Nicola Procaccini : "La prochaine Commission sera de centre-droit"

  • il y a 4 mois
Les conservateurs et les réformistes pourraient sortir renforcés des prochaines élections européennes, et sont prêts à modifier les équilibres du nouveau Parlement européen. Nicola Procaccini, co-président de l'ECR, est l'invité de the Global Conversation.

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00:00 Les conservateurs et les réformistes pourraient sortir renforcés des prochaines élections
00:07 européennes et sont prêts à modifier les équilibres du nouveau Parlement européen
00:11 où ils disposeront très probablement de davantage de députés qu'aujourd'hui.
00:14 Les partis conservateurs n'ont pas choisi de candidat principal puisqu'ils décrient
00:18 le système du Spitzenkandidat.
00:20 Ils ne souhaitent plus que leur Etat quitte l'Union européenne mais promettent de la
00:23 changer de manière radicale.
00:25 Ici à Latina, nous avons rencontré le co-président de leur groupe l'ECR, l'eurodéputé de Fratelli
00:31 d'Italia, Nicola Procaccini, invité de ce numéro de The Global Conversation.
00:37 Nicola Procaccini, merci d'être avec nous.
00:41 Vous êtes député européen Fratelli d'Italia, candidat aux prochaines élections européennes
00:45 et co-président du groupe des conservateurs et réformistes européens.
00:49 Nous nous trouvons dans un musée sublime consacré au XXe siècle mais aujourd'hui c'est l'avenir
00:53 de l'Europe que nous allons évoquer.
00:55 Comment les conservateurs et réformistes européens voient-ils l'Europe ? Est-il exact
00:58 de les qualifier d'eurosceptiques ?
01:00 Non, c'est une erreur.
01:04 Nous sommes ceux qui veulent revenir à l'idée originelle de l'Union européenne.
01:08 C'est-à-dire une alliance de nations qui réalise ensemble peu de choses mais des choses
01:20 importantes, des choses que les États-nations ne pourraient pas accomplir de la meilleure
01:26 des manières possibles de leur côté.
01:28 Et nous nous battons contre ceux qui veulent changer l'Union européenne pour l'amener
01:33 vers le fédéralisme qui n'est pas le modèle original de l'Union européenne.
01:40 Lorsqu'elle a vu le jour en 1957 avec le traité de Rome, la communauté européenne
01:47 était conçue comme une communauté d'États qui n'a pas à s'occuper de tout mais au
01:51 contraire de peu de sujets.
01:53 Malheureusement, au fil du temps, on a plutôt tenté de dépouiller les nations de leurs
01:59 compétences pour les regrouper sous l'égide de l'Union européenne.
02:03 C'est ainsi que l'on a tenté, selon nous, d'uniformiser des situations qui ne devaient
02:07 pas l'être.
02:08 Paradoxalement, on a ensuite oublié de construire l'Europe là où elle pouvait se montrer
02:12 utile.
02:13 Beaucoup affirment que le droit de veto bloque l'Union européenne.
02:17 Vous en revanche, vous le défendez si j'ai bien compris.
02:20 Pour quelle raison ? Nous défendons le fait que l'Europe reste une alliance de nations
02:25 et non un super État fédéraliste.
02:27 A partir du moment où l'on retire à un gouvernement la possibilité d'exercer un droit de veto,
02:33 ce qui porte atteinte à son intérêt national, vous vous dirigez évidemment vers un super
02:38 État fédéraliste.
02:40 Mais laissez-moi vous dire une chose qui, jusqu'à présent, n'est jamais arrivée.
02:48 Il n'est jamais arrivé qu'un veto empêche l'adoption d'un règlement, d'une loi ou
02:54 d'une directive.
02:55 Et à quoi cela a-t-il donné lieu ? A des négociations.
03:02 Des négociations qui ont duré des jours ou même des semaines.
03:05 Parce que l'Union européenne n'a pas vocation à s'occuper de tous les sujets, mais seulement
03:11 de certains sujets importants.
03:12 C'est pourquoi le fait de diviser l'Europe en nations de première catégorie pour certaines
03:17 et de deuxième catégorie pour d'autres, ou parfois pire, tout cela va à l'encontre
03:21 de notre conception de l'Europe, qui selon nous doit être une alliance de nations qui
03:26 prend en charge peu de sujets, mais des sujets qui comptent.
03:29 Mais la déclaration Schuman de 1950 fait expressément mention d'une fédération
03:34 européenne.
03:35 Non, oui.
03:37 L'Union européenne a débuté en tant que confédération et non pas en tant que fédération
03:41 de nations.
03:42 Je parle de la déclaration Schuman.
03:46 Non, cela figure dans le manifeste de Ventoten qui est un autre texte.
03:50 Il s'agit de la déclaration Schuman de 1950.
03:53 La fusion de la production de charbon et d'acier constituera la première étape de la fédération
03:57 européenne.
03:58 C'est encore une autre idée que je pourrais développer si nous avions l'occasion d'approfondir.
04:05 Je veux dire une chose qui est évidente.
04:11 L'Union européenne n'a pas vu le jour en tant que fédération, mais en tant que confédération
04:15 et elle a précisément vu le jour sur le fondement du charbon et de l'acier, c'est-à-dire
04:19 sur des sujets précis tels que l'approvisionnement en matière première dans le domaine de l'énergie,
04:24 pour lequel les États parviennent à de meilleures performances en termes d'optimisation des
04:27 dépenses et de qualité de sources énergétiques lorsqu'ils s'unissent plutôt que s'ils agissaient
04:32 seuls.
04:33 Mais on peut en débattre autant qu'on veut.
04:44 Il est impensable que quelqu'un puisse soutenir que l'Union européenne ait né, que ce soit
04:49 sous la forme de la CK ou de la communauté européenne, en tant qu'État fédéraliste
04:55 ou en tant qu'États-Unis d'Europe.
05:00 C'est quelque chose de totalement irréel.
05:03 On peut donc en parler si vous le souhaitez, mais je crains que cela ne nous éloigne un
05:06 peu du sujet.
05:07 Non, c'était juste pour citer de manière précise la déclaration Schuman.
05:12 Je pourrais citer De Gaulle et bien d'autres paires de l'Union européenne qui ont été
05:16 très claires à cet égard.
05:17 Bien sûr, votre groupe progresse considérablement dans les sondages, vous n'avez pas de candidat
05:23 principal par choix, une question s'impose donc, qui aimeriez-vous voir à la tête de
05:28 la prochaine Commission européenne ?
05:30 Et pourquoi n'avons-nous pas de candidat principal ? Pour la raison évoquée à l'instant.
05:36 Pourquoi l'idée de candidat principal n'est-elle pas mentionnée dans les traités européens
05:40 qui ont instauré l'Union européenne ? Parce que le chef de la Commission européenne est
05:44 choisi par les gouvernements et non pas par les partis.
05:49 Et nous le revendiquons.
05:51 Nous revendiquons le fait que les gouvernements sont les seuls à être légitimes pour choisir
05:56 le président de la Commission européenne et non pas les partis.
05:59 Voici le principal motif.
06:02 Donc n'importe quel autre candidat ne nous conviendra pas, parce que ce ne sera pas le
06:06 candidat de notre groupe parlementaire.
06:08 Mais aussi parce que le concept est erroné dès le départ.
06:13 Nous continuons à vouloir dépouiller les nations et les gouvernements légitimement
06:20 élus par les citoyens de compétences qui sont inscrites noir sur blanc dans les traités
06:25 fondateurs de l'Union européenne.
06:27 Aujourd'hui en Europe, les partis de la droite radicale sont souvent accusés de ne pas avoir
06:33 totalement rompu les liens avec les dictatures qui ont jalonné le XXe siècle, par exemple
06:37 en Espagne avec le franquisme.
06:39 A l'étranger aussi, votre parti Fratelli d'Italia est souvent décrit par la presse
06:43 étrangère comme une formation post-fasciste.
06:45 Que répondez-vous à cela ?
06:46 Mieux vaut post-fasciste qu'un néofasciste ou d'autres qualificatifs.
06:52 La vérité, c'est qu'une résolution votée au Parlement européen condamne fermement
06:58 tous les totalitarismes du XXe siècle.
07:00 Fratelli d'Italia, Vox, tous les partis de droite ont voté pour.
07:06 En revanche, la gauche a voté contre.
07:11 En particulier le Parti démocratique italien, évidemment pour défendre le communisme.
07:17 Nous, nous les condamnons tous.
07:19 Au sujet d'Ursula von der Leyen, au cours de ces cinq dernières années, qu'avez-vous
07:23 apprécié ou non dans ses actions ?
07:24 Très peu de choses, mais aussi parce qu'elle avait une commission européenne totalement
07:30 de gauche, ou presque.
07:32 A tel point que Franz Timmermans avait encore plus de pouvoir qu'Ursula von der Leyen en
07:38 pouvant mettre en œuvre le principal programme gouvernemental de la commission, le pacte
07:42 vert.
07:43 Heureusement, cela ne sera plus possible, car quel que soit le résultat des élections
07:51 européennes, nous savons déjà que la prochaine commission européenne sera de centre-droit.
07:55 Car les commissaires sont nommés par les gouvernements, ils ne sont pas désignés
07:59 par des élections, et les gouvernements sont de centre-droit.
08:02 Mais en tant que conservateur, seriez-vous prêt à soutenir Ursula von der Leyen ou
08:06 un autre candidat du PPE ? Il faudra voir en fonction du rapport de force, parce que
08:11 ce seront eux qui seront peut-être amenés à soutenir l'un de nos candidats, nous verrons
08:15 bien.
08:16 Si vous deviez choisir un objectif principal pour Fratelli d'Italia et le groupe des conservateurs
08:20 et réformistes européens pour la prochaine législature, quel serait-il ?
08:23 Un objectif, certainement d'arrêter l'immigration clandestine et de remettre l'homme au centre
08:31 des choses par rapport à la nature.
08:33 Le gouvernement italien, dirigé par un parti conservateur, a soutenu et approuvé le pacte
08:39 sur l'asile et la migration, la réforme de la politique migratoire européenne.
08:43 Le gouvernement polonais, lorsqu'il était dirigé par un parti conservateur, est aujourd'hui
08:47 encore s'y oppose fermement.
08:48 La répartition des demandeurs d'asile est-elle une question qui vous divise, vous, les conservateurs
08:52 ?
08:53 L'actuel gouvernement polonais a voté contre.
08:58 Et le précédent aussi.
09:00 C'est une étape clé, car le gouvernement actuel fait partie du PPE et il est soutenu
09:07 par les socialistes.
09:09 Il a voté contre, leurs représentants parlementaires ont voté contre.
09:16 Nous pensons que ce pacte n'est pas encore la bonne manière de gérer le phénomène
09:21 de l'immigration illégale et de l'immigration en général.
09:26 Mais objectivement, c'est un premier pas qui va dans la bonne direction.
09:33 C'est pourquoi nous avons voté pour et nous l'avons soutenu.
09:38 Enfin, nous suivons la direction préconisée par Giorgia Meloni depuis des années, mais
09:46 elle était considérée comme une dangereuse extrémiste, une fasciste qui voulait noyer
09:50 les gens.
09:51 Quelle est la solution ?
09:56 La solution, c'est de faire cesser les départs, car lorsque les migrants sont sur le sol européen,
10:02 il est déjà trop tard.
10:03 Le discours du placement et de la répartition est un discours qui ne devrait même pas être
10:12 tenu.
10:13 Si nous sommes capables d'établir en amont qui a droit et qui n'a pas droit à l'asile,
10:18 nous ne pouvons laisser entrer que ceux qui y ont droit.
10:21 Il s'agit alors de 15% de l'ensemble de l'immigration clandestine.
10:29 Nous pourrons alors briser le commerce le plus odieux qui soit, à savoir celui des
10:37 trafiquants.
10:38 Et en même temps, nous pourrons gérer un phénomène qui doit l'être, parce que toutes
10:44 les nations ont besoin de l'immigration légale, mais elle doit être limitée en quantité
10:51 et si possible, on doit pouvoir faire un choix.
10:53 Les migrants doivent être également formés sur le plan professionnel, c'est utile à
10:59 la fois pour la nation d'accueil et pour le migrant, qui n'est alors pas contraint
11:03 de rester en marge de notre société ou de devenir une cheville ouvrière du crime organisé,
11:09 mais qui peut au contraire trouver une place plus digne au sein de nos sociétés.
11:15 Dans ce musée, nous sommes entourés de belles voitures anciennes dotées de moteurs à combustion.
11:21 Après 2035, les voitures à moteur thermique ne seront-elles plus que des pièces de musée
11:25 en Europe ou y a-t-il encore un espoir de changement ?
11:27 Il y a encore de l'espoir, si ce que nous souhaitons parvient à l'emporter, à savoir
11:34 le concept de neutralité technologique.
11:37 Qu'est-ce que cela veut dire ? L'exemple du moteur thermique et du moteur électrique
11:41 est parlant.
11:42 Grâce aux biocarburants qui permettent d'obtenir un bilan de zéro émission, il est possible
11:47 de faire survivre le moteur thermique sans nécessairement devoir passer à une autre
11:52 technologie, celle du moteur électrique, pour lequel nous n'avons pas de souveraineté
11:57 industrielle en termes de chaînes de production.
12:00 Qu'est-ce que cela signifie, la neutralité technologique ?
12:10 C'est le fait de partager un objectif, mais de laisser les nations libres de choisir
12:16 la technologie la plus adaptée, en fonction de leurs spécificités.
12:20 C'est un concept qui nous tient à cœur et que nous soutiendrons fermement dans les
12:24 années à venir.
12:25 Mais les biocarburants ne figurent pas dans le règlement adopté.
12:29 Non, ils n'y figurent pas.
12:31 Préconisez-vous une exemption ? Absolument.
12:33 Pour rester dans ce thème et évoquer la neutralité carbone, les conservateurs et
12:37 les réformistes se sont opposés à la quasi-totalité des mesures du Pacte Vert.
12:41 Soutenez-vous l'objectif de neutralité carbone d'ici à 2050 ?
12:44 Nous partageons l'objectif d'avoir le moins d'impact possible sur l'environnement
12:51 et la nature.
12:52 Cela doit être fait avec bon sens, avec équilibre.
12:58 Ce sont deux concepts, le bon sens et l'équilibre, qui ont été totalement bannis de la politique
13:03 européenne ces dernières années, sacrifiés sur l'autel d'un emballement idéologique
13:07 pervers qui a fait augmenter les émissions de CO2.
13:11 Parce qu'elles ont augmenté en 2023, alors qu'elles avaient chuté cette même année
13:15 au sein de l'Union Européenne, et cela a ravagé notre compétitivité, l'environnement
13:20 et la nature.
13:21 Parce que ceux qui s'approprient la transition écologique, qui la réalisent, ce sont les
13:36 Chinois.
13:37 Ils tirent un avantage compétitif des choix européens et en même temps, ils ne se soucient
13:44 pas le moins du monde des normes environnementales qui nous préoccupent.
13:47 Car les batteries et les panneaux photovoltaïques sont produits grâce aux centrales à charbon,
14:01 sans qu'on se soucie de quoi que ce soit.
14:02 C'est donc trop demander que d'aspirer à la neutralité carbone d'ici à 2050 ?
14:09 Je pense que c'est un objectif à portée de main, mais il faut le faire, je le répète,
14:16 avec du bon sens.
14:17 L'exemple des biocarburants illustre la façon dont le bon sens est délaissé, et cela pose
14:22 question.
14:23 Le fait qu'une technologie neutre sur le plan environnemental soit interdite et ne soit
14:28 pas prise en compte par les institutions laisse penser qu'il y a des intérêts économiques
14:33 en arrière-plan.
14:34 L'Italie est le pays qui a le plus bénéficié en termes de fonds du plan de relance Next
14:42 Generation EU, l'unique dette commune à avoir été émise dans l'histoire de l'Union
14:46 Européenne.
14:47 Seriez-vous favorable à de nouvelles émissions de dette commune à l'avenir ?
14:49 Laissez-moi dire que l'Italie a malheureusement été le plus grand bénéficiaire car, comme
14:55 c'est le pays qui a le plus souffert de la pandémie d'après les critères établis,
14:59 c'est celui qui a reçu le plus de fonds.
15:02 Après tout, ce que l'on nomme les euro-obligations sont une invention du centre droit italien.
15:13 Giulio Tremonti, ancien ministre du gouvernement berlusconi et aujourd'hui membre de Fratelli
15:20 d'Italia, a été le premier à parler d'une dette commune en Europe.
15:24 Avec nous, il enfonce donc une porte ouverte à cet égard.
15:31 Le Fides, le parti de Viktor Orban, est proche de vos positions sur de nombreux sujets mais
15:37 pas sur celui de la guerre en Ukraine.
15:39 Pensez-vous qu'il pourrait rejoindre les conservateurs et réformistes européens après
15:42 les élections ?
15:43 Permettez-moi de dire que le gouvernement de Viktor Orban a voté aux côtés des 26
15:50 autres états européens en faveur de tous les programmes d'aide au peuple ukrainien,
15:54 qu'ils soient économiques ou militaires.
15:57 Mais il les a ralentis, du premier au dernier.
16:01 Il les a ralentis parce qu'il voulait faire valoir son propre droit, celui de ne pas être
16:10 discriminé politiquement, comme c'était le cas au cours de ces dernières années,
16:15 au prétexte de l'état de droit.
16:17 A tel point que la dernière livraison d'aide a été débloquée lorsqu'il a été écrit
16:22 noir sur blanc que l'article 7, celui sur l'état de droit, ne devait pas être utilisé
16:27 comme une arme idéologique pour frapper un gouvernement, simplement parce qu'il est
16:31 d'une couleur politique différente de celle des socialistes.
16:35 Est-ce que vous excluez totalement que Flatelli d'Italia puisse rejoindre le Parti Populaire
16:42 Européen ? Oui, je l'exclus totalement.
16:44 Nous appartenons à l'ECR.
16:46 Nous avons beaucoup investi dans cette famille politique, dans cette tradition politique,
16:52 et nous la défendons bec et ongle.
16:54 Merci Nicolas Procaccini pour avoir été avec nous.
16:56 Merci à vous.
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