Témoignage n° 16, lu par Edouard Durand

  • il y a 9 ans
Attention ce témoignage parle de violences sexuelles, il peut heurter la sensibilité de certains spectateurs.

Lecteur :
le magistrat Edouard DURAND

Réalisation : Catherine Zavlav et Cécile Nicouleaud
Image : Vincent Tulli
Assistante mise en scène : Sandra Moreno
Montage : Louis Beaugé de La Roque
Musique : Malik Ati
Mixage : VTP
Maquillage Marine Girondeau
Photos : Jérôme Godgrand
Régie : Tanya Artioli
Infographie : Christine Bruneteau
Etalonnage Yann Tribolle

texte du témoignage :Témoignage 16, lu par Edouard Durand, Magistrat


« Ça a commencé, j’avais 5 ans. Et toujours ces mots « Tu es toute ma vie ». Les 3 ans d’attouchements qui ont suivi, je les ai enfoui au plus profond de moi, pensant que j’étais folle... Mon papa qui m’aimait tant et que j’aimais si fort, ne pouvait pas m’avoir fait ça. J’avais un frère, et pour info, mon père le tapait.

Le médecin de famille avait compris ce qui se passait. Il s’est contenté de mettre en garde l’auteur de mes jours, lui disant qu’il risquait gros. Mais il n’a rien fait pour me protéger.

19 ans plus tard, alors que mes parents sont séparés depuis longtemps, mon frère m’appelle un jour, et me dit qu’il ne veut pas laisser sa petite fille à notre père. Et d’un coup, je lui balance tout ce que cet homme m’a fait, là comme ça. Mon mari près de moi me soutient.

Après avoir raccroché, mon frère a appelé notre père, qui m’a rappelée à son tour. Il a reconnu… Et s’est excusé… Puis m’a dit « ça allait mal avec ta mère … »
J’étais si soulagée… Tout s’est écroulé d’un coup. Tout. Cette vie que j’avais bâtie sur des mensonges. Non, je n’étais pas folle, et oui, mon père avait abusé de moi. Ce tsunami a finalement été salutaire. Ma mère m’a appelé, agressive. Elle m’accusait de ne rien avoir dit… que lui répondre…

Après ça, que faire… Porter plainte ? C’était mon père… Malgré tout je l’aimais… Je culpabilisais à l’idée qu’il aille en prison, je savais qu’on ne le soignerait pas là-bas. Et rien que de penser à ce que les détenus, faisaient subir aux pédophiles… Alors je lui ai demandé de s’engager à se faire soigner. Forte de sa promesse, je n’ai pas porté plainte. Il me restait quelques jours avant la prescription. Evidemment, il n’en a rien fait.

J’ai coupé les ponts avec mon père durant 10 ans. Le contact avec ma mère restait chaotique, néanmoins il existait. Puis je suis devenue maman. M’étant séparée de mon mari, j’ai quitté mon travail, et déménagé dans la même ville que ma mère. Nous nous sommes rapprochées.

J’ai voulu revoir mon père, pour lui présenter ma fille.
Je voulais qu’elle connaisse son grand-père. Elle ne devait pas pâtir d’une histoire qui ne la concernait pas.
Depuis, mon père voit sa petite-fille, 1h de temps en temps, toujours en ma présence.

En changeant de région, j’ai changé de métier, j’ai repris des études. Je suis devenue art thérapeute.
Je n’oublierai jamais, la cicatrice est indélébile…
Mais j’ai avancé. Et aujourd’hui, j’ai l’envie et les moyens d’aider les personnes en souffrance. »



Je suis Edouard Durand, Magistrat, et je soutiens la campagne Stop au Déni. (En regardant la caméra)

EXTRAIT DE STOP AU DENI-LES SANS VOIX

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