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  • il y a 2 ans

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Transcription
00:00 C'est une jeune française qui est dans nos studios ce matin après 16 ans de bataille.
00:03 Le tribunal judicien de Bordeaux lui a enfin accordé sa nationalité.
00:07 Pourtant le combat n'est pas totalement terminé.
00:09 Bonjour Charline Cazenave.
00:10 Bonjour Laetitia.
00:11 Alors vous avez obtenu la nationalité française après un long parcours.
00:16 Vous ne pouvez toujours pas aujourd'hui récupérer vos papiers ?
00:19 Non, puisque j'ai gagné la partie juridique, on va dire, depuis le 15 juin.
00:24 Mais il reste encore toute une partie administrative derrière à faire avec l'ambassade de France au Cameroun notamment.
00:29 Et c'est une partie qui est assez fastidieuse aussi puisque les délais sont compris entre 6 mois et 2 ans.
00:36 Et vous avez reçu un recommandé que vous ne pouvez pas aller chercher, expliquez-nous.
00:40 Oui tout à fait. Alors je ne sais même pas qu'est-ce qu'il y a dans ce recommandé.
00:44 Mais après les procédures juridiques, le procureur m'a donc envoyé un document.
00:50 Enfin je le sais puisque c'est écrit sur le recommandé.
00:53 Et j'ai voulu aller à la poste pour pouvoir le récupérer.
00:56 Le postier s'est tout à fait opposé à me remettre ce document.
01:00 Malgré le fait que je lui explique que j'ai besoin de ce document pour sortir de cette procédure.
01:05 Parce que si ça se trouve c'est quelque chose de très important.
01:07 C'est peut-être vos papiers d'identité ?
01:08 Alors peut-être pas les papiers mais ça peut être quelque chose comme un certificat d'appel ou de non-appel.
01:13 Enfin je ne sais pas ce que c'est.
01:14 Et ce postier m'a dit "non vous n'avez pas de carte d'identité, je ne vous donne rien".
01:18 Donc...
01:19 Oui, beaucoup de témoignages en ce temps sur Facebook.
01:22 Armel parle de fléau Eliane, de parcours du combattant.
01:26 Tout est fait pour dégoûter les gens, de demander des renseignements.
01:30 Ou même de se battre pour leurs droits.
01:32 Vous vous reconnaissez dans ces témoignages ?
01:33 Oui, tout à fait.
01:34 C'est un mélange de tout.
01:36 Se battre pour ses droits.
01:37 La lenteur administrative, j'en fais les frais depuis 16 ans maintenant.
01:41 Enfin je dis 16 ans parce que j'ai 30 ans et j'ai commencé cette procédure toute seule véritablement.
01:46 Accompagnée d'assistantes sociales, de choses comme ça depuis mes 14 ans.
01:49 Mais ça fait quand même 24 ans que mes parents et moi-même cumulés nous battons pour cette histoire.
01:55 Et Janelle, Jean-Pierre et Patrick sur les réseaux sociaux mettent aussi le doigt sur l'accès à ces informations.
02:00 Vous êtes nombreux à réagir sur notre page Facebook.
02:01 Jean-Pierre qui nous dit "en effet plus personne dans les bureaux pour vous répondre".
02:04 Il faut passer par internet à condition que cela fonctionne et de savoir maîtriser le fonctionnement.
02:08 Et puis les réponses aux questions arrivent des mois après, souvent dans délais dépassés.
02:12 C'est une honte.
02:13 Et puis Patrick qui nous dit "c'est de plus en plus compliqué".
02:16 Il faut aussi passer par internet.
02:17 Et ça, c'est pas toujours évident.
02:19 Je le confirme totalement.
02:21 Je sais pas si c'est ça ou non.
02:23 Je le confirme parce que si nous sommes sortis de cette histoire sans vouloir nous jeter des fleurs à mon frère et moi,
02:29 c'est en grande partie nous qui avons fait tout le travail en amont.
02:32 Et mon avocat peut même témoigner puisque quand nous lui avons remis le dossier,
02:36 le dossier était déjà complet.
02:37 Elle nous a dit "en six mois, moi je vais régler ça, vous avez déjà fait tout le travail".
02:40 Et oui, on a dû faire des nuits blanches à rechercher sur internet, à appeler différents services, à écrire à des services.
02:46 On appelait là-bas, là-bas, on nous disait "non, c'est là-bas".
02:49 Enfin, pendant des années, des années, ça n'a été que ça et c'est moralement très épuisant.
02:53 - Voilà, sur France Bleu Gironde, vous entendez le témoignage de Charlène Cazenat, notre invitée également sur France 3 qui tène.
02:59 - On va revenir sur votre histoire, justement, Charlène Cazenat.
03:02 Votre maman est au Cameroun, votre papa adoptif français, elle vient vivre ici pour savoir si elle s'acclimate.
03:09 Et comme ça se passe bien, elle vient vous chercher, vous et puis ensuite vos deux frères.
03:14 Le problème central, c'est l'acte de naissance du Cameroun qui n'est pas authentique et tout ce que du coup ça va générer
03:21 pour obtenir la nationalité française, les aller-retours entre les administrations des deux pays.
03:27 Qu'est-ce que c'est son quotidien quand on n'a pas de nationalité ?
03:31 - Je ne saurais pas comment expliquer en résumant, mais c'est un quotidien très très très compliqué.
03:37 Personne ne peut imaginer s'il ne le vit pas, puisque je pense qu'aujourd'hui, on nous demande notre carte d'identité.
03:42 Je vais grossir le trait, mais limite pour aller acheter du pain.
03:45 Comme je l'ai dit, je ne peux pas récupérer de colis à la poste.
03:49 J'ai une ligne de téléphone, elle n'est même pas à mon nom pour vous dire, c'est au nom de quelqu'un d'autre,
03:53 mais par contre c'est sur mon compte bancaire.
03:55 J'ai un compte bancaire, mais c'est parce qu'un directeur d'agence a gracieusement voulu nous ouvrir un compte bancaire.
04:01 Des vingtaines, trentaines de banques nous ont rejetés.
04:04 Moi-même, travaillant dans la banque, je vois que c'est tout à fait normal, c'est dans les process.
04:08 Mais c'est au bon vouloir des personnes. Pour obtenir vos droits, c'est très compliqué.
04:13 C'est-à-dire tout ce qui est, je ne sais pas, Pôle emploi, CAF, Sécurité sociale, très compliqué.
04:19 Je n'ai pas de numéro de Sécurité sociale définitif.
04:22 Donc quand je dois faire des frais de santé, je dois toujours soit les avancer,
04:29 et après me faire rembourser par la suite, vu que je n'ai pas de carte vitale,
04:32 puisque je ne peux pas avoir de carte vitale sans carte d'identité.
04:35 Je ne peux pas passer le permis, je ne peux pas voter, je ne peux pas me marier,
04:39 je ne peux pas avoir d'enfants. Enfin, je peux avoir des enfants,
04:42 mais ça va être très compliqué administrativement derrière.
04:44 - Pour les déclarer. - Voilà, en fait, tout est compliqué.
04:46 Tout ce qui paraît anodin au quotidien, pour nous, c'est des démarches et des démarches
04:51 qui aboutissent au bon vouloir des personnes que nous avons en face de nous.
04:54 - Est-ce que vous dormez mieux tout de même aujourd'hui, Charlène Ketam ?
04:57 - Alors, je dirais oui, tout de même. - Vous parlez beaucoup de nuit blanche.
05:01 - Oui, parce qu'on en a quand même fait pas mal, enfin beaucoup.
05:05 Et là, depuis, on va dire, je dirais juin, parce que j'ai essayé de pas penser
05:11 à tout le reste, tout ce qui va arriver après.
05:13 Mais effectivement, je dors un peu mieux, parce qu'avant,
05:15 quand vous savez pas de quoi sera fait votre futur,
05:18 vous voyez malgré tout votre âge, votre vie avancée,
05:20 sans que vous puissiez construire quoi que ce soit.
05:23 Vous êtes tributaire d'une décision d'une personne.
05:25 C'est très compliqué à vivre.
05:27 Je suis quelqu'un qui aime bien avoir sa vie en main et qui la prend en main.
05:31 Et j'ai l'impression que toutes ces années, on m'a volé ça.
05:33 - Là, aujourd'hui, le projet, c'est de prendre un appartement ?
05:36 - Alors, j'ai déjà un appartement depuis 8 ans que je suis domiciliée à Bordeaux.
05:41 Encore une fois, pareil, ça a été parce que l'agent immobilier
05:44 a bien voulu me faire confiance, et cette agence immobilière également.
05:47 Je les remercie d'ailleurs, s'ils écoutent cette émission.
05:49 Mais là, j'ai le désir de changer de logement pour avoir plus grand,
05:53 pour que ça corresponde plus à mon mode de vie actuel.
05:56 Et je reçois refus sur refus, et c'est pas une question de revenu.
05:59 C'est simplement une question de "vous n'avez pas de pièce d'identité".
06:02 Et comme tout se passe sur ordinateur, c'est très compliqué.
06:06 - Et si vous aviez un conseil aujourd'hui à donner à des personnes
06:09 qui sont peut-être dans une situation similaire, ce serait quoi ?
06:13 Ne pas lâcher ?
06:14 - Ne pas lâcher. Franchement, c'est ne pas lâcher.
06:16 Surtout quand vous savez que vous êtes dans vos droits,
06:18 que vous en avez la certitude, que vous êtes convaincu,
06:20 et que votre avocat ou les personnes qui vous assistent, en tout cas,
06:24 vous convaincent que vous êtes dans le bon chemin.
06:27 Il ne faut surtout pas lâcher. Voilà.
06:30 - Merci Charlène Cazenave d'avoir été avec nous ce matin sur France Bleu Gironde
06:33 pour raconter votre histoire.
06:36 - Merci à vous deux de m'avoir reçue.
06:37 - Cette interview, vous la retrouvez aussi en vidéo en intégralité
06:39 sur notre site francebleu.fr
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