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00:00On va vous avoir Pierre Vermeurenne, qui est historien, professeur d'histoire contemporaine.
00:03Bonsoir, Gauthier Le Brette.
00:05Bonsoir, Laurence.
00:05Vous avez regardé le tennis cet après-midi ou vous avez travaillé, mon cher Gauthier ?
00:08Les deux à la fois.
00:09Les deux à la fois.
00:10C'est ça, les jeunes, ils arrivent à tout faire en même temps.
00:12Nous sommes avec François Puponi.
00:14Bonsoir, François.
00:14Bonsoir, Naïmaïm Fadel et Geoffrey Laurence.
00:17On va commencer, si vous le permettez, par un petit hommage à notre ami Philippe Labreau.
00:21Il avait 88 ans, c'était une figure de notre groupe, évidemment,
00:24parce qu'il a commencé à Direct 8, qui était l'ancêtre de D8 puis de C8.
00:30qui a été fermé il y a tout juste trois mois.
00:32Et on va écouter ce qu'il disait à l'ami Nico Salliagas,
00:36qui lui demandait les recettes pour durer.
00:37Comment on dure dans ce métier ?
00:39Ça, c'est une vraie question que nous nous posons tous, n'est-ce pas, mon cher Gauthier ?
00:42Écoutez la réponse de Philippe Labreau.
00:45C'est quoi le secret pour durer ?
00:46Il n'y en a pas, j'imagine.
00:47Il n'y a pas de formule, mais c'est quoi l'éthique pour durer ?
00:50Je crois que l'éthique, c'est de dire ce que je vous disais à l'instant,
00:53pour chute de l'excellence.
00:54C'est bien, mais tu peux faire mieux.
00:55Donc, il faut recommencer.
00:56Rien ne nous appartient, au fond.
00:58On pense à autre chose le lendemain.
00:59Rien n'est acquis.
01:00Rien n'est acquis.
01:01Il faut continuer.
01:02Quels que soient les avanis, quels que soient les problèmes,
01:05les chutes, on se relève.
01:07Voilà, rien n'est acquis, Gauthier.
01:09Et je le dis pour vous, mais je le dis pour moi.
01:10Parce qu'il faut toujours se remettre en question.
01:12Se dire qu'on n'est jamais arrivé, qu'il ne faut jamais être content de ce qu'on a fait.
01:15Il y a deux choses qui sont absolument fascinantes chez Philippe Labreau.
01:17Évidemment, c'est la durée, et puis c'est l'éclectisme.
01:19Moi, j'ai vu, évidemment, l'héritier qui va repasser ce soir sur ses stars,
01:22où on voit bien que Belmondo joue une sorte d'incarnation de John Fitzgerald Kennedy,
01:27puisqu'il était passionné par les Etats-Unis.
01:29Et il était aux Etats-Unis au moment de l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy.
01:33De l'Hervé Oswald, très précis.
01:34Et il y a aussi, évidemment, l'Alpagueur.
01:37Vous l'avez cité, sans mobile apparent, avec Trintignant.
01:40Donc, il y a cet éclectisme incroyable.
01:42Écrire des chansons, être journaliste écrit, diriger une grande chaîne de radio.
01:47Donc, c'est ça qui est fascinant chez Philippe Labreau.
01:50L'antisectarisme aussi.
01:51parler à tout le monde, ne jamais donner de leçons.
01:56Et au moment où C8 a cessé d'émettre,
02:00il avait fait une chanson absolument remarquable,
02:01où il avait joliment écorné l'Arcom.
02:07Et donc, voilà, c'est la durée, l'éclectisme,
02:09et d'avoir fait tant de choses pendant aussi longtemps.
02:12François Piponi, on ne peut pas s'empêcher de faire un lien
02:14entre la fin de son émission et son décès.
02:16Ce sont des gens qui vivent, et pour le public aussi.
02:20C'était un immense écrivain.
02:22Bien sûr, il n'arrêtait pas de finir comme ça.
02:22Par rapport à sa carrière, on n'avait pas le droit de dire,
02:25à un moment, la chaîne sur laquelle il est ne nous plaît pas,
02:27et donc on arrête.
02:28D'ailleurs, il l'avait très très mal vécu.
02:29Mais s'il a aussi duré, c'est parce qu'il était extrêmement respectueux de tout le monde.
02:33Il avait de l'empathie, il avait de la gentillesse.
02:35Nous, on avait un ami commun qui avait joué, d'ailleurs, dans son oubli apparent,
02:39et je lui avais annoncé un jour le décès.
02:41Il me disait, mais j'aimerais bien aller sur sa tombe.
02:42Il aimait les gens, il était fidèle en amitié, il respectait tout le monde,
02:48et c'est ce qui lui a permis de durer,
02:49parce qu'on était content d'être invité chez lui pour être interviewé.
02:52Et c'était un curieux éternel, Geoffroy Lejeune, curieux de tout,
02:55des autres, de la littérature, de la musique, passionnée de musique classique.
02:58Il connaissait le classique merveilleusement bien.
03:01Honnêtement, c'est assez bluffant de toucher à ce point-là à tout.
03:04Moi, il y a une chose qui me fascine, parce que j'en ai connu quelques autres,
03:07j'ai connu notamment, moins que vous,
03:08et j'ai quand même connu Étienne Mougeot à la fin de sa vie,
03:11ces gens qui ne veulent pas s'arrêter.
03:13Je me demande quel est le ressort, en fait, quelle passion les motive.
03:18La passion, vous venez de dire, c'est la passion.
03:20Comptez sur moi, à l'âge de 62, 3, 4, 5, 6 ans, je ne sais pas,
03:24arrêtez de travailler et profitez de ce qui me restera à vivre.
03:27Et en fait, il y a des gens comme ça, des passionnés du journalisme,
03:29qui ont envie de tout...
03:31D'ailleurs, le fait qu'il ait si mal vécu la fin de son émission
03:34prouve qu'en réalité, c'était un moteur de sa vie.
03:37Et moi, je trouve ça respectable.
03:39D'ailleurs, la dualité en chanson,
03:42donc on pourrait penser qu'il y avait une certaine légèreté,
03:45mais en réalité, c'était poignant, en fait.
03:48C'était poignant, vraiment.
03:49Il était avec son équipe et il partait comme ça, en chanson.
03:52Et moi, je trouve ça extrêmement triste,
03:54parce que, voilà, on peut se poser la question,
03:57je suis désolée de me la poser ainsi,
03:58mais est-ce que ce n'était pas aussi, pour lui,
04:01un peu trop difficile à vivre ?
04:03Parce que je pense qu'il aurait voulu mourir sur scène,
04:05comme dirait le chanteur.
04:07Peut-être au quotidien, dernier mot.
04:08Moi, je l'avais croisé au moment où on savait que C8 allait fermer.
04:12Il venait dans l'émission de Pascal Praud.
04:14Il n'était pas du tout dans la légèreté
04:16au moment où C8 allait fermer,
04:18alors qu'il avait lancé la chaîne avec Vincent Bolloré,
04:20à l'époque où ça s'appelait Direct 8.
04:23Donc oui, d'ailleurs, tous les salariés de C8,
04:26toutes les incarnations de cette chaîne,
04:28c'était le doyen de la télévision française.
04:30Il était le doyen, à ce moment-là, de la télévision française
04:32dans une émission, L'Essentiel chez Labreau,
04:34qui était une émission qui voulait transmettre la culture
04:36et l'ouvrir au plus grand monde.
04:38Encore une fois, sans sectarisme,
04:39parler à tout le monde, à tous les publics,
04:41à toutes les Frances.
04:43Et c'est ça qui était tout à fait remarquable
04:44chez Philippe Labreau.
04:45Philippe-Labreau, rapidement.
04:46Moi, ce qui m'a frappé dans sa carrière,
04:49parce qu'il nous a accompagnés depuis longtemps,
04:51c'est cette génération qui était très française,
04:54de culture classique,
04:56et qui nous a parlé de l'Amérique.
04:58Parce qu'il nous a toujours parlé de l'Amérique.
05:00Et je pense que cette génération,
05:01fascinée par l'été enfant,
05:03enfin, adolescent et enfant,
05:04pendant la guerre et après la guerre,
05:07et ils ont eu ce sentiment d'être libérés par les Américains,
05:09et ça les a portés.
05:10Leur regard a été façonné sur l'Amérique,
05:12et ils ont construit notre regard.
05:14Et aujourd'hui, quand on est beaucoup plus Américains
05:15et mondialisés qu'eux ne l'étaient,
05:17on regarde l'Amérique autrement,
05:19parce qu'elle a changé,
05:20parce qu'elle a perdu de sa superbe.
05:23Mais voilà, il a aidé à construire notre regard sur ce pays.
05:26André Valigny ?
05:26Il y a une chose qu'il disait rarement,
05:28il l'avait dit une fois,
05:29je crois chez Frédéric Aziza sur Radio J,
05:32ses parents ont sauvé des Juifs pendant l'occupation,
05:35et ses parents ont été reconnus comme justes parmi les nations.
05:38Ils ont leur nom à Yad Vashem,
05:39au mémorial de la Shoah à Jérusalem.
05:41Voilà, hommage à Philippe Labreau qui nous a quittés ce soir.