00:00Punchline, 18h-19h, Anthony Favalli sur CNews et Europe 1.
00:11De retour dans Punchline avec Jonathan Sixx ou Françoise Laborde, Jean-Sébastien Ferjou, Nathan Devers et Axel Ronde pour commenter l'actualité.
00:19Peut-être qu'autour de la table, vous ne le connaissiez pas lundi dernier, Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur,
00:27persiste et signe malgré la bronca qu'il a lui-même suscité.
00:30L'islamo-gauchisme n'existe pas, disait-il.
00:33Eh bien, il réitère dans le Figaro ce matin, écoutez, je viens de la communauté scientifique, répète-t-il, et je suis attaché au sens des mots.
00:41L'islamo-gauchisme n'est pas une réalité unanimement acceptée par cette communauté, il n'existe pas au sens intellectuel du terme.
00:49Ça, c'est pour la première partie de la citation, déjà, que je voudrais analyser avec vous parce qu'elle est criante.
00:54Elle est dramatique parce qu'elle consacre quelque part le déni du réel, c'est-à-dire que si un phénomène n'est pas observé par la lunette d'un intellectuel,
01:03s'il n'est pas documenté dans une bibliothèque universitaire, il n'existe pas.
01:07C'est la consécration quelque part de la déconnexion du mépris de tous ceux qui vivent le réel aujourd'hui.
01:13Vous avez eu raison de commencer, Anthony, par le fait que, de manière générale, on connaît peu l'identité du ministre en général,
01:19quel que soit le gouvernement du ministre de l'Enseignement supérieur.
01:23Nous connaissons désormais le nom de Philippe Baptiste.
01:27Ce qui est intéressant, c'est qu'il y a eu un prédécesseur qui était, Ruth Grenelle, qui était Jean-Michel Blanquer,
01:33et qui, lui, avait dit que l'islamo-gauchisme était un fait social indubitable.
01:39Soutenant en cela le prédécesseur, la prédécesseur de M. Baptiste, qui était Frédéric Vidal.
01:46Pour la petite histoire, M. Baptiste a été dirkable de Frédéric Vidal.
01:50Directeur de cabinet.
01:51Directeur de cabinet, pardon.
01:52C'est très vargonneux.
01:53Et Frédéric Vidal avait suscité un tollé en son temps, je crois que c'était en 2021,
01:59puisqu'elle avait clairement dit qu'il y avait un problème d'islamo-gauchisme dans les universités françaises.
02:05Elle avait à l'époque demandé qu'un audit soit fait, et ça a été la valse des gouvernements.
02:09Et elle l'a dit notamment sur notre antenne.
02:11Elle l'avait dit parfaitement sur notre antenne.
02:13Et c'est là où le ministre de tutelle, à savoir Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Éducation nationale,
02:17avait parfaitement reconnu l'existence de ce phénomène.
02:20Donc entendre aujourd'hui le ministre délégué à l'Enseignement supérieur,
02:24asséner que c'est une sorte de vision de l'esprit, une sorte de vision artistique,
02:30parce que lui, en tant que scientifique, il sait mieux tout que tout le monde.
02:33C'est assez lâche, dirais-je.
02:35Je vais parler à l'intellectuel, justement, qui est autour de la table, Nathan Devers, écrivain.
02:41Nathan, vous n'êtes pas choqué par ce propos.
02:44On a l'impression que si ce n'est pas vu par la lunette de l'intellectuel,
02:47le phénomène n'existe pas.
02:48C'est effrayant quand il dit ça.
02:49Donc voilà, on pourrait parler de tous les chiffres de la délinquance.
02:52Je ne suis pas d'accord avec vous sur ce point,
02:56parce qu'en fait, le monde universitaire, le monde de la recherche universitaire,
03:01il fonctionne selon des normes qui sont souvent mal comprises dans le restant du débat public.
03:06C'est-à-dire qu'à l'université, un chercheur, alors il peut s'exprimer dans sa vie,
03:10dire tout ce qu'il veut dans sa vie privée, entre guillemets.
03:13Mais en tant que chercheur, quand il écrit, par exemple, un article dans une revue à comité de lecture,
03:17quand il écrit des textes universitaires, évidemment, quand il enseigne, quand il fait des colloques,
03:20sa parole, elle obéit à des critères de scientificité.
03:24Et des critères qui sont extrêmement précis.
03:26Je vous donne un seul exemple.
03:27Quand vous publiez un article dans une revue universitaire,
03:30contrairement à un média normal,
03:31vous êtes relu par un comité de lecture de façon anonyme.
03:34Les gens qui vous lisent ne savent pas qui a écrit l'article.
03:37Et donc, ils peuvent tout à fait estimer.
03:38Donc, si vous voulez, on est dans une logique qui est très, très différente.
03:41Et ce qui explique...
03:41Le problème, c'est que Philippe Baptiste est politique.
03:43Il n'est pas dans une...
03:44Et voilà, il n'est plus chercheur au Sénat.
03:45Il est mini, d'un pur.
03:47Mais ce qu'explique Philippe Baptiste, là, c'est que...
03:50C'est qu'il est soumis au chercheur et qu'il ne sortira pas de ce...
03:52L'islamo-gauchisme n'a pas de reconnaissance universitaire,
03:56pour beaucoup de raisons, d'ailleurs,
03:57qu'ensuite, il peut exister dans le débat public comme signifiant,
04:00mais que d'un point de vue académique, il n'en a pas,
04:01et encore moins pour parler de la manière dont les chercheurs travaillent.
04:05Ce qu'il avait dit dans sa première déclaration, c'est
04:06Oui, on peut trouver quelques chercheurs qui ont des engagements militants
04:10ou qui ne respectent pas, évidemment, les règles de leur métier,
04:13de la même manière que dans tous les corps de métier,
04:15il y a des gens qui ne respectent pas les règles,
04:16et ça, il faut le condamner, il faut être vigilant là-dessus.
04:18En revanche, penser que la recherche serait au service,
04:21globalement, d'un intérêt militant,
04:23c'est presque contradictoire dans les termes.
04:25Non, mais ce qui est absurde, c'est que...
04:27Pardon, mais Michel Foucault, il a existé,
04:30il a écrit sur pourquoi il était passionné par la révolution islamique
04:35et par les écrits à l'époque de l'Ayatollah Roménie,
04:38Jean-Paul Sartre aussi.
04:39Il y a des intellectuels qui le revendiquent,
04:40il y a des gens qui le revendiquent publiquement,
04:42justement, cet islamo-gauchisme.
04:44Il y a Uriah Boutelja, il y a des gens qui sont eux-mêmes
04:46qui écrivent des essais et qui revendiquent cette alliance-là
04:48parce qu'ils voient dans l'islamisme un vecteur
04:51pour porter un projet révolutionnaire.
04:53On n'est pas obligé d'être d'accord avec eux,
04:55mais ça existe, et donc, c'est même pas scientifique.
04:57Parce que de toute façon, si vous regardez en astrophysique,
05:01il y a des tas de théories différentes
05:02sur qu'est-ce que l'univers exactement.
05:05À l'heure actuelle, il y a de plus en plus d'astrophysiciens
05:06qui sont en train de dire que peut-être notre univers
05:08pourrait être le reflet d'un autre
05:11et que nous serions en train de vivre dans un trou noir,
05:14en réalité, qui aurait un univers par an.
05:16Ça n'est pas reconnu par toute la communauté des astrophysiciens,
05:18et pourtant, c'est un fait scientifique.
05:20Donc, on voit bien qu'il est sage-jus de se laver les mains,
05:22et ça explique mieux, par raison pour laquelle,
05:24quand Frédéric Vidal, à laquelle faisait référence
05:26tout à l'heure, mon voisin...
05:30Pardon, j'ai oublié ton prénom.
05:32Jonathan, c'est une chère du nom de famille.
05:34Pardon.
05:36Mais elle avait annoncé une enquête,
05:38et on sait, du ministère de l'Enseignement supérieur,
05:41ensuite, il y a une procédure judiciaire,
05:43et dans le cadre de la procédure judiciaire,
05:44on s'est rendu compte que le ministère
05:46n'avait jamais lancé l'enquête.
05:47Donc, si c'était son directeur de cabinet,
05:49on comprend mieux, effectivement,
05:50parce que c'est absurde de dire,
05:51ça n'est pas validé, mais en même temps,
05:52il ne fait pas d'enquête.
05:53Mais dans l'exemple que vous donnez,
05:54les deux exemples, Michel Foucault et Sartre,
05:57ni l'un ni l'autre,
05:58n'a pris ce genre de position
06:00dans des contextes académiques.
06:02Michel Foucault était prof au Collège de France,
06:03mais il l'a fait dans des textes
06:04qui étaient signés de sa plume dans des journaux.
06:06Non, mais c'est très important.
06:08Non, mais il va sortir un petit peu des études
06:11et se baser sur l'observation
06:14que les ballonches sont interrompues.
06:16Honnêtement, honnêtement, honnêtement.
06:18Moi, ce que j'ai envie de dire à ce garçon,
06:19c'est que le crétinisme
06:21a mis très longtemps à être validé
06:24scientifiquement.
06:25Et en effet, pourtant, il existait.
06:27On appelait souvent le crétin des Alpes.
06:29Et donc, sur le plan scientifique,
06:30le crétinisme a mis beaucoup de temps à être...
06:32J'entends que vous relevez l'absurdité
06:34du propos du ministre.
06:36Je veux juste dire que, parfois, scientifiquement,
06:37ça met un peu de temps à être validé.
06:39Et le mépris, effectivement.
06:40Mais bon, je prends l'exemple du crétinisme.
06:42C'est vrai que c'est un peu facétieux.
06:45Et je ne vise personne, évidemment.
06:47Mais ce que je veux dire simplement,
06:48c'est que c'est absurde,
06:50quand on est ministre,
06:51de dire que ça n'est pas reconnu scientifiquement.
06:53précisément, il n'est pas en train de faire
06:55une production scientifique
06:57qui doit être validée
06:59et donc, il doit s'expliquer
07:01comme politique.
07:02Je vous cite quelques personnes
07:04qui se sont exprimées ces derniers jours
07:06et dont les mots, pour moi, sonnent justes.
07:08Citation, vous la connaissez,
07:09de Charles Péguy, reprise par David Lysnard,
07:12maire de Cannes.
07:13Il faut toujours dire ce que l'on voit.
07:14Surtout, il faut toujours,
07:15ce qui est plus difficile,
07:16voir ce que l'on voit.
07:18Autre citation dans le Figaro
07:20d'un conseiller gouvernemental,
07:21là, qui m'a fait plutôt sourire,
07:22je dois le dire,
07:22on a découvert la persistance du déni
07:25en même temps que le nom du ministre.
07:27Voilà.
07:27C'était pour la petite...
07:28Ça a le mérite de la clarté,
07:29de la justice.
07:30Non, mais sérieusement,
07:31aurait-il dit ça à propos de Thomas Piketty ?