très très dur.
01:20:09Et puis la manière dont les victimes sont représentées,
01:20:14dont moi j'ai été représentée.
01:20:17Quand je suis convoquée à témoin,
01:20:20et moi je suis toute seule,
01:20:21voilà, j'ai que 16 ans,
01:20:22et on me fait dire tout et n'importe quoi.
01:20:25Ça c'est représenté, mais c'est vachement cruel.
01:20:30C'est...
01:20:31C'est douloureux.
01:20:33Puis devant, on nous met un Fourniré
01:20:35avec des yeux bleus perçants,
01:20:37avec des très très durs, très...
01:20:41Ça me fait mal, quoi.
01:20:42Enfin, c'est replongé dans quelque chose
01:20:45dont je suis capable, moi, si je le décide, de parler,
01:20:48mais que je ne veux pas qu'on m'impose.
01:20:50Que ce soit sous forme de dessin
01:20:52ou que ce soit sous forme de fiction,
01:20:56de série, de documentaire.
01:20:58Je veux avoir le choix,
01:20:59en tant que victime, enfin d'ex-victime,
01:21:01je veux avoir le choix de témoigner
01:21:03et de choisir ce que j'ai envie de dire aussi.
01:21:05C'est important.
01:21:05Stéphane Bourgoin minimise sa responsabilité dans cette affaire.
01:21:12Après un courrier de son avocate à l'éditeur,
01:21:16Daina a obtenu l'arrêt de la commercialisation de la BD.
01:21:18Face à l'emballement collectif
01:21:31pour les histoires de tueurs en série,
01:21:33toutes les victimes n'obtiennent pas la même reconnaissance.
01:21:37Mathias est étudiant.
01:21:40Il y a quelques mois,
01:21:42il est tombé dans un guet-tapens.
01:21:43C'est la première fois
01:21:49qu'il raconte son histoire devant une caméra.
01:21:55On est au mois d'octobre.
01:21:58C'est la soirée après les cours.
01:22:00Je me mets à discuter avec quelqu'un
01:22:01sur une application de rencontre.
01:22:04Sur son profil,
01:22:04il n'y a rien qui m'étonne.
01:22:06Il n'y a rien de très hors du commun.
01:22:08Donc je ne me mets pas en garde du tout.
01:22:10Il me donne rendez-vous chez lui.
01:22:13Et tout de suite,
01:22:21il me dit
01:22:22qu'on va prendre une douche.
01:22:24Et il ouvre la salle de bain.
01:22:27Et il y a un corps
01:22:29sur le sol.
01:22:35Je tourne la tête vers le lavabo
01:22:37et il y a des espèces de morceaux de chair.
01:22:40Je me dis que je suis face à une scène de crime
01:22:41et que je suis le prochain.
01:22:43Qu'est-ce que t'as fait ?
01:22:44Je ne sais pas.
01:22:45Il ne voulait pas rester.
01:22:47Il voulait partir.
01:22:49Il ne va pas partir.
01:22:50Et dès que j'ai vu une fenêtre de tir,
01:22:52je me suis précipité vers la porte
01:22:53et je suis parti en dévalant les marches,
01:22:56en courant et en criant à l'aide.
01:22:57Il n'y a aucun moment où je pense que ça peut être une blague.
01:23:12En réalité,
01:23:13Mathias a été la victime d'un canular sur YouTube.
01:23:18Et il est loin d'être le seul.
01:23:19On attend trois personnes.
01:23:26On va voir leur réaction et on va les pousser à bout.
01:23:28Ciao.
01:23:29C'était une caméra cachée.
01:23:30C'était une caméra cachée.
01:23:32Non, c'était une caméra cachée, frère.
01:23:34Ces blagues douteuses ont envahi les réseaux sociaux.
01:23:43Partout, la même perruque blonde,
01:23:45les mêmes lunettes.
01:23:49Tous font référence à Jeffrey Dahmer,
01:23:52un serial killer américain
01:23:53qui a commis 17 crimes sordides dans les années 80.
01:23:56Surnommé le cannibale de Milwaukee,
01:24:03il a récemment acquis une surprenante notoriété.
01:24:11Dahmer, c'est un des plus gros succès
01:24:12d'une histoire de Netflix.
01:24:14C'est une série qui a cartonné.
01:24:16Cette série a fait plonger Dahmer dans la pop culture.
01:24:20On a vu des enfants déguisés en Jeffrey Dahmer pour Halloween.
01:24:26Il y a un engouement extraordinaire
01:24:32autour de cette série
01:24:32au moment de cette diffusion.
01:24:34Et ça a développé une forme de fascination réelle
01:24:37pour le vrai Dahmer,
01:24:38une forme de fétichisme,
01:24:39des gens qui se sont amusés
01:24:41à rechercher des objets personnels
01:24:43qui appartenaient au vrai Jeffrey Dahmer.
01:24:46Donc, c'est ce qu'il y a de la caméra, en fait.
01:24:51C'est l'actuale caméra?
01:24:52Oui.
01:24:53C'est-à-dire que c'est une fiction,
01:24:55inspirée de faits réels.
01:24:57Et les spectateurs ont complètement oublié
01:24:59que c'était inspiré de faits réels.
01:25:01Et ils ont regardé ça
01:25:03comme on regarde un film d'horreur,
01:25:04c'est-à-dire une pure fiction sans contexte.
01:25:08Les victimes, bien réelles,
01:25:11prennent de plein fouet cet emballement
01:25:12autour de leur bourreau.
01:25:13Quand on regarde la série Netflix
01:25:18et quand on s'intéresse à l'affaire,
01:25:21on voit très bien combien encore aujourd'hui
01:25:24il y a des familles qui souffrent abominablement.
01:25:27Alors, je me dis que quand quelqu'un comme ça,
01:25:29je ne sais pas, est sur son téléphone
01:25:32et tombe sur une scène où il se retrouve nez à nez
01:25:35avec une caricature de celui qui a tué son fils
01:25:38ou son frère.
01:25:40Au moins, il y a quelque chose qui est un peu...
01:25:43Ouais, n'ayons pas peur des mots,
01:25:45qui est un peu sociopathe.
01:25:46Quel est ton sentiment, en fait,
01:25:51vis-à-vis de cette blague-là ?
01:25:53Qu'est-ce que tu en penses ?
01:25:55Déjà de la peur.
01:25:56Pendant plusieurs jours,
01:25:58j'avais l'impression de le voir partout.
01:26:01Dès que j'étais seul,
01:26:02je ne me sentais pas en sécurité.
01:26:04Je ne me sentais pas forcément en sécurité chez moi.
01:26:06Entrer dans une salle de bain
01:26:07a été dur pendant des semaines.
01:26:10Et honnêtement, ça fait des mois
01:26:12et ce n'est pas totalement terminé.
01:26:16Mathias a attaqué en justice
01:26:18l'auteur de la caméra cachée
01:26:20pour violence et usurpation d'identité.
01:26:25Mais il n'a pas obtenu gain de cause.
01:26:28Si vous transformez un tueur en série,
01:26:30un criminel qui a tué des hommes,
01:26:32des femmes, etc.,
01:26:33en une espèce d'icône médiatique,
01:26:37digitale,
01:26:38tout le monde parle de lui comme si...
01:26:39Non, non, non, ça reste un type
01:26:41qui a tué des autres personnes.
01:26:43C'est problématique de se tarifier,
01:26:45de faire de ces tueurs en série
01:26:46des pop stars
01:26:47parce qu'en fait,
01:26:48on va oublier les victimes.
01:26:50Et on va oublier aussi
01:26:51l'essence parfois misogyne,
01:26:53raciste ou homophobe
01:26:54des crimes qui ont été commis.
01:26:56Jusqu'où la fascination
01:26:57du tueur en série glamourisé,
01:26:59devenu un héros fréquentable,
01:27:02jusqu'où ça va aller
01:27:03et jusqu'où on peut le tolérer.
01:27:06Mais ça, c'est à chacun
01:27:06dans son envie d'aller regarder
01:27:09et donc de contribuer au succès,
01:27:10de faire le choix.
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