- 05/02/2024
Michel-Édouard Leclerc, président des centres E. Leclerc, répond aux agriculteurs, après la grogne. L'enseigne est considéré comme le symbole de la faible rémunération des fermiers français. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-lundi-05-fevrier-2024-4016883
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00:00 Et avec Léa Salamé, nous recevons ce matin dans le Grand Entretien, le président des
00:04 centres Leclerc, leader du secteur de la grande distribution en France avec près d'un quart
00:10 du marché.
00:11 Vos questions et réactions, amis auditeurs, au 01 45 24 7000 et sur l'application de
00:16 France Inter.
00:17 Michel-Édouard Leclerc, bonjour.
00:18 Bonjour, bonjour, bonjour amis de France Inter.
00:20 Et bienvenue à ce micro.
00:22 On est ravi de vous recevoir ce matin après deux semaines de crise ouverte dans le monde
00:27 agricole.
00:28 D'ailleurs, vous qui êtes un invité régulier des médias, un bon client comme on dit, on
00:33 ne vous a pas vu, pas entendu ces quinze derniers jours.
00:37 Il y a même eu des postes facétieux sur les réseaux sociaux, lançant des alertes
00:42 enlèvement vous concernant.
00:44 Alors rassurez-nous ce matin, Michel-Édouard Leclerc, où étiez-vous passé ?
00:49 D'abord, la première semaine, j'étais beaucoup sur le terrain à parler avec les
00:56 agriculteurs qui avaient bloqué certains magasins, qui voulaient discuter avec nous.
01:00 Et jusqu'à ce que Gabriel Attal rencontre ces mouvements plutôt partis du sud, des
01:06 mouvements au doigt, par exemple, nous n'étions pas particulièrement visés.
01:11 Et en fait, c'était assez paradoxal.
01:13 J'étais interpellé en tant qu'influenceur.
01:15 C'est la première fois que ça m'arrive.
01:17 On me demandait à travers les occupations de magasins, à travers...
01:21 On me listait les problèmes et on me demandait d'atteindre le président pour qu'il tienne
01:25 en considération les problèmes de l'agriculture française.
01:27 Et j'étais d'ailleurs coincé parce qu'en fait, beaucoup de familles de nos collaborateurs,
01:34 de nos 160 000 salariés partageaient beaucoup des motifs de récrimination des agriculteurs.
01:39 Le mouvement était populaire, mais il était populaire aussi parce que ça concernait nos
01:44 provinces, nos régions.
01:45 Et en fait, je n'y suis pas allé dans les médias pour ne pas rajouter des étincelles
01:51 parce qu'il y avait une partie de la colère que je trouvais extrêmement justifiée.
01:55 Extrêmement justifiée et peut-être preniez-vous une part de responsabilité aussi dans ce
02:00 qui se passait puisque vous dites que nos hypermarchés n'ont pas été particulièrement
02:04 visés.
02:05 Ce n'est pas ce que disent vos concurrents qui disent que particulièrement ce sont les
02:08 centres Leclerc qui ont été visés par les agriculteurs, qui ont été attaqués par
02:11 les agriculteurs.
02:12 Qu'en est-il exactement et qu'en est-il ce matin ?
02:14 Est-ce qu'il y a encore des centres Leclerc qui sont visés ?
02:17 A combien se chiffrent les dégâts également ?
02:19 Dans la première partie des manifestations clôturées par Attal en Haute-Garonne, dans
02:25 le premier cycle, les centres Leclerc n'étaient pas visés.
02:28 C'était la préfecture d'Agin, c'était l'autoroute, etc.
02:32 Et après, quand la FNSEA a voulu reprendre la main et a orchestré la deuxième partie
02:37 de la manifestation, effectivement, toute la distribution française a été visée
02:42 des Leclerc, des Systeme U, des Lidl, des Carrefour.
02:44 On en a parlé entre nous et là on s'est dit qu'on n'était pas cons.
02:48 Quand même, ce n'était pas à nous d'aller répondre à la place du ministre de l'Agriculture,
02:52 sur le régime de retraite insuffisant des agriculteurs, sur l'incapacité de négocier
02:58 des bons accords internationaux type Mercosur ou même de définir les surnormes sanitaires.
03:03 Nous n'avions pas notre place là.
03:06 Autant, autant, je réponds à votre question.
03:08 Oui, parce qu'il vous accuse aussi d'un certain nombre de griefs.
03:12 Il y a une loguerre aussi.
03:13 Vous dites, enfin les agriculteurs, on va pointer point par point d'ailleurs.
03:17 Qu'ils vous reprochent, on va y aller point par point.
03:19 Mais pour essayer juste de comprendre, est-ce qu'aujourd'hui, ce matin, il y a encore
03:21 des centres Leclerc qui sont bloqués ?
03:23 Là, ce matin, je n'en ai pas connaissance.
03:25 Non, mais hier soir, il n'y en a pas.
03:27 Non, mais il y a beaucoup d'acrimonie.
03:29 Parce que, pour le coup, les gendarmes sont intervenus, les préfets sont intervenus.
03:35 Donc, normalement, ça s'est libéré, mais ça n'a rien résolu.
03:38 On est bien d'accord.
03:39 À combien se chiffrent les dégâts ? Il y a combien de centres Leclerc qui ont été
03:41 attaqués ?
03:42 Ça, je ne sais pas.
03:43 Je ne sais pas, non.
03:44 Je ne sais pas.
03:45 Je ne sais pas.
03:46 On entre dans le…
03:48 Je voudrais simplement dire que c'est un classique de la manifestation paysanne depuis
03:53 2015, sous François Hollande.
03:55 Toute manifestation paysanne se finit sur les parkings des hypermarchés.
03:59 Et c'est une manière aussi, pour les pouvoirs publics, de dériver toutes les tensions sur
04:05 des espaces sans trop de population et avec des dégâts modérés.
04:09 Nos salariés, nos collaborateurs n'apprécient pas.
04:11 C'est vraiment pour moi un gros travail d'aller expliquer qu'effectivement, on
04:18 est sacrifiés à ça.
04:19 Mais bon, on va…
04:20 Mais pour vous, c'est les pouvoirs publics qui ont orienté les manifestants vers les
04:23 hypermarchés ?
04:24 Mais écoutez, toutes les consignes de manifestation…
04:26 C'est eux qui les ont dites à aller attaquer les centres Leclerc ?
04:30 Toutes les consignes de manifestation dont nous avons les photocopies dans chaque fédération
04:35 agricole visent spécifiquement la grande distribution et Leclerc.
04:39 Et même, il y a un groupe de députés Renaissance et Modem qui me vise personnellement.
04:44 C'est l'usine Atuit, c'est Michel-Edouard Leclerc…
04:47 Attendez, parce que là, ce n'est pas n'importe quoi ce que vous dites.
04:50 Non, merci.
04:51 Vous dites clairement que le gouvernement et la majorité parlementaire vous avisaient
04:55 très clairement et a poussé les agriculteurs à attaquer les centres Leclerc ?
04:59 Je dis que les agriculteurs ont reçu des consignes de venir dans la grande distribution,
05:03 c'est très clair.
05:04 Et c'est d'autant plus incompréhensible pour nos salariés que nous ne sommes pas
05:08 les premiers clients de l'agriculture.
05:10 La distribution n'achète qu'un tiers des produits agricoles français.
05:14 Ils ne sont pas allés chez les industriels qui achètent un autre tiers.
05:17 Ils ne sont pas allés dans la restauration collective et dans toutes les autres sociétés.
05:22 Donc vous nous dites que ce matin, on a été le bouc émissaire facile, c'est ça ?
05:24 On a notre part de responsabilité.
05:26 Alors c'est ça qu'on a envie aussi d'entendre, votre part de responsabilité.
05:29 On a notre part de responsabilité parce que nous avons, à un moment donné, boudé
05:33 des discussions législatives qui étaient faites contre nous, on les a prises contre
05:36 nous alors que peut-être on aurait pu participer à l'amélioration des relations industrie-commerce.
05:41 Mais après, au moment où on est venu, les trois derniers ministres de l'agriculture
05:45 n'ont eu de cesse que de nous diviser.
05:47 Autant sous Stéphane Lefolle, sous Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, quand
05:53 il y avait un problème, on était tous réunis et là, on essayait de résoudre concrètement
05:57 le problème des vins de l'eau, le problème du prix du porc, etc.
06:01 Autant aujourd'hui, nous ne sommes simplement que jetés en pâture.
06:04 Je suis le premier distributeur français, je n'ai pas eu un seul mot, un seul appel
06:10 téléphonique, aucun collaborateur.
06:11 On a eu d'appel de Darmanin pour savoir si tout allait bien ou de Feneau pour savoir
06:16 comment ça s'était passé.
06:17 C'est contrairement à Bruno Le Maire qui se souvient qu'il a été ministre de l'agriculture
06:21 et qui lui se tient au courant en permanence des dégâts qui peuvent y avoir.
06:25 On entend votre charge mais maintenant on va prendre point par point ce qui vous est
06:29 reproché.
06:30 Les raisons de la colère et ce qui vous est donc reproché, les agriculteurs vous reprochent
06:34 de contourner la loi française en allant acheter les produits dans des centrales d'achat
06:40 à l'étranger, vous en avez en Belgique, en Pologne, au Portugal et donc de négocier
06:44 les produits moins chers que sur le sol français s'ils étaient soumis à la loi française.
06:50 Qu'est-ce que vous répondez à ça ?
06:51 Alors d'abord, nous sommes effectivement implantés en Europe et donc dans chaque pays
06:58 d'Europe il y a des lois nationales mais vous voyez un étranger, un allemand ou un
07:04 belge qui viennent à Paris, ils respectent le code de la route.
07:06 Donc chacun respecte le code de la route de son pays.
07:09 Donc première chose.
07:11 Deuxième chose, nous sommes légalistes et je suis sûr que vous n'avez aucun dossier
07:17 contre nous, vous n'avez connaissance d'aucun dossier contre nous où nous aurions contrevenu
07:21 à la loi EGalim.
07:22 Je suis sûr que nous n'avons aucun...
07:25 On vient de finir les négociations.
07:26 Vous n'avez rien à vous reprocher Michel-Édouard Leclerc ?
07:28 Non, je ne crois pas.
07:29 Vous n'avez en aucun cas contourné la loi EGalim à aucun moment ?
07:32 Je ne crois pas.
07:33 Alors pourquoi les négocier ?
07:34 Attendez, attendez, juste une chose.
07:35 On vient de négocier le 15 janvier les discussions avec les PME et les publics des entreprises.
07:42 Il n'y a pas un dossier Leclerc chez le médiateur et à ma connaissance il n'y a pas un contentieux.
07:46 Donc ça c'est pour les entreprises franco-françaises.
07:50 Sur l'international, on négocie sur plusieurs endroits, parce que n'oubliez pas, on nous
07:54 a envoyé chercher des baisses de prix.
07:56 La dernière fois que j'étais dans vos studios c'était pour aller chercher des baisses
07:59 de prix.
08:00 On va y venir aux baisses de prix.
08:01 Et donc que ce soit sur l'Asie du Sud-Est où nous avons des bureaux d'achat ou que
08:05 ce soit en Belgique où on négocie avec des multinationales, en fait aujourd'hui nous
08:11 négocions des baisses de prix.
08:12 Nous essayons de négocier des baisses de prix, c'est très difficile, ils veulent encore
08:15 des hausses.
08:16 Mais à ma connaissance nous n'avons pas de dossier contentieux avec Procter, avec Unilever.
08:21 Nous ne négocions qu'avec des multinationales qui font au minimum 350 millions de chiffre
08:27 d'affaires hors France.
08:29 Nous négocions avec Procter, avec Mondelez, avec Nestlé, avec que des grandes boîtes
08:35 multinationales qui n'achètent pas leurs produits en France, qui n'ont pas leur siège
08:39 en France.
08:40 Donc il n'y a pas d'entreprise française avec qui vous négociez à l'étranger ?
08:44 Dès qu'elles sont à l'international, oui.
08:46 Alors ce n'est pas une centrale de négociation, c'est une centrale d'achat.
08:49 Nous approvisions dans les centres Leclerc de Pologne, du Portugal, qui sont trop petits
08:53 dans leur pays.
08:54 Et vous voyez par exemple, vous avez Lidl en France.
08:56 Lidl est allemand, d'origine allemande, mais c'est un des plus grands groupes européens
09:00 de distribution.
09:01 Aldi aussi.
09:02 Action aussi, on le connaît moins, mais c'est très gros.
09:04 Nous, à défaut d'être aussi gros qu'eux, on s'est associés avec des Allemands qui
09:08 sont concurrents de Lidl et on a les mêmes pratiques.
09:11 Mais vous êtes dans cette association à Bruxelles, pourquoi en Belgique ?
09:15 Parce que c'est moins cher là-bas, c'est pour payer moins cher là-bas et échapper
09:20 à Egalim.
09:21 Non, c'est parce que c'était entre Francfort et Paris.
09:24 On prend le Thalys et on s'arrête en Belgique.
09:30 On est à côté de la Commission européenne.
09:32 Purement géographique ?
09:33 Purement géographique.
09:34 Nous sommes une coopérative de commerçants indépendants.
09:39 Nous habitons en Vendée, en Alsace, aux Pays Basques.
09:43 La France est déjà très centralisée, ce n'est pas facile de se regrouper.
09:46 Plutôt que d'aller dans les lander allemands, on s'est retrouvé au point minimum qui est
09:51 la Belgique.
09:52 Et là, en plus, je voudrais juste vous rappeler que nos constructions ne datent pas de la
09:57 loi Egalim.
09:58 Ça n'a pas été fait pour contourner la loi.
10:00 Elle date de 2016.
10:01 Ensuite, la Commission européenne a donné quitus de notre installation.
10:06 Elle a trouvé que c'était bien pour les consommateurs qu'il y ait la possibilité
10:09 pour les consommateurs français de bénéficier du meilleur de ce qu'il y a en Europe.
10:13 Je vous rappelle quand même que de l'autre côté de la frontière, de l'autre côté
10:16 du Rhin, les couches et les tampax sont 20% moins chères qu'en France.
10:19 Donc il y a quand même un problème en France de négociation.
10:22 Et nous, en nous associant avec des Allemands, on va chercher des prix plus bas.
10:26 Mais Michel-Édouard Leclerc, vous comprenez que c'est difficilement audible pour les
10:28 Français de se dire que quand ils vont acheter un produit, une brique de lait ou une bouteille
10:33 d'huile dans les hypermarchés Leclerc, ce sont des prix que vous avez négociés à
10:37 l'étranger ?
10:38 Non, non.
10:39 Et pour que vous les achetiez moins chers ?
10:43 Non, non, mais c'est pour ça.
10:44 Merci de me donner la parole.
10:45 100% de… Moi je suis patriote, je suis breton, nous sommes vendéens, nous sommes alsaciens,
10:50 nous sommes des gens de terroir.
10:51 Eh bien 100% de la viande de porc fraîche chez Leclerc est notre marque de distributeurs,
10:56 c'est français.
10:57 100% de la viande de bœuf, elle est française.
10:59 100% de nos farines boulangères sont d'origine France.
11:03 100% du lait de consommation, la marque Delice de Leclerc, c'est notre marque, elle est
11:08 d'origine France.
11:09 100% des œufs frais sont d'origine France, ce sont des œufs à notre marque.
11:14 Sur les fruits et légumes, 75,50% des volumes achetés par l'enseigne sont d'origine
11:20 France et même 99% pour les cerises.
11:23 On a beaucoup parlé des pommes polonaises, nous c'est 96% de nos pommes sont françaises,
11:28 99% pour les poireaux, 94% pour les américos.
11:31 Vous savez aussi, puisque vous parlez de ce point-là, c'est un autre grief des agriculteurs
11:34 qui ont d'ailleurs mené des actions dans deux supermarchés Leclerc d'Indre-et-Loire
11:38 il y a quelques jours sur l'origine française.
11:40 Vous dites "c'est made in France, made in France".
11:42 Ils ont chopé plusieurs autocollants où il y avait écrit "France" mais ils disent
11:47 "non, c'est importé, c'est produit de nulle part, il n'y a pas de traçabilité,
11:51 le logo drapeau français est là mais pas d'origine de la provenance de la viande".
11:55 Voilà ce qu'ils vous reprochent aussi, de faire un marketing en disant "c'est
11:57 des produits français" mais en fait ce n'est pas des produits français, c'est
11:59 des français qui sont importés.
12:00 On passe des généralités au cas, les généralités je viens de les dire, après qu'il y ait
12:07 des erreurs de dictage, qu'on trouve individuellement des produits à importer, moi je ne dis pas
12:12 le contraire, on n'est pas un pays fermé.
12:13 Nous avons des foires au vin, nous sommes le premier distributeur de foire au vin en
12:17 France, 95% de nos vins sont français et c'est de nous-mêmes qu'on rajoute un
12:21 peu de vin de la Riora espagnole, un peu de vin de Toscane, un peu de vin d'Argentine
12:26 et d'ailleurs les viticulteurs sont d'accord avec ça.
12:29 Nous ne sommes pas un pays cloisonné, on n'est pas un pays soviétique.
12:31 Non, non, j'insiste là-dessus, si on fait des bêtises, on les corrigera.
12:36 Et il y aura de plus en plus de contrôles.
12:38 Vous m'avez déjà parlé de sanctions contre les distributeurs, les industriels,
12:42 elles tomberont, elles iront vite, elles iront jusqu'à 2% du chiffre d'affaires,
12:46 les contrôles aussi vont être plus fréquents, vous ne craignez rien, vous n'avez rien
12:51 à vous reprocher Michel-Edouard Leclerc ?
12:53 Nous savons que nous allons avoir des sanctions, c'est tous les ans pareil.
12:56 Mais je vous assure, c'est une caricature, on pourrait faire un film à la Tati, dès
13:01 que les accords commerciaux sont finis à minuit un soir, le lendemain l'administration
13:06 vient pomper dans les ordinateurs, autrefois elle faisait des perquisitions, maintenant
13:09 c'est quand même un peu plus élégant, et donc elle pompe tous les accords commerciaux
13:13 et donc ils vont faire leur marché dans ces accords commerciaux et probablement nous aurons
13:18 des assignations, c'est-à-dire soit des injonctions de faire autrement, soit des assignations
13:24 conduisant à des procès.
13:25 Mais parce que vous faites mal les choses ?
13:27 Parce qu'il y a des débats juridiques, la partie commerciale de la négociation est
13:31 assez facile, mais la loi française est tellement complexe, et d'ailleurs autant pour le distributeur
13:36 que pour l'industriel et l'agriculteur, qu'il y a toujours des débats de droit.
13:40 Mais à ma connaissance, vous n'en connaissez pas beaucoup de procès que nous avons perdus.
13:44 Vous avez protesté contre la loi Egalim en disant que c'était une loi délirante,
13:48 un scandale en pleine période d'inflation.
13:50 Marc Fesneau, le ministre de l'Agriculture dont vous a tourné manifestement le coup
13:53 de fil, ne s'est pas privé récemment de rappeler que vous étiez le seul à demander
13:57 l'abrogation de la loi Egalim en disant "on est le seul pays à faire ça, c'est
13:59 un pur scandale".
14:00 Aujourd'hui, vous demandez toujours l'abrogation après ce qu'il s'est passé ces 15 derniers
14:03 jours avec les agriculteurs ?
14:04 Vous demandez l'abrogation de la loi Egalim ?
14:06 Non, non, je ne demande pas l'abrogation de la loi Egalim, c'est pour ça que je suis
14:09 légaliste, mais dans la loi Egalim, il y a des gros qui se cachent derrière des petits.
14:13 Par exemple, on m'oblige dans la loi Egalim de prendre en pleine période d'inflation
14:18 10% de marge minimum sur des produits alimentaires.
14:21 Ça, c'est quand même une connerie.
14:23 Donc ça, on a le droit quand même de pouvoir critiquer, ça n'a rien à voir.
14:26 Dans la loi Egalim, vous avez entendu parler des amendements des crozailles, on va m'interdire
14:32 au 1er avril, peut-être même au 1er mars, de faire des promotions sur des produits de
14:37 détergent, sur les couches et sur les produits d'hygiène.
14:39 Dites-moi, qu'est-ce que ça a à voir avec l'agriculture ? Et dans l'intérêt de
14:43 qui, on m'interdit de faire ces promotions ?
14:45 Alors vous avez du côté de Bercy, Michel-Edouard Leclerc, SystemU, Intermarché, s'il vous
14:52 plaît, faites-nous un panier et s'il vous plaît, mettez-nous des bonnes choses dedans,
14:56 y compris des fruits et légumes et de la viande et tout ça.
14:58 Et allons-y pour montrer au public que le gouvernement se bat contre la vie chère.
15:02 Et de l'autre côté, vous avez le ministère de l'Agriculture et peut-être une partie
15:06 de l'Elysée qui vous disent "ah mais non, n'y touchez pas, c'est secteur protégé,
15:09 puis on a les élections européennes".
15:10 Eh, on va devenir schizo.
15:12 Donc moi, ce que je propose...
15:13 Vous dites que c'est des injonctions contradictoires.
15:15 Exactement, et c'est vécu comme ça aussi par les agriculteurs, du point de vue de l'écologie.
15:19 Donc moi, ce que je proposerais, c'est qu'on revienne à quelque chose de moins clivant,
15:24 qu'on arrête de nous mettre...
15:26 Vous savez, le système Macron, c'est quand même de mettre Uber et les VTC dans les pattes
15:30 des taxis, les agriculteurs dans les pattes des distributeurs, l'école privée dans l'école
15:34 publique, le service public et le service privé.
15:36 Moi, à un moment donné, je pense qu'il faut refédérer un petit peu tous ces professionnels
15:40 qui en ont marre.
15:41 C'est déjà très compliqué, le post-Covid, l'inflation, de nous mettre ensemble, résoudre
15:46 de manière pragmatique les problèmes et puis surtout d'avoir un plan.
15:50 Tiens, d'ailleurs, il est où le ministre du plan ? Il est où le ministre du plan ?
15:54 Ça fait longtemps qu'il n'y a plus de ministre du plan.
15:56 Eh bien, il s'appelle Bayrou.
15:57 Oui, c'est ça, il n'est pas ministre.
15:59 Et donc, on aimerait bien quand même savoir, qu'on soit agriculteur ou distributeur, on
16:03 aimerait bien savoir où aller.
16:04 Emmanuel, agriculteur nous appelle de la Nièvre.
16:08 Bonjour et bienvenue.
16:09 Bonjour.
16:10 On vous écoute.
16:11 Bonjour, monsieur.
16:12 Bonjour, monsieur Leclerc.
16:13 Bonjour.
16:14 Donc, moi, je suis éleveur de bovins, charolais et de poules pondeuses.
16:18 Et en fait, en viande bovine, vous expliquez que vous êtes un influenceur, mais on a perdu
16:23 un million de vaches depuis sept ans.
16:25 Et en fait, on s'aperçoit que la consommation, elle se maintient à peu près à 1% près.
16:31 Et du coup, la vraie question, c'est comment est-ce qu'on fait pour valoriser la production
16:35 française ? Parce qu'elle baisse beaucoup plus vite que la consommation.
16:39 Et moi, ce que je voudrais savoir, c'est pourquoi vous ne voulez pas utiliser les
16:44 indicateurs qui donnent nos coûts de production, nos prix de revient, qui permettent de nous
16:48 remunérer dans des contrats ? Je sais que vous avez des alliances locales dans lesquelles
16:52 ça n'est pas utilisé, ça représente peu, mais vous êtes surtout maître d'un
16:56 outil industriel qui fournit tous vos magasins.
16:58 Et là, pour le coup, il n'y a pas de son et pas d'image sur ce sujet-là.
17:01 Et moi, ça me dérange parce que ça donnerait des perspectives aux éleveurs en place, bien
17:06 sûr, mais surtout à tous ces jeunes qui ont envie de reprendre des élevages.
17:10 On a vu beaucoup de jeunes sur les barrages et là, en l'occurrence, ça donnerait de
17:13 vraies perspectives.
17:14 Vous voudriez que Leclerc soit plus proche de vous quant à la question des rémunérations
17:22 et des outils plus fins, c'est ça ?
17:24 Oui, parce que de toute façon, on voit bien que la question centrale, au-delà des réglementations
17:31 et des difficultés par rapport à l'environnement, c'est d'abord le revenu.
17:35 7000 euros de moyenne pour un éleveur en France, ce n'est pas tenable.
17:39 Et en l'occurrence, si on mettait cet indicateur dans les contrats, ça ne fait pas flamber
17:46 le panier de la ménagère.
17:47 Par contre, ça donne vraiment des perspectives aux éleveurs.
17:50 Merci Emmanuel pour cette question.
17:51 Michel-Edouard Leclerc ?
17:52 Je suis pour.
17:53 Je pensais que c'était fait.
17:55 Je suis pour.
17:56 En tout cas, je ne sais pas quoi vous dire d'autre.
18:01 Je pensais que les indicateurs de coût de production étaient dans les contrats d'alliance
18:05 locale, d'autant qu'on ne les négocie pas vraiment.
18:08 La première partie de ma réponse, j'entends ce que vous dites et je vais aller voir.
18:13 Et je vous dis, je vais plutôt dans votre sens.
18:16 Et la deuxième chose, on a un deuxième problème, c'est que les jeunes aujourd'hui mangent
18:22 moins de viande.
18:23 Donc, on a poussé toute une génération d'éleveurs à aller vers les races à viande plutôt
18:28 que les vaches de réforme.
18:29 Évidemment, ça coûte plus cher, même le bio et tout ça.
18:34 Et donc, c'est vrai que là, il y a une chute des ventes de viande qui est assez spectaculaire.
18:40 Les nutritionnistes s'y sont mis aussi.
18:42 Mais OK, pour en parler avec vous, pour essayer de voir comment on peut accompagner cette
18:48 modernisation des exploitations.
18:50 Dans les questions d'auditeurs, Gérard, peut-on savoir comment un chou-fleur acheté
18:53 70 centimes d'euro au producteur est en vente 5,99 euros sur l'étal des magasins Leclerc ?
19:02 Ça, j'ai un doute quand même.
19:05 Les laitiers, je prolonge, disent que la brique de lait a augmenté de 25 centimes et que
19:10 seules 7 centimes d'augmentation sont allées dans leur poche.
19:14 Où vont les 18 autres centimes ? Chez vous ? Chez l'industriel ? Lactalis ? Ou autre ?
19:20 Expliquez-nous Michel-Édouard Leclerc.
19:21 Eh bien, nous n'achetons pas le lait à la ferme.
19:23 Et donc, il y a des intermédiaires entre les leveurs.
19:26 Et quelquefois, ces intermédiaires, c'est des boîtes comme Danone ou Lactalis.
19:30 Mais quelquefois, ce sont des coopératives qui défalquent de l'argent qu'on a donné
19:35 en paiement du lait, qui défalquent leur coût de gestion.
19:39 Et donc, finalement, comme ces industriels intermédiaires ne sont pas transparents,
19:43 moi je ne sais pas, sur la base d'un litre de lait payé cher, combien reçoivent les
19:47 agriculteurs ?
19:48 En plus d'un litre de lait, le transformateur Lactalis par exemple…
19:52 Mais vous, vous prenez combien sur cette augmentation-là ?
19:55 Parce que vous vous rappelez quand même, vous êtes le…
19:57 J'aime pas dire ça, parce que ça voudrait dire…
19:59 Mais vous êtes quand même gagnant de la crise inflationniste de ces deux dernières années.
20:04 En 2023, le chiffre d'affaires de Leclerc a bondi de 10% à 48 milliards d'euros.
20:08 Vous faites beaucoup mieux que tous vos concurrents Michel-Édouard Leclerc.
20:11 Mais vous savez pourquoi ? Parce que d'abord, je suis venu dans vos studios pour dire en
20:15 premier et très longtemps à l'avance ce qu'il y allait y avoir dans l'inflation.
20:18 J'avais pas une boule de cristal, j'ai simplement regardé ce qui se passait aux
20:21 Etats-Unis et puis j'ai vu que ça démarrait plus vite là-bas.
20:25 Vous vous rappelez ?
20:26 Oui, oui, on se rappelle, vous l'aviez dit.
20:27 J'avais même demandé des commissions d'enquête aux parlementaires qui m'ont trouvé agité
20:32 du bocal.
20:33 Oui, mais tout de même, votre chiffre d'affaires explose.
20:37 Parce que nous avons baissé nos marges.
20:39 Nous avons refusé de répercuter…
20:41 Les centres Leclerc ont mis 4 mois avant de répercuter les hausses tarifaires.
20:45 Donc on a eu 4 mois d'inflation de différence.
20:47 Et aujourd'hui on a eu 1 million de consommateurs supplémentaires qui sont venus fréquenter
20:52 les centres Leclerc parce qu'on était vraiment moins cher.
20:54 Mais je voudrais vous dire qu'on n'est pas moins cher simplement parce qu'on achète
20:58 moins cher.
20:59 Vous entendez parler aujourd'hui de casinos.
21:01 Casino était associé avec intermarché dans la même centrale d'achat.
21:06 Or intermarché est 15% moins cher que casino.
21:08 Ça vous montre bien que c'est important de bien acheter.
21:11 Mais vendre moins cher, c'est d'abord une affaire de volonté.
21:15 C'est une affaire de modèle économique.
21:16 Et Leclerc aujourd'hui, on a compris que face à l'inflation, nous avions une utilité
21:21 sociale, un rôle social à jouer en baissant nos prix.
21:25 Et c'est ce qui fait qu'aujourd'hui nous avons cette progression.
21:27 Nous sommes le seul distributeur français à augmenter en volume en France.
21:31 Sur l'appli d'Inter, pardon, mais il y a quand même des gens qui sont en colère.
21:35 Pierre vous dit « mais pourquoi vous avez une centrale d'achat en Belgique ? »
21:38 Je ne comprends pas.
21:39 Et Jean Noël, plus cash.
21:41 Vous mentez Monsieur Leclerc.
21:42 Leclerc met une pression folle sur les groupes franco-français pour aller négocier dans
21:47 leur centrale d'achat internationale.
21:48 « Je travaille, dit-il, dans un groupe agroalimentaire français.
21:52 » Et vous savez que c'est ça le fond de ce qu'on vous reproche.
21:55 On vous reproche de vous être rallié avec des multinationales allemandes, belges et
21:58 devenir hyper puissant dans vos négociations.
22:01 Et que les gens sont obligés de céder s'ils veulent vendre leurs produits, vous vendre
22:05 leurs produits.
22:06 Et qui se retrouvent écrasés par la puissance de feu de la négociation.
22:10 Ou vous ne leur achetez pas cher.
22:12 Je ne réponds plus à ça, ce n'est pas du tout mon métier.
22:15 Je ne vais pas passer ma vie… Ça fait 40 ans que je réponds à part la négative.
22:19 Je vais vous dire avec qui on négocie.
22:20 On négocie avec Nestlé, en Belgique.
22:23 On négocie avec Nestlé qui a augmenté ses dividendes de 13%.
22:27 Il est suisse.
22:28 On négocie avec PepsiCo, USA, qui a augmenté ses dividendes de 13% l'année dernière.
22:32 Procter & Gamble a augmenté ses dividendes de 23%.
22:35 Ils sont américains.
22:36 Unilever a augmenté ses dividendes de 16,5%.
22:39 Royaume-Uni, Pays-Bas.
22:40 La bière, InBev, +26%, ils sont belges.
22:44 Coca-Cola, 28,8%.
22:45 C'est eux les profiteurs de la crise.
22:48 Heineken, 31% Pays-Bas.
22:50 Un français, Pernod Ricard, +29%.
22:53 Je vais vous dire, l'inflation a touché de 21% le pouvoir d'achat des français.
22:59 Toutes les grandes marques ont plongé.
23:01 Les distributeurs, Leclerc, Sistemu, Intermarché et un peu Lidl, on s'en est bien tiré parce
23:06 qu'on n'a pas répercuté l'ensemble de ses hausses.
23:09 Aujourd'hui, j'assume, je n'ai aucun complexe, je le redis, à aller négocier avec des gens
23:15 qui ont fait croire que c'était à cause de l'Ukraine, que c'était à cause des
23:18 problèmes de dérèglement post-Covid.
23:20 Quand je vois qu'ils ont distribué autant de dividendes, je suis fondé, nos acheteurs
23:25 sont fondés d'aller leur demander de baisser leurs hausses, de redemander des baisses ou
23:31 en tout cas de les étaler dans le temps.
23:33 C'est ça que je fais en Europe.
23:36 Et si en France, on avait cette culture anti-inflation, si on avait demandé aux gestionnaires de
23:41 cantines, si on avait demandé aux gestionnaires dans les collectivités locales qui font des
23:46 appels d'offres, de remettre en cause tous les contrats, dès l'année dernière, dès
23:50 l'année d'avant, je vous assure qu'on n'aurait pas été obligé d'aller taper
23:53 les Français d'une inflation aussi importante.
23:55 Mais quand Arnaud Rousseau, le président de la FNSEA, dit que la côtelette de porc
23:59 a 1,91 euros chez Leclerc, aucun agriculteur ne peut en vivre.
24:05 Quand il dit ça, vous lui répondez quoi ? Et vous dites quoi à l'agriculteur en
24:09 question ?
24:10 La côtelette, c'est un morceau du porc qui a été acheté très cher à l'agriculteur.
24:14 Et avec l'accord de l'agriculteur.
24:16 Je suis d'accord que c'est une connerie sur le plan publicitaire, puisque ça vous
24:20 fait un point de fixation.
24:21 Mais en l'occurrence, il n'y a pas de conflit.
24:23 C'est le fournisseur qui nous a...
24:25 On achète des porcs entiers, on les découpe et il y a des pièces qui sont...
24:30 Peut-être qu'on en a trop, je ne sais pas.
24:32 Ce n'est pas un bon exemple publicitaire.
24:35 On n'aurait pas dû le faire.
24:36 Ou le magasin n'aurait pas dû le faire.
24:38 C'est trop provocateur.
24:39 Mais il n'y a pas de problème de droit.
24:40 Vous dites toujours ce matin que le juste prix, c'est le prix le plus bas.
24:44 Non.
24:45 Non, non.
24:46 Le juste prix, c'est le prix le plus bas, mais qui n'asphyxie pas l'agriculteur.
24:50 Non, non, non.
24:51 Je vais vous dire.
24:52 Aujourd'hui, les consommateurs...
24:53 C'est là où je sens qu'il y a quand même...
24:54 Une évolution ?
24:55 Non, je sens qu'au rond-point, ça chauffe.
24:57 Vous voyez ? On dit aux gens qu'il faut faire des travaux d'isolation thermique.
25:02 Mais ça va vous coûter, même si on va vous subventionner.
25:04 Les carburants fossiles, ça va coûter plus cher.
25:07 On vous met...
25:08 Tout va coûter plus cher.
25:09 L'écolo, ça va coûter plus cher.
25:11 C'est presque punitif, etc.
25:12 Donc, à un moment donné, excusez-moi, mais ça va coûter tellement cher.
25:15 L'inflation structurelle va s'installer.
25:17 Jacques Attali l'a écrit, c'est pour 10 ans.
25:19 10 ans de transition énergétique, décarbonation, etc.
25:22 La relocalisation, ça va coûter plus cher.
25:25 Donc, on aura besoin des gens comme Leclerc.
25:27 On aura besoin des gens comme le système, comme Intermarché, pour que la nouvelle économie
25:32 reste accessible.
25:33 Il ne s'agit pas de revenir sur les engagements écologiques.
25:37 Il faut faire.
25:38 Paris 21, etc.
25:41 Mais il faut penser à le faire dans le timing du pouvoir d'achat des gens.
25:45 - Merci Michel-Edouard Leclerc d'avoir été à notre micro ce matin.
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