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ÉducationTranscription
00:00 Si vous vous appelez Claire, Anne-Sophie,
00:02 vous portez un kimono, c'est un kimono.
00:04 Si vous avez le malheur de vous appeler Sabrina, Linda,
00:08 ça va être un vêtement religieux.
00:09 On en est là aujourd'hui.
00:10 Donc vous avez un individu, M. Gabriel Attal,
00:13 ministre de l'Éducation nationale,
00:15 qui vient vous dire, sans passer par le vote,
00:17 "Ce vêtement-là est interdit, ce vêtement-là est interdit,
00:21 et tous les vêtements assimilables à la habaïa et au camis,
00:24 c'est problématique."
00:25 On ne peut pas laisser la liberté à un homme seul
00:28 de définir quel vêtement est acceptable ou pas.
00:30 La première conséquence, c'est qu'elles n'ont plus le droit,
00:33 ces étudiantes, puisque c'est d'elles dont on parle,
00:35 elles n'ont plus le droit de se vêtir librement.
00:37 De manière assez incontrôlée et de manière assez illimitée,
00:40 un chef d'établissement va pouvoir dire,
00:42 "Ce vêtement-là, je tolère, ce vêtement-là, je ne tolère pas."
00:45 Pour en revenir à cette jeune étudiante,
00:47 le CPE va pointer du doigt ma cliente
00:50 et va lui demander de se lever, de se rapprocher de lui.
00:52 Il va lui dire, "Qu'est-ce que c'est que cette tenue ?"
00:54 Elle lui répond, "C'est un kimono,
00:56 je ne vois pas pourquoi je devrais le retirer."
00:57 Le CPE, convaincu que c'est un vêtement religieux,
01:00 va lui demander de quitter la classe devant tous ses élèves.
01:03 Le proviseur va lui faire exactement la même injonction,
01:05 "Mademoiselle, pouvez-vous retirer cette tenue ?"
01:07 Et elle va rentrer chez elle.
01:08 Le chef d'établissement va recevoir la jeune fille le lendemain avec la famille,
01:12 ils vont persister.
01:13 On fait un rappel à la loi, on lui explique au chef d'établissement
01:16 que la loi était de son côté,
01:17 que d'autres camarades de classe portaient le même kimono
01:20 ou portaient des vêtements encore plus amples,
01:21 et ces jeunes filles n'ont pas été embêtées, bien heureusement.
01:24 C'est tout le problème que l'attitude de ce lycée pose.
01:28 On est clairement en présence d'une discrimination.
01:30 Vous savez, la définition est très simple.
01:32 Vous prenez deux individus dans une situation identique,
01:35 l'un va être privé de droit et pas l'autre.
01:37 Trois jours après, comme par hasard,
01:38 la jeune fille est retournée vêtue de son kimono,
01:40 et là le chef d'établissement ne lui a pas interdit l'accès.
01:43 Donc il faudrait savoir, si c'était un vêtement religieux il y a trois jours,
01:46 comment le chef d'établissement explique-t-il ce volte-face ?
01:48 Qu'est-ce qui différencie une robe longue d'une abaya ?
01:51 La différence va porter sur celle qui porte le vêtement.
01:54 Si vous vous appelez Claire, Anne-Sophie,
01:57 vous portez un kimono, c'est un kimono.
01:59 Si vous avez le malheur de vous appeler Sabrina, Linda,
02:03 ça va être un vêtement religieux.
02:04 On en est là aujourd'hui.
02:05 Ce ne sont pas des dérives, ce sont des humiliations.
02:07 Il ne faut pas oublier une chose,
02:08 c'est qu'on nous a présenté ces jeunes filles
02:10 comme étant des menaces pour la République.
02:11 Emmanuel Macron, quand on lui a posé la question de l'abaya,
02:14 vous avez vu sa réponse.
02:15 Oui mais vous savez, il y a eu Samuel Paty en France.
02:17 On a M. Dupont-Moretti qui a menacé les jeunes filles de poursuite.
02:20 Cette situation est absurde.
02:22 Mais si elle n'était qu'absurde, on aurait pu la laisser passer.
02:24 Il y a eu une jeune maman qui m'a contacté en m'expliquant
02:27 que sa fille portait un vêtement ample puisqu'elle avait des problèmes de poids.
02:30 La CPE l'a interpellée.
02:32 Elle lui a demandé de cintrer sa robe
02:34 puisqu'elle considérait qu'elle était trop ample.
02:35 La jeune fille n'est ni croyante, ni pratiquante.
02:38 Elle en est arrivée à se justifier de pourquoi
02:40 elle ne pouvait pas cintrer sa tenue
02:42 parce qu'elle n'était pas à l'aise avec ses formes
02:43 et elle craignait des moqueries.
02:44 Vous savez, sur la question des jeunes filles,
02:46 parce que c'est elles que je représente aujourd'hui,
02:49 c'est elles les plus vulnérables dans les lycées.
02:51 L'année dernière, on a fait exactement le même reproche.
02:53 À la rentrée scolaire, on a fait des injonctions à des jeunes filles
02:56 pour aller leur demander de se vêtir.
02:58 Là, c'est le contraire qui est en train de se produire.
03:00 On est en train de demander à d'autres jeunes filles,
03:02 pour d'autres motifs, de s'habiller différemment.
03:04 On en revient toujours à la même logique.
03:05 Il y a un contrôle qui est opéré de manière systématique
03:08 sur le corps de ces jeunes filles.
03:10 Il va falloir un jour les laisser tranquilles
03:12 et s'occuper d'autres choses.
03:13 Par exemple, de leur scolarité, elles ont le droit de s'habiller librement.
03:16 Ce phénomène-là ne va faire que s'aggraver
03:18 si on ne met pas fin à cette note ministérielle.
03:21 C'est ça que j'aimerais dire à l'exécutif
03:22 et notamment au ministre de l'Éducation,
03:24 qui a rappelé qu'il fallait être très ferme sur la laïcité, etc.
03:28 Peut-il avoir exactement la même fermeté
03:30 quand des discriminations sont commises,
03:32 quand du harcèlement est commis ?
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