Un mauvais pressentiment. C'est ce qui a sauvé de la mort Thierry Huguenin, un membre de l'OTS convoqué par Joseph Di Mambro le matin du 4 octobre 1994 dans le chalet de l'organisation à Salvan, en Suisse. Officiellement, c'était pour y recevoir de l'argent que l'Ordre lui promettait depuis longtemps pour des travaux effectués pour la secte par le passé. À son arrivée, il découvre un Joseph Di Mambro et un Luc Jouret visiblement anxieux, mais aussi une très forte odeur d'essence qui s'échappe de la maison. Submergé par une vague de panique, il décide de partir sans l'argent que la secte tardait à lui donner. Il ne le regrettera jamais.
Huguenin l'avait senti venir. Depuis plusieurs mois, l'Ordre du Temple Solaire vivait ses dernières heures dans une atmosphère de panique et de dissidence. Les révélations, quelques mois plus tôt, sur l'implication de plusieurs adeptes dans un trafic d'armes avaient fait mal. Selon les médias, la secte était en train de s'armer pour faire face à la fin prochaine du monde. Les projets de l'OTS étaient découverts. Mais les adeptes ne semblaient pas tous y adhérer. Le bateau prenait l'eau. Et c'est par le feu que Di Mambro et Jouret ont décidé de s'attaquer au problème.
Élément central dans l'enquête menée pour expliquer les massacres de l'OTS, Thierry Huguenin n'a jamais été pris au sérieux par les policiers et les magistrats. Il lui aura fallu attendre le transit du Vercors, que cet ex-adepte avait annoncé, pour devenir finalement crédible. Plusieurs membres de l'OTS lui en voudront d'ailleurs. Accusé de trahison, il sera publiquement menacé dans une lettre envoyée aux journaux québécois peu après le drame de Saint-Casimir. Laconiquement, la missive prévient « que le comité d'accueil l'attend ». Huguenin vit aujourd'hui en Suisse, sans aucune protection particulière.