Étude choc : "Des adultes français diplômés n'ont pas les compétences d'un enfant de 10 ans"

Sud Radio

il y a 2 semaines

Avec Gabriel Lattanzio, professeur agrégé à Paris 1 ex-professeur d'anglais au lycée en Seine-Saint-Denis

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00:00Le Grand Matin Sud Radio, 7h10, Patrick Roger.

00:06Il est 7h42, pourquoi ce niveau scolaire en France ? C'est assez incroyable.

00:11Alors là, c'est l'OCDE qui le dit, avec un rapport choc qui a été dévoilé hier, une étude.

00:20Des adultes français diplômés n'ont pas les compétences à l'écrit d'un enfant de 10 ans.

00:24Alors soit l'OCDE se moque de la France, soit c'est une réalité, et c'est assez inquiétant.

00:29Nous sommes avec Gabriel Latenzio, qui est professeur agrégé à Paris 1,

00:33ex-professeur d'anglais dans un lycée en Seine-Saint-Denis.

00:37Bonjour.

00:38Bonjour.

00:39Vous avez réagi à cette étude.

00:41Je disais, ce sont des gens, vous comme moi peut-être, qui ont passé des années à l'école,

00:47parfois donc à l'université, et qui n'ont pas les compétences à l'écrit d'un enfant, normalement,

00:53donc de 10 ans, c'est ça.

00:55Oui, ce que nous raconte ce texte, c'est que ça concernerait une personne sur 20,

01:00en gros, qui effectivement ne satisfait pas aux exigences un peu élémentaires de littératie.

01:06Alors il y a différentes mesures dans ce rapport, ça ne parle pas que de la France,

01:10et ça ne parle pas que de ce sujet-là, mais c'est un élément qui évidemment nous choque,

01:13parce que ça veut dire qu'il y a un trou dans la raquette.

01:14On a trahi une partie de notre jeunesse devenue adulte,

01:17et puis nous, on a évidemment d'autres espoirs pour un pays qui est censé autant incarner la culture que le nôtre,

01:22et effectivement, c'est un signal d'alarme.

01:24Vous savez, cette enquête, elle sort tous les ans,

01:28et en fait, ce que l'on voit, c'est le prolongement d'un phénomène que l'on avait déjà identifié.

01:32Je pense, moi, ce qu'il faut retenir de ce texte, c'est une grande contradiction,

01:35c'est qu'on n'a jamais eu autant de diplômés,

01:38et pour autant, dans les mesures de notre capacité de compréhension de lecture, ça baisse.

01:41Donc ça veut dire que quelque part, on a cassé le thermomètre.

01:43Oui, quelque part, effectivement, c'est une philosophie de l'éducation et du niveau de nos diplômés

01:49qu'on a revue ces dernières années, quoi.

01:52Quand, il y a maintenant 30 ans, Chevènement disait,

01:57il faut amener 80% des élèves au niveau pachelier,

02:01tout le monde a applaudi, ou beaucoup, en se disant, c'est vrai, fondamentalement,

02:05c'est mieux de monter le niveau des études,

02:07sauf que, dans la réalité, ce n'est pas exactement ça qui se produit, quoi.

02:15Oui, je comprends, M. Angé, je pense que c'est à la fois, vous avez raison,

02:18une question culturelle et aussi une question d'organisation.

02:21Je pense que c'est les deux à la fois.

02:22Sur la question culturelle, je vais même vous dire,

02:24je pense que c'est une évolution culturelle qui a lieu dans d'autres pays occidentaux.

02:28Moi, je suis américaniste, je suis spécialiste de nos amis états-uniens,

02:31et j'avais vu une étude, il y a trois mois, qui m'avait vraiment choqué,

02:35où l'on apprenait que dans des universités du Midwest,

02:38donc au plein milieu du pays,

02:39en gros, un étudiant en lettres sur trois ne peut pas comprendre un chapitre de Mark Twain.

02:44Et quand on apprend une chose pareille, on se dit, c'est leur domaine de spécialité,

02:46ils n'en sont même pas là pour...

02:48Twain s'assile très facilement, je vous assure, ce n'est pas Shakespeare.

02:51On se dit qu'on a vraiment un souci qui peut être commun à différents pays.

02:54Quant aux moyens, vous savez, l'OCDE nous montre quand même quelque chose,

02:57c'est qu'en fait, dans notre niveau d'investissement éducatif,

02:59on est à peu près dans la moyenne des pays de l'OCDE.

03:01Moi, ce n'est pas l'idée que je me fais de la France.

03:03On ne devrait pas être 21e, 22e dans nos dépenses éducatives.

03:06Et encore, c'est pire, parce que dans les dépenses éducatives,

03:09c'est un chiffre global qui ne fait pas le détail de ce à quoi cet argent est dédié.

03:13Donc oui, il y a plein de raisons d'être inquiets,

03:15et puis surtout, des raisons aussi de comprendre que c'est un phénomène qui est dans la longueur,

03:20et si on veut que ça change, il va falloir changer tout de suite,

03:22parce que les résultats seront dans des décennies.

03:24Oui, c'est ça.

03:25Gabriel Latenzio, lors de sa conférence de presse de rentrée,

03:28la ministre de l'Éducation, Elisabeth Borne,

03:30a ouvert la porte à des changements pour, je cite,

03:33« diminuer la pression sur les élèves ».

03:38Qu'est-ce que ça signifie, vous en tant que prof ?

03:43C'est un sujet complexe.

03:45Madame la ministre n'a pas dit que des choses avec lesquelles je suis en désaccord.

03:48Moi, je trouve qu'elle a su écouter des alertes qui ont été prononcées par plein de collègues.

03:54Un problème qui revient souvent, c'est la gestion de l'émotion pour nos adolescents.

03:57Moi, je pense qu'on a un peu suivi une pente dangereuse,

04:01et je ne suis pas le premier à en parler,

04:02il y a des psychologues américains qui l'ont étudié aussi,

04:04c'est qu'on a tellement voulu soulager de la possibilité de l'échec,

04:08que finalement, quand on arrive aux étapes difficiles à 18 ans,

04:11parcours sup, etc.,

04:12cet échec devient absolument insupportable.

04:15Et donc, c'est un peu contradictoire,

04:17mais il faut toujours parler de cette question culturelle, M. Roger.

04:19fondamentalement, je pense qu'il faut qu'on donne des opportunités déjouées à nos enfants,

04:24et qu'on les rattrape toujours.

04:25Et je crois qu'on ne fait pas ça.

04:26Je crois qu'on les met essentiellement dans leur scolarité face à des...

04:31Enfin, il n'y a pas tant de défixards,

04:32il y a même un refus de certaines notes,

04:34ou des notes tout court, etc.

04:35Puis on arrive à 17 ans, 18 ans,

04:37face à la vérité qu'on a besoin de choisir,

04:39qui va être juge, qui va être avocat,

04:41qui va être médecin, etc.

04:43Et là, il faut bien choisir.

04:44Donc, il faut reconnaître les qualités des élèves.

04:47Non, on ne le fait pas très bien,

04:49et il faut vraiment être très prudent sur la façon dont on organise le stress,

04:52ou qu'on refuse le stress aussi.

04:53Oui, absolument.

04:54Merci beaucoup, Gabriel Tanzio.

04:57C'est très intéressant, cette réflexion,

04:59parce qu'évidemment, les jeunes qu'on forme,

05:01c'est eux qui seront ensuite en capacité de faire tourner le pays,

05:04de penser même pour le pays.

05:07Et à ce sujet, à propos des jeunes,

05:09chose très intéressante aussi,

05:10on y reviendra tout au long de la journée,

05:12c'est la commission de l'impact psychologique des réseaux sociaux sur les mineurs,

05:17notamment de TikTok,

05:19qui rend ses conclusions aujourd'hui,

05:20qui demande l'interdiction de TikTok aux moins de 15 ans

05:24et une obligation des déconnexions passées 22 heures.

05:28Je ne sais pas comment c'est possible et réalisable.

05:32En tout cas, c'est une bonne réflexion.

05:34Nous y reviendrons.

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