Le CETA, pierre d’achoppement de la majorité sénatoriale

Public Sénat

20/03/2024

Pour la première fois, le Sénat va s’exprimer sur le CETA, un accord de libre-échange entre l’UE et le Canada. La majorité sénatoriale de droite et du centre affiche des positions divergentes sur ce texte. À notre micro, Hervé Marseille, le chef de file des sénateurs centristes, reproche à ses partenaires LR d’utiliser ce débat à des fins électoralistes, à trois mois des européennes.

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00:00 Union centriste président de l'UDI, il est à votre micro, Quentin.

00:03 Bonjour Hervé Mincey.

00:04 Bonjour.

00:04 Merci d'être effectivement en direct sur le public Sénat.

00:06 On le disait avec Tam à l'instant, le suspense est entier sur ce qui va se jouer

00:10 autour du vote de ratification du CETA demain matin en séance au Sénat.

00:15 Une majorité des sénateurs LR vont voter contre cette ratification.

00:19 C'est ce qu'a dit ce matin votre homologue, le président du groupe LR Bruno Retailleau.

00:23 Qu'est-ce que cette position des LR vous évoque ?

00:26 Écoutez, moi je respecte la position exprimée par les LR.

00:31 Je regrette que tout ça soit fait sans nuance.

00:33 Je crois que le CETA c'est un accord commercial avec le Canada

00:38 qui est un des rares accords commerciaux qui soit très profitable à notre pays.

00:42 Ça dépend des années.

00:43 Il y a eu des années où la balance commerciale était déficitaire sur deux années consécutives.

00:47 Maintenant elle est positive.

00:49 Le bilan global c'est +33% en six ans.

00:52 Donc vous vous dites qu'il faut retenir un accord positif pour l'économie française.

00:56 Je dis simplement que ça mérite plus de nuance.

00:59 Je sais qu'on est dans le cadre des élections européennes

01:03 et j'imagine que tout ça n'est pas sans effet

01:08 que mes collègues républicains votent sur une niche communiste avec l'aide des socialistes.

01:15 C'est ça, l'ordre du jour est établi demain matin toute la matinée par les communistes

01:18 et c'est eux qui ont décidé d'inscrire la ratification

01:20 qui n'a jamais été aussi proposée au Sénat par le gouvernement

01:24 depuis son vote en 2019 à l'Assemblée nationale.

01:27 Comment comprendre aussi que l'exécutif ne soit jamais allé au bout de ce processus de ratification ?

01:31 C'est acceptable ça pour un parlementaire ?

01:33 Vous avez parfaitement raison.

01:35 C'est une lacune et on voit bien les conséquences de cette lacune.

01:40 Aujourd'hui malheureusement il faut que nous parlions du CETA.

01:44 Je crois que c'est une question à laquelle on ne peut pas répondre par oui ou par non.

01:47 Et moi je regrette, il y a deux rapporteurs,

01:50 que les deux rapporteurs aient été choisis par la même formation, par le même groupe

01:55 et que les deux rapporteurs soient plus des procureurs que des rapporteurs.

01:59 Notamment Laurent Duplon, c'est cela, un des deux co-rapporteurs

02:02 qui est le président du groupe d'études sur l'agriculture.

02:05 Lui il dit qu'il défend les syndicats agricoles, qu'il défend le monde agricole.

02:10 Vous lui reprochez un avis trop tranché sur le fait que ces accords

02:13 sont trop négatifs pour le monde agricole, c'est ça ?

02:15 Je dis que nous sommes au Sénat et que le Sénat a l'habitude

02:19 de plus d'équilibre.

02:22 On est moins sommaire d'habitude.

02:24 On prend en compte la diversité des opinions.

02:28 Là il y a préemption sur un sujet parce qu'il y a des élections

02:31 et qu'on veut à tout prix montrer que tout ça,

02:34 ça va dans le sens de la défense des agriculteurs et qu'il ne faut rien faire d'autre.

02:39 Alors on voit que cela tend votre relation avec les républicains au Sénat,

02:43 alors que vous faites partie de la majorité sénatoriale entre centristes et LR.

02:48 Les centristes de l'UDI qui sont alliés à Renaissance pour les élections européennes,

02:54 est-ce qu'on est en train de voir un changement d'alliance,

02:56 un changement de paradigme ici au Sénat, M. Marseille ?

03:00 Ce n'est pas ce que je suis en train de vous dire.

03:02 Je suis en train de vous dire qu'on est au Sénat

03:04 et que le Sénat a l'habitude de l'équilibre.

03:06 Moi je respecte mes collègues républicains, j'entends qu'ils nous respectent.

03:10 Là il y a deux rapporteurs, ils ont été choisis adescens

03:17 pour obtenir un certain vote avec la gauche.

03:21 C'est une nouvelle forme, vous en conviendrez, de majorité.

03:24 Donc je souhaite qu'on revienne à des choses plus orthodoxes,

03:27 plus partagées et plus équilibrées.

03:29 Et donc, qu'est-ce que vous allez proposer sur le Sénat ?

03:32 Si on le comprend bien, vous allez déposer une motion de renvoi en commission

03:36 pour nous expliquer ce que c'est procéduralement.

03:39 Tout simplement, nous avons proposé le vote d'une motion de renvoi en commission,

03:45 comme son nom l'indique, pour dire "écoutez, on ne discute pas maintenant,

03:48 il faut retourner en commission et aller au fond, voir ce qui est positif,

03:52 ce qui est négatif, voir comment on peut rediscuter les points".

03:56 Parce qu'à l'évidence, il y a des points pour l'élevage bovin,

03:58 il y a les clauses miroirs, tout ça se discute.

04:01 Mais on est habitué à ça au Sénat.

04:03 Mais là, comme il y a des élections européennes,

04:04 tout le monde fait la ligne de front pour dire "regardez,

04:08 on veut faire quelque chose contre l'exécutif, pourquoi pas,

04:12 et on veut le faire sommairement sur la base d'une niche".

04:16 Ce n'est pas sérieux.

04:17 – Hervé Marseille, si le Sénat vote contre la ratification du CETA,

04:20 est-ce que cela signe la fin de cet accord commercial à l'échelle européenne

04:24 et avec le Canada ?

04:26 Si un des États membres vote contre, quelles sont les implications ?

04:30 – Je pense que, heureusement, ça ne met pas fin à cette convention

04:35 qui fonctionne depuis 2017.

04:37 Je vous rappelle quand même qu'elle a été initiée par les socialistes

04:41 à l'époque où M. Hollande était président.

04:43 Je suis un peu étonné de leur vote d'aujourd'hui.

04:45 Parce que les choses qu'a fait M. Hollande,

04:46 il n'y en a pas tant que ça qui fonctionnent.

04:48 Et donc, ce que je veux dire simplement, c'est que ça ne met pas fin,

04:52 heureusement, parce qu'il faudrait notifier à la Commission européenne.

04:55 Ce que je regrette, c'est le signal politique que ça va donner

04:57 et à nos amis canadiens et à nos amis européens.

05:00 – Eh bien merci Hervé Marseille pour toutes ces explications au micro de Public Sénat.

05:04 Une séance qu'on suivra particulièrement demain dans la niche communiste.

05:08 Effectivement, demain matin jeudi, Tam.

05:10 – Merci, merci beaucoup Quentin.

05:12 [Musique]

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