Kevin De Bruyne a inscrit ses 99e et 100e buts avec Manchester City sur la pelouse de Crystal Palace samedi (2-4). Une prestation majuscule de plus pour le milieu de terrain belge, que notre consultant Philippe Auclair place dans le gratin de l'histoire du football anglais. On en parle dans Tour d'Europe, ce lundi. Extrait en vidéo. [Réalisation : Simon Farvacque, Marko Popovic.] Les chaines Eurosport sont disponibles au sein des offres Canal+, Prime Video, Bouygues Telecom et Free avec TV by Canal
00:00 Il y a un joueur qui brille, on s'en parlait juste avant, l'un comme l'autre, on n'a plus les mots pour qualifier Kevin De Bruyne,
00:06 mais c'est quand même toi qui vas devoir en trouver, Philippe.
00:08 99ème et 100ème but inscrit ce week-end avec Manchester City par le Belge, un doublé absolument extraordinaire.
00:16 Où est la place de Kevin De Bruyne ?
00:21 Alors, ce n'est même plus seulement dans l'histoire de City qu'il faut le classer,
00:25 mais dans l'histoire de la Première Ligue et dans le gratin du football européen.
00:29 Où est-ce qu'on met De Bruyne ?
00:31 On met dans le 11 de départ, je pense.
00:34 D'abord, il faut lui trouver une place, ce n'est pas nécessairement évident,
00:39 mais on va lui donner, on lui met une place dans le 11 de départ de Manchester City, ça va de soi.
00:48 Au passage, on verse une petite larme de crocodile pour Chelsea qui ont quand même laissé partir ce garçon.
00:56 Il fallait quand même le faire.
00:59 Pour ce qui est de la Première Ligue, je pense qu'il a sa place dans le 11 de départ,
01:04 dans le 11 idéal de la Première Ligue depuis sa création.
01:07 Je te dirais même qu'on pourrait prendre l'ensemble du, ne parlons pas seulement de la Première Ligue,
01:12 le football existait avant 1992 et il est candidat à une place dans le 11 de départ ou dans quelques équipes où ce soit.
01:19 Je pense qu'aujourd'hui, de toute façon, quand on entendait Pep Guardiola en parler,
01:25 on le sentait confié d'admiration.
01:26 Tu auras vu d'ailleurs la réaction de Guardiola lorsque Kevin De Bruyne marque son premier but,
01:32 la façon dont il applaudit, envoie un baiser, etc.
01:34 C'est-à-dire que c'est un but venu d'ailleurs, c'est un joueur venu d'ailleurs,
01:39 et en même temps, c'est un joueur qui est vraiment d'ici bas.
01:42 C'est ça qui est extraordinaire chez Kevin De Bruyne et je crois qu'il fait qu'on ne se rend peut-être pas suffisamment compte de ce que ce joueur est.
01:48 C'est que c'est quelqu'un qui est tellement humble dans sa façon d'approcher son métier
01:52 et dans sa façon d'approcher les médias également et les fans.
01:56 C'est quelqu'un qui est tellement simple, naturel dans sa façon de gérer.
02:00 C'est quelqu'un qui est tellement transparent au niveau des émotions,
02:03 mais qui n'est pas quelqu'un d'excessif, qui n'est pas un grognon, etc.
02:07 Et du coup, on a du mal à s'imaginer que, à mettre en rapport cet homme très intelligent,
02:15 au passage, parlant trois ou quatre langues absolument couramment,
02:19 mais c'est vraiment un homme normal, c'est un homme comme toi et moi, comme tout le monde,
02:23 mais qui a ce talent absolument extraordinaire, ambidextre au passage, comme on l'a encore vu ce week-end,
02:30 et puis qui va nous marquer 100 buts en 372 matchs alors qu'il joue au milieu de terrain.
02:35 Bon, il n'y en a pas beaucoup qui vont dire ça.
02:37 Et en plus de ça, ces 100 buts, à mon avis, il aurait pu les inscrire beaucoup plus tôt parce que,
02:40 mine de rien, n'oublions pas Kevin De Bruyne, c'est aussi quelqu'un qui s'est battu contre les blessures dans sa carrière.
02:46 C'est quelqu'un qui a eu trois saisons tronquées à Manchester City, la dernière étant celle-ci.
02:51 Et d'autres joueurs se seraient pu les casser, pas Kevin.
02:54 Kevin, quand il est revenu de sa longue blessure pour participer à cette campagne de Manchester City,
03:00 où il pourrait bien être l'élément déterminant, comme il l'a été contre Crystal Palace au week-end,
03:05 d'autres joueurs auraient pu être dans un trou noir, la déprime, tout ce qu'on voudra.
03:09 Pas De Bruyne.
03:11 De Bruyne, il dit « ben non, je vais profiter de cette blessure pour emmener mes enfants à l'école, vivre une vie normale ».
03:16 Et c'est cette façon d'équilibrer la normalité, et j'allais dire l'exceptionnalité, qui rend De Bruyne pour moi encore plus grand.
03:23 Parce qu'il sait tout faire, sauf jouer de la tête.
03:27 Ça par contre, il n'est pas bon.
03:28 Ça, il n'est pas bon du tout.
03:30 Mais tout le reste, pour ce qui est de la vision du jeu, je pense que...
03:33 Moi, je vois un seul joueur qui puisse lui correspondre pour la vision du jeu, c'est Dennis Bergkamp.
03:39 Et quiconque me connaît et me connaît moins,
03:42 l'amour que je vous à Dennis Bergkamp, c'est que c'est un compliment, ça va très très haut.
03:47 C'est une forme d'intelligence du jeu que l'on trouve chez les grands meneurs comme Michel Tattili, justement, ou Dennis Bergkamp.
03:55 À mon avis, meilleur qu'André Aperlo, par exemple.
03:58 Mais il est dans cette classe-là.
04:03 C'est tout simplement extraordinaire, profitons-en, il est quand même plutôt jeune, notre Kevin.
04:08 Il est dans sa 33ème année, si je ne m'abuse.
04:12 Et il ne va pas être éternel, mais on souhaiterait qu'il le soit.
04:15 Parce que, très honnêtement, ce qu'il nous a encore offert, ce qu'il nous offre en ce moment,
04:19 ce qu'il nous offre tous les week-ends, c'est absolument exceptionnel.
04:22 Et ce qui est invraisemblable, c'est qu'il finira sa carrière sans avoir été footballeur de l'année en Angleterre.
04:27 Alors qu'il est tout simplement l'un des meilleurs joueurs que le football anglais ait jamais connu.
04:31 C'est ça aussi le paradoxe Kevin De Bruyne.
04:34 Peut-être un tout petit mot...
04:35 Il n'aura pas été ballon d'or, sauf si jamais, bien évidemment, il fait un triplé au capitale.
04:38 Ce n'est pas ce que nous réserve effectivement cette fin de saison, et notamment ce quart contre le Real,
04:43 où il a souvent martyrisé le Real Madrid, d'ailleurs, Kevin De Bruyne.
04:46 Peut-être un petit mot, parce que tu parlais aussi de Guardiola.
04:48 On a très souvent loué Pep Guardiola pour sa capacité à faire progresser ses joueurs.
04:54 Est-ce que c'est ça aussi l'histoire de De Bruyne, l'influence de Guardiola ?
04:58 Ou est-ce qu'on prend un peu plus de recul par rapport à ce joueur-là,
05:01 qui était déjà un excellent joueur avant de rencontrer Guardiola ?
05:04 Alors, il se trouve que moi je connais des gens qui connaissent Kevin depuis qu'il a 12 ans,
05:08 à peu près 12 ans, et qui sont occupés de lui à Genk.
05:12 Et ces gens m'ont raconté comment, même à cet âge-là, ils s'étaient rendus compte,
05:17 parce qu'ils font beaucoup de tests psychomoteurs dans les clubs belges,
05:21 je dirais, à l'époque, ils étaient en avance sur nous, et un peu sur tout le monde,
05:25 et ils disaient que Kevin De Bruyne avait une vision du jeu et une rapidité de pensée
05:32 qui était non seulement exceptionnelle, mais qu'ils n'avaient jamais vue auparavant
05:35 et qu'ils n'ont jamais revu depuis.
05:37 C'est-à-dire qu'on a affaire à un joueur d'exception à ce niveau-là.
05:41 Donc, on l'a toujours su.
05:42 Quand il était à Genk, c'était une merveille.
05:44 Quand il était à Wolfsburg, c'était une merveille.
05:47 C'est simplement que Chelsea n'a pas su saisir sa chance,
05:50 et qu'il est tombé avec Guardiola, même si sa relation avec Guardiola,
05:53 elle est parfois un petit peu tendue, on les a vues avoir des mots,
05:57 mais c'est des mots d'égal à égal.
05:58 C'est un très grand entraîneur qui parle à un très grand joueur,
06:01 et un très grand joueur qui a, en plus de ça,
06:04 encore une fois, je reviens là-dessus, c'est quelqu'un de normal.
06:07 C'est-à-dire que quand il va gueuler avec Pep Guardiola,
06:09 ce n'est pas un caprice de star.
06:12 C'est juste un joueur qui adore le foot, qui veut continuer de jouer au foot,
06:15 il veut être sur le terrain, et il ne comprend pas.
06:17 Parce que dans son esprit, il peut faire mieux, il peut donner mieux, etc.
06:20 Ou il frustre avec lui-même.
06:21 Et en effet, la rencontre est parfaite.
06:25 Même si Manchester City, j'ai vu des stats assez étonnantes
06:29 qui montraient que quand Kevin De Bruyne
06:33 n'est pas dans le 11 de départ de Manchester City,
06:35 en fait, le nombre de points par match des citizens
06:38 est quasiment le même que lorsqu'il est là.
06:40 Ce que, bien évidemment, les chiffres ne disent pas,
06:43 c'est qu'il y a des matchs, comme celui de Crystal Palace,
06:46 où quand il n'est pas là, ça fait une différence énorme.
06:49 Et où il fait la différence à lui tout seul.
06:53 Et l'autre chose, c'est qu'on ne se rend peut-être pas suffisamment compte
06:58 de la façon dont il est...
07:01 Il est en fait celui par qui les combinaisons passent.
07:04 L'une des raisons pour lesquelles Erling Haaland connaît une saison difficile,
07:08 attention, par ses standards,
07:10 c'est le fait que tout simplement Kevin De Bruyne n'était pas là.
07:13 Kevin De Bruyne était le joueur qui savait le trouver,
07:15 le joueur qui avait, je veux dire, les passes en première intention de Kevin De Bruyne.
07:19 Je ne connais pas grand-chose de plus beau que ça à avoir
07:22 pour quiconque aime le football, c'est l'intelligence du football fait homme.
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