00:00 [Musique]
00:06 Alors Marie, bienvenue à Auckland.
00:09 C'était comment les legs 2 ?
00:11 C'était intense, long et intense.
00:16 Compliqué !
00:19 Compliqué aussi.
00:21 On dit que c'est très...
00:23 qu'en fait, sur cette étape là,
00:26 il fait tout le temps froid,
00:27 t'es tout le temps mouillé.
00:28 Il n'y a pas vraiment des moments de plaisir de navigation.
00:31 Si, si, de toute manière,
00:32 c'est aussi du plaisir d'avoir froid.
00:35 On est un peu masochistes.
00:38 Mais si, c'est aussi du plaisir
00:39 d'être dans des conditions comme ça.
00:40 En fait, c'est le prix à payer
00:41 pour aller voir des endroits incroyables.
00:46 C'est des lumières qui sont très particulières.
00:51 C'est vraiment brutal.
00:52 On est dans un monde tout gris.
00:54 Et même si c'est tout gris,
00:56 ça reste des énormes, incroyables variations de lumières.
01:01 Je n'ai pas encore les mots.
01:03 J'arrive même pas à filmer ou à photographier.
01:05 On ne savait pas trop.
01:07 C'est tellement grand en plus.
01:08 C'est tellement différent.
01:10 Ce n'est pas l'océan qu'on connaît.
01:12 Ce n'est pas chez nous.
01:14 Et puis on sent qu'on n'est pas les bienvenus du tout.
01:16 On ne peut pas rester.
01:19 Maintenant, nous, on a à peine effleuré le Grand Sud.
01:25 J'ai un peu la sensation qu'on nous a volé l'océan Indien.
01:28 L'organisation course a mis un waypoint,
01:30 une marque de passage obligatoire pour toute la flotte,
01:33 très très haute, par 45° Sud.
01:38 Du coup, toute la flotte a été obligée de remonter.
01:42 Tu vas dire que tu n'as pas eu assez de tempête, c'est ça ?
01:45 Non, on n'a pas eu du tout.
01:46 On n'a jamais eu plus de 35 nœuds.
01:49 Les plus dures conditions météo qu'on a eues,
01:51 c'est ici en arrière-haut.
01:54 Et nous, au moment de passer cette marque de parcours,
01:59 les vents étaient contraires, ils venaient du Sud.
02:02 Donc si on voulait descendre, il fallait descendre auprès.
02:04 Il fallait faire au demi-cours.
02:06 On faisait un diagonal dans l'autre sens.
02:08 Donc on n'a pas pu nous descendre.
02:10 Je m'arrachais les cheveux, j'étais à la table à cartes
02:13 à essayer de trouver des solutions.
02:16 Et puis après, la voie s'est ouverte pour Translited,
02:19 et eux, ils ont pu redescendre.
02:21 Je suis folle.
02:22 Tu veux dire que c'est un peu ça, en fait ?
02:24 Tu veux dire que c'est un peu cette marque qui t'a perdue ?
02:26 Parce que depuis Cape Town, en fait,
02:28 comme depuis Southampton, tu as été leader de la flotte,
02:31 tu as été en tête de la flotte,
02:33 et juste avant ici, tu as un peu les mêmes conditions,
02:36 ce qui est incroyable.
02:38 Et je ne sais même pas pourquoi,
02:40 tu as un manque de vent juste avant
02:43 qui te fait relentir et qui permet à ceux de derrière,
02:46 savaient-ils déjà que tu étais sans vent là où tu étais,
02:49 de passer devant ?
02:51 Je ne sais pas.
02:52 Nous, la dernière semaine, ils ne savaient pas où on était.
02:54 On n'avait plus le micro de la BLU.
02:57 Mais l'avance, on avait trois jours d'avance
02:59 à la marque de l'obligatoire.
03:01 L'avance, elle a été perdue le long de l'Australie.
03:04 Ça a été…
03:06 Là, on se retrouve empêtrés dans vraiment plus de vent du tout.
03:10 Et puis oui, les autres qui reviennent.
03:13 C'est le jeu.
03:15 Après, on a essayé de faire des choix un peu…
03:18 un peu plus… très engagés.
03:21 Mais pareil pour le détroit de Basse,
03:23 on a été obligés de passer par là.
03:25 Les vents étaient contraires pour nous pour redescendre à Tasmanie.
03:28 Donc bon, il y a un moment,
03:30 c'est juste comme pas de chance, comme évidemment.
03:33 Et puis, il ne faut pas oublier qu'on est avec très, très peu de météo.
03:36 En fait, on reçoit juste une carte de pression.
03:39 Une carte en…
03:41 Alors on reçoit quand on reçoit, déjà,
03:43 ce qui n'est pas garanti tous les jours.
03:45 Puis après, il faut voir la qualité de ce qu'on reçoit.
03:47 C'est pas vraiment déchiffrable.
03:49 En fait, un weather fax, c'est ni plus ni moins les fax d'années 90.
03:54 Quand tu reçois le truc,
03:57 et qu'on recevait le truc, c'était quand même pas…
03:59 Mais là, c'est pareil.
04:00 Donc la carte, des fois, elle est toute noire.
04:02 Il faut réussir à identifier où est l'Australie,
04:04 où est la Tasmanie.
04:06 Et donc faire des choix météorologiques
04:09 avec très peu d'informations,
04:11 et puis jamais plus de prévision à quatre jours.
04:13 Une fois par jour, on pouvait avoir une prévision à quatre jours
04:15 quand on arrivait à la voir.
04:17 C'est engagé de se dire,
04:21 OK, et puis il y a des anticyclones qui sont énormes.
04:26 Bon ben voilà, c'est le jeu.
04:28 C'est les conditions.
04:29 Tout le monde reçoit des conditions.
04:31 Voilà, c'est le jeu.
04:32 Est-ce que…
04:33 Là, je suis désolée, je n'arrête pas de regarder les flaques
04:36 parce que j'ai peur que ça fasse un peu de bruit dans notre micro.
04:39 On verra bien.
04:40 Mais là, comment je ne peux pas arrêter le vent,
04:42 c'est quand tu es arrivé à chaque fois.
04:43 Tu es musclé, on ne peut même pas t'enlever avec un tailleux.
04:46 Tu viens comme ça, avec ce bateau super puissant,
04:48 avec ta tête, tu regardes le vent, tu y vas.
04:51 Tu le sens comment, le bateau ?
04:52 Tu le connaissais évidemment,
04:53 mais tu le sens comment en course, dans cette course ?
04:55 Je vais le dire, même si ça va peut-être t'énerver,
04:58 50 ans au même endroit que ton père, avec le même bateau.
05:02 Et sans problème de qui cette fois-ci ?
05:04 Oui, ni de moi, ni de qui.
05:07 Non, je le sens bien le bateau.
05:10 C'est toujours vraiment agréable maintenant
05:12 de pouvoir l'exploiter en tant que bête de course.
05:14 Je pense que ça fait 25 ans que le bateau n'a pas été dans cet état-là.
05:18 Il y a une différence entre un bateau qui fait la croisière
05:21 et un bateau sur lequel vraiment on tire.
05:23 Là, j'ai des performances que jamais j'avais eues avec lui avant.
05:26 Là où on était vraiment très heureux,
05:28 c'est de passer cette marque de parcours en première place
05:31 avec de l'avance alors qu'on n'avait pas eu les conditions
05:33 sur lesquelles Peneluxis est très bon,
05:35 c'est-à-dire les très grosses conditions.
05:37 On n'était pas dans les points forts du bateau
05:39 et on arrive quand même à être en avance.
05:41 On me dit que le bateau va bien
05:44 et qu'on sait bien l'utiliser.
05:47 L'équipage est génial.
05:49 C'est mon équipage de guerriers sur la leg 2 et 3.
05:55 Ce n'est pas du sang qu'ils ont dans les lèvres,
05:57 c'est de la lave.
05:58 Dans les veines, c'est de la lave.
06:00 On est tous très frustrés de ne pas avoir une autre dose.
06:06 On n'est pas du tout rassasiés.
06:08 J'espère que ça va venir.
06:10 Oui, j'espère que ça va venir.
06:12 Il va falloir qu'on se repose un peu quand même.
06:15 Mais oui, on est bouillons.
06:17 Et cette course, dernière question.
06:19 En un mot ou en deux mots,
06:21 ça te fait quoi comme sensation ?
06:24 C'est une question un peu idiote
06:26 parce qu'il n'y a pas une sensation comme ça aujourd'hui à Auckland.
06:29 Est-ce que tu te sens dedans ?
06:31 Est-ce que la frustration de manquer de météo,
06:34 de manquer un peu de technologie
06:38 et de ne pas pouvoir exploiter au maximum la vitesse du bateau,
06:41 est-ce que c'est quelque chose qui t'habite encore
06:44 ou tu commences à changer un peu d'optique
06:46 et à te dire "putain, je suis en train de faire un sacré truc".
06:50 Oui, c'est très agréable de naviguer comme ça.
06:53 On arrive vraiment à une navigation beaucoup plus naturelle.
06:56 C'est à son charme aussi de naviguer comme ça,
07:01 mais c'est nerveusement très dur.
07:03 Je suis nerveusement épuisé, vraiment.
07:07 On subit beaucoup.
07:13 Là, en plus, on n'était pas dans des conditions…
07:18 On était chassé, et ensuite chasseur.
07:21 En même temps, tu traînes la caravane de l'Ocean Globe Race derrière toi
07:26 depuis le début, depuis Sandstone.
07:28 Tu arrives peut-être deuxième pour des conditions,
07:30 pour des raisons inconnues pour le moment.
07:33 Mais ils sont tous derrière toi,
07:36 et tu es un peu même leader de la troupe, il faut le dire.
07:39 Ils t'attendent, ils te suivent.
07:41 Quand tu es arrivé, on ne pouvait pas te voir ici au ponton
07:44 parce qu'avec la quarantaine, les douanes, ici, l'immigration,
07:47 c'est très compliqué.
07:48 Mais les gens étaient tellement heureux de vous voir.
07:50 Et vous, vous étiez tellement puissant
07:52 quand vous faites votre "Hola"
07:53 ou je ne sais pas ce que vous faites sur le bateau et tout ça.
07:56 On est super, on est quand même très contents.
07:58 Je suis très contente que Translated ait gagné cette manche.
08:01 C'est vraiment un super chouette bateau.
08:05 Et puis Vittorio et Nico Malingri sont deux excellents marins.
08:08 Donc, il a mérité cette manche.
08:11 Maintenant, on est très amis quand on est à terre,
08:16 mais sur l'eau, beaucoup moins.
08:19 Mais en même temps, pour toi, c'est challenging peut-être aussi un peu
08:22 parce que Vittorio Malingri, il vient de toute cette famille de marins
08:25 qui a fait la Whitbread, etc.
08:27 Il a fait le Vendée Globe.
08:28 C'est un marin professionnel, plus âgé aussi.
08:31 Toi, tu es la jeune génération qui vient derrière.
08:35 Et c'est peut-être, moi, je trouvais ça très challenging
08:37 parce qu'eux, ils essaient quand même de te doubler,
08:39 depuis Cap Town, et tu es là devant.
08:41 D'accord, ce ne sont pas les mêmes tailles de bateaux,
08:43 mais en même temps, pour toi, ça doit être quelque chose aussi,
08:46 de te dire "Je suis devant eux".
08:48 Moi, c'est Vittorio Malingri.
08:50 Je les mets quand même assez là-haut.
08:52 Non, non, si.
08:54 Puis le bateau va bien.
08:58 Le Translitted, c'est vraiment un bon bateau qui va vite.
09:02 Là, il va plus vite.
09:03 Il a une meilleure performance que sur la première étape.
09:05 Donc, il commence vraiment à trouver les boutons.
09:07 Ça va devenir compliqué pour nous.
09:10 Non, non, je suis vraiment très heureuse qu'ils aient pu gagner cette manche.
09:15 Et ton équipage, tu rechanges là ?
09:18 Tu changes beaucoup ou c'est le même ?
09:19 Non, non, non, je n'en ai que trois qui changent.
09:21 C'est les trois qui changent.
09:23 Là, on garde toutes les forces avec nous.
09:27 Et ton second, tu l'as trouvé où ?
09:28 Parce que tu sais qu'on est toutes fans de lui.
09:30 Il faut que tu le lises.
09:31 Tom Nopper !
09:32 Ah, mais carrément !
09:33 C'est une légende, le Tom Nopper !
09:35 Bon, écoute, Marie, merci mille fois.
09:37 À bientôt.
09:39 Et puis, éclate-toi.
09:43 Oui, sans problème.
09:45 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
09:48 "La vie est une aventure" - Albert Einstein