Les causes qui ont créé les gilets jaunes sont-elles toujours là?

  • l’année dernière
Les Vraies Voix avec Philippe Bilger, Elisabeth Lévy, Jean Garrigues et Maxime Thiébaut, avocat et auteur de “Gilets jaunes: vers une démocratie réelle?” (aux éditions VA press).

Retrouvez Les Vraies Voix avec Cécile de Ménibus et Philippe David du lundi au vendredi de 17h à 20h sur #SudRadio.
---
Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry

———————————————————————

▶️ Suivez le direct : https://www.dailymotion.com/video/x75yzts
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/

———————————————————————

Nous suivre sur les réseaux sociaux

▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOfficiel
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr
———————————————————————

☀️ Et pour plus de vidéos des Vraies Voix : https://youtube.com/playlist?list=PLaXVMKmPLMDRB7z8JrbG9LyNtTmhxaU-a

##LE_COUP_DE_PROJECTEUR_DES_VRAIES_VOIX-2023-11-17##

Category

🗞
News
Transcript
00:00 "Les vraies voix sur radio, le code projecteur des vraies voix"
00:03 Et c'était il y a 5 ans, le 17 novembre 2018, l'acte 1 des Gilets jaunes,
00:07 un mouvement parti de prix de l'essence et des ronds-points.
00:10 Mais au fil des mois des actes, ils allaient investir les centres-villes
00:14 et des sujets comme le référendum d'initiative citoyenne ou la justice sociale apparaissaient, Philippe.
00:18 Et pour vous, 5 ans, jour pour jour, plus tard,
00:22 les causes qui ont créé les Gilets jaunes sont-elles toujours là ?
00:24 L'essence est plus chère que jamais ?
00:26 On ne peut pas dire que la situation des français se soit beaucoup améliorée ?
00:30 Le RIC, on ne l'a toujours pas vu ?
00:32 Est-ce que pour vous donc ces causes sont toujours là ?
00:35 Vous dites oui à 96% sur Twitter.
00:37 Maxime Thibault est avec nous, avocat et auteur de "Gilets jaunes, vers la démocratie réelle" aux éditions VA Presse.
00:42 Bonsoir, merci d'être en direct sur Sud Radio.
00:45 Juste avant de revenir vers vous, un petit tour de table de nos vrais voix.
00:48 Philippe Ilger avec cette question finalement de se dire,
00:52 les causes finalement sont toujours là, 5 ans après ?
00:55 Oui, alors, moi j'ai appréhendé avec beaucoup de sympathie à l'origine la cause des Gilets jaunes.
01:02 Et j'ai beaucoup aimé cette appréciation d'un politologue qui disait
01:08 "C'est plus qu'une émeute, c'est moins qu'une révolution."
01:11 Et ça a été un superbe échec, d'une certaine manière.
01:17 Et simplement, ils ont... Pardonnez-moi,
01:22 Non ça va, je craignais qu'un éternuement disciple peut penser qu'il me reste...
01:29 Et j'ai craint que, ou plutôt j'ai pensé que, malgré l'échec apparent,
01:38 il y a des problématiques capitales qui ont été mises dans le débat public,
01:44 dans l'espace démocratique.
01:46 Le président de la République qui a paru mal gérer la crise au début,
01:51 quelques mois plus tard, a fait une analyse très remarquable
01:55 de la crise des Gilets jaunes en disant que leur combat allait marquer durablement la France.
02:01 Et je continue à le penser.
02:03 Élite, peuple, pouvoir, représentativité.
02:07 Est-ce qu'il faut attendre les élections pour donner un avis ?
02:11 Il y a de misère, détresse, France négligée.
02:15 Pardon, j'arrête là.
02:17 Donc c'est très important aujourd'hui de penser que leur esprit demeure.
02:23 - Elisabeth Lévy ?
02:24 - Alors les causes, pour répondre directement à la question,
02:27 les causes qui étaient, un, qu'il y a des gens qui vont travailler aujourd'hui,
02:30 qui n'ont pas, avec leur travail, de quoi vivre décemment.
02:34 Et certainement pas de quoi avoir le petit plus
02:37 qui fait qu'on n'est pas juste, on ne va pas juste travailler pour remplir ses besoins...
02:42 - Primaires. - Primaires, si vous voulez.
02:44 Donc ça, ces causes-là, elles existent.
02:46 Deuxièmement, il y a effectivement des problèmes de fonctionnement de la démocratie représentative.
02:51 Mais, moi, le problème que m'a posé le mouvement des Gilets jaunes,
02:56 c'est une certaine démagogie, une certaine autocomplaisance.
02:59 Comme nous sommes des victimes, nous avons tous les droits.
03:02 Nous avons le droit à la violence.
03:04 Et puis, comme des gens très diplômés, effectivement, n'ont pas fait des merveilles.
03:10 Ah bah c'est super de ne pas avoir de diplôme !
03:13 C'est-à-dire, excusez-moi, c'était quand même une apologie de l'inculture de...
03:17 Oui, je suis désolé, c'était...
03:19 Ils passaient leur temps à expliquer que les diplômes, c'était nul,
03:22 que parce que des gens qui ont fait les nains n'ont pas réussi tout,
03:26 c'était super de ne pas avoir de diplôme !
03:28 Moi, toutes ces histoires de référendum d'initiative citoyenne ne m'intéressent mais absolument pas,
03:34 parce que je n'ai pas envie de voir la France se transformer en une grande réunion de copropriété.
03:39 Enfin, dès qu'une tête a dépassé, ils se sont employés, si vous voulez,
03:44 avec cette espèce d'égalitarisme basiste, à la décapiter.
03:48 Donc oui, il y avait un esprit des ronds-points que moi aussi j'aimais bien,
03:52 il y avait des revendications parfaitement légitimes,
03:55 et je pense que c'est un ratage, beaucoup par leur faute,
04:00 parce qu'eux, ils se sont regardés le nombril,
04:02 et ils ont passé leur temps à dire "les autres sont méchants et nous, nous sommes merveilleux".
04:05 Enfin non, les dernières manifestations qui consistaient à déambuler dans Paris en quinze ans,
04:10 elles n'avaient rien de merveilleux et elles ont pénalisé beaucoup de pauvres.
04:14 - Jean Garry.
04:15 - Non, je crois que ce qui vient d'être dit par Philippe et Elisabeth, c'est l'essentiel.
04:21 Moi, je suis comme eux, c'est-à-dire que, évidemment,
04:24 comment ne pouvait-on pas adhérer à ce cri de souffrance, qui était celui des ronds-points ?
04:32 C'est évident. Et au fond, cette souffrance-là, elle est toujours là,
04:35 pour répondre à la question initiale, elle est toujours là.
04:38 Le déclassement, la périphérie face à la capitale, le peuple face aux élites,
04:45 ça a été très bien dit, la faillite des services publics, l'inflation,
04:50 les salaires qui sont trop bas, tout ça, ils l'ont exprimé,
04:55 donc on ne pouvait pas être contre.
04:58 Après, effectivement, il y a eu les dérives du mouvement,
05:00 la récupération aussi, parce qu'il faut bien voir qu'un certain nombre de ces dérives
05:04 viennent de la récupération, d'une part, par des mouvements d'extrême droite,
05:08 ceux qui ont fait ce qui s'est passé à l'arc de triomphe, etc.,
05:11 et qui n'étaient pas le cœur du mouvement,
05:14 et puis la récupération ensuite par l'extrême gauche,
05:16 et là, qui a amené d'ailleurs toutes ces revendications démocratiques, etc.
05:20 Maintenant, sur la question, justement, de la revendication démocratique,
05:25 là, je me situerais peut-être plutôt du côté de Philippe,
05:28 il me semble quand même qu'il y a une demande sociale dans ce pays
05:32 d'avoir une démocratie qui donne plus la parole aux citoyens,
05:37 et je pense qu'on ne va pas pouvoir se contenter de la base
05:40 qui est la démocratie représentative, et que moi, j'appelle de mes voeux,
05:44 et qui est indispensable, je pense que sans faire de l'élite bashing,
05:49 il faut plus essayer d'associer beaucoup plus les citoyens,
05:52 et ça, c'est quelque chose qui était dans le mouvement.
05:55 - Maxime Thiebaud, vous êtes avocat et auteur du livre "Gilets jaunes, vers une démocratie réelle",
05:59 point d'interrogation publié aux éditions VA Presse,
06:01 les causes sont encore là, les vraies voix sont unanimes là-dessus,
06:04 est-ce que le mouvement pourrait redémarrer ?
06:07 - Oui, le mouvement peut redémarrer à tout moment,
06:10 et Emmanuel Macron en a conscience, on le voit dans sa politique,
06:14 du "en même temps permanent",
06:16 attention à ce que les classes populaires et classes moyennes ne se réveillent pas,
06:19 mais je partage le constat qui a été fait,
06:21 c'est-à-dire que le fond du mouvement, il était plutôt sain,
06:24 c'était des classes populaires, des classes moyennes,
06:26 qui étaient en souffrance, et qui le sont toujours,
06:29 et qui ne voulaient pas être représentées dans leur mouvement de souffrance.
06:33 Et à partir du moment où vous avez eu cette représentation
06:35 par tous ces récupérateurs de plateaux télé,
06:37 qui étaient plus mauvais que les uns que les autres,
06:39 comme l'a très bien résumé Elizabeth Levy,
06:41 vous avez eu petit à petit une descente des gilets jaunes,
06:45 parce que pour beaucoup,
06:47 ne se ressentait pas à travers ces récupérateurs de plateaux télé.
06:51 Mais je pense qu'il doit être compris du pouvoir politique,
06:55 Emmanuel Macron l'a certainement cerné,
06:57 que la dépossession et ce sentiment de déclassement des Français
07:01 ont été moteurs dans le mouvement qui a été celui des gilets jaunes
07:05 en octobre et surtout en novembre 2018,
07:08 et c'est ce qu'on ressentait, c'est-à-dire que
07:10 vraiment jusqu'à l'attentat de Strasbourg,
07:13 quand vous alliez, l'attentat de Strasbourg c'était en décembre 2018,
07:16 et jusqu'à l'attentat de Strasbourg, quand vous alliez sur les ronds-points
07:19 ou à la sortie des autoroutes,
07:21 vous trouviez des Français comme tout le monde,
07:24 c'est-à-dire des chefs d'entreprise, des élus, des classes moyennes populaires,
07:29 qui étaient là en disant "on en a ras-le-bol,
07:31 on a le sentiment de ne plus du tout être présentés
07:34 et on veut récupérer nos pouvoirs pour pouvoir les exercer dans notre intérêt
07:38 et non pas dans celui d'une minorité qui en fait sert d'autres intérêts
07:42 que le bien commun".
07:44 Est-ce qu'il aurait fallu un seul et unique leader, un porte-parole,
07:49 pas un leader, peut-être un porte-parole ?
07:51 - Des revendications ? - Oui.
07:53 - Mais vous avez raison, Cécile, et c'est une question que je pose à Maxime,
07:57 est-ce que leur faiblesse est venue de ce qu'ils ont cru être leur force,
08:01 c'est-à-dire d'avoir une sorte de spondanéité pluraliste
08:05 avec des personnalités qui émergeaient,
08:08 qui n'étaient pas toutes remarquables, il faut être clair,
08:11 et résultat, je me demande s'ils étaient allés vers une structure plus traditionnelle
08:18 avec l'acceptation d'un leader qui aurait su mieux porter leur parole
08:23 de contestation et de proposition, est-ce qu'il n'aurait pas mieux réussi ?
08:28 C'est une question que je pose.
08:30 - Oui, cher Philippe, moi, si vous voulez,
08:34 je pense qu'on est dans la tradition des jacqueries,
08:37 et les jacqueries n'ont jamais eu vocation à s'organiser ensuite
08:40 pour prendre le pouvoir, elles ont toujours eu vocation
08:43 à vouloir secouer le pouvoir établi pour que ce dernier
08:46 prenne conscience des manquements et des lacunes qui sont les siennes.
08:50 Et je pense que globalement, les Français et les Gilets jaunes
08:53 n'avaient pas envie que des leaders apparaissent parmi eux,
08:56 ils avaient surtout envie que le pouvoir soit mieux organisé
09:01 et corresponde davantage à des besoins d'une démocratie dite réelle.
09:04 Et quand je parlais de démocratie dite réelle,
09:07 c'est parce que j'ai constaté malheureusement que la Constitution
09:10 de la Ve République ne répond pas aux besoins du peuple.
09:13 Vous avez des défauts de représentativité,
09:15 notamment à l'Assemblée nationale, et je le rappelle quand même
09:18 que Marine Le Pen, par exemple, avait été au second tour
09:20 de la présidentielle en 2017, et qu'elle n'avait quasiment
09:23 aucune représentation à l'Assemblée nationale en suivant.
09:26 Ce n'est plus le cas aujourd'hui, et étonnamment,
09:28 vous voyez que la représentation du Front National,
09:31 du Rassemblement National, à l'Assemblée nationale
09:34 étant plus importante, vous avez moins de revendications
09:37 à une plus grande démocratie présente localement,
09:40 notamment dans les zones périurbaines et urbaines.
09:42 Et vous avez une attente politique qui réapparaît,
09:44 un engagement politique qui réapparaît,
09:46 là où il avait un petit peu disparu,
09:48 concomitamment à l'arrivée des Gilets jaunes.
09:50 - Et Elisabeth Lévy et Jean Garry ?
09:51 - Ce qui me semble, c'est qu'un mouvement politique
09:54 qui n'a pas de revendications, pas de représentants,
09:56 pas d'interlocuteurs, est voué à l'échec.
09:59 Parce qu'à un moment on se disait,
10:01 mais alors qu'est-ce qui arrêterait ?
10:03 Toutes les tentatives macroniennes,
10:05 finalement il y a eu quand même quelques chèques à la fin,
10:08 mais je ne pense pas que c'était leur objectif.
10:10 Leur objectif était en quelque sorte de régénérer la démocratie.
10:14 Mais vous ne régénérez pas la démocratie
10:16 en expliquant que tous les gens qui ont fait des études
10:19 sont des salauds.
10:20 Parce qu'il y avait aussi, écoutez,
10:22 à un moment il y avait un certain complotisme,
10:24 un certain qui confinait au tous pourris,
10:28 qui n'était plus intéressant,
10:29 au moins entre les Gilets jaunes des ronds-points
10:31 et ceux des manifestations, si vous voulez,
10:34 j'ai trouvé qu'il y avait quand même...
10:36 - Une différence.
10:37 - Comment qu'il y avait vraiment une différence,
10:40 mais ça n'empêche pas qu'évidemment les questions
10:43 qu'ils ont posées, voilà.
10:45 Mais moi je ne crois pas, si vous voulez,
10:47 à l'abandon de la démocratie représentative.
10:49 Je pense que nous n'en avons pas d'autres.
10:51 - Jean-Henri Riguez ?
10:52 - Non, je suis d'accord avec ça.
10:53 C'était une jacquerie, c'était un cri
10:55 qui n'avait pas finalement vocation à se structurer
10:58 et à devenir une véritable force politique,
11:00 même si c'était le discours qui nous était tenu.
11:02 Mais il n'y avait absolument pas d'instrument
11:04 pour le devenir, parce qu'il n'y avait pas d'idée,
11:06 pas de véritable projet politique.
11:08 - Mais pourtant il fallait une parole,
11:09 puisqu'il fallait qu'elle soit entendue, cette parole.
11:11 - Et il n'y avait pas d'incarnation aussi.
11:13 Regardez, mai 68, vous avez quand même une incarnation
11:16 qui s'appelle Daniel Cohn-Bendit,
11:17 et puis quelques autres.
11:18 - Il y en a d'autres, mais pas la seule.
11:20 - C'est un peu le miroir inversé
11:23 de ce qu'avait été la Commune de Paris en 1871,
11:26 qui est un mouvement parisien
11:28 qui n'était pas suivi par la province,
11:30 et où la démocratie directe qu'ils ont voulu mettre en place
11:34 les a totalement paralysés,
11:35 ensuite ils se sont fait écraser par les...
11:37 - Les annulphetières.
11:38 - Les annulphetières.
11:39 Mais il y a quelque chose de cette incapacité,
11:42 si vous voulez, à produire ensuite du positif,
11:45 à produire de quoi...
11:47 - Et j'ajoute juste un mot,
11:49 une responsabilité assez grande des médias,
11:52 qui ont magnifié la colère,
11:54 puisque à partir du moment où vous êtes en colère,
11:56 vous avez raison.
11:57 Et là je pense que c'est assez dangereux,
12:00 cette complaisance avec toute forme de colère est dangereuse.
12:04 - Et de violence.
12:05 - Merci beaucoup Maxime Thiebaud d'avoir été avec nous,
12:08 avocat et auteur de "Gilets jaunes vers une démocratie réelle".
12:12 Point d'interrogation aux éditions VA Presse.
12:14 Merci beaucoup Philippe Bilgeard d'avoir passé ce pré-week-end avec nous.
12:18 Merci beaucoup Elisabeth Lévy.
12:20 - Merci pour le fraise-tagada !
12:22 - Les fraises, les tagadas...

Recommandée