Passer au playerPasser au contenu principal
  • il y a 8 mois
Un jeune homme, Justin P., est passé à l'acte jeudi 24 avril dans l'établissement privé Notre-Dame-de-Toutes-Aides à Nantes. L'adolescent a attaqué au couteau quatre élèves du collège-lycée avant d'être interpellé. Une lycéenne est morte.

Catégorie

📺
TV
Transcription
00:00Et pour en parler avec nous, Gonaël Durand, secrétaire générale SNES, UNSA, éducation de le syndicat des infirmiers et infirmières
00:10exerçant ou ayant exercé dans l'éducation nationale.
00:13Joanna Rosenblum avec nous en plateau, psychologue, clinicienne, consultante BFM TV.
00:18Et Vincent Vantigame, grand reporter police-justice BFM TV.
00:21On l'a appris, c'est l'info de la soirée.
00:23La garde-vue a été levée pour le lycéen de 16 ans qui est accusé d'avoir tué une adolescente qui venait d'avoir 15 ans.
00:31D'abord un témoignage peut-être, celui d'un proche de Justin Pé qui avait bien remarqué les dérives du jeune homme.
00:39Il nous appelait nous dans un groupe sur Snapchat.
00:41Il disait que c'était la dernière fois qu'on allait le revoir, que c'était une longue vie.
00:44Il l'a raccroché direct et moi je lui ai direct l'envie de le rappeler en privé entre moi et lui.
00:49Il ne voulait pas me parler, il me disait longue vie à toi, c'est que du bonheur, prends soin de ta famille.
00:55Je le connais depuis août, ça veut dire qu'il nous parlait de temps en temps,
01:00quand il avait envie, quand il envoyait des vidéos de réseaux sociaux, TikTok et tout ça.
01:03Il nous parlait de la pollution, il nous parlait de nazis, d'extrémistes, de djihadisme,
01:08même du journal d'Anne Franck, je ne sais pas, plein de trucs.
01:13Mais moi ce qui m'a fait le plus peur, c'est qu'il m'a parlé du 11 septembre.
01:15C'est juste là que j'ai eu le plus peur.
01:16Il nous disait que ça a l'air incroyable de détourner un avion, de conduire un avion sans savoir le conduire.
01:21Johanna, ces mots sont quand même extrêmement troublants.
01:23Ces mots rapportés par l'un des camarades de Justin Pé.
01:28Ils n'auraient pas pu être repérés avant ?
01:30Si je pense qu'ils ont été repérés, mais qu'ils n'ont pas été pris à la mesure du danger qu'ils représentaient.
01:35Vous savez, avant une décompensation et un passage à l'acte aussi grave,
01:39il y a souvent ce qu'on appelle une phase prodromique, c'est-à-dire des symptômes à bas bruit, des signaux faibles.
01:44Et peut-être que ce jeune avait besoin de soins, peut-être même qu'il en a eu.
01:47À un moment donné, je ne sais pas s'il était suivi, on le saura, s'il observait un traitement.
01:51En tous les cas, il y a eu un manque d'observance, soit du corps médical, soit de la famille ou de l'éducation.
01:55Mais tenir de tels mots, ça ne veut pas dire qu'on va basculer dans l'irréversible.
02:00Non, évidemment, toutes les personnes qui ont des délires apocalyptiques, de persécution, ne passent pas à l'acte.
02:08Mais de toute évidence, il y a eu une accélération de ces symptômes.
02:11Peut-être que dans les jours qui précédaient aussi le passage à l'acte, il y a eu une marginalisation, un renfermement.
02:17Peut-être qu'il s'est mis à parler seul.
02:18En tout cas, il y a souvent ces symptômes qui disent que le jeune est en train de décrocher.
02:23Mais vous savez, en absence d'un suivi, les psychologues scolaires, les infirmiers sont parfois dispersés sur des dizaines d'établissements.
02:29Il est difficile de repérer ces jeunes qui basculent.
02:32Alors justement, Gwenaël Durand, vous, ce problème de suivi, vous le connaissez bien.
02:36Parce que forcément, les moyens manquent pour repérer ce type de comportement et de dérive.
02:46Oui, tout d'abord, j'ai une pensée pour la famille des victimes, évidemment, et toute la communauté éducative.
02:53Et effectivement, nous, on le revendique depuis très longtemps.
02:56On manque de moyens, on manque de postes.
02:59On réclame des postes supplémentaires pour pouvoir accueillir tous les jours les élèves et les écouter et pouvoir les orienter dans les structures adaptées.
03:09On vous avait lu, évidemment, le texte envoyé avant les actes par Justin Pé.
03:12On va peut-être voir quelques extraits de ce texte.
03:15Les allusions au climat, les allusions à l'environnement, la mondialisation à transformer notre système en une machine à décomposer d'humains.
03:22Pourquoi continuer à vivre soumis à un système qui détruit notre essence ?
03:27Qu'est-ce qu'ils traduisent, selon vous, ces mots ?
03:29Alors, pour moi, il traduit une grande détresse psychologique, une quête de sens, une perte de repère.
03:43Ce qu'il faut savoir, c'est que ce jeune, il était, il y a cinq ans, quand on était confiné, il était en CM2.
03:50Donc, c'est un élève qui a connu l'angoisse climatique, l'angoisse des virus qui peuvent arriver.
04:00Et je pense qu'il s'est construit sur une angoisse, en fait, sur l'environnement, etc.
04:08Et peut-être qu'il n'a pas eu l'espace pour pouvoir échanger et revoir un peu ses pensées très noires sur la société, le climat, etc.
04:20Vous parlez de la période du Covid.
04:22Est-ce que la santé mentale des ados, maintenant, c'est une préoccupation nouvelle ?
04:28Tous s'accordent à dire que la racine du problème de ce qui s'est passé à Nantes, c'est la santé mentale.
04:34Est-ce que nos ados vont mal ?
04:38Oui, oui, complètement. C'est un problème de santé mentale.
04:42Nous, sur toutes les consultations qu'on peut réaliser, on interroge systématiquement la santé mentale.
04:48Est-ce que ce jeune va bien ? Comment il est ? Comment il se sent ?
04:51Est-ce qu'il n'est pas en détresse ? C'est une détresse psychologique peut-être provisoire.
04:55Comment il se sent ?
04:56Sachant que là, c'est une période importante pour les élèves.
04:59Ils ont une pression académique, ils ont la pression de l'orientation, de la réussite, etc.
05:06Et puis tout ce qui les entoure, que ce soit les guerres, le climat, peut être source d'angoisse pour ces jeunes qui se posent beaucoup, beaucoup de questions.
05:15Toute la question est de savoir, justement...
05:17Il y a l'urgence sur la santé mentale.
05:19Et là, c'est la difficulté.
05:20À partir de quand on peut redouter qu'un adolescent qui n'est pas bien dans sa peau bascule vers cet acte terrible qui a eu lieu à Nantes ?
05:29C'est ça qui est difficile.
05:30C'est ça.
05:33Donc il faut une évaluation.
05:35Dès qu'on a le moindre doute, il faut évaluer la santé mentale.
05:39Nous, on le fait.
05:40Mais maintenant, on manque de moyens.
05:42Il faudrait des personnes qui puissent nous orienter aussi l'élève où on a des doutes,
05:49pour que nous, on puisse faire une évaluation plus approfondie de ces symptômes et l'orienter vers les structures adéquates.
05:56Et c'est toujours pareil, il manque aussi des structures de soins pour accueillir ces jeunes, pour les prendre en charge.
06:04Je donne juste ce chiffre.
06:057500 infirmières pour 12 000 collèges et lycées.
06:08900 médecins scolaires pour l'ensemble des écoles, collèges et lycées de France.
06:12Soit 60 000 établissements.
06:14Alors l'une des informations importantes de Vincent Vantiguem de la soirée, c'est que la garde à vue, en fait, de Justin P, elle a été levée.
06:20Et qu'il a été donc interné dans un hôpital psychiatrique.
06:23Quels sont les éléments qui conduisent un psy à prendre une telle décision ?
06:29Alors ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'au tout début de la garde à vue, avant la moindre audition,
06:33chaque personne a le droit de voir d'abord un médecin, un psychologue ou un psychiatre, et aussi évidemment un avocat.
06:38Et là, avant la première question qui lui est posée, c'est est-ce qu'il est en état justement de répondre aux questions ?
06:43C'est un psychiatre qui l'a examiné.
06:45Et voilà, il y a des signaux qui sont pris en compte.
06:47Est-ce qu'il a une bouffée délirante qui se poursuit après le passage à l'acte ?
06:51Est-ce qu'il dit qu'il entend des voix ? Est-ce qu'il parle tout seul ?
06:53Voilà, c'est des éléments qui vont être pris en compte pour que le psychiatre détermine que, non, à ce moment-là précis,
06:58il n'est pas en mesure de répondre aux questions et qu'il faut donc lever la garde à vue.
07:01Ça veut dire que l'État peut évoluer et que la garde à vue peut reprendre ?
07:04Exactement, à n'importe quel moment. Si on considère par exemple aujourd'hui, en fin de journée, qu'il a retrouvé une forme de stabilité
07:09et qu'il est en mesure de répondre aux questions, on pourra reprendre la garde à vue aujourd'hui ou dans quelques semaines.
07:14Maintenant, il y a une deuxième phase qui va s'ouvrir, puisque évidemment on est sur des faits criminels, une information judiciaire va être ouverte.
07:19Et dans le cadre de cette information, dans plusieurs semaines, voire peut-être plusieurs mois, il va être expertisé, examiné par un psychiatre
07:25qui va déterminer si son discernement était aboli, altéré ou s'il avait pleinement conscience de ses actes afin de déterminer s'il est responsable pénalement.
07:32Mais dans ce cas-là, il pourrait donc ne pas y avoir de procès ?
07:35Non, si on détermine que son discernement a été totalement aboli, il ne sera pas jugé.
07:40Il y aura un procès uniquement pour les victimes, pour leur attribuer le statut de victime.
07:43Mais lui, de son côté, ne pourra pas être considéré comme responsable de ses actes, parce qu'en France, on ne juge pas les fous.
Écris le tout premier commentaire
Ajoute ton commentaire

Recommandations