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  • il y a 3 mois
Lundi 16 juin 2025, retrouvez Pierre-Yves Dugua (Correspondant américain) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.

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Transcription
00:00Le dernier quart d'heure de Smartbourg, chaque lundi, c'est le quart d'heure américain.
00:08Nous faisons le point justement sur les affaires en cours à Washington, sur la dimension économique,
00:13mais également géopolitique, avec Pierre-Yves Dugas, notre correspondant américain qui est avec nous,
00:17donc en visio chaque lundi pour ce quart d'heure américain.
00:21Bonsoir Pierre-Yves, bienvenue, merci beaucoup d'être avec nous.
00:24L'actualité très immédiate nous amène évidemment à évoquer la guerre entre Israël et l'Iran,
00:32qui est vue comment depuis Washington, Pierre-Yves, c'est un facteur qui vient perturber, bousculer,
00:42à la fois la conduite de la politique économique et monétaire, et puis la dimension beaucoup plus politique au sein du Congrès ?
00:48Écoutez, si ce conflit ouvert dure trois mois, six mois, ça complique tout, et ça remet en question beaucoup de choses.
01:03Si ça dure trois semaines, un mois, ça ne sera qu'un petit blip.
01:09Dans l'immédiat, on ne sait pas bien évidemment, et c'est une raison de plus pour la réserve fédérale de ne rien faire,
01:16et d'attendre de voir si ce choc pétrolier est une aberration,
01:24ou si cela affecte durablement le pouvoir d'achat des Américains en faisant grimper le prix de l'essence à la pompe,
01:31et si ça a une répercussion sur les prix, et si c'est une raison de plus de craindre un réveil de l'inflation.
01:38L'autre principale raison étant, bien entendu, la répercussion des hausses de droits de douane sur les étiquettes.
01:46Donc pour la Fed, c'est une complication, et c'est plutôt perçu, a priori, si ça se prolonge, comme un élément de stagflation.
01:54Pour le président Trump, c'est aussi un peu compliqué, parce que Donald Trump s'est vendu auprès de l'opinion américaine
02:04comme le faiseur de deal et le faiseur de paix, qui surtout évitera de lancer les États-Unis dans un nouveau conflit,
02:12et surtout pas au Moyen-Orient.
02:14Et Israël aimerait bien, ne serait-ce que pour un soutien plus que logistique,
02:23mais des interventions de gros bombardiers américains avec des énormes bombes
02:27qui soient capables de faire exploser les bunkers dans lesquels, au plus profond de la montagne,
02:33se trouvent les centrifugeuses iraniennes.
02:35Ça serait quelque chose qui compliquerait cette affiche de faiseur de paix que voulait donner Donald Trump.
02:46Et Donald Trump, lui, il est évidemment dans le marketing politique.
02:51Il veut préserver sa promesse au peuple maga de ne pas s'engager dans des guerres durables sur le front extérieur,
02:58mais il veut aussi paraître comme l'homme qui est toujours du côté des gagnants.
03:02Et si Israël est en train de gagner, il faut qu'il soit affiché comme l'homme qui aura aidé Israël à gagner,
03:12parce qu'indirectement, la destruction de certains éléments de l'infrastructure pétrolière iranienne,
03:20si elle accélère la disparition du régime des Mollahs,
03:25peut servir les intérêts américains et les intérêts ukrainiens aussi,
03:30et les intérêts européens.
03:32Ne l'oublions pas, l'Iran est du côté de la Russie dans le conflit avec l'Ukraine.
03:37L'Iran est également le premier fournisseur de pétrole de la Chine.
03:42L'Iran est un pays qui, indirectement, travaille avec beaucoup d'ennemis des États-Unis
03:46et que tous les problèmes de l'Iran peuvent servir, directement ou indirectement,
03:53les intérêts américains.
03:54Le problème, c'est qu'entre cet élément positif des problèmes que doit subir le régime des Mollahs,
04:02il y a le risque d'une forte augmentation des cours du pétrole,
04:06sans parler bien sûr de la catastrophe que serait un blocage du trafic pétrolier dans le détroit d'Hormuz.
04:11Le pétrole qui est l'actif de vérité pour Donald Trump et son électorat,
04:17la transmission de la hausse des cours du pétrole sur les marchés de matières premières à la pompe aux États-Unis,
04:23ça peut aller assez vite et on sait que là, c'est vraiment un facteur de mécontentement en général
04:29pour le consommateur américain dans son ensemble, j'allais dire tout biais politique confondu.
04:35Un mot peut-être également dans ce contexte du statut du dollar, je le disais avec les invités tout à l'heure,
04:42les dernières heures ou les dernières journées depuis l'offensive israélienne menée contre l'Iran vendredi dernier,
04:50Pierre-Yves a été un petit moment de stress test pour savoir si, sur un facteur géopolitique extérieur aux États-Unis,
04:57savoir si le dollar retrouvait un peu de son statut de valeur refuge.
05:01Qu'est-ce qu'on peut en dire en ce début de semaine ?
05:04Écoutez, j'ai regardé le dollar index depuis 5-6 jours, il est à la baisse.
05:10Le dollar n'a pas joué son rôle traditionnel pendant quelques heures, oui,
05:17mais aujourd'hui il est encore à la baisse, certainement face à l'euro.
05:20Il se passe quelque chose de très intéressant,
05:23il se passe quelque chose aussi qui est corrélé avec le marché obligataire et les bons du trésor américain.
05:30Nous n'avons pas ce rush vers la sécurité, ce rush vers le refuge que l'on pouvait observer d'habitude
05:38sur le dollar et les bons du trésor américain, rush que l'on observe en revanche sur l'or.
05:43Donc, il se passe quelque chose.
05:46J'ai trouvé très intéressant les propos de Mohamed El-Erian, le conseiller économique du groupe d'assurance Alliance,
05:56qui estime que l'ordre financier international est en train de se fragmenter
06:02et que les grands investisseurs institutionnels sont en train de modifier leur perspective
06:10à l'égard du dollar et des États-Unis qui étaient au centre de cet ordre,
06:15en faisant une distinction entre le risque souverain américain qui se détériore
06:21en raison d'une politique commerciale, budgétaire et fiscale qui est, aux yeux de beaucoup, irresponsable,
06:28et d'autre part, le risque américain privé qui est porté par une innovation technologique considérable
06:33qui est en train de changer le monde.
06:35Et cette analyse est intéressante.
06:38Ce que j'ai trouvé aussi intéressant et paradoxal, c'est la manière dont se sont déroulées les émissions massives
06:46d'obligations du trésor la semaine dernière.
06:50C'est quand même stupéfiant de voir que ça ne fait pas une ligne dans le journal.
06:54Mais les États-Unis, la semaine dernière, ont emprunté 119 milliards de dollars
07:02en émettant des obligations, des obligations à 3 ans, des obligations à 10 ans et des obligations à 30 ans.
07:10J'avais les montants là.
07:1458 milliards d'obligations à 3 ans, 39 milliards d'obligations à 10 ans, 22 milliards d'obligations à 30 ans,
07:21dans un contexte où toute la presse nous explique qu'il y a une défiance du monde entier
07:25à l'égard des obligations du trésor américain parce que la politique budgétaire est délirante.
07:30Alors que voit-on ? Et ces enchères se sont très très bien déroulées.
07:35L'ampleur de l'intérêt suscité par les émissions est considérable.
07:39Les rendements ont baissé après que les enchères se soient déroulées.
07:45Il y avait eu un bon chiffre d'inflation, je me souviens la semaine dernière aussi,
07:49un bon chiffre d'inflation qui a peut-être aussi amélioré le profil de la demande
07:54pour ces treasuries qui ont été vendues la semaine dernière.
07:58Ça a certainement pu jouer un rôle, mais ce qui est intéressant,
08:04et Mohamed El-Erian l'a bien signalé, c'est qu'il ne faut pas se tromper
08:10et voir dans le succès des émissions du trésor un indicateur absolu de l'intérêt pour le papier américain.
08:21Pourquoi ? Parce qu'émettre facilement 119 milliards de dollars en net net n'est pas incompatible
08:30avec un désengagement progressif à la marge de nombre de grands investisseurs.
08:36On sait que la Chine, par exemple, qui représentait, là encore je vérifie ce que j'ai écrit sur mon papier,
08:45qui représentait 15% du marché du stock de treasuries en 2020 ne représente plus que 9%.
08:54Les Chinois se désengagent et il y a fort à parier que dans le climat de fortes tensions diplomatiques
09:02et commerciales entre les États-Unis et la Chine, la Chine continue de se désengager du marché des obligations américaines.
09:10Le Japon a grimpé depuis 4 ans et les autres grands pays ou grandes institutions domiciliées dans ces pays
09:18comme le Royaume-Uni, la France et l'Amérique sont un peu prestables.
09:20Le principal moment vient de la Chine. Ce n'est pas incompatible, ce désengagement.
09:27N'oublions pas que les étrangers achètent plutôt des obligations relativement courtes.
09:32Ils sont beaucoup moins importants dans la participation des obligations à 30 ans
09:37et que ce sont celles à 30 ans et à 20 ans qui sont les plus difficiles souvent à faire passer
09:43parce qu'elles se sont les plus volatiles.
09:45Mais que dans ces obligations courtes, il suffit de laisser ces obligations arriver à maturité
09:49pour ensuite ne pas les renouveler en volume dans la même proportion
09:56pour qu'en fait on se désengage sans en avoir l'air.
10:00Et c'est probablement ce qui est en train de se passer et qui n'est pas évident
10:03si l'on regarde de manière superficielle les chiffres qui nous montrent un succès
10:08des émissions du Trésor américain.
10:10Il faut bien regarder qui achète aujourd'hui sur les émissions ou au-delà,
10:15qui achète des Trésorys et qui n'en achète plus ou en achète moins.
10:18Et c'est vrai qu'il y a un mouvement vers une dette américaine sans doute beaucoup plus domestique.
10:23Il va falloir que les Américains se mettent eux aussi à acheter peut-être beaucoup plus activement
10:28de la dette pour compenser les achats moindres des poids lourds qu'ont été
10:34et que sont encore la Chine ou encore le Japon.
10:37Merci beaucoup Pierre-Yves.
10:38Pierre-Yves Dugas avec nous chaque lundi dans ce quart d'heure américain.
10:41A retrouver bien sûr en replay sur bsmart.fr.

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