00:00Dans un instant, nous recevrons la chanteuse, la grande voix, Fabienne Thibault.
00:04Mais on est toujours avec deux experts du foot business, Virgile Cayet et Pierre Maes,
00:08pour parler des droits télé, du foot et des prix en forte augmentation
00:13pour pouvoir voir ces matchs de Ligue 1.
00:15Et je me pose la question si Dazone, donc on parlait de ce nouvel acteur,
00:19Dazone, britannique, qui est arrivé en France et qui propose les matchs à 40 euros.
00:24Certains des matchs de Ligue 1, il faut s'abonner pour 40 euros.
00:27Si jamais ils ne vendent pas assez d'abonnements, qu'est-ce qu'il se passe ?
00:30Est-ce que la saison de la Ligue 1 pourrait carrément s'interrompre ?
00:33Faute de financement, Pierre Maes.
00:35Certainement pas, ce n'est pas la première fois que des droits télé sont achetés par des télés à perte,
00:41qu'ils les exploitent à perte.
00:43Ça a d'ailleurs été une des caractéristiques du business
00:46dans les dernières années de sa progression atmosphérique,
00:51on va dire quand par exemple les telcos, les sociétés de télécommunications
00:55ont commencé à investir comme Altice,
00:57ont commencé à investir dans le contenu sportif.
01:00Ils ont perdu énormément d'argent.
01:03Les plus habiles parvenaient à vendre des abonnements internet,
01:07mais l'exemple d'Altice est là pour nous le montrer,
01:10il a perdu beaucoup d'argent et est reparti assez rapidement.
01:14Donc voilà, si Dazone perd de l'argent,
01:18pour moi ce qui est plus inquiétant,
01:20c'est comme je l'expliquais,
01:23c'est l'attitude et la volonté du propriétaire d'encore remettre au pot, d'encore investir.
01:29Ils ont annoncé que normalement le groupe serait à l'équilibre ici en 2024,
01:34ça n'a toujours pas été confirmé,
01:36mais dans le business, nous on sait bien que le groupe Dazone est à vendre,
01:41est à vendre depuis longtemps.
01:42Le rêve de Len Blavatnik qui voulait en faire un Netflix du sport,
01:47c'est de le vendre à Apple ou à Disney,
01:52pour en faire vraiment, pour retirer une plus-value de son investissement.
01:56Et donc pourquoi il est venu investir en France ?
01:59Comme ça il peut dire, je suis présent dans quatre pays du Big Five européen,
02:05et donc son groupe représente du coup normalement une attractivité supplémentaire.
02:10En tout cas, c'est ce qu'il pense.
02:11Il faut quand même derrière qu'il y ait des abonnés pour que la mariée soit jolie,
02:15et ça va être compliqué parce que de plus en plus de téléspectateurs se tournent,
02:19on le voit aujourd'hui, vers des moyens illégaux.
02:22On parle de l'IPTV, de Telegram.
02:25Est-ce qu'on sait combien de personnes aujourd'hui regardent par ces biais-là les matchs de Ligue 1 ?
02:31Par définition, c'est impossible de le dire puisque c'est interdit.
02:34Donc sauf à ce que les gens lèvent le doigt en disant je transgresse la loi.
02:39Mais effectivement, on peut estimer que c'est plusieurs centaines de milliers de spectateurs
02:45qui ont malheureusement, je dis malheureusement parce que pour le modèle économique et la règle du jeu,
02:50c'est dommage, mais en gros, ils ont pris l'habitude de suivre les matchs de Ligue 1 de cette manière-là.
02:59Alors il faut savoir quand même que l'arsenal législatif a été sérieusement renforcé en France
03:03depuis un an et demi maintenant.
03:05Il y a même une association qui s'est créée qui regroupe tous les détenteurs de droits,
03:09donc les ligues professionnelles et puis les diffuseurs,
03:12de façon à lutter contre le streaming illégal.
03:15Et maintenant, en référé, on peut aller très très vite pour fermer un site.
03:19La difficulté, c'est qu'effectivement, lorsqu'on en ferme un, il y en a dix qui peuvent s'ouvrir à côté.
03:23Donc c'est vraiment un travail mondial qu'il faut arriver à mener.
03:27Il y a eu des sanctions contre des consommateurs déjà ?
03:29Bien sûr, oui, bien sûr, il y en a eu et puis surtout contre ceux qui vendent les accès en IPTV, etc.
03:35Mais c'est quand même extrêmement complexe.
03:39Néanmoins, il y a une vraie volonté du législateur d'avancer,
03:42soutenue par les détenteurs de droits, puisque c'est quand même leur modèle économique qui est en péril,
03:46si ça ne fonctionne pas.
03:47Oui, c'est très étonnant de voir le sport,
03:51comment on va dire, plus de 25 ans après Napster,
03:57se battre contre le piratage.
04:01Donc effectivement, Napster qui signait le début du piratage de la musique,
04:05le business de la musique a commencé à réagir de la même façon.
04:09D'abord le déni et puis on essaye de juguler et de le réprimer.
04:14Mais ils ont dû à un moment donné comprendre que ça ne servait à rien,
04:19ça coûtait cher et qu'effectivement, à partir du moment où ils ont commencé à punir leurs propres consommateurs,
04:24ils se sont dit, tiens, là il y a peut-être un problème.
04:26Et aujourd'hui, le sport en est encore là.
04:29Et c'est un peu dramatique dans la mesure où...
04:32Alors c'est quoi la solution du coup ?
04:33Parce que la solution, ce serait d'avoir un acteur avec un coût beaucoup moins élevé.
04:37C'est ce qu'on a vu dans la musique, vous faisiez le parallèle avec un Spotify ou un Deezer
04:42qui sont arrivés en France avec des prix autour de 10 euros.
04:45Je me souviens que l'an dernier, Amazon proposait des abonnements à des prix relativement corrects.
04:50Je crois que c'était aux alentours de 20 euros.
04:52Pourquoi ça s'est arrêté ça ?
04:53Il y a deux leviers.
04:55Il y a effectivement le tarif et puis il y a également le spectacle que l'on propose.
05:01C'est vraiment les deux éléments qui vont faire la différence.
05:05Là, on peut s'interroger aujourd'hui et c'est probablement le travail que doit mener la ligue.
05:08Je ne veux pas croire un seul instant que la ligue de football professionnelle reste les bras croisés
05:12en se disant, ça y est, on a fait le taf, on a signé avec Dazone.
05:14Ça ne suffit pas.
05:15Donc je pense que c'est d'ailleurs probablement la raison pour laquelle ils ont fait...
05:18Ils ont préservé une porte de sortie au bout de deux ans.
05:21Et je pense qu'ils travaillent sur des solutions B au cas où cette option-là ne fonctionne pas.
05:27Il y a un phénomène générationnel, indiscutablement.
05:30Et vous l'avez dit tout à l'heure dans le journal des médias,
05:33les nouvelles générations ne consomment plus le sport et la télé de la même façon.
05:39Donc tout ça est une vraie réflexion de fond qui change aussi le modèle du foot et des clubs français.
05:45Est-ce qu'on met l'argent beaucoup sur les salaires de joueurs moyens
05:49ou est-ce qu'on organise un peu autrement le spectacle ?
05:52C'est vraiment une réflexion de fond actuelle.
05:54Merci, on sera amené à reparler, j'en suis sûr, de ce sujet passionnant.
05:58Merci à tous les deux d'être revenus à ce micro.
06:01Virgile Cayet, je rappelle que vous êtes déléguée générale de l'Union Sport et CITL.
06:05Et puis Pierre Maes, pour aller plus loin sur le sujet, le titre de votre livre,
06:09La ruine du foot français.
06:11Je recommande également le business des droits télé du foot.
06:14Tout est dans le titre avec Pierre Maes, c'est ça qui est bien.
06:18Merci à tous les deux d'être venus.