A la suite des débordements liés aux raids anti-immigration à Los Angeles, Donald Trump a décidé de mobiliser la garde nationale et l’armée. Une décision considérée comme démesurée et qui traduit une dérive jugée par certains experts comme autoritaire. Alors, derrière la réponse musclée de la Maison Blanche, que se cache-t-il ? Du mépris pour l’Etat californien et son gouverneur, Gavin Newsom, qui défendent un modèle progressiste à l’opposé de celui du président et de ses électeurs MAGA ? Une volonté trumpiste de redorer un début de mandat abîmé par quelques crises internes récentes ? On analyse la séquence avec Maurin Picard, notre correspondant aux Etats-Unis.
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00:00Depuis le vendredi 6 juin en Californie, et plus particulièrement à Los Angeles,
00:04de violents affrontements ont lieu entre les forces de l'ordre
00:07et des personnes qui protestent contre la politique migratoire de Donald Trump.
00:19Une protestation qui est née suite à différents raids de la police de l'immigration.
00:23Des gens ont été arrêtés sur le perron de leur maison, dans leurs entreprises,
00:27parfois à l'entrée d'école ou même dans les écoles.
00:30Des familles ont été séparées et de nombreux citoyens ont tenté de s'interposer.
00:34Le président américain Donald Trump a alors fait intervenir la gare nationale de Californie et des US Marines,
00:40sans concertation avec les autorités locales,
00:42et notamment sans demander son avis au gouverneur démocrate de la Californie, Gavin Newsom.
00:47Un gouverneur qui est devenu la bête noire de l'administration Trump.
00:51Donald Trump, sans le consulter des leaders de l'administration californien,
00:55a commandé 2 000 de nos membres de l'Assemblée nationale de l'Assemblée nationale
01:00pour déployer sur nos streets, illégalement et pour aucune raison.
01:04Cela faisait 60 ans qu'un président n'avait pas appelé à la mobilisation de l'armée
01:08sans l'approbation du gouverneur de l'État concerné.
01:11Une décision qui semble en plus démesurée par rapport à la réalité du terrain.
01:15Pour mieux comprendre, on a posé la question à Morin Piccard, notre correspondant aux États-Unis.
01:19Alors bonjour Morin.
01:21Bonjour.
01:21Alors vous l'avez dit, il est important de préciser que Los Angeles n'est actuellement pas à feu et à sang.
01:26Les débordements sont contenus et les dégâts relativement limités.
01:30Mais donc ce durcissement du ton de la Maison-Blanche est-il démesuré selon vous ?
01:35Et si oui, pourquoi le président Trump a-t-il justement décidé d'outrepasser les autorités locales
01:39et notamment celles du gouverneur de l'État de Californie ?
01:42Disons que si on prend les incidents proprement dits,
01:45la réaction de l'administration Trump est disproportionnée.
01:47D'autant que vous faites appel à des unités militaires qui ne sont absolument pas formées pour le maintien de l'ordre.
01:53Il s'agit juste de montrer, de faire une parade de muscles et d'armes de guerre,
02:00de faire intervenir des véhicules blindés en centre-ville à Los Angeles.
02:04Donc il s'agit d'impressionner.
02:06Mais c'est aussi une façon de mettre de l'huile sur le feu,
02:09puisque l'arrivée des unités de la Garde nationale et des premiers Marines,
02:13qui sont quand même des troupes d'élite qui sont envoyées, on le sait,
02:16se battre aux quatre coins du monde dans des situations extrêmement délicates,
02:19pas du tout, encore une fois, taillées pour affronter des manifestants désarmés.
02:22Donc c'est totalement disproportionné et ça ne peut que mettre de l'huile sur le feu,
02:26puisque la réaction des gens est un petit peu attisée par cette intervention d'unités militaires
02:33qui n'ont rien à faire là.
02:35Ensuite, il y a des raisons politiques très identifiées pour lesquelles Donald Trump a décidé de faire ça.
02:41Pour lui, c'est du pain béni.
02:43Il avait annoncé pendant la campagne électorale qu'il allait s'en prendre à ces villes sanctuaires
02:47qui ont un petit peu déclaré les unités de ICE,
02:52donc ces fameuses unités conçues pour interpeller les personnes en situation régulière,
02:57donc ces unités, de les déclarer non grata dans une ville comme Los Angeles.
03:02Et donc Trump avait dit qu'il allait s'en prendre à ces villes,
03:04qui sont évidemment, selon lui, des repères de démocrates, de gauchistes,
03:07qui pensent d'abord aux immigrants clandestins avant de penser à leurs propres administrés.
03:13Et c'est du pain béni dans la mesure où Los Angeles est un petit peu l'incarnation
03:17de tout ce qu'il déteste.
03:19Il déteste la côte ouest, il déteste la Californie,
03:21il déteste cet État qui a toujours systématiquement voté démocrate depuis des décennies,
03:26donc où il se sent évidemment en terrain hostile,
03:29et on sait qu'il veut se venger d'une certaine manière.
03:32Alors comment a réagi justement le gouverneur Gavin Newsom ?
03:36C'est une provocation selon lui ?
03:37Et au-delà de ça, est-ce qu'on peut revenir un petit peu sur son profil,
03:40puisque c'est clairement quelqu'un qui pourrait être présidentiable en 2028 ?
03:45Oui, alors il y a plusieurs niveaux d'interprétation par rapport à la réaction très viruleuse de Gavin Newsom.
03:51En droit, sa réaction est tout à fait justifiée.
03:53Il a déclaré cette intervention, cette mobilisation de la Garde nationale de Californie,
03:58totalement illégale et injustifiée,
04:01puisque vous avez un certain nombre de critères dans lesquels un président des États-Unis
04:05peut faire appel à la Garde nationale pour régler des situations de maintien de l'ordre.
04:08Et Gavin Newsom considère que ça mérite d'être présenté, porté devant les tribunaux.
04:15Une plainte a été déposée lundi contre le gouvernement fédéral,
04:18puisque les conditions ne sont pas réunies.
04:21Donc Gavin Newsom est motivé et justifié à raison de s'en prendre à la réaction excessive de l'administration fédérale.
04:28Par contre, il y a évidemment aussi une opportunité pour lui.
04:32Il est l'autre homme de la situation avec Donald Trump.
04:36Il est clairement un prétendant aux primaires démocrates de 2028.
04:41Il a un profil qui pourrait tout à fait réconcilier l'électorat démocrate avec les élites démocrates,
04:46puisqu'il est peut-être un petit peu moins « woke »
04:48que l'image qu'a pu donner Kamala Harris l'année dernière.
04:52Donc Gavin Newsom, évidemment, incarne une forme d'espoir.
04:56Donc il y a un bras de fer intéressant à suivre,
04:58qui est une affaire de communicants, bien sûr,
05:00entre deux personnes avec un caractère, on va dire, exacerbé.
05:03Et on va voir ce qui va se passer dans les prochains jours.
05:06Dans l'immédiat, la crise de Los Angeles permet à Donald Trump de faire d'une pierre deux coups.
05:11En assumant les pleins pouvoirs exécutifs,
05:13il distrait ses électeurs,
05:14qui ont été pas mal ébranlés par le chaos économique provoqué par la guerre douanière
05:18qu'il a déclarée au reste du monde,
05:20mais aussi par le divorce idéologique désormais acté avec Elon Musk.
05:24En déclarant un état de chaos à Los Angeles,
05:27il gonfle la réalité et participe à la stigmatisation de l'opposition démocrate
05:31et de son modèle progressiste.
05:34Bonjour.
05:35Bonjour.